Médecins de la Grande Guerre

Histoire du Père Emeri Cambier, « Roi du Kasaï », prisonnier pendant trois ans en Allemagne !

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Histoire du Père Emeri Cambier, « Roi du Kasaï », prisonnier pendant trois ans en Allemagne !



Le Père Cambier était un fameux garnement dans son adolescence !

       Interne au collège d’Enghien, il se fait remarquer par un caractère droit mais fort indépendant et espiègle. Défendant les souffres douleurs du Collège, il n’hésite jamais à secourir plus faible que lui, même s’il en coûte d’être puni. Ainsi, le jour où il gifle un « président de table » pour avoir refusé de donner du café à un plus jeune. Emeri est puni de son geste par une punition écrite mais la victime secourue aide son bienfaiteur en « grattant » la moitié de la « colle » tout en imitant l’écriture de son aîné. Le stratagème est découvert et Emeri est convoqué chez le Préfet. Il doit bien avouer l’aide reçue mais ne veut pas dénoncer son petit camarade. La sanction est lourde : la « séquestration » durant un trimestre entier !  Cette peine signifiait qu’il était exclu de tous les loisirs prévus pour les internes. Après deux mois de ce régime, le Principal du collège, le chanoine Deblander, arrêta la punition à la seule condition d’une excuse chez le Préfet mais sans aucune obligation de dénonciation ! 

       Durant ses humanités, Emeri avait eu un moment l’idée de devenir missionnaire comme son professeur, le Père Geluy, en partance pour la Mongolie. Cependant, en fin d’humanités, Emeri, s’était décidé à devenir officier. Avant de présenter l’examen d’entrée à l’Ecole royale Militaire, son frère, curé à Châtelineau, lui conseilla de faire une petite retraite de deux jours. Emeri accepta. Au cours de celle-ci, les projets du jeune homme changèrent de façon radicale au point qu’il revint à sa première vocation.

       Emeri, 17 ans, rentre alors dans la compagnie missionnaire de Scheut, congrégation appelée aussi Congrégation du Cœur Immaculé de Marie[1]. Après un an de philosophie au petit séminaire de Bonne-Espérance suivi de quatre années de théologie et de noviciat à Scheut, Emeri est maintenant prêt à partir en Chine, le terrain de mission de cette congrégation. Cependant, le Roi Léopold II, en 1888, intervint à Rome pour que les missionnaires Scheutistes élargissent leur champ d’action vers le Congo. Ces missionnaires n’eurent alors pas d’autres choix que d’organiser une première expédition vers cette immense contrée, domaine privé du Roi des Belges.



Sur cette carte mentionnant les missions des Sœurs de Charité, on distingue nettement le chemin de fer entre Matadi et Léopoldville passant par Tumba, Thysville et Kisantu mais il ne fut inauguré qu’en 1898. Avant cette date, le trajet se faisait à pied sur la route des caravanes.


Carte du Congo indiquant les Missions des Sœurs de la Charité de Gand et itinéraire suivi par Ste Marie-Godelière dans son voyage de Moanda à Luluabourg

En route pour Léopoldville

       Le 26 août 1888, les quatre premiers missionnaires de la Congrégation de Scheut destinés au Congo, tous issus des anciens du collège St Augustin d’Enghien, s’embarquent  à bord du petit steamer anglais, « l’Africa ». Il s’agit des Pères Huberlant[2], De Backer[3], Geluy[4] et Cambier. Après un voyage de plus d’un mois, le bateau accoste à Banane, le petit port situé à l’endroit où le fleuve Congo se jette dans l’Atlantique. Les quatre missionnaires s’embarquent alors en en Pirogue jusque la mission des pères du St Esprit à Nemlao. C’est un premier contact avec l’Afrique et le dépaysement est total pour les quatre hommes qui visitent la mission ainsi que le village voisin dans lequel se déroule une étrange cérémonie. Les veuves du roi Nemalo décédé depuis plus de deux mois, doivent en effet entretenir le feu dont la fumée épaisse enfume le royal cadavre et cela, jusque l’intronisation de son successeur. Le 21 septembre, les quatre missionnaires arrivent à Boma d’où ils partent pour Matadi. Arrivés à destination, leurs bagages n’ont pas suivi et c’est le P. Cambier, faisant déjà preuve de ses prouesses de pionnier, qui retourne à Goma les chercher !



       Les premiers contacts avec l’Afrique sont très décevants. Par manque de vivres, la marche vers l’intérieur sur la route des caravanes doit être reportée jusqu’au 27 octobre. A cette date, seuls le P. Cambier et Huberlant sont valides. Le duo se met alors en route vers la station de Léopoldville. Celle-ci n’est pas accessible par voie maritime à cause des 32 rapides qui jalonnent le trajet. Il s’agit donc de 24 jours de marche à effectuer avec quelques porteurs en franchissant de multiples obstacles comme la terrible escalade du mont Palaballa. La fièvre s’empare du P. Huberlant, et Emeri, lui-même, va souffrit d’un ulcère au tendon d’Achille. Il faut traverser des marais, une rivière sur deux fragiles troncs puis la rivière Inkissi dans une pirogue qui, d’ailleurs, versera lors de la traversée du P. Huberlant. Les tombes de voyageurs malchanceux côtoient la piste sinistre. Enfin après 400 km de marche, les pionniers arrivent à Léopoldville le 18 novembre. Les deux missionnaires entament un « Te Deum » tant ils ont la sensation d’avoir échappé miraculeusement aux multiples dangers.



A la sortie de Matadi, un monument rappelle la souffrance des porteurs sur la route des caravanes et cela, jusqu’à l’inauguration du chemin de fer Matadi-Léopoldville en 1898.

La fondation de Berghe-Ste-Agathe[5] au confluent du Congo et du Kasaï

        Enfin, quelques jours plus tard, ils peuvent embarquer sur le fleuve Congo qui redevient navigable. Ils arrivent ainsi le 24 novembre au confluent du Congo et du Kasaï pour y établir la mission de Berghe-Sainte-Marie, cela après trois mois de voyage. Le 10 janvier leurs deux compagnons, les P. Gueluy et De Backer, remis de leurs indispositions les rejoignent. Pendant des mois, les missionnaires se contentent d’être des pionniers. Le temps se passe à construire les habitations et à se procurer des vivres sur les marchés indigènes. Il y a aussi des occasions d’acheter des enfants réduits à l’esclavage, ce sera la politique des missionnaires pour peupler leurs missions. De ces enfants, ils en feront des chrétiens, des catéchistes et plus tard, lorsqu’ils se marieront, ils constitueront les premiers foyers chrétiens.

