Médecins de la Grande Guerre

Le chagrin d’une grand-mère pleurant son unique petit-fils !

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Le chagrin d’une grand-mère pleurant
Maurice Gallé, son unique petit-fils !


       Maurice Gallé était le fils unique adoré des propriétaires de la faïencerie de Creil (Oise). Il était aussi l’unique petit-fils adoré de sa grand-mère Marie Franchemont. Cette famille très aisée vivait dans une grande maison bourgeoise, servie par un personnel domestique conséquent. Aujourd’hui, la maison familiale dans l'ile de Creil est un musée. La chambre de Maurice subsiste encore et des effets personnels lui appartenant sont toujours exposés. Maurice avait 22 ans quand il est mort d’une balle à l’abdomen alors qu’il effectuait une difficile mission de liaison entre deux compagnies le 25 septembre 1916. Son régiment, le 106ème R.I. se trouvait alors dans la région de Bouchavesnes où se déroulait la dernière phase de la bataille de la Somme. Ses parents restèrent sans nouvelles de lui pendant six mois. Ce furent les Anglais qui retrouvèrent son corps lorsqu’ils parvinrent à faire reculer les Allemands de leurs positions. Ils lui donnèrent une sépulture et les parents parvinrent à obtenir l’autorisation de se rendre sur la tombe de leur fils le 3 août 1917. Quelques mois après, les parents y retournèrent une nouvelle fois cette fois en compagnie de la grand-mère maternelle, d’un oncle et de l’épouse de ce dernier. En 1920, moment très pénible et douloureux, le corps est exhumé en présence des parents qui décident de ne pas ramener le corps de leur fils dans le caveau familial mais de construire au-dessus de sa tombe un monument à sa mémoire, monument qui fut inauguré en 1922.


       La grand-mère maternelle, Marie Franchemont composa cette émouvante prière après la mort de son unique petit-fils. Elle la récita sans doute chaque jour dans la chambre de son petit-fils laissée telle qu’il l’avait quittée et cela jusqu’à sa propre mort.


       Annette Becker publia en 1994 un très beau travail sur « La guerre et la foi » (Editions Armand Colin). Elle conclut son livre par la prière de cette grand-mère qui résume très bien le sacrifice d’une génération et l’immense chagrin de celle qui la précéda. Un chagrin qui ne pouvait trouver consolation que dans la foi, une foi persuadée de l’utilité du don de soi, mais aussi une Foi en l’Après-Vie qui répare et réunit ceux qui se sont aimés.


Prière de Madame Franchemont, grand-mère d’un soldat de 22 ans mort pour la France

Pour les vingt années de bonheur que vous m'avez données.
Par mon cher petit-fils
Je vous remercie Seigneur

Pour sa douce enfance
Pour son aimable adolescence
Pour sa belle et pure jeunesse
Je vous remercie Seigneur.

Pour ces deux années de droit
Où j'ai joui de sa présence
Où j'ai eu le bonheur de goûter mille joies intimes dont il était la cause
Je vous remercie Seigneur.

Pour le courage qu'il a eu quand il a quitté sa chère maison le 16 décembre 1914
Ne sachant quand il y reviendrait
Laissant sa maman si malade et trouvant à Paris sa grand-mère
Je vous remercie Seigneur.

Pour les qualités de toutes sortes
Qui l'ont fait estimer et aimer de tous, chefs et soldats
Dans sa nouvelle carrière
Je vous remercie Seigneur.

Pour la joie qu'il a eue de revenir en permission dans sa chère !
Noël 1915 et 1er janvier 1916
Je vous remercie Seigneur.

Parce que dès 1915 après l'attaque de septembre en Champagne
Il a envisagé que vous pourriez lui demander le sacrifice de sa vie
Et parce qu'il a accepté
Je vous remercie Seigneur.

Parce qu'il lui a été donné de prendre part
A l'apothéose de l'année et de ses poilus le 14 juillet 1916
Et parce qu'il a vibré d'enthousiasme
Je vous remercie seigneur

Parce que le 25 septembre 1916
Il s'est offert pour une mission particulièrement dangereuse
Et qu'il est touché en magnifique officier français
En pur chevalier chrétien
Je vous remercie Seigneur.

Parce qu'il a exhalé son âme sainte
Par un temps radieux comme il l'aimait
Je vous remercie Seigneur.

Parce que vous avez permis que nous ayons des détails précis
Sur ses derniers instants
Et que nous savons qu'il n'a pas souffert
Je vous remercie Seigneur.

Parce qu'il est tombé en terre française
Parce que nous avons pu retrouver sa tombe
Et arroser de nos larme la terre sacrée qu'il a arrosée de son sang
Je vous remercie Seigneur.

Parce que son sacrifice et celui de ses frères d'armes
A sauvé la France et l'a mise au premier rang des nations
En sauvant avec elle l'univers entier
Je vous remercie Seigneur.

Parce que vous lui avez accordé la plus belle mort
Et ouvert votre Paradis
Où je l'imagine comme Saint
Je vous remercie Seigneur

Amen.

Dr Loodts Patrick

 

 

Sources :

1)     Sur Maurice Gallé, ce livre : Stéphane Audouin-Rouzeau et Nathalie Garreau-Demilly, "Maurice Gallé, vie d'un soldat, deuil d'une famille (1914-1929)", MEMO, 1998

2)     Le corps dans la première guerre mondiale de Stéphane Audoint- Rouzeau dans :
Annales. Histoire, Sciences Sociales Année 2000 Volume 55
Numéro 1 pp. 47-71

 

 

 

 



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