Médecins de la Grande Guerre

La première guerre mondiale, un labo à ciel ouvert

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Collège Sainte-Croix et Notre-Dame

Hannut

Travail de fin d'année

La première guerre mondiale,

un labo à ciel ouvert


Amandine Gilis 6i

Professeur: M. Godet

Année scolaire 2010-2011

 

Merci à

M. Godet, professeur de français, pour

m'avoir encadrée et conseillée,

M. Loodts qui par son précieux

témoignage a enrichi mes recherches,

tous les membres de ma famille qui

m'ont encouragée lors de la réalisation

de ce travail.

 

Quand je vous dis que la guerre est la source

de tous les arts, j'entends dire aussi qu'elle

est la source de toutes les grandes vertus et

facultés des hommes.

J. RUSKIN, La Couronne d'Olivier Sauvage

1. Introduction

J'ai choisi de réaliser mon travail de fin d'année sur les progrès de la médecine lors de la première guerre mondiale.

J'aime beaucoup l'Histoire, c'est la nôtre! Je la trouve très intéressante. Toutes ces personnes qui nous ont précédés, ont influencé leur époque pour modeler notre société actuelle. Il est important de connaitre notre passé, l'Histoire, pour découvrir qui on est, d'où nous venons et d'où nous viennent ce que nous considérons comme acquis.

Après quelques recherches en bibliothèque, je me suis intéressée au premier conflit mondial. J'ai découvert une guerre méconnue, restée longtemps dans l'ombre de la guerre 40-45.

La science ainsi que la médecine m'intéressent beaucoup. Je suis impressionnée par les médecins et les scientifiques qui repoussent sans cesse les limites de l'Homme et essayent de lui donner de meilleures conditions de vie...

Le sujet est relativement vaste et complexe car il touche à trois domaines bien définis: l'Histoire, la science et l'éthique.

Ce travail de fin d'année montre comment la première guerre mondiale est un laboratoire à ciel ouvert. Il répond à la question : en quoi la première guerre mondiale a-t-elle fait évoluer les connaissances médicales de l'époque ?

Tout d'abord, il me semble indispensable de situer ce conflit dans le contexte spatio-temporel. Je relate brièvement ses origines et son déroulement, limitant mes recherches au front occidental de cette guerre.

Ensuite, je brosse un aperçu de la situation de la médecine avant l'entrée en guerre. Dans ce chapitre, j'aborde également les problèmes logistiques dans le service de santé belge.

Pour comprendre la violence des blessures infligées aux combattants et pour mesurer l'impact que ces traumatismes ont sur leur psychologie, il me parait opportun de parler des armes. Que ce soient les armes conventionnelles, les nouvelles technologies ou encore les armes chimiques et biologiques.

Dans le cœur du travail, j'explique comment le monde médical va être le premier témoin de la cruauté de ce conflit. C'est lui qui va permettre les avancées médicales en luttant contre les épidémies, en soignant les blessures de guerre, en élaborant de nouvelles techniques ... Cette partie est la plus importante, elle permet de répondre à la question problème.

J'envisage enfin le sujet délicat et difficile de l'éthique. Quand la science se met au service de la guerre, est-elle hors-la-loi ? Les médecins ont testé de nouvelles techniques, dans quel but ? Les soldats ont-ils été des sujets d'expérimentation ?

2. Origines de la guerre

        2.1. Les causes 

Les origines de la guerre sont multiples. Nous pouvons déceler quelques causes majeures. A l'époque, l'expansion et la recherche de territoires nouveaux sont ou apparaissent comme vitales pour certains Allemands. L'Allemagne, avec une population de 67 millions d'habitants, se sent à l'étroit. Les surfaces nécessaires pour nourrir et réaliser un développement industriel leur manquent. En comparaison avec l'Angleterre et la France, leurs colonies sont peu nombreuses. Des rivalités coloniales existent donc entre ces différents pays. Les colonies sont très prisées car leur exploitation promet richesse et prospérité. Ainsi l'Angleterre, en possédant presque la moitié du monde, est toute puissante à cette époque.

A la fin du 19ème siècle, différents nationalismes secouent l'Europe. Les Allemands veulent unir les différentes minorités germaniques en un grand empire appelé « Reich ». Un sentiment de supériorité, une armée de premier plan et un rejet des peuples slaves les conduisent à la guerre.

Les Français, après la défaite humiliante de 1871 et la perte de territoires (Alsace, Lorraine) ont un esprit de revanche animé par un patriotisme exacerbé.

Les Slaves constituent une mosaïque de peuples avec des coutumes, des langues et une histoire différentes. Ils veulent leur indépendance vis-à-vis de l'empire austro-hongrois.

       2.2. L'évènement déclencheur

L'empire austro-hongrois est gouverné par un vieil homme. Son neveu, l'archiduc François-Ferdinand est le seul héritier. Le 28 juin 1914, lui et sa femme sont assassinés à Sarajevo, capitale de la Bosnie, par Gavrilo Princip, un bosniaque pro-serbe.

L'Autriche-Hongrie menace la Serbie et se sert de ce prétexte pour lui déclarer la guerre le 28 juillet.

Pour l'Empire, la guerre est un moyen de reprendre en main et d'écraser les différentes velléités indépendantistes. Il va ainsi réaffirmer son autorité.

       2.3. L'effet domino suite au jeu des alliances

D'un côté, l'Allemagne s'allie, à la fin du 19ème siècle, à l'Autriche-Hongrie pour former la «  Duplice ».

Ensuite, avec l'Italie, ils composent la « Triplice ».

De l'autre côté, la France et la Russie forment l'alliance franco-russe pour contrer l'union initiée par l'Allemagne. L'Angleterre suit le chemin et crée « l'Entente Cordiale» avec la France. Cela donnera lieu à une coalition du nom de « Triple Entente ».

Les alliances ont fonctionné uniquement pour se protéger mutuellement d'une invasion...

L'Autriche-Hongrie, soutenue et même poussée par l'Allemagne déclare la guerre à la Serbie. De par l'accord de la Triplice, l'Autriche-Hongrie, l'Allemagne et l'Italie sont alors en guerre mais l'Italie refuse subitement et se proclame neutre. La Serbie, pays slave, est protégée par la Russie.

La Russie déclare alors la guerre à l'Autriche-Hongrie et à l'Allemagne pour soutenir la Serbie. La France et l'Angleterre sont forcées, elles aussi, d'entrer en guerre. Les armées des belligérants sont mobilisées et le 4 août l'Allemagne envahit la Belgique pour atteindre la France...

A cause des différentes alliances, chaque pays se voit précipité dans la guerre. Ainsi, non seulement les pays européens se déclarent la guerre, mais entrainent aussi avec eux toutes leurs colonies. Le conflit devient dès lors mondial. Sur chaque continent, les peuples se font la guerre pour une cause que bien souvent eux, vivant à plusieurs centaines ou milliers de kilomètres, ne comprennent pas.

3. Déroulement du conflit

       3.1. Une guerre de mouvement

La guerre de mouvement débute le 4 août 1914 lorsque l'Allemagne envahit la Belgique et applique le plan d'un dénommé Schlieffen. Ce plan consiste à couper la Belgique en deux parties : les Allemands passent au sud de Liège et au sud d'Anvers. Ainsi, les opposants prennent les troupes françaises à revers car celles-ci attendent les troupes allemandes à la frontière de l'Alsace-Lorraine.

L'avancée allemande est très rapide et en septembre ils sont seulement à 40 km de Paris. La bataille de la Marne, du 6 au 17 septembre 14, bloque l'avancée allemande et stabilise le front. Ainsi, la guerre s'enterre dans les tranchées et devient une guerre de position.

