Le sort des enfants, de toute nationalité, dans la guerre.
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Petit Jean, l’enfant adoptif des Zouaves. Petit Jean est âgé de 14 ans, il a perdu sa famille au cours de la tourmente qui à secoué le Nord au moment de l’occupation prussienne. Un régiment de Zouaves l’a adopté et maintenant, Petit Jean fait le coup de feu aux côtés de ses grands camarades.
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Un soldat russe de 15 ans fait prisonnier de guerre.
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Colonie d'enfants belges hospitalisés chez M. Maxton, boulevard Victor-Hugo à Calais.
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Une visite des médecins Suisses à Holzminden. Distribution de douceurs aux enfants. (Le Miroir 1918)
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Une visite des médecins Suisses à Holzminden. La mission sort d’une baraque. (Le Miroir 1918)
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A Wisques – L’orphelinat. (collection B. de Moreau)
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A Wisques – L’orphelinat. (collection B. de Moreau)
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A Wisques – L’orphelinat. (collection B. de Moreau)
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Bébé trouvé dans la cave d’une maison bombardée à Dixmude, élevé dans les tranchées par nos soldats belges et baptisé Albert de l’Yser 1914.
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Un petit Français que des Prussiens allaient fusiller en compagnie de mineurs et d’un sergent blessé fut sommé par le capitaine allemand de prendre un fusil et de tirer sur le sergent s’il voulait avoir la vie sauve. Vivement le gamin épaula et visa le sergent mais soudain retourna l’arme vers le capitaine.
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Au cimetière d’Adinkerke. (photo Dr Loodts)
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Dix-sept ans et demi, un jeune sergent !
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D’après le témoignage de la
comtesse van den Steen
Durant les bombardements des villages proches du front ou durant leur fuite éperdue vers l’arrière, des centaines d’enfants se retrouvèrent orphelins ou tout simplement perdus.
Voici quelques exemples des circonstances dramatiques dans lesquelles furent retrouvés plusieurs de ces enfants.
Colonie d'enfants belges hospitalisés chez M. Maxton, boulevard Victor-Hugo à Calais.
Ypres est devenue après de terribles combats une ville morte. En mai 1915, il n’y a plus d’ âmes qui vivent
sauf dans les caves aux soupiraux aveuglés par les sacs de sable, où quelques tommies gardent la ville. Et ces tommies, au petit jour, entendent qu’on rit
et qu’on chante de l’autre côté des sacs. Ils risquent un œil, et que voient-ils ? Une dizaine de bambins esseulés se sont regroupés et jouent…Les soldats
veulent mettre les enfants à l’abri mais les allemands en face ne leur en laissent pas l’occasion :un obus tombe au milieu des enfants ne laissant que quelques
enfants en vie. Les soldats emmènent les survivants et les corps mutilés à l’hôpital de
Poperinghe, car le poste de secours le plus proche, celui du Sacré-Cœur avec les docteurs Goodhall et Thomson, les bonnes sœurs et Lilly Van der Noot a été évacué.
Le courageux Curé de Saint-Pierre a trouvé au fond d’une cave une petite fille de quatre ans.
Un des Quaker de l’hôpital a rencontré aux premières lignes des soldats en train d’enterrer un nouveau-né. Au moment où ils le déposaient dans la fosse, il se mit à miauler comme un chat malade.
A la crèche, on lui prodigua des soins qui le firent vivre encore pendant six semaines. Puis, il mourut pour de bon. Quand on voulut l’enterrer, le maire réclama son état-civil.
Naturellement on ne pouvait lui fournir et le permis d’inhumer fut refusé pendant bien des jours. Ainsi cet enfant après avoir manqué d’être enterré vivant, faillit ne pas l’être quand il fut mort…
Quand les Britanniques prirent Wytschaete (avril 18), les Allemands s’enfuirent et quand les tommies pénétrèrent dans leurs tranchées abandonnées,
ils virent pour les accueillir deux bébés de deux ans, garçon et fille qui semblaient être des jumeaux. Les infirmiers du 62° Clearing Station évacuèrent ensuite les enfants à l’hôpital de
Poperinghe Longtemps Charles et Marie-José sont restés dans la crèche. Aux annonces mises dans les journaux pour rechercher leurs parents, des quantités de lettres répondirent.
