Médecins de la Grande Guerre

Le chagrin de l’« Ami des Belges », Herbert Hoover, futur Président des Etats-Unis.

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Le chagrin de l’« Ami des Belges », Herbert Hoover, futur Président des Etats-Unis.

point  [article]
Herbert C. Hoover. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Ernest Solvay - Industriel. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Emile Francqui – Ministre d’Etat. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Bâtiment de la Société Générale de Belgique où était installée l’administration centrale du Comité National. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Banque belge pour l’Etranger où s’installérent la C.R.B. et les services de l’alimentation. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Le Comité National en séance. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Le Comité National en séance – détail des emplacements. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Membres américains de la Commission for Relief in Belgium. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Offices de la Commission for Relief in Belgium à Rotterdam. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

« L’Eburon » prêt au départ de Rotterdam. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Rotterdam. Navire de la Commission for Relief in Belgium. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

En février 1917, le brise glace ouvrant les eaux du port de Rotterdam à nos bateaux. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Rotterdam. Le « Trevier » en déchargement . (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Les quais de la Commission for Relief in Belgium à Rotterdam. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Un entrepôt de tonneaux à graisse vide à Rotterdam. Commission for Relief in Belgium. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Les bateaux d’intérieur du Comité National dans le port de Rotterdam. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Dans une cale des transports de la Commission for Relief in Belgium. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Cantine maternelle, rue de l’Escalier, à Anvers. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

La « Soupe populaire ». (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

La « Soupe scolaire ». (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Epluchage des pommes de terre. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Le transport des vêtements. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Nouveaux vêtements. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Distribution du travail dans les ouvroirs du Comité National. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Le vestiaire central du Comité National au « Pôle Nord » à Bruxelles. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Présence du drapeau américain. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Vêtements venus d’Amérique. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Ce que Bruxelles consomme de farine en un jour à raison de 190 gr. par tête. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Préparation de la soupe populaire dans la cuisine centrale de Bruxelles du Comité National dscurs et d’alimentation. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

A l’annonce de la distribution d’un hareng par habitant, le marché Saint Géry connait une véritable bousculade. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Première distribution de soupe et de pain à Bruxelles. (tirée de : La Belgique et la guerre. Georges Rancy Edition Henri Bertels 1927)

Hommage de Reconnaissance aux généreux Américains et à leur Noble Président. Ecole des filles de la Sagesse de Mons. (Propriété du Fonds d’Archives Photographiques sur Mons d’André Faehrès)

Céline Ella arrière grand-mère de mes petits-fils dans sa classe de Lens St Remy. (Dr Loodts)

1914 - 1917. Honneur aux Américains secourant la Belgique. (Col. Maison du Souvenir)

Le chagrin de l’ « Ami des Belges », Herbert Hoover, futur Président des Etats-Unis

La misère de la population civile et la fondation de la Commission for Relief

                     

       Après quelques mois de guerre la Belgique se retrouve dans une situation misérable.

       Prenons l’exemple de la province de Luxembourg. Le bilan matériel de la traversée de l’armée allemande dans celle-ci laisse d’innombrables plaies qui seront très  lentes à cicatriser.

       Rien que pour l’habitat, selon le chanoine Schmitz, 259 maisons sont détruites dans l’arrondissement de Virton et 581 dans celui de Neufchâteau ! Dans les villages les plus détruits, le nombre de bâtiments à reconstruire par 100 habitants fut de 12 à Musson et Rossignol, 13 à Izel et Maissin, 16 à Herbeumont, 18 à Tintigny et Ethe et 20 à Porcheresse. Ce chiffre de 20 maisons à reconstruire par cent habitants à Porcheresse signifie qu’il fût le village le plus sinistré avec un nombre de ménages sans abri représentant les trois quart de la population !

       Pour ce qui concerne l’alimentation, les réquisitions de l’ennemi et le chômage forcé conduisit la population belge à éprouver les affres de la faim !  A Bruxelles, nos autorités nationales prirent toute la mesure de la misère grandissante des Belges en créant un « Comité central de secours et d’alimentation » soutenu par les banques et les grands industriels et dont la présidence fut confiée à Ernest Solvay.  Pour donner des moyens à ce Comité, il fallait   importer en Belgique une immense quantité de vivres et maintenir cette importation pour une longue durée ! Le problème logistique était énorme mais le problème diplomatique l’était autant car il fallait garantir aux alliés que les vivres importés ne serviraient pas à ravitailler l’occupant, lequel devait par ailleurs s’engager à ne pas saisir l’aide fournie à la population !