       3.2. Une guerre de position

Dès décembre 1914, les soldats alliés et ennemis creusent des réseaux de tranchées où ils resteront jusqu'en mars 1918. A plusieurs reprises, les armées tentent des percées afin de fragiliser l'ennemi.

Ces attaques aboutissent à d'énormes pertes humaines et à des batailles tristement célèbres comme celles de Verdun (de février à juin 1916), de la Somme, la plus meurtrière, (de juillet à novembre 1916) ou encore celle du Chemin des Dames (en avril 1917) mais ne modifient en rien le front.

De nombreux fronts voient le jour: l'empire ottoman et la Bulgarie s'engagent au côté des opposants ; le Japon, l'Italie, la Roumanie, la Grèce se rangent au côté des alliés.

Ensuite la guerre devient mondiale, les conflits s'étendent à l'Afrique, à la Palestine, ... puisque les colonies des différents pays belligérants entrent elles aussi, en guerre.

       3.3. Retour à une guerre de mouvement

En juillet 1918, l'équilibre des forces en présence va être modifié. Les Etats-Unis envoient leurs troupes. La Russie devenue communiste se désengage du conflit. Au printemps 18, l'Allemagne va alors concentrer tous ses efforts sur le front ouest en lançant quatre grandes offensives qui vont toutes se solder par des échecs.

       3.4. L'Armistice

L'Autriche-Hongrie se dissout, l'Allemagne se retrouve alors seule et demande la paix au début du mois d'octobre. Le 11 novembre 1918, l'Armistice est signée à Rethondes en France dans un wagon de chemin de fer. A 11 heures, le cessez-le-feu entre en vigueur.

Le bonheur est indescriptible dans le camp allié. Chacun souhaite que cette guerre soit la dernière, « la der des ders ». Nul ne connait l'ampleur des dégâts matériels et humains qu'elle a engendrés.

Cette guerre va laisser des cicatrices indélébiles chez tous les belligérants...


Photographie prise le 11 novembre 1918 à 7 h 30 au moment ou le Maréchal Foch part pour Paris remettre au gouvernement français le texte de l’Armistice qui vient d’être signé avec l’Allemagne. 1- Maréchal Foch 2- Amiral Sir R. Wemyss 3- Général Weygand 4- Contre-Amiral G. Hope 5- Captain Marriott 6- Général Desticker 7- Capitaine de Mierry 8- Commandant Riedinger 9- Officier –Interprête Laperche (cliché Pupier)

4. Etat de la médecine au début de la guerre

       4.1. La médecine générale

Au 19ème siècle, la médecine est une science approximative. On croit encore que Dieu envoie les maladies comme une quelconque punition. A cette époque, les prêtres ou les guérisseurs tentent de guérir les malades avec des prières ou des formules « magiques »... Beaucoup aussi font confiance aux cataplasmes, ventouses, tisanes, sangsues... Peu à peu, la discipline médicale va prendre de l'importance grâce à la révolution pasteurienne. A la fin du 19ème siècle, des médecins et des scientifiques font de grandes découvertes. En ce qui concerne la chimie, Jean-Baptiste Dumas (1800-1884) et Joseph Gay-Lussac (1778-1850) dotent les médecins de nouveaux produits : médicaments, désinfectants, .... L'invention du stéthoscope par René Laennec (1781-1826) facilite le diagnostic médical. Pierre Rayer (1781-1826), quant à lui, valorise les recherches au microscope en identifiant dans le sang de moutons les particules de charbon qui causent leur mort. Claude Bernard (1813- 1878) définit la recherche scientifique en la basant sur l'expérimentation et le raisonnement.

Louis Pasteur (1822-1895) débute des recherches sur la fermentation et découvre les microorganismes. Il inaugure alors une nouvelle science appelée la bactériologie. Ensuite, il poursuit des recherches sur les germes et leurs implications dans des maladies infectieuses. Il s'attaque aux épidémies du 19ème siècle comme le choléra, la variole ou encore le typhus qui secouent l'Europe. Ces maladies se révèlent très meurtrières. Il élabore la théorie de la propreté absolue : l'antisepsie et l'asepsie. Il s'agit de toutes les méthodes pour vaincre les microbes. Des règles d'hygiène s'imposent en milieu hospitalier : asepsie des salles d'opération, désinfection des différentes parties d'un hôpital. Le port des gants chirurgicaux (dès 1889), la stérilisation des instruments chirurgicaux deviennent des gestes indispensables. L'opinion publique est désormais conscientisée par l'importance à accorder à l'hygiène. Ensuite, l'Institut Pasteur, inauguré en 1888, continuera les recherches sur la bactériologie, la parasitologie et l'immunologie. Il sera connu en Amérique et plusieurs de ses membres découvriront d'importants sérums et vaccins.

Le physicien allemand Röntgen (1845-1923) découvre en 1895 les rayons X. La radiographie va rendre les diagnostics fiables et plus précis. Moins d'un an après cette découverte, les premières tentatives de radiothérapie sont pratiquées sur des tumeurs cancéreuses.

Les transfusions sanguines de bras à bras sont rendues possibles grâce à la découverte des groupes sanguins par l'Autrichien Karl Landsteiner (1868-1943).

Les médecins vont lutter contre la mortalité élevée des femmes en couches et la mortalité infantile en aménageant des services de maternité. Les jeunes mères y reçoivent des notions d'hygiène. Les premières consultations de nourrissons sont également créées.

La médecine devient une science mais le chemin à parcourir est encore long...

       4.2. Les problèmes logistiques dans les services de santé : l'armée belge

A la mobilisation, la Croix-Rouge est dans l'incapacité de fournir le personnel et le matériel indispensables. Faute de stocks suffisants et de mauvaise gestion, elle ne peut tenir ses obligations envers l'armée belge. Les moyens sont dérisoires : elle ne dispose que de cinq voitures d'ambulance, deux voitures de pharmacie et un fourgon de matériel hospitalier.

La situation logistique est donc désastreuse, et, pour y remédier, le professeur Antoine Depage[1], homme connu et respecté par le monde médical, est chargé de prendre les choses en main. En quelques jours, grâce à des initiatives privées, ou à la charité publique il tente de remédier aux problèmes structurels du Service de santé. Des cliniques privées, des écoles, des maisons du peuple et même une aile du palais royal de Bruxelles sont reconverties en «  ambulance »[2].

Le deuxième problème rencontré est la pénurie de brancardiers. L'armée va mobiliser les instituteurs, les curés et les séminaristes. Cependant rien n'est prévu : aucun uniforme, aucun matériel, aucune formation. Les premiers blessés sont évacués dans des brouettes réquisitionnées dans les fermes.

La troisième difficulté, et non des moindres, est le manque de médecins et d'infirmières. Au début du conflit, seulement 900 médecins sont disponibles, ce qui est gravement insuffisant. L'armée engage des étudiants en médecine comme médecins militaires. Ceux-ci, bien qu'inexpérimentés, sont envoyés au front.

Quant aux infirmières, on en recense très peu en 1914. Le domaine des soins infirmiers en Belgique accuse un retard par rapport aux pays anglo-saxons. La première école d'infirmières existe seulement depuis 1907 à Bruxelles. Le directeur, le docteur Depage, charge Edith Cavell, une infirmière anglaise, d'en assurer la gestion.


Edith Cavell avec des nouvelles diplômées. (Coll. Dr Loodts)

A l'entrée en guerre, Edith Cavell reste à son poste, elle va abriter des militaires anglais, mais très vite elle est trahie et condamnée à mort.

Toujours à Bruxelles, une deuxième école en soins nursing, Saint Camille, forme des religieuses.

Toutefois, en 1912, les infirmières diplômées sont encore peu nombreuses, elles sont à peine une cinquantaine. Deux ans plus tard, l'armée est obligée de compter sur le dévouement et le courage de religieuses et de bénévoles. Elle engage aussi des infirmières recrutées en Angleterre.