       « J’ai déjà eu trois fois l‘occasion d'acheter de petits esclaves. Au commencement ce marché fait si drôle, si triste effet. Dernièrement je débattais ainsi le prix d’un petit mioche. Les larmes m'en vinrent aux yeux et je faillis me trouver mal. A voir son visage souriant, ses yeux pétillants d’esprit, j'augurais qu’on en ferait un bon petit chrétien. Mais le maître impitoyable en demandait 200 francs. Or, vu l‘état de nos ressources, nous ne pouvons poser un tel précédent, alors surtout qu'aux Bangala et au Kasaï, nous en aurions à volonté pour 5 et 10 francs. Ce n'était point cependant pour les habits du négrillon qu'on le fixait si haut, il était nu, comme la main.» (Lettre envoyée à son frère et datée du 10 février 1889)



Marie-Hilda avec quelques enfants de l’orphelinat de Berghe Ste Marie

       Les seules distractions des Pères sont les parties de chasse ou des évènements inattendus qu’Emeri Cambier raconte avec beaucoup de verve et de talent :

« Je crois devoir vous rassurer à propos d'un petit incident, dont le P. De Backer doit avoir parlé dans une lettre : la renommée grossit tout, et, exagération en exagération, en Belgique, on pourrait bien vous avoir annoncé ma mort. Je vais vous conter l'histoire telle qu'elle est arrivée ... Pendant le souper du 20 février, voilà que notre petit chien sort tout effaré de la chambre du P. De Backer et se précipite hors de la salle commune ayant l'air de se chamailler avec l'une ou l'autre bête que nous ne distinguions pas. Je prends la lampe, je cherche, j’aperçois un serpent long d'un mètre cinquante à deux mètres, attendant paisiblement et avec fierté l'attaque du chien. Prendre le fusil de chasse, y glisser une cartouche, est l'affaire d'un instant pour le P. Gueluy. II tire... mais qu'est-ce qu'un grain de plomb logé dans une anguille ! Le serpent fuit, longeant le mur (si mur il y a) et disparaît aux environs de ma chambre ; on y retourne des pièces de bois, des caisses ; recherches infructueuses ! On contourne ma chambre et nous finissons par découvrir effectivement un serpent. Un coup de bâton l'assomme, une bêche le coupe et... nous allons achever notre repas... Un instant de patience pourtant : en entendant la détonation, les Bangala étaient accourus, et l'un d'eux dans sa course précipitée avait reçu la douce sensation d'un ongle de doigt de pied arraché par une pierre aiguë, contre laquelle il était venu chopper. J'ai hâte donc de retourner à ma chambre, nanti d'une potiche qui me sert de lampion, pour y chercher du linge de pansement ; je me baisse, j’étends le bras ... et ... de derrière la boîte s'élance un serpent qui me mord avec gentillesse au dos de la main droite. Un cri de frayeur m’échappe, vite, je retourne à la salle commune en suçant la blessure (Ciel, quelle amertume que ce venin !) et après avoir injecté de l'ammoniaque, je retourne tranquillement tuer la vilaine bête. Elle l'avait bien gagné ! D'un coup de bêche, j'en fais une division qui tourne à multiplication ; pour nous c'est une soustraction, et celui-ci avec celui-là, cela fait une addition. Ce second serpent était, sans nul doute, celui que nous avions aperçu tout d'abord, et qui, perdu de vue, s'était bel et bien glissé, par la palissade, dans ma chambre, et blotti derrière les caisses, dans un coin. Un léger gonflement de main a été la conséquence de cette morsure, avec quelques éblouissements et battements de cœur. Le lendemain toute trace de l'accident avait disparu. Quant à nos deux braves chiens (un second était venu à la rescousse du premier), ils en ont été quittes pour 4 ou 5 jours d'un aveuglement presque complet ; le serpent cracheur leur avait lancé pas mal de bave dans les yeux. Il va sans dire que ma messe du lendemain a été une messe d'actions de grâce. Ce fait me prouve une fois de plus que le manteau de Marie, notre Mère, nous sert d'égide en toutes circonstances. Figurez-vous donc ce serpent restant inaperçu dans ma chambre, venant s'enrouler la nuit autour de mon bras... rien que d'y penser, dira quelqu’un, me donne le frisson. Mais non, Marie veille sur nous ! ... Ceci s'est passé il y a une quinzaine de jours. Chaque fois que cette histoire me revient, je ressens la douce impuissance de retenir un « Ave Maria » sur mes lèvres pour remercier la Ste Vierge de sa protection. Et vous tous qui m'aimez, si vous voulez me causer un plaisir qui aille au cœur, remerciez Marie pour moi. Je vous embrasse de tout cœur. » (Lettre à sa famille)

La fondation de la mission de Nouvelle-Anvers

       En octobre 1889, le P. Geluy avait choisi chez les Bangalas un site favorable pour y établir, au nord de l’Equateur, une nouvelle mission appelée « Nouvelle-Anvers » Le 6 décembre, les Pères Gambier et Van Ronslé quitte Berghe-Ste-Marie à bord du steamer de la mission française de Brazzaville, le « Léon XIII » piloté par le P. Augouard, futur premier évêque du Congo français. Ils remontent le fleuve et aborde le 20 décembre à l’endroit choisi. Les Bangala ont une réputation de guerriers farouches ayant tenu tête à Stanley. Le 4 janvier, l’habitation provisoire est terminée. La mission des Bangala est donc fondée avec comme chef le P. Cambier. Pendant que le P. Cambier poursuit ses travaux d’installation, son confrère va chercher aux « Falls », (L’endroit deviendra Stanleyville), des enfants orphelins délivrés des marchands d’esclaves. Malheureusement, victimes de mauvais traitement, beaucoup décédèrent peu après leur arrivée. Fin février 1891, le P. Cambier découvre que l’on retient ses marchandises dans un magasin d’Etat. La plupart des caisses en souffrances avaient été laissées à l’humidité et les tonnelets contenant le vin de messe avaient été vidés. Il y avait là acte de malveillance de la part des coloniaux envers les missionnaires. A Nouvel-Anvers, les Pères avaient aussi découvert une population ravagée par la maladie du sommeil. Il fallait de toute urgence avertir Léopold II de l’existence de ces deux problèmes. Le P. Cambier retourna donc en Belgique. Il y signala la situation difficile des populations par de nombreuses conférences et suscita la charité. Pour ce qui est de l’esclavage, il soutint la thèse que le meilleur moyen de supprimer la traite des esclaves était de multiplier les postes de l’Etat pour s’attaquer aux marchands d’hommes tandis que les Missions devaient en recueillir les victimes. Le P. Cambier fut reçu par le Roi et ce dernier envoya les télégrammes nécessaires pour faire cesser les vexations de certains agents dont les missionnaires souffraient. Le Roi exigea même que les charges destinées aux missions partent avant celles de l’Etat. Léopold II tint aussi à contribuer au financement du bateau des missionnaires, le « Notre Dame du perpétuel Secours ». C’est pendant ce séjour en Belgique de trois mois que le P. Cambier recueillit les derniers soupirs de sa maman.

Cambier fonde la mission de Luluabourg-St-Joseph (aussi appelé Mikalayi) mais le P. De Gryse retourne à Moanda

       Rentré au Congo en juin 1891, Emeri est d’abord désigné pour fonder la mission de Moanda tout près du port de Banane. A peine cette mission mise sur pied, le voilà qui regagne Nouvel-Anvers. Son activité est extraordinaire : en un an, il parcourt trois fois la douloureuse route des caravanes entre Matadi et Léopoldville dont le trajet, rappelons-le, consiste en trois semaines de marche. Bientôt, le P. Cambier abandonne Nouvel-Anvers pour s’en aller fonder une mission à Luluabourg avec le P.De Gryse. Le bateau français « Ville de Paris » les embarque mais, le lendemain, doit faire demi-tour car le P. De Gryse est tombé malade. Emeri repart donc seul. Le bateau le mène jusque Luebo d’où, le 5 novembre, il poursuit à pied sa route pour Luluabourg où il arrive le 14 novembre 1891. Le 7 décembre, il établit sa résidence sur les bords d’une rivière à quelques kms du Poste de l’Etat. Le P. De Gryse le rejoint enfin quelques semaines après mais, hélas, ne peut résister au climat et doit retourner sur la côte. Il y restera et remplira les fonctions d’aumônier chez les religieuses de Moanda.