       Des négociations étaient donc nécessaires à la fois envers les alliés et d’autre part, avec les occupants allemands ! Seules des nations neutres pouvaient se permettre d’entreprendre de pareilles négociations en faveur de la population civile belge.

       Ce furent les Etats-Unis et l’Espagne par l’intermédiaire de leurs ambassadeurs ou ministres plénipotentiaires qui s’en chargèrent pour constituer ensuite la Commission for Relief in Belgium.

       Cette organisation neutre fut donc agréée par tous les belligérants et autorisée à fournir l’aide matérielle vitale à la survie des Belges ! La Commission for Relief pris rapidement une extension énorme tant les besoins étaient considérables et elle comptabilisa plus de deux mille bateaux battant son pavillon. Les vivres, essentiellement des sacs de farine, provenant en grande partie d’Amérique du nord étaient déchargés dans la Hollande neutre, à Rotterdam. La marchandise était ensuite contrôlée par les membres américains de la commission avant d’être chargée sur des camions pour la Belgique. Le succès de cette organisation complexe est à attribuer principalement à son président, Herber Hoover.

       Cet Américain extraordinaire était un brillant ingénieur qui s’était déjà fait remarquer en Chine des circonstances difficiles. En 1900, alors qu’il travaillait dans une entreprise privée comme ingénieur-chef, la révolte des Boxers éclate et son campement à T’sien-Tsin est pris sous la mitraille de l’ennemi. Pendant plus d’un mois, le campement va résister grâce à Herbert Hoover qui organise la construction de barricades.

       Le 3 août 1914, l’ambassadeur américain à Londres lui demande de l’aider afin d’organiser le rapatriement de 120.000 Américains surpris en Europe par la Grande Guerre. Un peu plus tard, il est sollicité pour aider  la  Commission for Relief in Belgium à ravitailler la population de la Belgique occupée. Hoover organisa alors de façon magistrale cette organisation humanitaire avant la lettre et en devint le président. Juste récompense, Herbert Hoover, par son action incessante pendant près de trois ans au profit de la population civile belge fut le seul homme à qui l’on décerna le titre d’ « Ami de la nation belge ». Ce fils d'un forgeron Quaker de l'Iowa et ingénieur des mines était de plus un fin diplomate qui avait compris l’importance de la « diplomatie de la navette ». Il traversa plus de quarante fois l’Atlantique pour se rendre tant à Londres qu'à Berlin dans le but d’obtenir un règlement accepté par tous les belligérants.

       La Commission for Relief fournit aux Belges plus de 697.116.000 livres de farine (soit plus de 350.000 tonnes) dans des sacs en coton « Mills ». Pour s’assurer que les sacs vides ne finissent aux mains des Allemands (le coton est employé dans les industries de l’armement) ou soient recyclés dans des activités de contrebande (revente de sacs remplis de farine de qualité inférieure), les consignes étaient de les donner aux écoles professionnelles et aux ateliers de coutures afin qu’ils soient recyclés. Les couturières belges les utilisèrent avec beaucoup de talent en y brodant de nombreux motifs patriotiques pour les transformer en vêtements mais surtout en  tapis de table, sacs d’agrément ou en encore en oreillers.

       Une partie de cet artisanat était vendu aux Etats-Unis au profil de la Commission for Relief. Bien entendu Herbert Hoover reçut plusieurs centaines de sacs en remerciement qu’il garda précieusement !  Aujourd’hui ces sacs cousus, brodés, dessinés par d’innombrables femmes belges sont conservés dans le musée consacré à Hoover à Iowa-City. Ils constituent une collection unique au  monde. Je vous convie à parcourir l’exposition virtuelle consacré à ces sacs afin d’y admirer les œuvres de nos grands-mères et arrières grand-mères !