Au cours d'un entretien avec le Roi Albert, le docteur Depage suggère la mise en place d'un hôpital de la Croix-Rouge qui serait un modèle pour les Services de Santé. La Reine Elisabeth soutient le projet et y collabore. Le 21 décembre 14, l'hôpital Océan ouvre ses portes à La Panne. L'établissement va rapidement se diversifier et après quelques mois, accueille toutes les spécialités médicales.

L'Océan devient une référence pour le monde soignant. Les alliés y envoient leurs médecins pour se spécialiser. D'autres infrastructures pouvant accueillir un grand nombre de blessés sont ensuite construites à Hoogstade, Vinckem, Beveren et Adinkerke.


Devant l’hôpital Océan, on aperçoit un abri construit pour protéger la salle d’opération.

5. Les armes utilisées et leurs conséquences

       5.1. Armes

La Première Guerre mondiale est une guerre violente. Elle inaugure les premiers affrontements de l'âge industriel. La place est à l'artillerie lourde : les lance-flammes, les chars d'assaut, les tanks et d'autres véhicules motorisés font leur apparition. Les canons, les explosifs connaissent des progrès considérables afin d'être les plus performants. Les projectiles sont étudiés pour conserver leur vitesse. Ils sont hérissés d'aspérités et susceptibles d'arracher n'importe quelle partie du corps humain : « 70% des blessures sont infligées par des obus[3] ». Tout est mis en œuvre pour anéantir l'ennemi.

D'autres emplois sont trouvés aux avions et aux dirigeables. C'est pourquoi ils ont leur place dans la catégorie des armes. L'avion, inventé par le Français Clément Ader en 1890, subit de grandes transformations et est utilisé pour la première fois dans un conflit armé. Au début de la guerre, l'engin de reconnaissance surveille le front et aide l'artillerie dans son positionnement. Peu à peu, il devient bombardier et engin de chasse... Le dirigeable se fait, lui aussi, bombardier mais est surtout utilisé, employé par les Allemands.

« La grosse Bertha» est le premier canon longue portée. D'origine allemande, il lance des obus à quelques centaines de mètres. Le 23 mars 1918, il est utilisé pour la première fois. Ce bombardement touche Paris et plonge la ville dans la terreur car ce canon a une portée de 110 kilomètres. Il va semer la panique chez les alliés.

Tout au long de ce conflit, l'utilisation des armes et notamment des obus ne cesse d'augmenter. La qualité ne prime plus sur la quantité puisqu'il faut toujours plus, très vite et le moins cher possible. Cela entraine donc des accidents : les armes sont souvent défectueuses et des obus explosent parfois à la figure de leurs manipulateurs...

Enormément de personnes décèdent suite à l'utilisation de ces armes, des soldats comme des civils. D'autres, blessés gravement ou superficiellement, doivent recevoir les soins adéquats.

La modernisation de l'armement, les nouveaux projectiles et la nouvelle intensité de feu vont provoquer des dégâts corporels jamais vus jusqu'ici. Cela aura un impact direct sur la médecine.

       5.2. Armes chimiques[4]

Les armes chimiques sont utilisées pour la première fois à une importante échelle lors de la Grande Guerre. Grâce aux progrès scientifiques du 19ème siècle, l'industrie chimique a atteint un haut niveau de développement surtout en Allemagne. En effet, ce pays contrôle sa production et également une grande partie de celle de la France.

Lors de ce conflit, la seule arme chimique employée est le gaz. Il en existe différentes sortes que nous pouvons répartir en plusieurs classes : les irritants, les suffocants, les vésicants et les toxiques.

  • Les gaz irritants, peu toxiques et à effets passagers sont actuellement consacrés au maintien de l'ordre. Les lacrymogènes entrainent les larmes et le clignement des paupières. Les sternutatoires attaquent les voies respiratoires et déclenchent toux, vomissements... Les urticants engendrent des brûlures et des irritations cutanées.
  • Les gaz suffocants irritent les poumons et les voies respiratoires. Ils sont volatils et se disséminent grâce à de bonnes conditions atmosphériques. Ces gaz, après inhalation, engendrent la mort. Le plus connu est le chlore.
  • Les gaz vésicants provoquent des brûlures sur la peau ou les muqueuses. Ces gaz sont rarement mortels à condition que les voies respiratoires soient protégées et demandent une longue période de rémission. Cependant, si les voies respiratoires sont touchées, la mort est foudroyante. Ce gaz traverse certains matériaux ce qui rend la protection difficile et les objets contaminés restent dangereux un grand laps de temps. Le plus employé est le sulfure d'éthyle dichloré appelé Ypérite et tristement célèbre sous le nom de gaz moutarde.
  • Les gaz toxiques, eux, entrainent la mort inévitablement et très rapidement.

Enlisés dans les tranchées, les belligérants vivent une situation désespérante. Les Français vont prendre l'initiative dès août 1914 et ainsi faire le premier pas dans l'engrenage de la guerre chimique. Ils emploient des substances non délétères à effet momentané. Même si ces gaz ne violent pas la Convention de La Haye de 1899, ils constituent la première attaque chimique.

Le 22 avril 1915, les Allemands emploient pour la première fois des gaz de combat dans la région d'Ypres près de Langemarck. Au moyen de cylindres pressurisés placés dans les tranchées, 150 tonnes de chlore, un gaz suffocant, sont libérées et transportées par le vent vers les lignes françaises. La guerre chimique vient de prendre sa forme meurtrière. Pour les alliés, la surprise est totale et les pertes sont considérables. Une brèche de six kilomètres s'est ouverte dans leurs lignes. A la suite de cette attaque, les coalisés se dépêchent de combler leur retard et suivent les Allemands dans cette nouvelle forme de guerre. Seulement trois pays sont capables de répondre à ces attaques : l'Allemagne, la France et l'Angleterre. Eux seuls possèdent les industries nécessaires à la fabrication de ces substances.

Au fil du conflit, les techniques de dissémination s'améliorent. Elles ne dépendent plus exclusivement de la météorologie. Ainsi, le gaz est inséré dans les obus... Bientôt des agents chimiques de plus en plus nocifs apparaissent. Leur efficacité s'améliore. Les masques respiratoires et les moyens de détection de ces nuées délétères sont, eux aussi, sans cesse perfectionnés. Une attaque efficace dépend de la surprise. Certaines se déroulent donc la nuit avec une visibilité très faible.


Dans les tranchées d’Ypres, les soldats britanniques portent un masque à gaz.

Dans la nuit du 12 au 13 juillet 1917, l'artillerie allemande utilise pour la première fois un vésicant d'une extrême toxicité : l'Ypérite, nommé gaz moutarde pour son odeur. Les Allemands vont bombarder les tranchées d'Ypres. Les soldats ne réalisent pas qu'ils font l'objet d'une attaque chimique et retournent dormir. Au lever du jour, ils se réveillent avec d'intolérables souffrances qui ne cessent de s'aggraver. Ils meurent quelques heures plus tard. De plus, les soldats alliés ne disposent pas encore de masques protégeant contre ce nouveau gaz. Celui-ci, très vicieux, agit à retardement et attaque chaque partie du corps exposée à l'air. Les soldats ont donc beaucoup de difficultés à s'en protéger. A ce stade du conflit, on peut parler de totalisation de la guerre.

Le gaz a entrainé des pertes importantes, mais a aussi dégradé la vie et le combat dans les tranchées. Le but premier de cette « guerre dans la guerre » est de revenir à la guerre de mouvement, de sortir des tranchées et de rompre le front. Très vite, le gaz devient une arme psychologique redoutable. Il influence avant tout le moral des combattants. En effet, les soldats angoissent, l'alerte peut être donnée à n'importe quel moment et une réaction rapide et immédiate est vitale. Ces gaz de combat deviennent peu à peu une arme d'usure forçant les combattants à la veille permanente.

