Médecins de la Grande Guerre

Nos paquebots pendant la guerre

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Nos paquebots pendant la guerre.

point  [article]
Le paquebot à aubes Emeraude, 1848.

Le paquebot à aubes Parlement belge, 1873.

Le paquebot à aubes Flandre, 1887.

Le Rapide, camouflé en vue de rendre sa visibilité moins nette.

La Princesse Henriette.

La Princesse Elisabeth.

La Ville de Liège.

Ostende - L'épave du Vindictive dans le chenal.

Le Pieter De Coninck pendant les hostilités.

Douvres - Entrée du port.

L’Elisabethville.

Le princesse Clémentine, de la Cie Léon Dens, à l’ancre en Angleterre.

Le premier bateau de ravitaillement envoyé des Etats-Unis en Belgique.

Le « Léopold II »

Nos paquebots pendant la guerre.[1]

 

 

 

 

   Le grand public connaît notre service de paquebots de l’Etat qui, via Ostende-Douvres, relie la Belgique à l’Angleterre ; il ignore cependant les services rendus par nos malles à la cause des Alliés. Nous croyons donc intéresser nos lecteurs en leur fournissant quelques précisions à ce sujet.

   En 1914, la flottille de notre ligne maritime comprenait dix navires à marche rapide, dont cinq à aubes, ayant une vitesse de 21 à 22 nœuds, et cinq à turbines, qui, filant plus de 24 nœuds, soit environ 45 kilomètres à l’heure, sont les paquebots les plus rapides de la Manche.

   Bien avant 1914, l’Administration de la Marine s’était préoccupée des services que ses navires pourraient éventuellement rendre à l’armée ou au gouvernement en cas de mobilisation et en cas d’une guerre où la Belgique aurait à défendre sa neutralité ; aussi toutes les dispositions nécessaires à cette fin étaient-elles arrêtées au moment où les événements du mois d’août 1914 vinrent nous surprendre.

   La région du littoral n’ayant pas été envahie pendant la première période des hostilités, le service des paquebots continua à fonctionner quasi normalement jusqu’au 14 octobre 1914, date de l’arrivée de l’ennemi à Ostende. Toutefois, Douvres, port militaire, ayant été fermé au trafic des passagers, nos malles se dirigèrent sur Folkestone à partir du 4 août. D’autre part, en présence des dangers que présentait la navigation de nuit et de l’encombrement qui régnait dans le port de Folkestone, où fonctionnaient cinq lignes régulières de navigation, le troisième et le deuxième service Ostende-Douvres furent successivement supprimés ; dès le 19 août, il ne subsistait plus qu’un départ journalier dans chaque sens.

   Dès le début, nos paquebots à turbines, qui, grâce à leur vitesse et à leurs formes, étaient susceptibles d’être transformés en croiseurs auxiliaires, furent mis à l’abri d’un coup de main éventuel de l’ennemi : le Jan Breydel, le Pieter De Coninck et la Princesse Elisabeth à Anvers, le Stad Antwerpen et la Ville de Liège dans l’arrière-port d’Ostende, d’où ils pouvaient se réfugier à Bruges où à Zeebrugge par les eaux intérieures. Trois malles à aubes furent maintenues à Ostende pour continuer à assurer avec l’Angleterre des relations qui devaient, à tout prix, être maintenues jusqu’à la limite extrême ; les deux autres furent également dirigées sur Anvers.

   Durant la période du 4 août au 14 octobre 1914, et notamment au cours du siège d’Anvers, nos paquebots furent chargés de missions de confiance : transport de matériel, de soldats, de blessés et de malades, pour l’armée belge, coopération au débarquement et à l’embarquement de troupes françaises et britanniques, transport des fonds et de l’encaisse métallique de la Banque Nationale. Ce sont encore nos malles qui conduisirent en Angleterre S.M. la Reine et les Enfants Royaux, ainsi que les ministres d’Etat qui partirent, le 31 août, pour les Etats-Unis. Enfin, quelques jours avant la chute d’Anvers, nos malles à turbines transportèrent de cette ville à Ostende le corps diplomatique, les services gouvernementaux et de nombreux fugitifs.