Le Comité national et les Comités provinciaux sont crées pour distribuer les vivres fournis par la Commission for Relief

       Comment acheminer jusqu’au plus petit village belge les vivres fournis par la Commission for Relief  ? Ce fut la tâche du Comité  national de Secours et d’Alimentation qui  s’était formé en Belgique. La Commission for Relief in Belgium réussit son œuvre admirable   parce qu'il existait une coopération exemplaire entre Hoover et les membres du Comité national de secours et d'alimentation dont les figures de proue étaient Emile Francqui, Adolphe Max, Ernest Solvay, Emmanuel Janssen ou encore Edouard Bunge. C’est donc une double organisation qui assura la subsistance des Belges. La Commission for Relief qui recevait les dons, achetait et transportait les vivres et, en Belgique, le Comité National  distribuait ceux-ci par l’intermédiaire de Comités provinciaux qu’il créa dans chaque province.

       On a vu plus haut que la province Belge de Luxembourg était la province la plus sinistrée.

       Ce fut dans cette province que le premier Comité provincial de Secours et d’Alimentation fut créé. Son abréviation « CSAL »  fut  rapidement connue de tous nos Ardennais et Gaumais et son président le baron Auguste Goffinet.  Parmi  les  membres du comité, le baron Evence Coppee  et son père menèrent  une action philanthropique très importante.

       Ils n’hésitèrent pas une seconde à faire de leur domaine de Roumont près de Libramont, un centre de ralliement pour tous les délégués communaux  du CSAL. Evence n’était qu’un jeune homme de 32 ans mais il se révéla particulièrement créatif et énergique pour aider ses concitoyens. Le magasin général de la province se trouvait à Libramont et à la gare de cette commune siégeait en permanence un délégué américain de la commission qui procédait à la réception des marchandises. Le Comité de la province de Luxembourg ne se contentait pas de distribuer une aide importée. Elle créa aussi des potagers communautaires qui produisaient des légumes pour la soupe populaire et du travail aux villageois chargés de les cultiver.

Le CSAL fit fabriquer près de cent mille paires de sabots  pour lutter contre le chômage

       Le CSAL fournit aussi du travail aux chômeurs de manière parfois surprenante  quand il, commanda plusieurs milliers de paires de sabots aux sabotiers de Porcheresse. Un excellent document édité en 1995 par le centre Georges Lemaire créé par le syndicat d’initiative de Daverdisse[1] nous apprend que  le CSAL comptait fournir une aide aux comités de Liège  par l’envoi de 85.000 paires de sabots et, au comité de Charleroi,  par l’envoi de 15.000 paires de sabots ! On imagine les heures de travail que cette fabrication procura aux sabotiers de la province de Luxembourg et en particuliers à ceux de Porcheresse, village connu pour cette spécialité. Toujours dans le même document, on découvre avec étonnement que l’administration allemande interdit le  transport de sabots le 5 septembre 1916 ce qui conduisit le CSAL à ne plus pouvoir les distribuer. C’est ainsi  qu’à la date du  premier novembre 17, le stock de sabots immobilisés se montait à Porcheresse à 67.000 paires, 43.000 à Libramont, 21.000 à Wellin, 12.000 à Corbion, 56.000 à Tellin

Le CSAL bâtit des maisons provisoires

       Les Comités provinciaux non seulement se mobilisèrent pour fournir alimentation et travail aux démunis mais ils se démenèrent pour fournir un logement à ceux qui avaient tout perdu. En Belgique, 78.000 maisons avaient été détruites et il fallait les reconstruire. Le gouvernement du Havre créa dans ce but le Fonds du roi Albert en 1916 mais celui-ci ne fut opérationnel en Belgique qu’en 1919. Le comité National accorda une aide en argent aux Comités provinciaux  qui bâtirent de petites maisons de secours  en matériaux locaux.

       Dans la province de Luxembourg, toutes ces petites maisons qui se ressemblaient comme des sœurs jumelles portèrent gravée sur une pierre l’inscription « 1915 CSAL ». Les « maisons du comité » aussi  appelées « américaines » rendirent  alors d’appréciables services à la population. Certaines d’entre elles ont traversé le temps. Il en reste par exemple une vingtaine à Porcheresse et le promeneur attentif les repérera facilement. Le fascicule du Centre Georges Lemaire en fait un remarquable inventaire[2]. A Baranzy, une de ces maisonnettes  se trouve dans le jardin du 14, rue Marcel Niessen.

L’histoire  de l’occupant de l’ « Américaine » de Baranzy,  René Lecerf  et de Madame Schaeffer.