Malgré toute l'horreur et le dégoût provoqués par les armes chimiques, malgré les sérieuses répercussions sur le moral et le physique des troupes, les gaz n'ont provoqué que 3% des pertes parmi les belligérants. L'arme chimique ne représente que 0,22% de l'investissement de guerre pour les Britanniques.[5] Cependant, une chose est certaine, cette arme modifie le visage du conflit : la guerre devient totale. En effet, elle n'a plus de limites car les gaz n'ont pas de frontières et frappent aussi bien le militaire que le civil...


Mémoire d’Apollinaire, lettres à Lou I peinture de FOLON (FOLON, Jean-Michel et GILSOUL, Guy, Fondation Folon. Gand : éditions Snoeck, 2008, p.61)

       5.3. Armes biologiques

« Une arme biologique est un micro-organisme qui provoque une maladie chez l'homme, les plantes ou les animaux, ou qui produit une détérioration des matériaux.[6] »

Contrairement aux armes chimiques, les armes biologiques datent de l'Antiquité. En effet, la pratique y est courante. En temps de guerre, ils infectent les points d'approvisionnement en eau de l'ennemi au moyen de cadavres. De cette façon, l'ennemi ne sait pas se ravitailler. Par la suite, les agents biologiques sont peu employés. Avec le progrès de la médecine et de la microbiologie, l'intérêt des militaires pour les armes biologiques s'intensifie à la fin du 19ème siècle.

Lors de la première guerre mondiale, les Allemands mènent différentes opérations de sabotage dans des pays neutres. Les chevaux et les récoltes destinées à leurs ennemis sont contaminés par des agents biologiques. Ils utilisent de Baccilus anthracis plus connu sous le nom d'anthrax et le Burkholderia mallei appelé singulièrement morve pour contaminer des moutons roumains destinés à la Russie. Les Français, quant à eux, emploient l'agent étiologique de la morve contre la cavalerie allemande lors d'opérations de sabotage.

Il existe différentes sortes d'agents biologiques naturels militarisables. Les agents vivants (comme les bactéries, les virus) et les agents moléculaires (qui produisent des toxiques chimiques) sont utilisés par le terrorisme. Aujourd'hui, l'arme biologique continue de faire peur. Il n'est pas rare de voir dans les médias les menaces à l'anthrax.

6. Les avancées médicales durant la guerre

       6.1. Combattre les épidémies

Pendant la guerre, les épidémies sont très fréquentes. La promiscuité des soldats joue un grand rôle dans la contamination. Les armées belligérantes doivent faire face à ce problème. Les hommes de science se montrent très inventifs. Ils repoussent leurs limites et celles de la science. Une solution est de combattre directement ces maladies. Pour cela, il faut perfectionner les vaccins et améliorer les sérums existant déjà. Il est impératif de conscientiser les soldats et leurs dirigeants de l'extrême importance d'une bonne hygiène.

               6.1.1 Les sérums et les vaccins

Le sérum est constitué d'antitoxines que l'on a prélevées sur un animal. Lorsque l'on vaccine un animal contre une maladie microbienne ou une toxine, celui-ci crée des anticorps pour la combattre. Il suffit alors de prélever ces antitoxines dans le sang de l'animal pour constituer un sérum. Cela va permettre une lutte rapide chez l'homme.

Au début de la guerre, deux sérums sont utilisés: celui contre la diphtérie et celui contre le tétanos. Ils sont fabriqués grâce au sang des chevaux qui ont développé les bons anticorps. Le sérum antidiphtérique a été créé par Behring[7] et Roux[8] en 1889, celui du tétanos par Roux et Vaillard[9] en 1892.

Le vaccin est une substance microbienne morte ou non infectieuse qui est injectée afin d'assurer l'immunité. A la veille de la guerre, il existe seulement deux vaccins : l'un contre la rage « de Pasteur » découvert comme son nom l'indique par Pasteur[10] en 1885 et l'autre contre la fièvre typhoïde découvert par Wright[11] en 1896.

La rage est une maladie mortelle d'origine animale qui peut être transmise à l'homme. La fièvre typhoïde est causée par les bactéries Salmonella. Cette maladie se propage à cause des mains sales et de la mauvaise hygiène, mais aussi par la contamination alimentaire. Il faut convaincre les hauts dirigeants de l'Armée de faire vacciner les troupes.

              6.1.2. L'hygiène, une alliée efficace

Le Service de santé prend conscience que l'hygiène est primordiale pour éliminer les différentes maladies qui coexistent chez les soldats. Chaque bataillon a sa propre équipe sanitaire en vue de minimiser le plus possible la prolifération de maladies, bactéries, virus, et autres.


LE NAOUR, Jean-Yves, La Première Guerre mondiale pour les Nuls, Paris, éditions First, 2008, p.69

Pour lutter contre la tuberculose, des médecins mettent sur pied des sanatoriums pour séparer et isoler les malades des tranchées et de la population civile. Là, ils sont soignés par des moyens naturels : repos, suralimentation, héliothérapie (lumière solaire). Une campagne de prévention et d'information voit même le jour.

Au début du siècle, le typhus exanthématique est un fléau. Pour sauver des vies humaines, tous les soldats reçoivent l'ordre de lutter contre les poux car ces parasites véhiculent le typhus. Afin d'être débarrassés de ces hôtes indésirables, les soldats doivent prendre des douches et leurs vêtements sont désinfectés. Les Services de santé investissent beaucoup : des bains douches pour les soldats sont construits, des cabines de désinfection viennent assainir les vêtements. Parfois, les moyens manquent et les habits ne sont plus nettoyés. En hiver, une solution s'impose : les soldats doivent les laisser geler à l'extérieur.

Un autre parasite, moins nocif que le précédent, mais insoutenable pour les soldats est la gale. Elle rend les soldats fous puisqu'ils se grattent continuellement et qu'il est extrêmement difficile de s'en débarrasser. Le petit insecte sarcopte se loge sous la peau, ce qui engendre des lésions de grattage insupportables. Le seul traitement est de frotter et d'enduire pendant 24 heures le contaminé d'une pommade à base de soufre.

Dans les tranchées, les bacilles dysentériques sont partout. Les facteurs de transmission comme le ruissellement des eaux, les diptères (les mouches et les moustiques) qui prolifèrent dans les matières fécales contaminent la nourriture et les objets appartenant aux soldats. Ceux-ci essayent de lutter contre ces insectes en confectionnant des attrape-mouches. Ils peignent aussi des murs en bleu clair pour tenter de les tenir à l'écart.

Un autre problème est la présence des rats dans les tranchées. Ces rongeurs sont de réels vecteurs de maladies. Il est très difficile de s'en débarrasser.

Lorsqu'on essaye d'améliorer l'hygiène, un facteur très important est l'eau. Donc, il est primordial de pouvoir transporter directement l'eau jusqu'aux tranchées. C'est chose faite grâce à un ingénieur français, Philippe Bunau-Varilla. Celui-ci réussit à capter et à acheminer l'eau au moyen de puits de fortune, de pompes et de tuyaux.


Comme on peut le constater, de nombreuses mesures d'hygiène sont prises lors de cette guerre pour protéger ces soldats qui, 24 heures sur 24, croupissent dans les boyaux de la mort. En effet, ces endroits confinés, sales et humides sont des lieux propices à attraper une maladie, à être contaminé ou à contaminer, tant la promiscuité y règne. Il était donc important de s'investir dans la prévention des maladies...

              6.1.3. La syphilis

La syphilis est une maladie vénérienne, infectieuse et contagieuse. De nombreux soldats en sont victimes. Lors de permissions ceux-ci succombent aux charmes de prostituées et sont ainsi contaminés.