Moanda – Vue d’ensemble de la Mission


Mission des Sœurs de la Charité à Moanda (Bas-Congo)


Orphelinat des Sœurs de la Charité à Moanda

Le P. Cambier, 26 ans, seul pour bâtir la mission de Luluabourg

       A 26 ans, Emeri Cambier se retrouve donc seul dans un pays immense pour conquérir ses âmes. Pendant une année, il vivra là un temps très dur de solitude. Plus tard, il répètera : « Il faut avoir 26 ans pour supporter cela ! Maintenant je ne pourrais plus le faire ! » Puis, se reprenant : « Mais si, si mes Supérieurs me l’ordonnaient, je le ferais encore… »

       Seul et parfois au milieu d’une partie de la population hostile qui avait le désir de le tuer pendant son sommeil ! A la halte d’une nuit, lors d’un voyage, il avait entendu parmi ses porteurs : « Quand il s’endormira, nous le tuerons… »  Le croiriez-vous, expliqua plus tard le missionnaire, ce qui m’a été le plus dur cette nuit, ça a été de lutter contre… le sommeil, un sommeil de plomb qui m’envahissait après 8 heures de marche au soleil d’Afrique ! »

       A la fin d’octobre 1882, la nouvelle mission abritait 305 esclaves rachetés ou libérés. Ce renfort lui avait été donné en grande partie par le lieutenant Doorme qui avait réussi à s’emparer d’un camp d’esclavagistes Bakiokos à trois heures de marche de Luluabourg et cela, avec l’aide de quarante soldats. Ce camp comportait 307 esclaves. Les hommes furent incorporés par le lieutenant tandis que les autres, infirmes, malades, femmes, enfants furent remis au P. Cambier. Le Père Cambier dut désobéir aux instructions qu'il avait reçues, à savoir celles qui prévoyaient qu’il ne pouvait accepter que des jeunes garçons âgés de moins de 14 ans. Sa désobéissance était réfléchie : en acceptant tous les anciens esclaves, le P. Cambier fondait ainsi de véritables communautés chrétiennes. Deux mois après la délivrance des captifs, le P. Cambier pouvait dresser un bilan :

       « Une rue compte déjà 55 habitations et une autre en a 22 ; et 10 sont groupées autour de ma cases. Un grand hangar de 30 m. abrite nos scieurs de long, charpentiers, menuisiers, tourneurs et forgerons. Nous n'avons que quelques haches et machettes ; il faut bien faire des forgerons pour fabriquer ces outils avec de vieux canons de fusils rachetés aux indigènes. La petite scie circulaire, le soufflet de forge, la meule, tout cela est mû par une grande roue actionnée par une courroie fabriquée avec la peau d'un bœuf. J'ai tanné moi-même cette peau avec l'écorce très astringente d'un arbre du pays. »

       Le P. Cambier est toujours seul. Il y fait allusion en terminant cette même lettre :

       « Et moi ... ? Resterai-je seul, seul à six semaines de tout confrère, seul à fonder une Mission nouvelle, seul à nourrir, diriger et instruire (…). Certes non. Dieu sait ce qu'Il fait, son œil me voit perdu au sein du noir continent. Son amour veille sur moi, son bras me défendra. » (Lettre datée du 24 avril 1892)

       Cette solitude dont souffre, malgré lui, l'ardent missionnaire, il ne peut s'empêcher d'en faire part à ses proches, mais toujours sans amertume, allant même jusqu'à terminer sa lettre en badinant :

       « Je suis seul depuis le mois d'avril. Du personnel que j'avais alors, j'ai presque 200 morts, squelettes en arrivant ! Malgré cela, j'ai aujourd'hui 316 esclaves rachetés ou libérés, dont je suis : le directeur d'âmes, le roi, le ministre, le sénateur, le représentant, le gouverneur, le conseiller provincial, le bourgmestre, le gendarme, le conseiller communal, le juge de paix, le garde-champêtre et ... le médecin. Octave (Ndrl : son frère médecin en Belgique) me dit que le soin des malades l'empêche de m'écrire. Il n'en a pas tué 200 en dix mois !!! Depuis trois mois, je n'ai pas été couché une seule fois avant minuit ; même en me couchant à cette heure, il y a des nuits où je dois me lever trois ou quatre fois. C'est pourquoi, depuis que je suis à Luluabourg, je me couche tout habillé. Je ne crois pas avoir passé mon temps à ne rien faire. Il est maintenant 10 h. 1/2 et je compte vous écrire jusque vers 1 heure. Cela me fera 5 heures de repos et demain matin, travail, (… .). Impossible d'écrire le jour. Comment ne suis-je pas malade ? Comment ne suis-je pas mort ? Je n'en sais rien ...

       Si vous saviez, surtout maintenant que je suis seul, avec quel plaisir avec quelle joie je reçois des lettres d'Europe ! Dois-je vous le dire ? Vous me croirez peut-être devenu insensible après quatre ans de Congo. Eh bien, en lisant votre lettre, j'ai pleuré comme un enfant et voilà encore que les larmes me viennent aux paupières. Allons, parbleu, j’ai 27 ans !

       Oui, vous avez beau dire, voilà sept mois que je suis seul. Je suis arrivé avec un demi-approvisionnement. Vous voyez donc quelle a été mon existence ... Mais voilà, je me suis mis à pleurer. « Grand enfant, me suis-je dit après, n'es-tu pas ici pour faire la volonté du Bon Dieu ! » Peu à peu je me suis consolé. Mais, si je continue, je vais vous faire pleurer aussi. Changeons de ton ! (…). (Lettre datée du 16 novembre 1892)



Luluabourg : l’œuvre d’un véritable pionnier

       Un an après, en 1893, le Révérend Père Supérieur Général de la Congrégation de Scheut, vint à Luluabourg accompagné du P. De Deken, et constata les grands progrès de la mission du P. Cambier : 530 catéchumènes, deux villages, celui de Saint-Joseph et celui de Lourdes Notre-Dame... Le Père Supérieur décrit la mission comme une véritable fourmilière. Des cinquante hectares de la mission, six sont occupés par les constructions et de larges routes bien nivelées et bordées d’arbres. Tout le reste est ensemencé. Maintenant, deux grands chefs indigènes réclament la présence des Pères chez eux, notamment le chef Kalaha Kafoumba résidant à quatre jours de la mission ainsi que le grand et puissant chef Kassongo.



Mission St Joseph du Père Cambier

       Devant la réussite de la mission, un renfort est rapidement demandé. En attendant, c’est le supérieur Général lui-même, Mgr Van Aertselaer, qui aide le P. Cambier. Les Sœurs de la charité de Gand arrivent en janvier 1894 pour diriger l’hôpital de fortune qu’il vient de créer. Le Supérieur Général restera plus d’un an et le jour de son départ avoua à Emeri Cambier qu’il était d’abord venu à Luluabourg pour le renvoyer en Belgique pour avoir transgressé les instructions. Et maintenant, il le félicitait de son travail et lui remettait une lettre élogieuse. Emeri sentit que cette lettre flattait trop son égo et, il la déchira et en brûla les morceaux !