       Cette maisonnette est liée à l’histoire de René Lecerf qui fut mon ami. Ce Monsieur était âgé d’un an quand, dans les bras de sa maman, le 23 août 1914, il fut blessé au visage par un éclat d’obus. La maison paternelle fut détruite et une maison du comité construite dans le jardin. J’ai connu René Lecerf à la fin de sa vie  qui entretenait avec amour la maison américaine qui l’avait abrité. René, décédé vers 2005, était une personne très attachante et avait combattu sur la Lys en 1940!   Le lecteur intéressé trouvera en annexe, le texte que j'écrivis en 2001 en son hommage et en hommage à son amie, madame Schaeffer qui fit partie de la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale. [3]

Après la guerre les maisons du fonds Roi Albert succèdent aux maisons du CSAL

       Mais revenons aux maisons des sinistrés. Après l’armistice, c’est le Fonds Roi Albert qui construisit de nombreuses maisons provisoires. Le fonds obtint du Ministère de l’Intérieur un budget de 100 millions en 1919 et de 50 en 1920. Des baraques militaires furent rachetées aux Anglais et servirent d’écoles ou de bâtiments administratifs mais le Fonds construisit aussi des maisonnettes uni familiales  en bois dont on vit de nombreux spécimens dans le pays comme par exemple la cité Froideveau à Dinant. A Porcheresse, l’église provisoire fut louée au fonds Roi Albert et dix maisons du fonds roi Albert furent construites. Le roi lui-même se rendit à Porcheresse le 18 décembre 1919. Il s’arrêta devant le fournil de Joseph Poncelet puis fut accueilli devant l’école, où était préparé un goûter. Les sabotiers lui avaient dressé un arbre de triomphe à leur façon, fait de sabots !

       Une commune se vantait en 1998 de garder beaucoup de maisons du fonds roi Albert. Il s’agit d’Herstal, rue Basse-Préalle, rue du Bon Air, en quelques rues, on pouvait découvrir en 1998 une trentaine de ces maisons[4]. La plupart servent encore d’habitations.

       Dans le pays de Charleroi, on possède encore un important patrimoine du Fonds Roi Albert, en particuliers la très belle chapelle  en bois du Try d’Haies à Loverval[5].

       Juste après la guerre, une lutte s’engage entre architectes, entre conservateurs et modernistes. Les conservateurs veulent reconstruire à l’identique, les modernistes tentent de faire passer des concepts sociaux  nouveaux comme des cités-jardins. Finalement, les réfugiés rentrant au pays, il faut opter pour l’urgence et les idées des modernistes (dont Louis Van der Swaelmen est un des fers de lance)  sont mises de côté ! Malgré l’urgence de reconstruction, les baraques du fonds ne sont pas construites aussi rapidement que prévu ! En 1919, seules 850 baraques ont été construites sur les 2.000  commandées. Les fonds ne suivent pas. En 1925, le fonds Roi Albert est liquidé.  Après avoir été utilisées dans les régions du front, un grand nombre ont été ensuite remontées dans des villes à population ouvrière comme à Herstal !     

Le chagrin de l’ami des Belges, le Président Hoover

       Hoover fut un véritable sauveur pour les Belges. Son idéalisme, sa force de travail, ses talents organisationnels contribuèrent de façon exceptionnelle à la mise sur pied du ravitaillement des Belges en territoire occupé. Il en fut bien récompensé ; des milliers de cartes postales, de photos de classe  écrites par les enfants des écoles lui parvinrent en remerciement.

       On ne compte pas non plus les sacs de farines qui vidés de leurs contenus furent renvoyés décorés de dessins et de mots de remerciements aux donateurs américains.

       Les Belges de 14-18 gardèrent une gratitude immense envers les Américains et cela grâce à Herbert Hoover. La guerre  14-18 révéla aux Américains la valeur de leur compatriote.

       En 1917, son activité au profil de la Commission for Relief cessa et Hoover fut rappelé par le Président Wilson pour prendre la tête du ministère de l’agriculture aux Etats-Unis.