Au cours du conflit, il faut presque tout inventer au niveau de la pharmacologie. Avant la guerre, il n'existe qu'un seul médicament efficace contre la syphilis : le Salvarsan, aussi appelé le 606. Au terme de nombreuses années de recherche, en 1910, ce médicament a été découvert par le scientifique allemand, Paul Ehrlich. Bien qu'encore au stade expérimental, il est utilisé à grande échelle lors de la Grande Guerre pour lutter contre cette maladie. Il faudra cependant attendre de nombreuses années avant que des médicaments plus performants soient commercialisés.


Le Cri du Poilu, parole et musique de Vincent SCOTTO. (CHAVOT, Pierre et MORENNE, Jean-Denis, L’ABCdaire de la Première Guerre mondiale. Paris : Flammarion, 2001, p.15)

              6.1.4. La grippe espagnole

En 1918, une épidémie de grippe touche le monde entier. Cette grippe venant d'Asie est surnommée « grippe espagnole ». Les populations, déjà très affaiblies à cause des privations et les soldats fragilisés par les conditions de combat ont peu résisté à ce virus. Des mesures sont prises pour diminuer le risque de contagion comme le port de masque, l'interdiction de se réunir, mais cela a peu d'impact. Des médecins militaires ouvrent des hôpitaux pour soldats grippés les obligeant à y rester, même après l'Armistice. Cette épidémie prend fin en 1919, mais elle a entrainé d'énormes pertes à travers le monde...

       6.2. Traiter les blessures de guerre

              6.2.1. Les progrès de la médecine

                     6.2.1.1. La radiologie

« La radiologie est une partie de la médecine qui utilise les rayons X, les isotopes radioactifs et les radiations non ionisantes à des fins diagnostiques ou thérapeutiques.[12] »

Avant la guerre, la radiologie est très peu employée et l'on doit son essor à plusieurs pionniers dont fait partie Marie Curie.

Marie Curie, physicienne française (1867-1934), a découvert la radioactivité naturelle. Pendant la Grande Guerre, elle se sent investie d'une mission : elle va propager l'imagerie médicale dans les hôpitaux français et belges.

Grâce au soutien de la Croix-Rouge française et d'autres organismes de bienfaisance, elle aménage des limousines données ou prêtées en voitures radiologiques qui seront appelées plus tard les « petites curies ».


Marie Curie au volant d’une voiture radiographique dite « petite curie ». Elle ignore encore les méfaits des rayons X

Son permis de conduire en main, Marie Curie va se rendre là où les blessés affluent. Elle initie des infirmières aux techniques radiologiques et équipe dix-huit voitures ainsi que deux cents postes fixes de radiologie. A bord de chaque « petite curie » se trouvent un médecin, un technicien en imagerie médicale et un chauffeur. Ces ambulances radiologiques font partie des grandes avancées nées de la guerre 14-18.

                     6.2.1.2. Les transfusions et perfusions

La transfusion est une injection dans une veine, de sang ou d'un produit constituant le sang (plaquettes, globules rouges, globules blancs, ...) préalablement prélevé sur un ou plusieurs donneurs. La perfusion est une introduction lente et continue dans l'organisme d'une solution contenant un médicament ou un produit sanguin.

L'incompatibilité entre donneur et receveur a trouvé une solution en 1900 grâce à la découverte des différents groupes sanguins. Cependant, le facteur Rhésus n'a pas encore été découvert et cette lacune pose problème.

La transfusion sanguine ne résout pas tous les problèmes, toutes les maladies, mais contribue à une meilleure guérison des blessés et des malades. Pourtant, pendant la première guerre, les transfusions sanguines sont encore à l'état expérimental. C'est pourquoi, elles ne se font que rarement. Il faut attendre la fin du conflit pour voir cette pratique se généraliser.

Un autre problème est celui de la coagulation naturelle du sang. Celle-ci survient très vite après le prélèvement. Il n'est donc pas possible de prendre le sang d'une personne saine et de le transfuser à un patient. Mais le docteur belge Albert Hustin découvre en 1913 un produit qui rend le sang incoagulable: le citrate de soude. Celui-ci se révèle efficace, non nocif et non coagulant. En 1914, Hustin réussit à élaborer un matériel de prélèvement et d'injection. La transfusion sanguine est devenue extrêmement simple. Malgré cette trouvaille, les transfusions directes de bras à bras sont beaucoup plus utilisées que les transfusions différées. Selon le docteur Loodts[13], ces dernières font encore l'objet de méfiance et ne sont pratiquées que par une minorité de soignants.

                     6.2.1.3. Les soins portés aux soldats gazés

Les soldats qui survivent à une attaque de gaz en conservent très souvent des séquelles. Ils ont besoin de soins. Au début de la guerre chimique, les médecins sont inexpérimentés et ne savent pas comment réagir face à ce problème. Tout doit être pensé pour améliorer la vie de ces soldats. Cependant, le monde médical ne dispose que de peu de ressources. Pour Patrick Loodts, les soins proposés sont des traitements de survie. Les gazés ne guérissent jamais totalement... Les seuls soins sont l'atropine, l'oxygénothérapie et la kinésithérapie.

L'atropine est un médicament qui dilate les voies respiratoires, ce qui permet aux victimes de mieux respirer. Leurs voies respiratoires fonctionnent moins bien, les poumons des gazés reçoivent moins d'oxygène, l'oxygénothérapie s'impose. Cette thérapie va naitre dans les hôpitaux du front. Avant, cela n'existait pas. Les gazés ont les muqueuses respiratoires fragilisées et vont souffrir de complications : pneumonies, bronchites, tuberculose... La kinésithérapie, spécialité née de cette guerre, va aider les personnes gazées à mieux respirer. Toutefois certains décèdent des semaines, voire des mois après une attaque au gaz, tandis que d'autres survivent avec des séquelles plus ou moins importantes.

Laissez-moi vous raconter l'histoire de mon arrière-arrière grand-père Jules Dochière.

Jules Dochière (1890-1979) est enrôlé dans l'armée belge en 1914. Il prend part à toute la guerre excepté lorsqu'il est blessé à la main. Il est alors envoyé 20 jours en Angleterre pour être soigné. Il n'en garde aucune infirmité.


Photographie d’époque de Jules Dochière en uniforme de fantassin de l’armée belge

Retranché à Ypres avec son bataillon, il se fait gazer. Il en conserve de graves séquelles. Toute sa vie, il souffre d'emphysème[14], d'asthme, de bronchites chroniques... La guerre terminée, les traitements pour ce genre de pathologie sont bien minces. On lui applique sur le dos des ventouses, petites cloches en verre chauffées avec du coton enflammé. Elles aspirent la peau en produisant une irritation locale. Ce procédé permet de « décoller » l'infection. Plus tard, dans les années 50, son état s'améliore avec l'arrivée des antibiotiques...

Quant à son état psychologique, il revient fort changé de la guerre. Homme pudique, il ne partage que rarement son expérience des tranchées. Il lui faut du temps pour se réhabituer à la vie quotidienne. Il s'éteint à l'âge de 88 ans emportant avec lui ses souvenirs enfouis de 14-18.

                     6.2.1.4. Lutter contre la gangrène

Un des premiers défis à relever pour les médecins bactériologistes était de lutter contre la gangrène gazeuse. La gangrène est une nécrose des tissus à l'intérieur d'organismes vivants, due à un arrêt de circulation du sang ou d'une infection.

Au début du 20ème siècle, toutes les plaies profondes ont de grandes chances de se gangréner. Les médecins doivent agir rapidement pour éviter que la gangrène s'installe. C'est une course contre la montre, il faut enrayer sa propagation afin d'empêcher que les cellules infectées touchent les tissus voisins et plus grave encore la totalité d'un membre. Si l'infection se diffuse à l'entièreté du corps, la mort par septicémie est inéluctable.

