L'histoire de l'abbé Vandermeulen: un aumônier qui fut dégradé et envoyé comme simple brancardier dans la compagnie disciplinaire belge de l'île de Cézembre.   [article] L’île de Cézembre En venant de St Malo pour mieux situer l’île de Cézembre. Entre les deux guerres, l’île et ses barraquements. (Collection W. Winnelinckx) Les barraquements de l'île. Vue aérienne de l’île de Cézembre. L'île de Cézembre vue de la mer. (photo Dr Loodts) Le promontoire de l'île. (photo Dr Loodts) Les escaliers du promontoire avec St Malo à l'arrière plan. (photo Dr Loodts) L’endroit ne pouvait « convenir » que pour une compagnie disciplinaire. (photo Dr Loodts) La plage de l'île. (photo Dr Loodts) Les baraquements actuels de l’île. (photo Dr Loodts) Le phare signalant l’île de Cézembre. (photo Dr Loodts) Vue du restaurant installé dans une des deux baraques de l'île. (photo Dr Loodts) L’île fut un lieu de retraite pour les moines et les ermites. (photo Dr Loodts) Prêtres Belges d'une ambulance automobile

Source: "Aumôniers militaires belges de la guerre 1914 - 1918", J.R. Leconte, Musée Royal de l'Armée et d'Histoire Militaire, Bruxelles, 1969.

Né à Bree le deux mars 1893, brancardier à la colonne d'ambulance de la 3 DA le 3 août 1914. Passé au 4° chasseur à pied le 20 février 1915. Commissionné en qualité d'aumônier adjoint de 2 ° classe le 15 juillet 1916. Adjoint à l'aumônier en chef le 12 octobre 1916. Attaché au 2° R.A.L. le 13 mai 1917, puis au 1° R.A.L. le 31 mai 1917. Commission retirée le 27 août 1917. En congé sans solde le 19 août 1919.

L'abbé Vandermeulen, est sans doute un des seuls aumôniers qui fut dégradé pendant la grande guerre. D'aumônier adjoint de deuxième classe, il redevint simple brancardier et comme si cela ne suffisait pas, il  fut muté à la compagnie de discipline de l' île de Cézembre (1).Voici le motif de sa punition qui fut publié à l'ordre du jour de l'armée du 27 août 1917.

1) avoir répandu au front un journal contenant des articles tendancieux, de nature à porter atteinte aux institutions de l'État Belge et à nuire à la bonne entente qui doit exister entre tous les membres de l'Armée.

2) avoir ainsi permis à l'oppresseur de notre pays, qui s'efforce d'y semer la zizanie et les dissentiments entre Belges, de se servir de ces articles foncièrement  antipatriotiques pour les insérer dans un journal flamand publié sous l'inspiration de l'autorité allemande dans un camp de prisonniers flamands.

Prêtres Belges d'une ambulance automobile

Le motif de la punition est assez inattendu pour un homme ayant la croix de guerre avec deux palmes, la médaille de Saint-Georges de 1° classe, la croix de l' Yser, la médaille du volontaire combattant, la croix de feu.

Th. Luykx dans son ouvrage "Politieke geschiedenis van België van 1789 tot heden" (Brussel-Amsterdam, 1964) explique ainsi la punition de Vandermeulen: "hij had die straf opgelopen wegens een artikel over "de Raad van Vlaanderen" verschenen in het "Limburgsh Studentenblaadje voor Oorlogstijd". Hierin had hij geen principiële goedkeuring van het Activisme gegeven, maar de handelwijze der Activitisten verschoond et de bestaande antithese Vlaanderen-België onderstreept: "Wij zijn eerst Vlaming en dan Belg; Vlaming zijn wij door natuur en van Godwege, Belg zijn wij enkel door een politiek verband".

Dans l'ouvrage de L. Devliegher et L. Schepens: "Front 14/18" (Tielt- Den Haag, 1968), il est dit p. 37: "Van der Meulen werd voorbeldig gestraft. De reactie op deze maatregel was echter zo stevig, dat minister De Ceuninck na drie maanden genoodzaakt werd de aalmoezenier als brancardier over te plaatsen naar St-Lunaire.

A noter qu'après sa punition, Vandermeulen ne donna plus aucun motif de mécontentement et qu'il fut même désigné pour remplir les fonctions d'aumônier à l'hôpital militaire de Villers-le-Sec le 15 juillet 1918.

Conclusion:
Personne aujourd'hui ne peut nier que la société belge était, au début de la Grande Guerre, entre les mains des  francophones. L'abbé Vandermeulen fut un courageux brancardier en même temps sans doute qu'un prêtre intrépide ayant osé concevoir une "autre Belgique" faite de communautés coexistant dans l'égalité. Oui, nous sommes Wallons ou Flamands de par la langue que nous ont apprise nos parents, mais nous sommes  aujourd'hui avant tout des êtres humains persuadés que pour vivre "différents", il est nécessaire de disposer de structures supra communautaires  garantissant à chaque peuple de pouvoir garder sans craintes ses spécificités.       

(1) voici ci-dessous le texte officiel  prévoyant la manière dont les militaires belges condamnés à une mutation dans la compagnie disciplinaire  doivent être transférés dans l'île de Cézembre:

Au G.Q.G. , le 20 août 1915

Paragraphe 4 des O.J.A., N° 376, relatif au transfert à l'île de Cézembre des militaires à incorporer dans la compagnie de discipline.

Le paragraphe 3 des O.J.A. du 28 juillet 1915; (alinéa 5) relatif à la constitution d'une compagnie de discipline, mentionne que les disciplinaires seront conduits à l'Île de Cézembre dès que la décision de leur incorporation dans cette compagnie aura été prise par l'autorité supérieure. Ces voyages étant longs et nécessitant un personnel de conduite, leur nombre doit être réduit au minimum. En conséquence, les mesures suivantes seront appliquées à l'avenir: Tous les hommes désignés pour être incorporés dans la compagnie de discipline seront conduits à la prison de Furnes le 14 de chaque mois; le transfert commencera le 15 et sera assuré par les soins de la gendarmerie.