       Après l'armistice, Hoover, membre du Conseil économique suprême et directeur de l'Administration de l'aide américaine, organisa l’envoi de  cargaisons de vivres à destination des millions d'affamés d'Europe centrale. Il étendit cette aide à la Russie frappée par la famine en 1921. A celui qui lui reprocha de favoriser ainsi les bolchéviques, Hoover répliqua : « Vingt millions de personnes meurent de faim, quelle que soit leur appartenance politique, elles seront nourries ! ». Herbert Hoover fut un Secrétaire au commerce (équivalent de ministre)  très efficace dans le gouvernement des présidents Warren G Hardinf et Calvin Coolidge entre le 5 mars 1921 et le 21 août 1928.  En 1927, Hoover dirigea  les secours portés à la population sinistrée par les crues du  Mississipi. Peu après, le 14 juin 1928, il devint le candidat à la présidence du Parti républicain.

       En mars 1929, il fut élu comme 31ème président des Etats-Unis et quelques mois après, en octobre, il dût  affronter le cataclysme du grand  crash boursier !

       Aucun homme politique n’aurait pu trouver une solution à cette crise économique majeure mais, pour beaucoup, il fallait un responsable et Hoover apparut comme une victime toute désignée ! Le mécontentement des Américains se cristallisa au printemps et en été 1929 quand les anciens combattants de la Grande Guerre  exigèrent  le paiement prématuré d’une prime (d’un bonus) qui devait normalement leur être payée en 1942. Plus de vingt mille personnes marchèrent sur Washington et ce mouvement prit le nom de « Bonus Expeditionary Force »[6].  La tension grandit de jours en jours et Hoover pour garantir l’ordre public ordonna au général Douglas Mac-Arthur d’intervenir pour faire sortir de la capitale les vétérans. Ce dernier surpassa les ordres qu’il avait reçu en traversant la rivière Anacostia pour marcher sur le campement principal des manifestants et le détruire par le feu. Cette tactique valût à Hoover la fin de sa carrière politique. On l’accusa de cruauté envers les anciens combattants, lui qui avait tant contribué à l’effort de guerre américain. Le chagrin d’Hoover fut énorme.

       Malgré ses explications les Américains ne lui pardonnèrent pas l’action démesurée entreprise par son général. Dans ses mémoires, Hoover  essaya de justifier son attitude et refit la chronologie des évènements.  Six mille anciens combattants avaient accepté de toucher des frais de voyage (ticket home) qu’Hoover  avait pu obtenir en urgence au  Congrès pour qu’ils puissent retourner chez eux. Mais il restait cinq mille mécontents qui ne voulaient pas de compromis. Parmi eux, une enquête semble le prouver, se trouvaient beaucoup d’agitateurs qui n’avaient jamais servi à l’armée ! Dans un building de la Pennnsylvannia avenue 50 manifestants avaient installé leur camp. Ce building était en fait en construction dans le cadre du plan de la lutte contre le chômage. La police essaya de déloger les manifestants pour permettre au travail de reprendre mais les policiers furent submergés et d’eux d’entre eux jetés au sol. Pour se défendre, ils firent feu et tuèrent deux hommes. C’est à la suite de cet incident grave, qu’Hoover pris la décision  de faire appel à l’armée. Cette décision fut suivie de la destruction par le feu d’un camp de manifestants, une décision prise à la seule initiative de Mac-Arthur mais qui salit à jamais la renommée d’Hoover.

       En 1932 Roosevelt lui-même usa de ce malheureux événement pour sa campagne électorale. Hoover fut caricaturé comme un tueur et un ennemi des vétérans. Une large majorité de ceux-ci croyaient faussement qu’Hoover avait donné l’ordre de tiré sur eux. Hoover était pourtant l’homme qui avait au cours de sa carrière instauré  le plus de  mesures  en faveurs des anciens combattants. Plus tard un ancien communiste, Benjamin Gitlow publia un compte rendu de la marche dans lequel il avoua que celle-ci avait été noyautée par son parti. Quoi qu’il en soit, les accusations des vétérans jouèrent en faveur de Roosevelt et Hoover ne fut pas réélu. On comprend la souffrance morale endurée par cet homme exceptionnel : rejeté par les anciens de la Grande Guerre alors que pendant celle-ci, il avait fait preuve d’un dévouement exceptionnel !