Le Père Cambier lutte contre la maladie du sommeil



Hôpital à Luluabourg (Scheut)


Examen des ganglions pour le dépistage de la maladie du sommeil à la mission de Saint-Jean-Baptiste-Lubefu dans le district de Sankuru, presqu’au centre du Congo. Le missionnaire qui a joint à sa vocation d’apôtre, les fonctions de médecin est le P. Pierre Bouvez qui administre à la population

       Le P. Cambier sut se faire aimer des indigènes par la pratique de la médecine. Il possédait la science de soigner grâce à l’enseignement que lui avait donné son frère médecin. On le surnomma bien vite « Tata na biso, Mugangabouka na biso », soit « notre Père, notre Guérisseur ». Depuis 1900, la terrible maladie du sommeil ravageait de nombreuses contrées du Congo. Le P. Cambier fit aménager une île dans laquelle il isola les malades. Une religieuse, deux fois par jour y descendait pour soigner les « dormeurs ». Les religieuses de Gand dont les premières[6] arrivèrent en janvier 1894 furent admirables. Six d’entre elles décédèrent en six ans et le Père Huberlant devait aussi mourir de cette maladie le 24 mars 1893, peu après son retour en Belgique. En 1910, le P. Cambier rentra en Belgique et y intéressa les autorités à la déplorable condition de ses malades. Au mois de septembre, il revint au Kasaï ramenant avec lui, le docteur Monnard. Ce dernier décida alors d’élever un nouvel hôpital en dehors de l’île. C’est le frère Louis qui construisit celui-ci en remettant à plus tard l’achèvement de la nouvelle grande église de Luluabourg. Au 18 octobre 1911, il y avait 518 malades soignés avec le médicament à base d’arsenic, l’atoxyl. Les malades occupent des maisons construites pour eux. Une pompe aspire et refoule l’eau su ruisseau Kibosshe-Milakai jusqu’à l’hôpital à une hauteur de 50 mètres et sur une longueur de 1.200 mètres. Quant à la nourriture de ces malades, tout un personnel est occupé pour acquérir le manioc, le réduire en farine et le pétrir !



Missionnaires de Scheut – Luluabourg-Saint-Joseph – Vue générale

Face aux Batetela en révolte

       A côté de la mission, à quelques km de là, se trouve la station de L’Etat tenu par trois Européens : le commandant Pelzer, le lieutenant Cassart[7] et le commis Lassaux. Les soldats de la station, des Batetela se révoltent et tuent le 4 juillet 1895, le commandant Pelzer. On sait que ce dernier a vraisemblablement suscité lui-même la révolte de ses soldats par ses punitions cruelles qui conduisait souvent à la mort : il infligeait 300 coups de chicotte à des sentinelles surprises en train de dormir !

       Le Père Cambier, averti de la révolte fait évacuer les religieuses et les enfants vers le village d’un chef ami tandis que lui-même reste seul à la mission. Le lieutenant Cassart, blessé se cache dans les bois puis rejoint la mission pour y être soigné. Le Père est décidé à brûler toute la mission si les rebelles l’attaquent. Finalement, les deux blancs avec 400 hommes de la mission quittent avec regrets Luluabourg pour s’enfoncer dans la forêt sur les traces des enfants et des religieuses. Ils arrivent vers minuit chez le chef Kanoa. Le lendemain, à 5 heures du matin, les fugitifs au nombre de 1.200 se remettent en route dans la direction du chef Pania Mutombo. Cambier est maintenant hors d’atteinte des révoltés. Après mille incidents, la colonne harassée et affamée revient à son point de départ, un émissaire ayant averti le Père Cambier que les rebelles s’étaient éloignés sans investir la mission. Restait un obstacle, Ngongo, un chef Lulua, qui avait été malmené auparavant par Cassart, avait profité de la révolte pour prendre sa revanche et comptait retenir prisonnier toute la caravane lorsqu’elle traverserait son village pour regagner la mission. Le Père Cambier prit les devants et alla se présenter à Ngongo, tenant le chef sous la menace de son révolver pendant tout le temps nécessaire à la traversée du village par sa caravane… Quand il jugea les siens à bonne distance, il prit alors congé de « Sa Majesté » en lui souhaitant un au revoir par un pied de nez exécuté dans les règles !



       Mais la révolte continuait à s’étendre et Ngongo se préparait à nouveau à l’offensive. Le 18 juillet, la Mission est attaquée et massacrent dans tout le district 26 blancs. Entretemps, le lieutenant Cassart avait quitté la Mission pour Lusambo afin de quérir l’agent Dufour et 30 soldats Haoussa munis chacun de 30 cartouches. Ngongo divisa ses troupes en deux parties, l’une marchant vers la Mission, l’autre vers le lieutenant Cassart. Devant la Mission, plutôt que d’assister au massacre des religieuses, le P. Cambier s’avança avec son fusil, un « Express rifle », s’agenouilla et entrepris de tirer sur les gens de Ngongo. Un boy lui passait les cartouches au fur et à mesure. Mais à peine avait-il tiré quelques coups que les rebelles s’aperçurent de la puissance énorme de ce fusil de chasse et qu’ils se débandèrent. Un peu plus tard, les hommes du chef Zappo-Zab, allié à la Mission, donnèrent la chasse aux hommes de Ngongo. Le soir ils revinrent chargés des corps de leurs victimes. Ils allumèrent de grands feux pour manger leurs victimes. « Ils avaient dit le Père Cambier été jusqu’à dessiner un grand cercle de têtes coupées dans lesquelles ils avaient planté des bougies qu’ils allumèrent, puis ils se mirent à chanter et danser tout autour ! »

       Grâce au sang-froid du P. Cambier, le soulèvement fut réprimé à Luluabourg mais la rébellion Batetela continua de longues années et ne fut totalement réprimée qu’en 1901. Quant à Ngongo Tshunkenge, le commandant Michaux lui infligea, l’année suivante, une grosse défaite.

       La vie dans la Mission reprit. Le Père Cambier entama la construction d’une tour fortifiée en briques munies de meurtrières dont les dimensions étaient uniques dans la région (correspondance du 13 septembre 1895). Elle était destinée à abriter les religieuses en cas de nouveau danger. Cette tour disparut plus tard lors de la construction de la grande église. Comment après cela ne pas comparer le Père Cambier à une sorte de Templier ? D’ailleurs n’avait-il pas hésité à devenir officier ?

       En tout cas, ses ennemis ne manquaient pas à l’appel et les premiers étaient certainement les vecteurs des maladies tropicales. Le Père Cambier perdit en 12 jours deux de ses six confrères qui étaient venus le seconder. Il avait lui-même aménagé un caveau à la mission dans lequel une niche restait vide et qu’il s’était réservée. Il se fabriqua lui-même un cercueil à sa taille ce qui perturba toute la Mission dont beaucoup de membres vinrent le supplier de ne pas les abandonner !



       A partir de ce moment, l’autorité du P. Cambier devint indiscutable dans tout le Kasaï. Des bruits circulaient que son fusil possédait un pouvoir particulier.