Chacun réclamait des enfants perdus, d’autres demandaient d’adopter les jumeaux. Il fallait user de la prudence et ce fut sage, car après bien des mois, un ménage réfugié dans le
Midi de la France écrivit. On envoya à ces gens les photos des trente enfants de la crèche et sans hésitations ils indiquèrent les jumeaux.
On vous laisse imaginer la joie des parents quand ils vinrent rechercher leurs deux petits qu’ils avaient confiés, lors de leur fuite, à une vieille dame des environs de
Wytschaete, et dont ils n’avaient jamais plu entendu parler.
Toujours durant la bataille du mont Kemmel, un autre bébé fut un véritable miraculé. Deux infirmières de l’hôpital Mesdemoiselles Cuylits et
Dardenne, sont envoyées porter secours aux villageois des villages de Westoutre et d’Hooogegraef. Le lieutenant Joe de Prêt et le comte Max de Lalaing les appellent.
Un obus vient de tomber sur une petite maison. Le lieutenant est entré dans la maisonnette et aperçut les corps sans vie des grands-parents.
Quand à la jeune femme de la maison, son corps excepté la tête disparaissait dans les
plâtras enchevêtrés. Le lieutenant l’a prise par les épaules, il a tiré…il a tiré la tête et les épaules seulement …le corps était coupé en deux. Comme il laissait retomber
son fardeau un éclat de rire est parti en biais du coin de la chambre. Là abrité par une grosse poutre, un mioche blond riait aux anges. Des bras du lieutenant, le poupon
est passé dans ceux des infirmières. On l’a appelé
Joe, comme son sauveur. Ce n’est pas son vrai nom, mais il a gardé celui-là. Joe a pris place à la crèche. Quand la crèche a été dissoute, Joe a trouvé une protectrice et
un carnet de caisse d’épargne, ce qui lui a permis d’entamer des études au collège..
Les enfants retrouvés trouvèrent réconfort à la crèche de l’hôpital de Poperinghe dirigé par la comtesse van den Steen. Les enfants de plus de quatre ans furent de là
expédiés vers l’arrière par trams et trains spéciaux avec une étiquette portant leur nom et leur numéro d’ordre
cousue sur la poitrine. Quant aux enfants de moins de quatre ans,
ils durent au grand désarroi de la comtesse van der Steen rester sur place. Heureusement pour eux, le secours vint d’abord sous la forme de trois infirmières
américaines : Mrs Wood et les deux demoiselles
Upton, puis sous forme d’argent, de vêtements, de nourriture et d’encouragements. Les bébés purent alors être évacués à
Wisques, sous les toits du vieux château puis à Caestre dans un campement de longues baraques de bois. Chaque bébé avait son berceau d’osier, son biberon, son petit pot,
son menu trousseau, sa poupée. La baronne de Coninck menait ce royaume en miniature.
Le 12 avril 1918, à quatre heures du matin, la crèche est prévenue de l’avance des Allemands sur
Caestre. Il faut fuir. Mais où se rendre ? On téléphone à la Reine et c’est la Reine elle-même qui avec le général
Rouquerol, chef de la mission française organise l’évacuation..
Pas un instant à perdre, de Poperinghe, des ambulances avec des infirmières partent à toute vitesse. Chaque bébé est ficelé dans sa bercelonnette avec sont fourniment.
Les berceaux sont ensuite serrés dans les camions et on se sauve en direction de Saint-Omer. Il était temps ; à peine le dernier chargement a t-il tourné le coin du camp,
qu’un schrapnell éclate au-dessus des baraques. Les pauvres gosses eurent ensuite les plus grandes difficultés à trouver un gîte. On les logea durant plusieurs nuits dans
un grenier plein de foin et de souris et leurs fidèles infirmières durent donner toute leur mesure de dévouement. Enfin la colonie infantile trouva au château de
Bouvelinghem un asile presque confortable, moitié dans la maison même, moitié dans les chalets démontables parsemés dans le parc.