     Le 5 juillet 1958, Hoover, au siège de la société Générale à Bruxelles, à 84 ans, recevait une nouvelle fois  les hommages des Belges et déclarait :

       « C’est dans cette salle, c’est à cette table que nous avons travaillé ensemble, pendant de longues années, au cours de la première guerre mondiale. C’est ici que nous avons pris soins des malades, des vieillards et des affligés. Nous avons fait plus, nos organisations ont soutenu le moral, la cohésion et la force spirituelle d’un peuple pendant ces quatre années terribles. »

       En 1947, le Président Truman  nomma  Hoover Président de  la commission de réforme des ministères. Il occupera une fonction similaire sous la  Présidence d’ Eisenhower  en 1953. Les travaux de ces deux commissions génèrent de nombreuses économies dans le fonctionnement du gouvernement. Hoover mourut à l'âge de 90 ans à New-York le 20 octobre 1964.

La Chaire Hoover perpétue la mémoire du Président Hoover à Louvain-la-Neuve

       Aujourd’hui, une chaire universitaire  perpétue en Belgique depuis vingt ans le nom de notre bienfaiteur Hoover. La fondation Hoover, dont l’origine, on l’a vu plus haut, se trouve dans l’opération de secours à la population belge pendant la première guerre mondiale, a accepté de faire un don en 1990 à l’U.C.L. Ce don servit à créer  à Louvain-la-Neuve le 28 octobre 1991, dans la Faculté des sciences économiques, une « Chaire Hoover » ayant  pour objectif d’étudier et d’encourager l’éthique nécessaire à une économie tenant compte des aspirations humaines. La chaire organise notamment un diplôme complémentaire au cours duquel les étudiants en économie sont encouragés à développer des  argumentations éthiques dans des projets économiques ou sociétaires novateurs. Un thème parmi d’autres est par exemple celui de l’allocation universelle. Au fil du temps, la chaire est devenue aussi un petit centre de recherche grâce à quelques chercheurs du FNRS et de nombreux visiteurs étrangers. Voici l’adresse du site de la chaire Hoover :

La Grandeur d’âme de l’Ami des Belges

       N’oublions jamais l’énergie qu’Hoover consacra à la Belgique dans les heures les plus douloureuses de son histoire !  N’oublions pas non plus les leçons de l’histoire : Hoover fut placé au sommet de l’Etat fut ensuite, malgré ses grandes qualités, rejeté par ses concitoyens !  Le sort d’un homme méritant dépend souvent  des rumeurs et des circonstances ! Du piédestal aux géhennes, la route est fort fréquentée.  La grandeur d’âme d’un « Grand homme »  doit  nécessairement être bâtie sur une grande humilité. Une humilité qui se satisfait du seul sentiment d’avoir fait  plus que son devoir…

Dr Loodts P.

11 novembre 2011   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



[1] « Les maisonnettes de 1915  à Porcheresse (Daverdisse), Souvenirs des tourments d’un village », Centre Georges Lemaire, syndicat d’initiative  de Davredesse, édité en 1995.

[2] Idem au 1

[3] Ce texte est paru dans le mensuel « Le Gletton », N° 304-305, juillet-août 2001, éditeur : Michel Demoulin à Virton.

En août 1914, quand la  première guerre mondiale  éclate les habitants des  villages gaumais  vont se retrouver dans une tourmente qui ressemblera furieusement à l’enfer. Civils massacrés, maisons en feu, toute la région  va être littéralement dévastée par une barbarie sans nom. Un événement qui nous semble aujourd’hui si lointain et déjà presque ’ irréel… Et pourtant ce jour n’est pas si reculé ; pour preuve, la présence parmi nous, en 2001, d’un homme qui survécut à ces terribles journées.

 Monsieur Lecerf est né le 17 mai 1913 à Baranzy. Pendant les combats du 21 août 14, les habitants se terrent comme ils peuvent.  Dans une des maisons bombardées, un bambin d’un an se met brutalement  à hurler ; sa mère se précipite sur lui : le visage de l’enfant s’est couvert  de sang. D’un geste rapide, avec sa manche elle éponge le visage de son petit. Ouf ! la plaie qui saigne n’est pas trop grave : le coin de l’œil droit s’est  ouvert sur un cm mais, par miracle, l’œil semble indemne. Un petit miracle, sans  aucun doute, qui on le verra par après, n’est en fait que le premier d’une  série d’autres  qui jalonneront la vie de René Lecerf. Un bandage  est  serré et voilà  comment le  petit  René  se retrouva un des premiers blessés de la Grande Guerre.