Pendant la Grande Guerre, la seule solution est l'amputation. Même si celle-ci n'est pas synonyme de guérison, elle va sauver quelques soldats. Le docteur Carrel, un Français, et le chimiste Dakin, prix Nobel de médecine (1910) vont inventer une solution antiseptique à base d'hypochlorite de soude.

L'antiseptique ne présente pas d'effets secondaires. Comme me l'a bien expliqué le docteur Loodts, le traitement « Carrel-Dakin » semble avoir sauvé des vies et empêché des amputations. Pour lui, cette découverte constitue l'avancée médicale majeure de cette guerre.

Du côté anglais, les docteurs Fleming et Wright ne partagent pas l'avis de leurs collègues français. Pour eux, la solution antiseptique n'est pas efficace. Ils conseillent l'ablation d'un maximum de tissus nécrosés et l'humidification de la plaie afin de limiter les cas gangréneux. Il faudra attendre 1928 pour que Fleming découvre la pénicilline. Beaucoup trop tard pour de nombreuses victimes de 14-18 !

              6.2.2. La chirurgie dans l'urgence

La guerre est la seule véritable école du chirurgien[15].

                     6.2.2.1. Les blessés de la face : « les gueules cassées »

En 1914, avec la modernisation de l'armement, les hommes sont confrontés à un nouveau type de conflit engendrant des mutilations jusqu'alors peu courantes comme celles de la face. Ainsi, on estime que 11 à 14% des blessés français de la Grande Guerre l'ont été au visage.[16] La guerre des tranchées favorise, en effet, ce type de blessure car les combattants sont littéralement enfouis « face à face » et exposent donc leurs visages au feu ennemi.

Les dégâts occasionnés aux visages sont d'une violence inouïe. De nombreux blessés sont laissés sur le champ de bataille tant leurs blessures sont hideuses et paraissent sans aucun espoir. Les soldats défigurés sont souvent évacués les derniers. Face à ces traumatismes, les médecins sont inexpérimentés. Ils vont remarquer que ces effroyables blessures accompagnées souvent de la perte des sens (yeux, oreilles, nez, ...) ne compromettent pas les fonctions vitales. Les défigurés survivent à leurs lésions.

Des centres de chirurgie maxillo-faciale vont voir le jour. C'est très lentement et par essais-erreurs que la chirurgie réparatrice va progresser, obligeant le blessé à de longs traitements et à de fréquentes opérations. Les premières greffes sont ainsi réalisées : greffes osseuses, de cartilages. Les greffes « ostéo-périostiques », le périoste étant la membrane fibreuse qui entoure l'os, se montrent les plus efficaces.


Blessé de la face, un lambeau crânien a été prélevé pour lui reconstruire un semblant de menton

Un laboratoire de prothèses est aménagé dans ces centres. Les mécaniciens-dentistes y fabriquent des appareils prothétiques à partir de moulages. Toutefois, les lésions faciales causent beaucoup plus de troubles psychologiques que physiologiques. En effet, en perdant son visage, le défiguré perd également son identité. Très souvent, il se renferme sur lui-même. Il a dès lors besoin d'être pris en charge par une équipe pluridisciplinaire : spécialistes de la face, kinésithérapeutes, psychiatres...


Prothèse orbitaire

La chirurgie esthétique est une spécialité médicale née de cette guerre. La médecine doit répondre à une nécessité majeure : rendre à tous ces hommes aux visages ravagés une figure humaine. Tous ces blessés vont permettre à la chirurgie restauratrice de la face de réaliser, parfois à leurs dépens, d'immenses progrès.

                     6.2.2.2. Les blessures au ventre

Les projectiles se montrent particulièrement meurtriers et destructeurs. Ils déchirent les corps et rompent les barrières anatomiques protectrices comme le péritoine qui entoure les viscères, la plèvre qui englobe les poumons, ...

Les médecins du front sont les premiers témoins de cette violence. Au début du conflit, ils appliquent le principe dicté à l'entrée en guerre: l'abstention opératoire des blessés à l'abdomen. Celle-ci est systématique : un soldat touché au ventre gravement ou non se voit systématiquement condamné.

Cependant certains praticiens s'insurgent contre cette inertie thérapeutique. Il y a une incompréhension entre les médecins « de la première ligne », souvent jeunes, parachutés sans expérience sur les champs de bataille, et les médecins « de l'arrière » plus expérimentés, mais ignorant tout de la dure réalité du terrain. Le Service de santé veut maintenir loin du front les médecins les plus experts pour les préserver du danger.

Malgré la mortalité élevée de ce genre de lésion (90%)[17], les chirurgiens ne s'avouent pas vaincus. Mais c'est seulement dans la seconde moitié de l'année 1915 que les blessés au ventre sont pris en charge par l'ensemble des chirurgiens. Au fil du conflit, ils constatent que la survie de leurs patients dépend de la rapidité des soins apportés. Ils vont militer afin que les conditions d'évacuation soient meilleures et plus rapides.


Salle d’opération pendant la guerre 14-18

L'évacuation des blessés se révèle cependant souvent difficile : le transport des blessés est lent, les brancardiers doivent se frayer un chemin dans la boue des tranchées. Les blessés sont fréquemment transportés dans de simples toiles de tentes qu'on empoigne aux quatre coins. Il n'y a pas toujours un brancard à disposition.

Comme ces problèmes d'évacuation aggravent considérablement la mortalité au front, grâce à l'insistance des chirurgiens, des postes chirurgicaux avancés voient le jour : les ambulances chirurgicales. Une ambulance chirurgicale est un établissement temporaire construit souvent près du front. Son rôle est de dispenser les premiers soins aux blessés. En général, elle est composée d'une salle d'opération, d'une salle de pansements et d'une installation pour les radiographies.

Comme on le constate, le sort des blessés à l'abdomen est très précaire. Il dépend, non seulement de la gravité des lésions, mais surtout de l'afflux des blessés. Si celui-ci est trop important, les chirurgiens délaissent les blessés du ventre dans le but de sauver un maximum d'autres blessés. Les laparotomies, opérations longues et délicates, monopolisent un chirurgien et plusieurs infirmières pendant plusieurs heures.

Les formations chirurgicales sur le front en période d'offensive doivent remédier à ce problème. La rapidité d'intervention étant un facteur vital, des ambulances automobiles sont donc dépêchées selon les besoins à l'endroit où affluent les blessés.

                     6.2.2.3. Les blessures aux membres

A l'entrée en guerre, les médecins vont essayer de conserver les membres touchés. Mais devant la violence des blessures, l'amputation devient une évidence pour les chirurgiens. « L'amputation est une chirurgie dictée par le champ de bataille:[18] » L'ensemble des chirurgiens semble d'accord, il faut intervenir rapidement sur les blessures aux membres et très souvent l'amputation est la seule solution.

Cependant, leurs avis divergent au sujet de la technique utilisée. L'amputation « en saucisson »[19] remet en cause les techniques préconisées par les chirurgiens de l'arrière. Le monde médical d'abord indigné par cette méthode « barbare » finit par se rendre compte que c'est une intervention beaucoup moins traumatisante qu'une amputation classique. Cette méthode se révèle la meilleure car elle est rapide, facile et surtout efficace.

Au début du conflit, le monde médical réagit par une « non-réponse » à la question de la douleur : « il apparaît en effet plus facile de nier la douleur que d'y répondre.[20] » Le monde médical est dans l'incapacité de soulager la douleur des amputés. Celle-ci concerne la quasi-totalité des estropiés.

