Médecins de la Grande Guerre
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En septembre 1914, l'armée belge s'est réfugiée dans la ville fortifiée d' Anvers. Un journaliste américain, Alexander Powell. partagea la vie des civils et militaires Belges dans leur métropole. En 1915, il racontera cette expérience dans un livre "La guerre en Flandre" publié par la Librairie Larousse à Paris. De ce livre est extrait ce témoignage poignant: Aucun historique d' Anvers en état de guerre ne serait complet, sans une mention si brève fût-elle, des boys-scouts, qui constituaient un des traits les plus pittoresques et les plus intéressants de la physionomie de la ville. Je ne vois pas très bien comment la cité eût pu se passer d'eux. Ils étaient toujours en besogne; on les voyait partout, ils faisaient tout. Ils remplissaient les fonctions de messagers, d'huissiers, de guides, d'ordonnances pour officiers d' état-major, de courriers de cabinet. Ils se préposaient à la marche des ascenseurs d'hôtel, se dévouaient dans les hôpitaux, aidaient les réfugiés à trouver nourriture et gîte. Les boys-scouts stationnés dans les divers ministères restaient à leur poste 24 heures d'affilée. Ils dormaient, roulés dans des couvertures de laine sur les planches, prenant leurs repas quand ils le pouvaient, et à leurs propres frais, et se rendant utiles de toutes les manières connues .Quiconque était assez influent pour se procurer une automobile obtenait le secours d'un boy-scout qui prenait place à côté du chauffeur, ouvrait la portière au bon moment, et servait de maître Jacques. Mon boy-scout avait nom Joseph. Il était à peindre avec son sombrero à cocarde couleur cerise, son mantelet vert bouteille et ses bas verts, rabattus par le haut et laissant voir des genoux aussi blancs et aussi bien moulés que ceux d'une femme. A vrai dire je n'avais pas de quoi l'occuper. Si bien que lorsque je ne me trouvais pas dans le véhicule, il s'employait à la manœuvre de l'ascenseur de l' hôtel Saint-Antoine. Joseph se tenait auprès de moi durant l'attaque des Allemands contre Waelhem (1). Nous nous trouvâmes, pendant une heure dans une situation offrant des dangers imprévus, sous un feu continu de schrapnells. J'étais curieux de voir comment ce jouvenceau de 14 ans se comporterait. Tout à coup, il se tourna vers moi, ses yeux noirs étincelant d'envie : "Me permettez-vous de me rapprocher un peu de l'action, monsieur? Je reviendrai vite. Rien que le temps de cueillir un casque allemand!..." Peut-être la bravoure de ces éphèbes à chapeau de mousquetaire, à genoux nus, était-elle celle que facilite l'ignorance du péril, mais elle caractérisait tous les soldats belges. J'ai eu connaissance de quatre petits boy-scouts qui sacrifièrent leur vie à leur patrie. Deux furent renversés et tués par des autos dans Anvers, deux furent fusillés par des troupiers allemands aux environs de Bruxelles, pendant qu'ils tentaient de transporter des dépêches, à travers les lignes ennemies. Un de ces épèbes était devenu si habile en ce genre de mission que le gouvernement l'employait régulièrement pour correspondre avec ses agents à Bruxelles. Ses exploits fourniraient les matériaux d'un émouvant roman d'aventures pour la jeunesse. Il fut décoré par le roi. Transport de blessés. (1) L'auteur décrit aussi dans son livre l'acte de bravoure effectué à Walhem par une dame américaine, Madame Winterbottom: Elle se nommait Madame Winterbottom, native de Boston, et mariée à un officier de l'armée anglaise. Lorsque celui-ci se rendit au front, en France,, sa femme partit pour le front en Belgique, où elle avait amené son auto, conduite par elle-même, et qu'elle mis à la disposition du service d'ambulance anglais. Après que l'artillerie du fort de Waelhem eut été réduite au silence, et que la partie transportable de sa garnison se fut retirée, on avisa le quartier général ambulancier que nombre de soldats, dangereusement blessés, avaient dû être laissés en arrière et périraient s'ils n'étaient pas immédiatement secourus. Pour atteindre le fort, il fallait traverser près de deux milles de terrain fouillé en tout sens par les obus. Avant que personne n'eût eu le temps de comprendre ce qui se passait, une grande voiture grise fila comme une flèche sur la route, montrant la frêle silhouette de Madame Winterbottom, penchée sur le moteur. Sur le marchepied s'accoudait son chauffeur anglais et, près d'elle, était assis un petit photographe du Kansas, Donald Thompson. Bien que l'air charriât des flocons de fumée blanche, pareils à des boules de laine et émanant de l'explosion des shrapnelles, Thompson me dit, dans la suite, que Madame Winterbottom montra le même imperturbable calme que lorsqu'elle descendait en auto une des paisibles avenues de Boston, tel dimanche matin. Quand le trio atteignit le fort, la pluie d'obus redoubla; mais on emplit l'auto de blessés et Madame Winterbottom regagna les lignes belges avec sa cargaison trempée de sang. |