   L’évacuation d’Ostende commença le 10 octobre et dura cinq jours ; les paquebots effectuèrent à cette occasion un service extrêmement intense, emportant des milliers de passagers, de blessés, de malades, de militaires vers l’Angleterre où le nord de la France ; le 13 et 14 octobre, ils embarquèrent, en destination du Havre, le gouvernement, le corps diplomatique et une partie du personnel des ministères.

   Du 19 août au 14 octobre, nos malles-poste ont embarqué à Ostende pour Folkestone 48.683 passagers.

   Aucun de nos paquebots ne tomba entre les mains de l’ennemi.

   Pendant la guerre, toutes nos malles-poste furent mises successivement à la disposition de l’Amirauté britannique pour coopérer aux transports militaires : les cinq malles à turbines furent transformées en navires-hôpitaux et utilisées spécialement pour conduire en Angleterre des malades et des blessés ; les malles à aubes servirent au transport des troupes. Durant la période du 21 septembre 1915 au 31 décembre 1918, nos paquebots accomplirent, pour le compte des armées alliées, 3.604 voyages entre les ports français et anglais de la Manche, transportant 500.365 blessés ou malades et 1.661.952 hommes de troupes.

   Ces voyages présentaient cependant de sérieux dangers, car les mines mouillées ou dérivantes abondaient dans la partie méridionale de la mer du Nord et dans la Manche, où les sous-marins ennemis faisaient de fréquentes incursions. Mais il n’y eut, de ce chef, aucune perte, ni aucun accident grave à déplorer. Nos paquebots étaient d’ailleurs camouflés et ils étaient protégés, durant leurs voyages, par des navires des flottes alliées. Après la fin des hostilités, quelques-unes de nos malles participèrent au rapatriement des troupes britanniques démobilisées et, au cours de 436 nouvelles traversées, transportèrent encore 27.835 blessés et 335.688 soldats.

   En résumé, plus de 4.000 voyages ont été effectués et plus de 2.500.000 hommes ont été transportés par les paquebots de l’Etat belge. On peut donc dire que ceux-ci ont apporté une aide précieuse à la tâche énorme accomplie par les Alliés et il convient de signaler ici que leurs états-majors et leurs équipages ont, au même titre que nos soldats, fait preuve de dévouement et d’abnégation dans l’accomplissement de leurs devoirs.

   Rappelons enfin ici que pour rentrer en Angleterre, après l’armistice, le maréchal Sir Douglas Haig, accompagné de ses généraux, choisit le paquebot belge Jan Breydel, à bord duquel il traversa le Pas-de-Calais via Boulogne-Douvres, ce qui marque suffisamment que les malles de la ligne Ostende-Douvres jouissaient d’une réputation de tout premier ordre auprès des autorités britanniques.

   A Ostende, tous les ouvrages d’art et installations nécessaires à l’exploitation de la ligne Ostende-Douvres avaient été détruits ou dévastés par les Allemands, qui en outre, avaient semé d’épaves le chenal et le port. Les différents services intéressés se mirent énergiquement à l’œuvre pour rétablir promptement la navigation et moins de deux mois après la signature de l’armistice, c'est-à-dire le 18 janvier 1919, le paquebot à turbines Ville de Liège faisait sa rentrée triomphale à Ostende, ramenant au pays un premier et important contingent d’exilés. Ce fut une réception délirante, où la joie se mêlait à l’émotion d’une foule impatiente de revoir des parents ou des amis.

   Dès ce jour, les relations régulières entre la Belgique et l’Angleterre via Ostende-Douvres étaient rétablies. Toutefois, dans les premiers temps, à cause des épaves et de l’envasement du chenal, on ne put assurer que quatre ou cinq voyages par semaine dans chaque direction : mais à partir du 16 juin 1919, il y eut un départ et une arrivée par jour à heures fixes, ce qui permit au chemin de fer de rétablir des correspondances directes et rapides avec Londres. Le 1e mai 1920 fut réorganisé le deuxième service entre Ostende et Douvres ; depuis cette date, il y eut donc deux services journaliers, reliant la Belgique à l’Angleterre, et notre ligne nationale à immédiatement reconquis sa vogue d’avant guerre. En effet, pour chacune des années 1920 et 1921, nos malles ont transporté plus de 260.000 passagers, alors que le chiffre antérieur le plus élevé, celui de l’année 1913, n’atteignit que 254.000 voyageurs.