« Une fréquence de 98 à 99%. Le phénomène semble donc presque constant. Seuls 1 à 3% des mutilés des membres échappaient à la règle,[21] »

Dans un premier temps, les blessés souffrent d'hallucinose : illusion de la présence du membre. Le mutilé est convaincu de la présence de son membre amputé. Il n'a pas intégré la modification de son schéma corporel. « 95% des amputés ont vu leur membre fantôme apparaître au cours de la première année suivant l'amputation.[22] »

Il y a aussi les douleurs du moignon dont était victime la moitié des amputés. Nombre d'entre eux deviennent morphinomanes. Cette dépendance est jugée à l'époque comme incurable. Beaucoup de mutilés, désespérés, iront même jusqu'au suicide.

              6.2.3. Les soins psychiatriques

                     6.2.3.1. Les automutilations, les maladies ... un refuge?

Les blessures volontaires sont souvent portées aux pieds, aux mains ; celles de la main gauche sont les plus fréquentes. Des coups de feu peuvent aussi être tirés dans les bras, les jambes, ...

Les maladies provoquées n'ont pas été répertoriées, mais le témoignage suivant illustre bien ce qui s'est produit à maintes reprises lors de cette guerre :

« Le docteur Armand Colard, à l'hôpital d'Adinkerke, chargé de soins dans plusieurs salles de malades, fut un jour confronté à une épidémie de jaunisse catarrhale très particulière car caractérisée par le fait étrange que les malades émettaient des urines normales ne contenant pas de bile ni de sels biliaires. Le pharmacien de l'hôpital flaira le pot aux roses et découvrit dans les urines de l'acide picrique qui colorait la peau en jaune et qui avait été ingéré par les fraudeurs. Bientôt, les cinq soldats avouèrent avoir avalé des lamelles de poudre à canon contenant de l'acide picrique.[23] »

Le peu de données médicales et juridiques rend difficile l'évaluation du nombre de mutilations et de maladies volontaires. La médecine légale en est à ses débuts. Le rôle attribué aux médecins est délicat. Certains praticiens sortent de leur rôle premier et deviennent des hommes chargés d'expertises. La moindre erreur de jugement de leur part peut avoir de graves conséquences.

S'ils dénoncent les faux malades ou les soldats qui se sont blessés volontairement, ceux-ci devaient en subir les conséquences judiciaires et donc une condamnation. « Entre août 1914 et octobre 1916, sur 290 exécutions probables, 35 d'entre elles soit environ 12 %, relèvent de « désertion en présence de l'ennemi » sous la forme d'une mutilation volontaire :[24] »

Cela engendre dans le monde médical de sérieux problèmes éthiques et soulève de houleux débats. Progressivement le monde médical va se rendre compte que les souffrances infligées sont des actes désespérés de personnes qui ne supportent plus l'expérience traumatisante de la guerre.

Dès lors, les médecins sont tenus de considérer les maladies et les blessures volontaires comme des cas médicaux à part entière.

                     6.2.3.2. La névrose de la guerre et sa prise un charge sur le front

C'est une névrose qui peut apparaitre sous forme d'angoisse et d'agitation. Les patients souffrent de troubles de la parole, de surdité, de troubles de la marche, ... Malgré l'absence de toute blessure, certains sont incapables de se tenir debout et de marcher.

Le monde médical est conscient que les soldats peuvent être victimes d'une pathologie psychiatrique. Les psychiatres remarquent que si le patient est pris en charge rapidement et traité à proximité du front, ses chances de guérison et de retourner au combat sont grandes. « Les Anglais en appliquant cette méthode réussissent à renvoyer 66% des soldats traumatisés psychiques à leurs unités.[25]»

La psychiatrie de guerre prend donc de l'ampleur pendant le conflit, mais elle ne réussit pas à empêcher l'exécution de nombreux soldats déserteurs alors qu'ils souffrent de toute évidence de névrose de guerre.

                     6.2.3.3. La détresse des gueules cassées

Mais toi, dont le masque effroyable

Est défiguré par l'horreur

Semblable au monstre de la fable

Dont les petits enfants ont peur...[26]

Sur la dégradation physique, des blessés maxillo-faciaux, se greffe une détresse morale. Comment vivre avec des traits hideux, une identité perdue ? Même si à l'époque on ne parle pas d'une prise en charge psychologique proprement dite, le monde médical est conscient que le processus d'acceptation du handicap facial est lent. Il sait aussi que la « guérison » doit se dérouler en deux étapes.

Dans un premier temps, l'équipe médicale, souvent des infirmières, organise la confrontation entre le défiguré et sa famille. Les infirmières ont une tâche délicate à accomplir. Elles préparent les proches au choc, ceux-ci vont retrouver un fils, un frère, un mari méconnaissable.

L'acceptation du blessé par la famille est une étape clé, une absolue nécessité dans la reconstruction d'une nouvelle identité. Si la famille rejette le mutilé par la peur, le dégoût, elle compromet sa réintégration à la vie sociale.

Dans un deuxième temps, le défiguré doit affronter le regard de la société. Certains peuvent ressentir de la fierté : ils se sont battus et ont payé un lourd tribu. Mais ce sentiment est vite gâché par le regard des autres. Ces jeunes visages meurtris deviennent des objets de curiosité, des créatures dont on a peur.

Se reconstruire se révèle donc très difficile tant la crainte, l'angoisse de rencontrer les autres est une terrible épreuve. Celle-ci peut entrainer l'échec du processus d'acceptation. Dans de nombreux cas, les blessés de la face se sont péniblement réintégrés à la vie civile. Beaucoup ont préféré rejoindre les centres pour mutilés. Dans ces endroits protecteurs, ils ont continué à vivre à l'abri des regards partageant le quotidien d'autres gueules cassées.


Invalides de guerre jouant aux cartes (1920) Peinture de l’Allemand Otto Dix (1891-1969) Il relate les horreurs commises pendant la Grande Guerre

La chambre des officiers (2001) est un très beau film qui aborde ce sujet. Si vous ne l'avez pas encore vu, je vous le recommande vivement... Ce film s'éloigne des tranchées pour rejoindre les chambres des mutilés de la face d'un hôpital français après que le visage d'Adrien, le héros ait croisé un projectile. Le metteur en scène François Dupeyron montre très bien le cheminement de ces hommes ébranlés par la défiguration qui essayent de se reconstruire et surtout de s'accepter.


Affiche du film

7. Science et éthique

Science sans conscience n'est que ruine de l'âme[27].

       7.1. Quand la science se met au service de l'armement de guerre

« Entre la science et la guerre, l'alliance est ancienne c'est un pacte indéfectible.[28] » Science et guerre interagissent, elles ont besoin mutuellement l'une de l'autre. Le premier conflit mondial est une guerre qui mobilise tout ce qui est disponible pour anéantir l'ennemi. Elle est industriellement et scientifiquement organisée. La recherche militaire est à l'affût d'innovations. C'est pourquoi des complexes militaro-industriels vont voir le jour. Des ensembles de laboratoires, d'usines étudient et conçoivent des nouvelles armes dans le but de causer un maximum de dégâts corporels. 14-18 est une guerre totale où la science est une partenaire au service de la guerre. La menace vient de partout et amène la mort anonymement. Notamment avec les gaz de combat, elle met en œuvre de nouveaux moyens cruels qui ont pour but de massacrer l'ennemi physiquement et moralement.

La guerre aide également la science en débloquant des sommes d'argent pour la recherche scientifique. Une arme de guerre peut, même si le fait est rare, connaitre un destin heureux. L'Ypérite a connu une histoire étrange. Mortel dans les tranchées d'Ypres, il va devenir un médicament. En 1946, un accident survient à bord d'un navire américain transporteur d'obus d'Ypérite. Cela va entrainer la contamination des membres de l'équipage. On remarque chez eux une diminution des globules blancs. Les oncologues s'intéressent au phénomène et vont l'employer dans le traitement de certains cancers. L'arme de guerre meurtrière est devenue un traitement anticancéreux.