       « Dix-huit ans après, rapporte le P. Cambier, un chef indigène vint à la Mission et m'apporta des cadeaux. Alors, il me demanda si je le reconnaissais. Sur une réponse négative, il me déclara qu’il était un des révoltés de 1895, échappé au massacre. Il me supplia, comme une faveur, de voir le fameux fusil, de le toucher et, enfin, de tirer une fois. Mais le recul était si considérable que ce Noir, qui n'avait jamais eu de pièce semblable entre les mains, tomba à la renverse après avoir tiré. Il se releva, sans mot dire, et prit la fuite à toutes jambes, plus persuadé que jamais que mon fusil était une arme merveilleuse dont j'étais le seul à pouvoir faire usage. »

       Le « rescapé » alla, sans aucun doute, colporter le récit de la scène dans laquelle il venait de jouer un rôle de « victime » !... A noter que le précieux fusil lui fut confisqué quelques années plus tard ! On imagine que le Père Cambier en fut très meurtri !



Missions de Scheut – Kasaï - Cathédrale de Luluabourg St-Joseph

       Le Père Cambier continua d’être un pionnier exceptionnel. Il fonda les missions de Mérode-Salvador et de Thielens-St-Jacques.

       Plus anecdotique est l’élixir qu’il créa, en référence en sa ville natale, « La Flobecquoise ». En se souvenant de sa jeunesse écoulée à l’ombre de la brasserie paternelle, il fabriqua aussi une bière brassée dans une des annexes de la mission. Ses invités étaient dès lors toujours bien accueillis !

       Emeri Cambier atteint le sommet d’une gloire éphémère quand, en raison du formidable développement des missions du Kasaï, celles-ci furent érigées en Préfecture apostolique. Le P. Cambier en fut le premier titulaire et devint dès lors « Monseigneur Cambier »

Fondateur de la première mission du Katanga

       Après avoir vécu des heures héroïques au Kasaï, le Père Cambier va encore se faire remarquer en fondant une des premières missions du Katanga à Ruwe en 1909. Il y arriva au prix de nombreuses difficultés, une hache dans une main, une boussole dans l’autre, faisant confiance comme son grand-oncle Jean Dehoust à Saint Christophe dont la statue était vénérée à Flobecq depuis le XIVè siècle. Jean Dehoust, laissé pour mort lors de la retraite de Russie, se recommanda au Grand Saint et promis d’assister le 25 juillet de chaque année, lors de la ducasse de Flobecq à une messe d’action de grâces. A peine le vœu prononcé, qu’une voiture s’arrêta auprès du moribond étendu dans la neige qui levait un bras dans un dernier appel au secours !

Le Père Cambier, pionnier dans la lutte contre la maladie du sommeil

       Le Père Cambier s’occupa toujours de soigner activement les malades du sommeil. Il profite même d’un séjour en Belgique pour suivre les cours de médecine tropicale. Il fut aussi un des premiers adeptes de la quinine en prévention qu’il prit à la dose de 1 gr par jour et qu’il employa aussi pour traiter la maladie du sommeil. Voici la lettre qu’il adressa au Ministre des Colonies le 27 janvier 1910.

       « J'ai l'honneur de vous remettre le mode de médication de la maladie du sommeil dont il a été question dans une précédente correspondance. A proprement parler, il y a deux méthodes qui m’ont réussi et que j'ai réunies, pour la pratique, en une seule. Comme vous le remarquerez, ces médicaments ne sont point nouveaux ; la manière seule de les employer est nouvelle.

       La première consiste dans l’'administration de quinine, n'importe sous quelle forme, à très haute dose et de façon continue ... L'autre médication est celle de la liqueur de Fowler (dérivé d’arsenic comme l’atoxil) administrée à forte dose et sans continuité. »

       Et le missionnaire de décrire, avec un luxe et une précision de détails, les avantages et les inconvénients de ces deux manières de traiter le fléau. Il signale également les expériences qu'il a pu réaliser à ce sujet. Emile Vandervelde fit reproduire dans le journal « Le Peuple » du dimanche 27 mars 1910 l’appel touchant du missionnaire :

       «Suivez-moi, je vous en conjure, dans l'un ou l'autre lazaret que la charité catholique a élevés pour recueillir les dormeurs. Il est huit heures du matin. Déjà ceux qui sont encore les plus robustes parmi ces infortunés se sont traînés au dehors, pour réchauffer sous les caresses du soleil leurs membres engourdis par la nuit froide et brumeuse de la saison sèche.

       D'aucuns ont gagné le tronc d'un arbre couché par terre, s'y sont assis, et se sont endormis bientôt après. Les uns s'étant posés la tête en arrière finissent par perdre l'équilibre et tombent à la renverse. Les autres, ployés d’abord en avant, leurs mains prenant appui sur les genoux, s'effondrent bientôt, face première, sur le sol. » Quelques malades de la même catégorie se sont adossés au mur, à quelque pieu de la palissade, et là, les genoux à demi pliés, les bras ballants, les yeux ouverts, ils dorment debout, jusqu’à ce que la fatigue les fasse s'écrouler, sans leur arracher pourtant ni plainte, ni gémissement. Si on négligeait alors de les éveiller, ils resteraient sur place et seraient, comme tant d'autres malheureux chassés ou perdus dans la brousse, foudroyés par le soleil de midi.

       D'autres malades déjà moins robustes recherchent plus avidement encore la chaleur du soleil naissant. Mais n'étant plus maîtres de leur équilibre, ils font un violent effort pour avancer de quelques pas, et vont s’abattre de tout leur poids contre la muraille, une palissade, la terre nue, voire même contre d'autres malades. » Maintes fois, quand nous nous rendons au lazaret pour la visite du matin, nous trouvons la porte obstruée par un monceau d'hommes impuissants. À se relever. Un premier malheureux s'étant échoué sur le seuil, d'autres ont buté contre l'obstacle, et là ont formé une lamentable grappe de corps entrelacés, tandis que des gémissements, des pleurs convulsifs, des cris de rage vont porter au loin les accents d’une détresse aux abois.

       Sommes-nous au dernier terme de la misère humaine ? Pas encore. Les malheureux que je vous présente maintenant sont-ils encore vivants ? L'œil pourrait s'y tromper. Voyez ces os saillants comme ceux d’un squelette ensaché dans la peau ; ces yeux fixes, exorbités ; ces narines large ouvertes pour aspirer un peu d'air ; ces lèvres encroûtées, agglutinées par le feu de la fièvre ; cette bouche gangrenée d'où s’échappe une salive jaunâtre coulant en filets sur la poitrine décharnée : ce sont nos dormeurs de la troisième catégorie. Et maintenant écoutez encore. J’ai abordé de pauvres créatures portant des plaies hideuses sur les membres. Par moments un mouvement convulsif anime ces épaves humaines dont les bras voudraient s'agiter pour éloigner une nuée de mouches s’acharnant sur des chairs putrides. Ils feront effort pour se redresser et leurs dents desserrées laisseront passer deux mots : « Blessure, feu » ; et à bout de forces ces malades s’effondreront à nouveau sur la natte. Avez-vous compris ? C'est l'histoire de centaines et de centaines de malheureux qui, sans le savoir, ont poussé un pied, une jambe, un bras dans le feu qui brûle au milieu de la case, et qui, vu leur faiblesse, ne sont pas parvenus à le retirer. Et c'est dans cette effroyable position qu’on les retrouve, parfois après des heures, parfois après toute une nuit, les membres atteints ne présentant plus que des chairs noircies boursouflées, cuites jusqu'aux os. L'agonie de ces pauvres dormeurs est souvent bien longue. Pour le grand nombre, le râle persiste pendant quatre et cinq jours. Dès qu’ils se trouvent en cet état, on les dépose sur une natte. Le lendemain on les retrouve exactement dans la même position que la veille, sauf que la bouche est plus écumeuse, les yeux plus vitreux, les mains plus crispées, et la tête plus rejetée en arrière par la courbe de l'épine dorsale ployée comme un arc. » Il n’est pas rare qu'une caravane de fourmis s'acharne la nuit sur ces cadavres vivants, et, de leurs mandibules d’acier, creuse de larges sillons dans les chairs. La victime impuissante ne bouge pas. Si je parle encore des rats et autres animaux qui s'attaquent aux membres inférieurs, c'est pour donner une idée exacte de l'effroyable torture en durée par ces infortunés, alors que leur intelligence garde encore toute sa lucidité. A ces spectacles dignes de l'enfer de Dante, vous croyez qu'on ne peut rien ajouter - Détrompez-vous. Entendez ces cris de joie féroce, ces ricanements d'hyènes attroupées autour d’un cadavre dont elles fouillent les entrailles. C'est effroyable. La maladie du sommeil produit chez certains individus la folie furieuse. Il faut enchaîner ces malheureux qui gesticulent frénétiquement et qui n'ont conservé de l'homme que ce qu'il en faut pour dépasser la brute en cruauté. Nous trouvâmes un jour un dormeur dont l'un de ces déments avait fracassé le crâne. Un autre, mutilant un cadavre en décomposition, avait découpé une partie du mollet et dévoré cette chair nauséabonde.