A l’armistice, le déménagement de France en Belgique se fit grâce à l’aide apportée par l’armée britannique qui prêta un immense lorry (camion). A Lille,
il fallut s’arrêter car les enfants étaient affamés et fatigués. On arrêta la pouponnière ambulante devant un campement américain et l’infirmière qui dirigeait
le convoi s’en fut en ville chercher ce qui était nécessaire. Quand elle revint, le camion était vide. Dans la grande tente du Headquarter Américain, chaque soldat
avait sur les bras un petit Belge auquel il donnait le biberon et les bébés ne criaient plus que de joie. Enfin, une seconde étape les mit à Dilbeek où garçons et
filles eurent depuis le temps de grandir, et de retrouver chacun, un parent, une famille au pays natal.
(1)
Pages de Gloire, Editions Desclée, De Brouwer,1925, page 37 à 44
(2)
La comtesse van den Steen de Jehay fonda l’hôpital militaire et civil de Poperinghe en janvier 1915. au début avec le concours de la Société des Quakers anglais,
le Friend’s Unit, puis avec l’aide d’anciennes infirmières ayant travaillé à l’hôpital St Camille (Bruxelles).L’activité de l’hôpital s’étendait sur toute la zone
belge occupée par l’ Armée Britannique. Outre les civils blessés et malades (en trois mois 428 typhiques hospitalisés et 27.000 injections anti-typhiques faites dans la région),
l’hôpital soigna des soldats anglais et belges, servit d’ambulance au 7° régiment d’artillerie, s’occupa du ravitaillement des réfugiés, établit un service d’évacuation,
effectua les distributions de lait aux enfants et servit d’orphelinat.
La comtesse van den Steen entretint toute sa vie des relations privilégiées avec la reine
Élisabeth.
3)Une infirmière, J. De Launoy a été témoin du départ d’un de ces trains d’enfants :
« Nous entrons à l’hôpital de Poperinghe, et dans la joie verdure du jardin si souvent bombardé j’attends la Comtesse van den Steen. La voilà, souriante, vive, spirituelle comme toujours. II fait bon ici ; mes pauvres nerfs ont besoin de cette détente qui me permettra de reprendre le harnais. Nous allons en auto méditant sur les bienfaits de l’invention des ressorts assister au départ de sept cents enfants flamands évacués vers la France. Nous servons les tartines, la limonade et tâchons de nous rendre utiles. Beaucoup d’enfants sont indifférents, quelques-uns joyeux. Par contre, il y a quelques drames et il faut tâcher d’agir. Les enfants sont vêtus pour le voyage ; au milieu du groupe une fillette de sept ou huit ans sanglote à fendre l’âme. Elle n’est pas
inscrite… en haillons, sale, hirsute, elle se cramponne aux deux petits auxquels elle sert de mère et qui sont désignés pour partir. Leur maman est morte…l’aînée- sa remplaçante de sept ans pousse si loin la conscience de sa responsabilité qu’elle arracherait des larmes aux pierres ! Le petit frère- cinq ans- pleure comme un homme sans cris, les mains crispées, le geste saccadé. La toute petite pleure silencieuse. La maman d’occasion se lamente…Que faire !
Madame van den Steen chez qui j’ai couru, essaie de parlementer et finalement après des luttes et des efforts, la maman en broussaille et « ses petits » qu’elle couve sont embarqués. Elle a passé leurs bras sous les siens et ne les lâche même pas pour entrer dans les trams qui attendent. Quel merveilleux instinct maternel que cette petite ! L’embarquement n’est guère organisé ! enfin ça va tout de même ; les trams s’ébranlent dans le brouhaha. Les enfants qui partent poussent des vivats en agitant leurs mouchoirs et leurs menottes…l’œil extasié de la petite mère se pose sur nous au passage…nous faisons signe….c’est tout ! Les trams ont disparu…A ce moment précis une auto couverte de poussière s’arrête. Un haut gradé chamarré en descend, s’incline cérémonieusement devant
nous… fait quelques pas avec majesté, cherchant quelque chose sur la chaussée vide pendant qu’une petite voix malicieuse à ma droite articule en sourdine : « Et demain on lira dans les journaux du front : « Grâce à l’initiative du colonel X. les enfants furent embarqués dans un ordre parfait…etc. » L’auto repart. Nous rions et rentrons déjeuner. »
(J. De Launoy, Infirmières de guerre, Édition Universelle, Bruxelles,1936, pages 106)
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