Médecins de la Grande Guerre

Le docteur Derache

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Le Lieutenant Général Médecin Derache (photo de Patrick Bossaert Derache, colorisée par Francis De Look)


Le Docteur Derache.

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Le Lieutenant Général Médecin Derache (photo de Patrick Bossaert Derache, colorisée par Francis De Look)

Le Lieutenant Général Médecin Derache (photo de Patrick Bossaert Derache)

Le Docteur Derache en train d’opérer

En souvenir du Docteur Derache

Le Lieutenant Général Mélis

Le Docteur Nolf qui dirigea Cabour à partir du 12 mars 1917

Hôpital Cabour au Front

Hôpital Cabour vu des dunes

Hôpital de Beveren sur Yser

Le plan de l’hôpital militaire de Beveren sur Yser.

La Reine Elisabeth s’entretien avec un blessé à Cabour.

Travail en salle d’opération

Le chirurgien Derache

Une fête à l’hôpital de Cabour

Transport d’un opéré du P.C.A. vers l’auto lit qui doit le conduire à l’hôpital du front.

Installation d’un opéré du P.C.A., dans l’auto lit.

Poste Chirurgical Avancé de Grognie

En témoignage d’attachement sincère de vos dévoués blessés, I / III /1920.

Effet d’un bombardement allemand par avion.

Sortie de la messe à Beveren s/Yser.

Arrivée d’un blessé à l’hôpital de Beveren s/Yser

Construction de l’hôpital de Beveren s/Yser.

Construction de l’hôpital de Beveren s/Yser.

Construction de l’hôpital de Beveren s/Yser.

Soins dans les chambres à Beveren s/Yser.

De gauche à droite, les personnes reconnues ! Madame Derache née Marguerite Fontaine, le Comte de Broqueville, Sa Majesté la Reine Elisabeth, le Docteur Derache et le Docteur Mélis. (Si vous reconnaissez quelqu’un, un Email fera plaisir)

Plaque émaillée de l’Avenue Général Médecin Derache. (Photo Patrick Bossaert Derache)

Le Dr Derache

Source:

1)Contribution à l'histoire du Service de Santé de l'armée au cours de la guerre 1914-1918, L. Mélis, Institut cartographique militaire, Bruxelles 1932

2) Histoire de la médecine militaire dans les provinces belges du moyen age à 1971, E. Evfrard et J. Mathieu, Editeurs Dr Evrard et Dr Mathieu Bruxelles 1996. 

3) Hôpital de Beveren-S/-Yser, Notice.
Imprimerie militaire belge des Invalides et orphelins de guerre de Port-Villez 

L'hôpital l'Océan, sous la direction du Dr Depage avait été édifié par la Croix-rouge de Belgique et sous l'initiative de la Reine Elisabeth. Les premiers mois de guerre avaient prouvé les insuffisances du Service de Santé et l'Inspecteur Général Mélis voulait  redorer le blason de la médecine militaire en créant un premier hôpital chirurgical entièrement militaire...Le Dr Mélis décida d'édifier ce nouvel hôpital sur le terrain d'un certain Monsieur Cabour qui possédait un pavillon de chasse situé à Adinkerke le long de la frontière française. La distance entre Adinkerke et La Panne étant de moins de 10 kilomètres, on peut se demander pourquoi le Dr Mélis fonda cet hôpital chirurgical militaire si près de l'hôpital l'Océan! Ne courait-on pas en effet le risque de faire naître une rivalité entre les deux installations? Nous ne connaîtrons sans doute jamais les raisons qui poussèrent le Dr Mélis à choisir cet endroit. Peut-être saisit-il  simplement l'opportunité offerte par un terrain facilement disponible! Quoi qu'il en soit, la relève de Service de Santé  allait dépendre entièrement dans la manière dont le nouvel hôpital de Cabour fonctionnerait. Dans cette optique, le choix de son chef allait sans doute se révéler plus crucial que son emplacement ! Ce n'était pas une mince affaire que de trouver un chirurgien  militaire qui serait capable de soutenir la comparaison avec le brillant professeur Depage! 

Ce fut le Dr Derache qui fut désigné par le Dr Mélis en avril 1915 pour diriger le nouvel hôpital de Cabour. Ce jeune médecin avait dirigé depuis le 25 octobre 1914 l'hôpital Fort Saint-Louis à Dunkerke (1). Ce choix se révéla excellent malgré le fait, écrivit plus tard l'Inspecteur Général Dr Mélis, qu'il fut posé contrairement à toutes les règles, à toutes les traditions de la hiérarchie!  Le jeune Derache se montra en effet pendant toute la guerre non seulement un chirurgien extrêmement compétent mais aussi un chef efficace  très aimé de ses subalternes et de ses blessés!    