       Descendons encore un degré, le dernier. De petits mioches encore à la mamelle, s’efforcent de puiser au sein de leur mère, dormeuse agonisante, un lait tari depuis longtemps. Aussi c'est à peine si l'on distingue sur le giron de la femme l'enfant émacié jusqu'à l'invraisemblance. Et tout à l'heure, quand la mort aura fini son œuvre nous retrouverons le pauvret enchaîné sur une poitrine déjà glacée, enchaîné dans les bras rigides de la mère qui semble avoir voulu, par une suprême étreinte, le garder avec elle dans la tombe. » Mais direz-vous, votre lazaret n 'a donc que des horreurs, et les plus épouvantables d'entre toutes ! Maintes fois, nous y avons conduit des voyageurs et des agents de l’Etat. Après la visite, ces messieurs n'ont jamais manqué d'ajouter à leurs remerciements : « Père, je suis content d'avoir vu ; mais, quant à revenir, jamais ». Et cependant, le spectacle le plus sublime s'y trouve aussi, spectacle bien fait pour réjouir le regard et remonter le cœur. Car, de même que la sombre nuit s'efface devant l'aurore, les misères si lamentables que j'ai tâché de décrire, disparaissent devant l'héroïque dévouement de la Sœur de Charité de Gand, qui, sourire aux lèvres et crucifix sur la poitrine, se donne tout entière à ces rebuts infects de l'espèce humaine. Et ces pauvres épaves de la souffrance savent apprécier l'abnégation compatissante de l'ange de la charité, et du plus loin qu'elles l'aperçoivent, elles lui crient : « Baba, moyo » : « Bonjour mère ».

       J'ai parlé de malheureux recueillis dans nos pauvres asiles ; mais il est des centaines, des milliers d'autres. La maladie du sommeil décime les villages, dépeuple les contrées, est en train d'anéantir des races entières. Et nous pourrions ne pas crier à nos compatriotes, criés au monde, à l'humanité tout entière :

       « Pitié pour ces malheureux. Pitié, et sans tarder ». Non, jamais. Ces hommes sont nos frères, et nous devons plaider leur cause, nous devons faire connaître leurs affreuses souffrances au monde entier, car le monde entier a le devoir de compatir à pareille infortune. Les dormeurs sont, au plus haut degré, dignes de notre miséricordieuse compassion. Non seulement privés de tout ce qui peut rendre la vie, sinon attrayante, du moins supportable, ils sont encore accablés de maux, de souffrances et de misères. Rebutés de leurs propres foyers, ils sont chassés dans la brousse à coups de trique, pour aller y périr de faim et d'inanition. La maladie du sommeil ne connaît ni limites, ni faveurs ; elle n’épargne ni sexe, ni âge ; elle fauche toujours et est bien autrement meurtrière que les plus épouvantables catastrophes. Sans parents et sans amis, le dormeur épuisé par le sommeil se meurt là où il tombe. Et sur ce corps décharné, mais encore vivant, les chiques, les mouches et autres insectes, assoiffés de sang grouillent et déchirent de sorte que leur victime devient bientôt un moignon informe, fait d’horreur et de souffrance. Eh bien, ces malheureux entre tous les malheureux du globe, n'ont pas encore un seul hôpital convenable, et c'est pour édifier cet hôpital indispensable entre tous, pour le doter convenablement que je prie et supplie la presse du monde entier de reproduire le présent appel à la charité universelle. Si le Congo réserve aux peuples des richesses, ces peuples ont cependant avant tout le devoir de s'intéresser au sort malheureux, souverainement malheureux, de leurs frères du Congo. Il nous faut un hôpital digne de ce nom, digne de ces innombrables victimes, digne de notre civilisation. Nos Sœurs de Charité s'y dévoueront, comme elles l'ont fait jusqu’à présent dans d'infects lazarets. Une religieuse, atteinte de la maladie du sommeil au Kasaï est morte à Gand. Une autre est malade à Saint-Trudon (Kasaï). Et cependant, que nous demandions autant de religieuses qu'il faudra nous les obtiendrons.

       Nos Pères leur prêteront le concours le plus généreux. Nos missionnaires, prêtres et frères coadjuteurs, construiront eux-mêmes cet hôpital indispensable entre tous ; eux-mêmes mettront la main à la pâte et deviendront ouvriers de chantiers une fois de plus.

       Donnez-nous les ressources suffisantes pour soigner convenablement les malheureux dormeurs. » Si vous pouvez donner pour eux, faites-le, je vous en conjure au nom du Christ.  Je vous remercie d’'avance en leur nom et au mien. »

Signé : Emeri CAMBIER, missionnaire de Scheut, Préfet Apostolique du Haut Kasaï (Congo).



Chapelle de l’hôpital de Luluabourg (Scheut)

       Le P. Cambier vouera une admiration sans bornes aux religieuses belges qui consacrèrent leur vie à soigner les malades souffrant de cette terrible maladie. Voilà ce qu’il raconta à propos d’une d’entre elles.

       « En 1908, m'étant rendu en visite à, la Mission de Saint-Trudon, près de Lusambo, le docteur du Poste m'avait dit que la Sœur qui soignait les malades atteints de la maladie du sommeil, étant malade elle-même, devait rentrer en Belgique. Le lendemain matin, je me promenais dans une des allées de la Mission, lorsqu'arrive cette Sœur qui se met à genoux devant moi. Je n'emploie point d’'hyperbole ou figure de rhétorique quelconque : Cette sœur se met à genoux devant moi.

       - Mon Père, me dit-elle, le docteur vous a dit que je dois rentrer en Belgique mais je vous en supplie, n’en faites rien. Laisser moi mourir près de mes Noirs ...