   Ce succès est d’ailleurs parfaitement justifié ; d’abord par les qualités nautiques remarquables de nos paquebots, qui sont des navires à turbines à trois hélices, équipés d’une façon moderne (éclairage électrique, télégraphie sans fil, moyens de sauvetage perfectionnés, etc.) et possédant tout le confort désirable ; ensuite parce que la ligne Ostende-Douvres constitue la route la plus rapide et la plus économique pour nos relations avec la Grande-Bretagne.

   Un paquebot à turbines, destiné à remplacer une des malles à aubes, est en construction dans les chantiers de la Société Cockerill, à Hoboken, et l’on escompte qu’il pourra entrer en ligne en septembre prochain. Il sera du même type que les malles-poste Jan Breydel, Pieter De Coninck et Princesse Elisabeth, qui ont si puissamment contribué au succès de notre ligne de navigation sur l’Angleterre ; il présentera toutefois la particularité de pouvoir utiliser l’huile, aussi bien que le charbon, pour l’alimentation de ses chaudières, ce qui peut être considéré comme une heureuse innovation au point de vue d’une exploitation économique du navire.       

Complément d’information sur la Malle « Léopold II » par Dominique Henrard – Gestionnaire du Patrimoine de Marine au Musée Royal de L’Armée.

Envoyé par Jean Godefroid

 

En 1914, notre pays disposait de 13 malles, dont dix en service actif, gérées par l’Administration de la Marine. A heures fixes, elles assuraient la liaison régulière entre Ostende et Douvres. Il s’agissait de :

-       cinq navires à aubes : Léopold II (comme sur deux de vos photos) ; Marie Henriette ; Princesse Clémentine

                                        (I) ; Princesse Henriette et Rapide.

-       cinq paquebots à turbines : Jan Breydel ; Pieter de Coninck ; Princesse

                                                 Elisabeth ; Stad Antwerpen et Ville de Liège    


-       et de trois unités désarmées : La Flandre ; Léopold I et Princesse Joséphine.

Malle « LEOPOLD II » 

Ton. Br : 1.376  -  798 t.j.n.
Lancé le 22 décembre 1892 aux chantiers William Denny & Brothers à Dumbarton (G.B.). En service d’avril 1893 à 1920.

Du 1er août au 7 octobre 1914 : trafic normal avec passagers entre Ostende et Douvres, puis Folkestone lorsque ce dernier port fut fermé pour le trafic civil.
Le 8 octobre 1914 : évacue des réfugiés d’Anvers sur Ostende.
Du 10 au 14 octobre 1914 : prend part à l’évacuation de réfugiés d’Ostende vers la France et la Grande Bretagne.
Le 17 octobre 1914 : quitte définitivement Ostende pour Dunkerque.
Du 18 octobre au 10 mars 1915 : transporte des blessés du Front vers Le Havre et retour avec des munitions.
Du 9 septembre 1915 au 18 décembre : hôpital stationnaire à Calais.
De janvier 1916 au 18 décembre 1918 : prêté aux Anglais pour le transport de troupes entre la France et l’Angleterre.
Du 1 janvier 1919 à avril 1920 : rapatriement des troupes anglaises.

Cédé à l’Administration de la Marine Britannique en 1920 en échange des bateaux-pilotes n° 4 et 5. Vendu en mars 1922 à un chantier de démolition belge qui le revend à son tour à une société allemande l’année suivante. Au cours du transfert, ce navire s’échoua le 24 octobre 1924 dans les eaux allemandes, mais  fut remis à flot et finalement démoli en 1925.

  

 



[1] Extrait  du Bulletin Officiel du Touring-Club de Belgique du 1e mai 1922.

  Clichés du « Service de Presse et de Publicité du Ministère des Chemins de fer ».



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