Mais revenons un instant à la création de l'hôpital. Son équipement en bâtiments avait fait l'objet des plus grandes attentions. Le docteur Mélis avec l'aide du colonel de génie Wallens avait fait construire par les constructeurs Hamon frères de Paris un type démontable de pavillons au nombre de 500 (dont 100 prévus pour la reconstruction des hôpitaux lors de la future réoccupation du territoire national). Ces pavillons dénommés à tort "pavillons américains" avaient chacun une contenance de 24 lits. Aux quatre coins du bâtiment se trouvait une chambrette. Deux d'entre elles, étaient réservées aux malades devant être isolés, l'une servait de lingerie, l'autre de salle de bain. Les pavillons étaient abondamment éclairés. Ils reposaient à 20 cm de hauteur sur des blocs de béton ou de briques qui les isolaient du sol, permettaient une circulation d'air et remédiaient à la déclivité irrégulière du terrain. A Cabour, 19 pavillons furent élevés pour les blessés et trois servirent au logement du personnel. Cinq cents lits pouvaient être occupés. Le petit pavillon de chasse, le seul bâtiment en dur, fut aménagé en salle d'opération. L'hôpital fut ainsi édifié en 28 jours et fut ouvert le 26 avril 1915. Les mécènes ne furent pas absents. M. Evan Thomas, Lord Northiffe, délégués de l'Antwerp British hospital fund alimentèrent Cabour en matériel hospitalier et chirurgical. Le comte Félix de Mérode fournit un certain nombre de voitures automobiles et du matériel hospitalier.

Le docteur Derache installa par après le poste chirurgical avancé de son hôpital à Grognies. Ce poste fonctionna du 20 juillet 1916 au 6 juillet 1917 et 64 grands blessés y furent soignés (28 décédèrent).

L'hôpital de Cabour recevra de la date de son ouverture jusqu'en février 1917 des patients au nombre de  3.324 dont 2.811 atteints de lésions par blessures de guerre. 227 décès furent enregistrés, ce qui donne une mortalité de 6,8%. En moyenne il y eut cinq opérations par jour à Cabour. Les médecins firent d'excellentes observations scientifiques et sous l'égide de l'Inspecteur Général du Service de Santé, le docteur Mélis, on entreprit de les publier mensuellement. Le premier numéro de guerre des "Archives médicales belges" parut le premier janvier 1917 et était imprimé au centre de réadaptation de Port-Villez. Ce fut probablement la reparution de ces "archives" qui incita  le docteur Depage, piqué au vif par l'initiative des médecins militaires, à faire paraître chez Masson, en de luxueuses et copieuses brochures les travaux scientifiques de son hôpital l'Océan!

L'hôpital chirurgical de Cabour fonctionna jusqu'au 12 mars 1917, date à laquelle il devint un hôpital général dirigé par le docteur Nolf et destiné essentiellement aux malades et non plus aux blessés. L'équipe chirurgicale sous la direction du Dr Derache se trouva quant à elle mutée  à Beveren, situé à seulement 9 Km des premières lignes. Là, s'étendait un tout nouvel hôpital conçu dans tous ses moindres détails par le docteur Derache lui-même. Les pavillons des blessés avaient la particularité d'être tous reliés entre eux par des couloirs latéraux qui offraient l'immense avantage de pouvoir transporter un blessé à l'abri du froid de n'importe quel point de l'hôpital à n'importe quel autre.18 pavillons abritaient les blessés, un dix-neuvième servait de salle de pansement (2). Un vingtième de chapelle. Ces 20 pavillons étaient placés sur deux rangées de 10. Les deux rangées de dix communiquaient entre elles par un long couloir sur lequel donnait la salle des entrants, la salle de radiographie (3), la salle de narcose, la salle de stérilisation et les deux salles d’opération (4). Le Dr Derache dans son nouvel hôpital était assisté de 12 médecins, d'un médecin radiographe et de douze élèves médecins. Il y avait en outre  60 infirmières, des brancardiers et du personnel technique. Note amusante, les animaux n'étaient pas absents de l'hôpital puisque l'on comptait aussi ....12 vaches laitières pour fournir du lait frais aux blessés, 12 porcs engraissés avec les restes des cuisines, les chevaux des officiers, et un cheval de trait réservé pour la charrette à immondices!  