       Et la pauvre se mit à pleurer, si bien  que (Ai-je bien fait ?  Ai-je mal fait ?) je n'eus pas la force d’exiger son départ... Quelques mois après, elle mourut, près de ses malades. Quel est son nom ? Je l’ai oublié. Où est sa tombe ? Je ne le sais plus. Et cela aussi, Messieurs, c'est de la folie, comme la folie de votre héroïsme. C'est de la folie, mais c'est la folie de la Croix, la folie de la Charité. Depuis lors, je n 'ai plus jamais rencontré une Sœur sans la saluer bien bas et sans que ce souvenir me revienne à la tête et au cœur. » (Discours prononcé par le P. Cambier au monument du cinquantenaire, le 24 juin 1928)



Sœur de la charité à Luluabourg


Groupe de Sœurs de Luluabourg

Honneurs et disgrâces pour le Père Cambier

       Le 30 septembre 1910, il reçoit un coup de fusil de chasse dans le mollet droit en pénétrant dans le magasin. Quelques semaines auparavant, des voleurs s’étaient introduits dans le magasin et pour les prendre on avait installé un piège à l’entrée. Une corde tendue devait faire tomber le chien d’un fusil de chasse chargé d’une cartouche « double zéro ». Tout le monde croyait le P. Cambier était au courant mais ce n’était pas le cas ! On retire du mollet du Père 14 plomb mais à peu près 40 restèrent dans la jambe.



P. Bracq – R. P. Cambier – P. Vandermolen

       Le 27 août 1911 ; Luluabourg est en fête : le Préfet apostolique vient inaugurer la nouvelle église. Le 20 novembre 1912, les 25 ans de prêtrise du missionnaire sont fêtés. Le Père Cambier, cependant, de par le succès de son œuvre, de par son indépendance, de par son originalité, attire bien sûr la jalousie. Il a construit de sa main la première maison en briques de Luluabourg et l’habite. Il distillait de l’alcool et alla jusqu’à essayer de former une milice armée dans sa Mission pour prévenir toute nouvelle incursion. Cambier possède aussi, de par son ancienneté inégalée au Kasaï, une grosse collection de dossiers sur les errements de nombre d’agents. C’est ainsi qu’on relève qu’en 1904, il fait une déposition devant l’agent de l’Etat Decock et porte plainte contre de nombreux abus de l’Etat, en y incluant le meurtre récent de prisonnier par deux soldats. Les cadavres ayant été abandonnés sur la route et les soldats assurés de l’impunité pour les meurtres, vols, abus divers commis dans les villages. Sa personnalité hors du commun lui vaut une terrible campagne de dénigrement dont le comble fut les bruits qu’on fit courir sur Niemba Johanna, première chrétienne de la Mission, qui fut le bras droit du père Cambier et gérait les achats de la mission. Des bruits accusaient, en 1911-1912, le missionnaire d’avoir eu un enfant de cette femme et de lui avoir ordonné l’infanticide. Une instruction fut menée par le Procureur du Roi, un nommé Munck, de nationalité norvégienne mais elle déboucha en 1913 sur un non-lieu, les cheminements de la rumeur accusatrice, ayant été minutieusement reconstitués. Tout cela, rappelons-le dans un contexte bien particuliers d’une Belgique où libéraux et socialistes mènent la guerre contre le parti catholique en s’attaquant notamment aux Missions du Congo. On accusait aussi les missions de monopoliser l’enseignement. En 1909, le leader socialiste Emile Vandervelde lançait sa première attaque contre les missions sur ce thème en estimant qu’au Congo, l’enseignement devait devenir un service public. Vandervelde se présente ainsi comme le porte-étendard de l’offensive contre les missionnaires catholiques. Comme dans les fermes-chapelles tenues par les Jésuites, on accusait la Mission de Luluabourg de garder trop longtemps sous tutelle les jeunes adultes qui avaient été libérés des esclavagistes ou qui y avaient séjournés comme orphelins. Il est vrai que Cambier ne ménagea pas des efforts pour obtenir de Bruxelles la prolongation au-delà de 25 ans de la limite d’âge de tutelle reconnue par l’Etat indépendant en 1894. Ses efforts furent vains. On reprochait aussi au Père Cambier ses relations avec la société C.K. (Compagnie du Kasaï) qui depuis 1902, récoltait dans cette région le caoutchouc. Au début des années 1910, Cambier affrétait de nombreux jeunes gens de sa Mission comme porteurs pour le compte de cette société. Le bénéfice financier atterrissait sur un compte de la congrégation à Scheut mais le Père Cambier n’avait pas la liberté d’en disposer comme il le voulait pour sa Mission. Il chercha un arbitrage à Rome, ce qui ne lui valut pas la bonne grâce de ses supérieurs à Scheut. Le Père Cambier pouvait se vanter avoir créé la plus grande mission des deux Congo (belge et français) et sans doute de l’Angola, mais il rencontrait aussi, à cause de ce succès, l’immense challenge de devoir assurer le financement de son œuvre. Sans doute voulut-il le faire avec les moyens qui s’offraient à lui et qui au fil du temps devinrent contestables.

       Le P. Cambier, Préfet apostolique du Haut-Kasaï suscita de plus en plus de polémiques, ce qui conduisit finalement sa hiérarchie à l’éloigner de la colonie. Un poste est trouvé pour lui à Rome. Emeri est obligé de quitter sa chère Mission en 1913 pour Rome où il remplit la fonction de « Consulteur de la Congrégation de la Propagande ».

Renvoyé en Belgique et prisonnier trois ans en Allemagne

       Au début de la guerre 14-18, n’ayant pu obtenir son renvoi en Afrique, le revoilà en Belgique. On le nomme curé à Roselies, près de Châtelet, pour remplacer l’abbé Joseph Pollart, fusillé par les Allemands, le 23 août 1914. Quelques mots sur l’histoire de ce martyr : à Flobecq, une rue porte son nom et un vitrail de l’église Saint-Luc évoque le sacrifice qui fut celui de l’abbé Joseph Pollart en août 1914. Lorsqu’éclata le premier conflit mondial, alors que les Allemands avaient pris en otage plusieurs de ses paroissiens, l’abbé Pollart sauva la vie de deux jeunes pères de famille en insistant pour être fusillé à leur place !




       Le grand lutteur qu’est Emeri Cambier se signale vite par sa témérité et son franc-parler. Un sermon vexant l’occupant et voici l’ancien Préfet Apostolique dans les geôles teutonnes. Après un an d’emprisonnement dans la caserne Trézignies à Charleroi, on le transfert en Allemagne où il connut les bagnes d’Anrath (Crefeld) et d’Hozminden. Ses derniers mois de détention sont cependant adoucis puisqu’il est autorisé à les passer dans la communauté des moins de Buren. Il n’empêche, il demeura prisonnier du 4 juin 1915 au 18 novembre 1918. Les témoignages du Père Cambier sur ces années d’emprisonnement ne sont hélas pas connus, de même la teneur du sermon prononcé à Roselies. Mais Cambier, il est certain, n’est pas un homme qui gémit sur son sort. L’humour l’aida certainement et il en possédait beaucoup comme le montre cette anecdote : un dentiste lui avait arraché toutes ses dents et lui avait placé un dentier complet sans accepter d’honoraires. Le P. Cambier lui envoya deux défenses d’éléphant montées en porte-bouquet avec ce mot : Je rends toujours œil pour œil, dent pour dent ! »

Une vie d’ermite comme chapelain de la Croix-Monet (Aische-en- Refail) pendant 18 ans



L’ermitage accolé à la chapelle de la Croix-Monet. Février 2020. On y vénérait une Vierge miraculeuse sous le vocable de « Notre-Dame des Affligés ». Cette Vierge était invoquée pour la guérison de la fièvre lente. Malheureusement, la statue fut volée dans les années 1970.