 La population civile de la Gaume paya un lourd tribut à la barbarie. Madame Lecerf dut faire à elle seule des prodigues pour faire survivre sa famille. Elle n’avait plus à ses côtés son mari Constant (1882- 1962) qui avait rejoint début août l’armée belge. Constant restera au front sur l’Yser deux ans avant d’être muté à l’arrière de l’armée, du côté de Calais, pour occuper un job dans la maintenance des équipements. Quelle terrible séparation est imposée aux familles ! Quand la guerre se termina, la Gaume martyre reconstruisit avec courage ses villages dévastés et peuplés de tant de veuves et d’orphelins. Les Américains  aidèrent à la reconstruction des maisons des plus démunis : 130 maisons furent construites grâce à leur initiative, toutes sur le même modèle lilliputien : un couloir, une chambre à gauche, une salle de séjour à droite. Aujourd’hui, il en subsiste quelques unes dont une jalousement entretenue dans le jardin  actuel de… René Lecerf.


René va grandir au milieu des campagnes qu’il aime à parcourir. Il gardera de cette époque le goût pour la nature, pour les choses du terroir. Un goût qui ne le quittera jamais : tout à tour René durant sa longue vie se transformera en horticulteur chevronné (Il obtiendra de nombreux premiers prix dans des foires et salons), en  pêcheur, chasseur et même taxidermiste afin de pouvoir admirer chez lui à toute heure du jour  les merveilleuses créatures de la vie  animale. Aujourd’hui encore, en 2001, à 88 ans, René s’occupe  encore de son jardin. Il prend aussi énormément plaisir à  créer des  variétés de cidres qu’il met en bouteille  avec un savant dosage d’herbes parfumées. Enfin, quand la pluie ou le froid le force à rester à l’intérieur, ses mains rugueuses aiment à s’emparer d’un morceau  de bois  pour y graver un cerf (ce n’est pas pour rien qu’il s’appelle Lecerf) ou l’image  de la vierge miraculeuse de Baranzy qui a dû le protéger plus d’une fois comme au temps de la  « dernière guerre » quand, à l’âge de  23 ans, jeune époux et futur papa,  il  dut  avec  son célèbre régiment des  Chasseurs ardennais  combattre trois jours et trois nuits sur la Lys. Ah ! que ces combats furent durs ! Plus de soixante après, des larmes coulent encore sur  les joues  de René quand il évoque cette période de sa vie.


L’armée capitulera le 28 mai 40 et les soldats belges sont faits prisonniers. Beaucoup partiront prisonniers en Allemagne mais  René qui  a toujours sa bonne étoile n’en sera pas du nombre. En effet, le 8 juin 40, les Allemands renvoient en effet  dans leurs foyers bon nombre de soldats flamands et  René est mis par erreur dans le lot chanceux. Curieusement ces soldats peuvent rejoindre leurs villages dans leur uniforme belge. Avec un compagnon gaumais heureusement placé dans la même situation, René entreprend de rejoindre aussi vite qu’il le peut sa famille. Pour ce faire, il récupère un vélo démunis de pneumatiques qui était  à l’abandon et met au point les règles d’une judicieuse performance  sportive : pendant qu’un équipier  fait 5 km à pied en trois quart d’heure, son compagnon à vélo effectue le même trajet en quinze minutes. Le cycliste bénéficiera donc  d’une demi-heure de repos en attendant de voir poindre son compagnon. Le relais du vélo s’effectue alors et le cycliste devient marcheur à son tour. Avec un tel rythme, on peut poursuivre une route très longtemps. Parti d’Audenaerde le 8 juin à 14 heures, les deux soldats arrivent le 10 juin à 15 heures à Attert ayant parcouru plus de deux cents km dont la moitié à pied !  René tente de rejoindre Baranzy mais les Allemands ont dressé des barricades : son village est déclaré zone militaire car  proche de la ligne Maginot. Il apprend que les habitants ont auparavant  reçu l’ordre d’évacuer leurs maisons et que nombre d’entre eux sont partis en France  avec parmi eux  sa femme enceinte et ses beaux-parents.. Notre Gaumais de René n’a pas d’autres ressources que d’essayer de trouver à loger à Attert. Une ferme héberge une quinzaine de réfugiés, notre gaillard sera le seizième. Dans la ferme, pour ne pas trop penser à ses ennuis, il propose ses services  ce qui l’amène à côtoyer Yvonne, la fille du fermier.


Ce sera là une rencontre de deux êtres exceptionnels.