Le Roi lui-même semble avoir été impressionné par le nouvel hôpital ingénieux car il lui donna le nom de "merveille militaire". 

Le docteur Derache avait un bel outil pour travailler mais par ordre du commandement, en vue d'opérations militaires, sa capacité fut brutalement réduite de moitié à la date du 11 avril 18. 


Le Docteur Derache en train d’opérer

22 pavillons furent démontés et envoyés à l'arrière au Magasin Général des hôpitaux. Incroyable bévue ou malchance car quelques jours plus tard, le 16, 17 et 18 avril se produisit une terrible offensive allemande et pendant ces trois jours, l'hôpital dut faire face à un afflux de 506 blessés! Le Dr Derache eut fort à faire pour placer tous les entrants et improvisa en transformant la chapelle, la salle des fêtes et la galerie en salle de blessés. Le 20 septembre 1918, l'état-major rétablit la capacité de l'hôpital en autorisant 14 nouveaux pavillons. 

Après avoir dirigé successivement trois hôpitaux, l'infatigable Dr Derache fut désigné lors de l'offensive libératrice pour prendre la direction d'une antenne chirurgicale. Nanti du matériel de Grognies, il suivit pied à pied le développement de l'offensive. Successivement, il s'installa et opéra à Zonnebeecke, Bruges, Beernem, Engelhoeck, Craenepoel....   

Le nombre de militaires hospitalisés dans les formations dirigées par le Dr Derache s'est élevé à 11.494, y compris les postes chirurgicaux avancés. Les médecins et infirmières qui avaient travaillé avec le docteur Derache fondèrent en 1922 le Beveren Club qui se réunit tous les ans "le dernier samedi d'avril". En 1929, les patients mirent sur pied au musée d'Ixelles une manifestation de gratitude envers "le patron", en présence de la Reine Elisabeth. Lors de sa promotion comme Inspecteur Général du Service de Santé, il y en eut une seconde, au "Cercle Gaulois" en 1933. Elle fut suivie de la parution, en son honneur d'un livre jubilaire dédicacé par la Reine Elisabeth.  

Le Dr Derache poursuivit après la guerre une carrière militaire brillante et devint Inspecteur général du Service de Santé. En plus de ces hautes fonctions, il continua à opérer à l'hôpital militaire de Bruxelles tout en se consacrant aussi à une importante clientèle privée. Il mena cette vie de travail exceptionnellement chargée malgré un diabète grave. La mort le surpris en pleine activité au chevet des malades le 7 août 1935.

Anecdote amusante qui donnera peut-être des idées aux pères qui voudraient transmettre leurs noms malgré le fait de n'avoir que des filles: en récompense de ses services, le Roi par un Arrêté Royal de 1935 autorisa que les trois filles (et leurs descendance) du docteur Derache puissent porter son patronyme après leur nom de mariée.

Dr Loodts P.     

(1) hôpital Fort Saint-Louis: il fut mis à la disposition des Belges par l'autorité française. Ce petit hôpital de trente lits avait été équipé en installation de radiographie par Madame curie et l'ambassade des Etats-unis avait offert la salle d'opération complètement équipée. A la fermeture de cet hôpital le 30 avril 1915, près de 5.700 patients avaient été soignés dans les deux hôpitaux de Dunkerke (le second était Saint-Pol). La plupart des blessés provenaient de Furnes par voie ferrée.

(2) La salle de pansement était composée de quatre locaux successifs: une salle de plâtre, une salle de pansements, une petite salle d'opération septique pour les ouvertures d'abcès), une chambre de dépôt de gaze non stérilisé dans laquelle la gaze est coupée en compresses...

(3) La radiologie comportait une installation fixe, d'un laboratoire (chambre noire), d'une pièce où se trouvaient les appareils générateurs haute tension, d'une salle d'opération réservée pour la recherche et l'extraction des projectiles sous contrôle RX et aussi d'une voiture radiologique mobile..

(4) les salles d'opération étaient chauffées par un chauffage central à eau chaude. Quatre gros tubes émaillés encadrent chaque salle et y entretiennent nuit et jour une température constante. Sur ces tubes, on fait chauffer les couvertures qui envelopperont le blessé pendant le transport jusqu'à sa salle.



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