Qui se souciera du clocheton de la chapelle de Croix-Monet qui menace de s’effondrer ? (Février 2021)

       De retour en Belgique, il habite d’abord chez son frère prêtre à Châtelineau, puis à Mellet où il fait office de curé tout en créant une liqueur « La Flobecquoise » qu’il dénomme « Cordial-Congo-Cambier ». Entre 1925 et 1943, il se retire dans la chapellenie namuroise de la Croix-Monet.



       Le 21 novembre, sa paroisse d’adoption fête ses cinquante ans de prêtrise. Le 10 juillet 1938, on fêta le cinquantenaire du départ du P. Cambier pour l’Afrique dans la cathédrale de Namur. La cérémonie se poursuit sur la place d’Armes où défile la musique du 13e de ligne, des troupes suivies d’un détachement de l’école des cadets et de nombreux écoliers des écoles de Namur. Le P. Cambier va ensuite fleurir la statue du Roi-colonial. La cérémonie est suivie d’un banquet. Agrémenté des discours des autorités et le P. Cambier termine par ses mots en hommage à tous ceux qui sont morts pour le Congo :

       « Il n’y a pas au monde de missions comparables à celles du Congo. Notre Colonie, ce bijou, à côté de ces richesses spirituelles, œuvre de la charité, en renferme d’autres, trop peu connues et appréciées. Ce Congo, nous le garderons : il est à nous, car le cœur des indigènes est à nous. Nous le défendrons s'il le faut. Mais nous le garderons. Que tous, croyants ou incroyants, aient ce soir une pensée et une prière pour ceux qui sont morts pour lui. »  

       Les convives font une ovation interminable au Père Cambier, dont le propos a révélé, une fois de plus, l'âme ardente, apostolique, vibrante, apparaissant sous la truculente bonhomie. Et le banquet s'achève, joyeux et fraternel.



Plaquette en l’honneur du Père Cambier (recto)


Plaquette en l’honneur du Père Cambier (verso)

       Le Père Cambier se disait fier d’être à Croix-Monet le gardien du sanctuaire où l’on vénère une vierge miraculeuse (malheureusement volée vers les années 1970). Il accordait beaucoup de conseils aux nombreuses personnes qui venaient lui rendre visite. Léopold III, lui-même, l’honora de plusieurs visites princières avant de monter sur le trône. A tous ceux qui l’approchaient, le P. Cambier montra bonhomie, bonté, humilité.

       Le 29 septembre 1943, il décéda à l’hôpital Sainte-Elisabeth de Salzinnes.

Conclusion



Le Père Butaye, Jésuite dans une mission du Kwango


Doucement mon ami !


       Quel homme fut vraiment le Père Cambier ? Certainement un homme d’une trempe et d’une énergie peu courante. Mais, au-delà de sa réputation justifiée de pionnier, je ne peux m’empêcher de voir aussi dans cet homme indépendant et fier un missionnaire qui consentit librement à de multiples sacrifices : la volonté de ne jamais se plaindre, de ne jamais dénigrer ses supérieurs, de leur avoir toujours obéi malgré le refus de ses demandes et cela, quoi qu’il lui en coûta et,… il lui en coûta beaucoup, lui qu’on surnommait, « le Roi du Kasaï » !

       Puissions-nous à travers le souvenir du Père Cambier honorer les nombreux missionnaires et religieuses qui reposent pour l’éternité en terre congolaise. Puissions-nous aussi garder des liens puissants et fraternels avec nos frères Congolais.

Dr P. Loodts

 

Iconographie : les dessins figurant dans cet article sont l’œuvre d’A. de Vinck et figurent dans le livre d’Albert Mariaule, Le Père cambier, Editions Grands Lacs, Namur

 

Sources

1 - « Le Père Cambier », Albert Mariaule, Editions Grands Lacs Namur, 1948

2 - « Dans la brousse congolaise, les origines des missions de Scheut au Congo », R.P. Leon Dieu, Editions Maréchal, Liège, 1946

3 - Note sur la démission en 1914 d’Emeri Cambier Préfet, Flavien NkayMalu dans la revue «  Histoires et missions chrétiennes s » Karthala, 2008/4 N°8. Voir

4 - « Emeri Cambier (1865-1943) fondateur de la mission du Kasai : la production d'un missionnaire de légende » In : Images de l’Afrique et du Congo/Zaïre dans les lettres belges de langue française et alentour : actes du colloque international de Louvain-la-Neuve (4-6 février 1993), Bruxelles, Textyles-éditions, Kinshasa, Ed. du trottoir, p. 39-74, Jean-Luc VELLUT.

5 - Le lecteur intéressé trouvera sur le site suivant un magnifique reportage d’une religieuse de la Charité racontant son voyage jusque Luluabourg en détaillant la vie des missions des sœurs de la charité de Gand. Ce reportage sous forme de lettres porte comme titre : Voyage au Congo ; lettres d'une sœur de Charité de Gand par une Sœur de Charité de Gand, publié en 1905.

 

 

 

 

 



[1] La congrégation du Cœur Immaculé de Marie fut fondée par le P. Théophile Verbist, aumônier à l’Ecole royale Militaire de Bruxelles dans le bit d’évangéliser la Mongolie ! Le Père Verbist s’y rendit avec trois autres missionnaires en 1865. Il devait y mourir en 1868 !

 

[2] Le Père Huberlant naquit à Marchienne-au-Pont, le 18 décembre 1853.fit ses humanités à Enghien. Ordonné le 13 octobre 1878, il est nommé professeur à Chimay puis vicaire à Binche. Il rentre dans la congrégation de Scheut le 21 mai 1888. Rentré à Scheut malade, il y meurt le 24 mars 1892

[3] Le Père De Backer est né à Moustier-au-Bois le 6 décembre 1853. Professeur à Ath puis vicaire à Flobecq puis à St-Piat à Tournai et enfin à Gosselies ; il entre dans la Congrégation de Scheut en 1888. Il meurt à Nouvelle-Anvers, le 21 février 1892

[4] Le Père Gueluy est né à Anvaing le 23 avril 1849. Effectue ses humanités à Enghien. Entre ensuite dans la congrégation de Scheut en 1875. Part en Mongolie puis au Congo. Occupe différentes fonctions importantes dans la congrégation avant de succomber à Scheut le 22 décembre 1924.

[5] Ainsi nommée en mémoire de Mgr Oswald Van den Berghe qui avait fourni les ressources nécessaires à cette fondation et qui avait obtenu du Saint-Siège que la Ste Vierge fut déclarée « Patronne du Congo »

[6] Les premières religieuses furent Sœurs Albanie, Godelieve, Humilienne, Hydina et mère Amalia. Sœur Humilienne mourut à Luluabourg le 29 décembre 1950

[7] Lieutenant Cassart Florent (1869-1913). Déjà célèbre au Congo pour avoir accompagné Alexandre Delcommune dans son exploration du Katanga. En rentrant de cette expédition de trois ans ; il voulut combattre les esclavagistes et se mit sous les ordres de Dhanis. Il prit part à l’assaut de Nyangwe. Rentré en Belgique, il est reçu et félicité par Léopold II. A Luluabourg depuis 1884, il se distingue encore en luttant contre les guerriers de Kalamba, chef des Kiokos.

 



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