Yvonne  Schaefer (née le 11-6-20) est une jeune mariée qui attend impatiemment le retour de son mari prisonnier de guerre. Les deux jeunes gens vont dans les épreuves se soutenir l’un l’autre. Une amitié exceptionnelle débute ainsi entre deux jeunes  familles. Yvonne n’est pas n’importe quelle femme ! Elle  rentre dans la résistance  du réseau F-1 et son apparence de jeune  maman candide est employée au mieux. Yvonne  va effectuer, au risque de sa vie,  de nombreuses missions en transportant cachés dans  le landau de son bébé  armes et courrier. Aujourd’hui, Yvonne  évoque ces souvenirs avec beaucoup  de simplicité. Les héros ne  sont-ils pas souvent des gens très humbles ? Mais ne nous y trompons pas : Yvonne est détentrice de la  Médaille de la résistance, de la Médaille Commémorative de la guerre 40-45 avec sabres croisés. Pour avoir été Résistante du 1-1-42 au 14-10-44, elle reçut même une petite pension symbolique qui lui sert aujourd’hui à gâter ses petits-enfants. Aujourd’hui qu’Yvonne et René sont tous les deux veufs, ils ont repris l’habitude de se voir  de temps à autre pour s’encourager l’un l’autre ! Quand ils se rencontrent, ils parlent de fleurs, de jardin et parfois du temps passé comme par exemple le temps pendant lequel René fut quasiment le seul habitant de Baranzy et qui vaut la peine d’être raconté ici…

 Nous avons  quitté momentanément René alors qu’il était réfugié dans la ferme d’Yvonne. Ce séjour ne va pas être bien long car René à hâte de rejoindre sa maison de Baranzy. Il va profiter d’une offre du bourgmestre qui cherche quelques hommes volontaires pour surveiller nuit et jour  les biens que les villageois de Baranzy ont abandonnés contraints et forcés. On lui remet un brassard et on l’autorise à rejoindre le village fantôme le 24 juin 40. René éprouve un immense cafard en voyant le village abandonné. Il y règne une atmosphère pesante et angoissante. Un chien abandonné rejoint René qui l’adopte. Malheureusement son canin de compagnon ne fera pas long feu et mourra  empoisonné quelques semaines plus tard causant ainsi  un gros  chagrin  à notre Robinson solitaire. Plus amusant est le sauvetage d’une vache abandonnée qui avait Dieu sait comment rejoint le troisième étage d’une maison  du village. Ce fut toute une aventure pour convaincre « Marguerite » de descendre les escaliers. René surveillera le village pendant plusieurs semaines et c’est avec  soulagement qu’il vit la fin de la quarantaine imposée au village et le retour des réfugiés parmi lesquels se trouvait sa tendre épouse qui suprême cadeau de retrouvaille mit au monde leur petite fille  quelques jours à peine après son retour .

Après la deuxième guerre, René  travailla après la libération à l’usine de Musson. C’est là, dans les années soixante, qu’il connut la troisième aventure de sa vie. En réparant l’alimentation électrique d’une machine il fut électrocuté par une décharge de 15.000 volts. René qui travaillait en hauteur  chuta, électrocuté, de plusieurs mètres. Incroyable mais véridique, il ne fit qu’un bref séjour à l’hôpital et surprit  tous les médecins. La fée de Baranzy avait encore protégé René à moins…à moins  que ce fut le « quart »  de goutte qu’un copain de René lui fit boire dans le plus grand secret  à l’hôpital en le convainquant qu’il n’y avait pas de meilleur médicament  ? Quoi qu’il en soit René est encore aujourd’hui étonné de l’audace de son guérisseur d’ami, audace à laquelle il ne peut s’empêcher  à chaque fois de penser en riant…

Cher René, Chère Yvonne, un jour d’été 2001, ce fut pour moi une immense joie  d’avoir rencontré des Gaumais tels que vous, solides et droits comme des chênes, bons et simples comme un pain de campagne.. Puissions-nous ne jamais vous oublier !

[4] « Ma cabane du fonds du roi », article paru dans le journal  « Le Matin » du 10 novembre 1998 et signé C.E. 

[5] Sur la chapelle du Try d’Haies à Loverval voir le site   

[6] “The bonus March : Herbert Hoover’s view”, American History Magazine, juin 2004



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