L'éthique ne doit pas être un frein aux progrès scientifiques. Cependant, la science ne peut exister sans une morale qui définit son champ d'action. L'éthique a sa raison d'être, elle doit s'assurer que l'innovation technique ou scientifique ne nuise pas et constitue bien un progrès. Elle veille aussi à ce que la découverte ne soit pas une menace en contradiction avec des valeurs importantes comme les droits de l'homme ou le respect de la vie privée.

Idéalement, avant qu'une avancée ne voie le jour, les chercheurs devraient en analyser les conséquences. Rien ne sert de penser, il faut réfléchir avant[29]. Mais cela est une utopie puisque maints progrès scientifiques sont le fruit du hasard.

La majorité des scientifiques souhaite que la science serve la connaissance et le progrès. Il n'y a pas de bonne ou de mauvaise science. Celle-ci ne se met pas hors-la-loi. C'est l'usage que l'Homme en fait qui détermine dans quelle catégorie il faut classer une découverte scientifique. Une découverte aussi noble soit-elle peut, dans de mauvaises mains, devenir une arme redoutable.

       7.2. Les médecins face à l'horreur de la guerre

La Grande Guerre soulève des questions médicales et éthiques[30] inédites auxquelles les soignants doivent répondre dans l'urgence. A l'entrée en guerre, face à la gravité des blessures, ils sont démunis, dépassés mais ils vont rapidement se ressaisir. Ainsi, ils vont se remettre en cause et adapter leurs attitudes thérapeutiques à la réalité du terrain.

Sophie Delaporte dans son livre Gueules cassées nous dit que « les mutilés de guerre ont constitué un véritable « matériel humain » objets d'expérimentation ou d'acharnement thérapeutique[31] ». Le docteur Loodts ne partage pas cet avis. Pour lui, au fur et à mesure des opérations, les chirurgiens acquièrent plus d'expérience, d'assurance ; ils modernisent leurs techniques et les perfectionnent. Ils expérimentent aussi de nouvelles pratiques avec, certes, des réussites, mais surtout beaucoup d'échecs. Dans le but de sauver des vies, les médecins sont en constante recherche. Mais qui dit recherche dit essais, tests, expériences et donc, fatalement, erreurs, approximations, ratés...

Au début du 20ème siècle, l'éthique médicale est peu présente. La déontologie n'est pas encore régie par un code. Le médecin est une personne respectée qui ne doit rendre des comptes à personne. Il est seul juge. La concertation médicale n'est pas systématique. L'unique mot d'ordre est de ne pas nuire à la vie humaine.

Y a-t-il eu des expérimentations en 14-18 ? Certainement, dans l'urgence, devant des cas désespérés, des médecins ont-ils tout tenté pour maintenir en vie des jeunes soldats ou pour leur assurer des conditions de vie plus supportables.

Les médecins du front ont ignoré les ordres de leurs supérieurs quant à l'abstention opératoire pour les blessures au ventre. Malgré la forte mortalité de ce genre de blessures, ils se sont mobilisés et ont opéré. Les innombrables blessés leur ont permis de multiples opérations, des essais de traitements divers et variés ainsi que de nombreuses recherches dans différents domaines.

Certains hommes de sciences ont-ils opéré, soigné dans l'unique but d'expérimenter ? Nul ne le sait !

Mais c'est plus que probable ! C'est aussi pendant cette guerre que le monde médical se rend compte qu'une médecine spécialisée est nécessaire devant la diversité des pathologies et des cas médicaux. Le docteur Depage dans son hôpital l'Océan l'a bien compris. Il y invite de nombreux confrères. Pour partager leurs pratiques, leurs expériences et leurs recherches. Ainsi, ils vont faire progresser la médecine à tel point que l'Océan va devenir un modèle de recherche dans le monde médical.

Les praticiens de l'époque font évoluer la science, mais jusqu'à quel point peuvent-ils aider les malades, les blessés ? Où commence l'acharnement thérapeutique ? Où sont les limites du maintien en vie ? Ces questions d'éthique médicale existeront tant que les hommes feront preuve de responsabilité, de questionnement, de recherche et de discernement.

8. Conclusion

14-18 est un défi lancé aux scientifiques. Dans cette guerre totale, les militaires et les dirigeants de chaque pays se sont donné les moyens pour gagner et écraser l'ennemi. De grandes sommes d'argent ont été investies dans la production de matériel de guerre qui s'est très fortement modernisé. Un nouveau type d'armes est également apparu, les gaz ont modifié le visage du conflit et ont eu une incidence sur le moral des troupes. Pour gagner cette guerre, la volonté des armées est le rétablissement rapide des soldats blessés.

A l'entrée en guerre, les médecins ne sont pas préparés à faire face à la masse et aux types des blessés. Pendant quatre années, le corps médical, sans être régi par un code, va se mobiliser et tout tenter pour améliorer la vie de ces hommes qui se battent dans les tranchées. Les traumatismes physiques et psychologiques sont importants.

Par la force des choses, la médecine se voit propulsée sur le devant de la scène. Grâce à la volonté des hommes, des avancées médicales vont naitre du chaos de ce premier conflit mondial.

A l'entrée en guerre, les microbes tuent autant que les obus. L'hygiène s'impose et devient une alliée efficace. Les sérums et les vaccins sont utilisés à bon escient. Grâce à l'audace de certains, des innovations médicales se répandent dans les différents hôpitaux du front. Je pense au docteur Depage qui va accueillir à La Panne plusieurs spécialistes. Son hôpital va ainsi devenir un modèle et un centre de recherches. J'évoque aussi Marie Curie qui propage l'imagerie médicale.

Les avancées majeures nées de cette guerre sont nombreuses. Le traitement de Carrel-Dakin contre la gangrène évite les amputations, les techniques opératoires se perfectionnent et sauvent des vies.

La psychiatre n'est plus considérée comme une médecine accessoire et tente de s'imposer. Pour moi, l'innovation principale est la chirurgie esthétique. En effet, les opérations réussies ou non effectuées sur les nombreuses « Gueules Cassées » ont permis à cette spécialité de voir le jour et de se développer.

La première guerre mondiale est donc bien un labo à ciel ouvert où de nouvelles techniques médicales ou scientifiques sont explorées. Cela a un impact important sur la médecine civile et militaire de l'après-guerre. Ce conflit lui a donné une impulsion. Il a considérablement influencé l'enseignement dans les facultés de médecine et dans les écoles de soins infirmiers. Les progrès scientifiques et médicaux de ce conflit ont contribué à façonner la science et la médecine d'aujourd'hui.

Au début de mes recherches, le sujet me paraissait complexe. J'ai eu la chance de rencontrer monsieur Loodts, un médecin, passionné d'histoire et particulièrement de la guerre 14-18. Il est l'auteur de La Grande Guerre des soignants. La lecture de son livre a donné à mes recherches un éclairage nouveau et m'a permis de mieux en préciser les composantes.

Au fil de mes découvertes, j'étais très impressionnée par ces hommes qui, dans un chaos indescriptible, ont repoussé leurs limites et celles de la science pour sauver un maximum de vies.

Ce travail m'a beaucoup apporté et m'a permis de mieux comprendre la relation entre l'Histoire, la science et l'éthique, trois domaines intimement liés. Je jette désormais un regard nouveau sur cette guerre. Deux sentiments ambivalents m'habitent. D'un côté, la guerre avec toutes ses cruautés et ses malheurs. De l'autre, la formidable mobilisation du monde médical qui fait de cette guerre un champ d'expérimentation dans lequel l'Homme est sans cesse amenés à se surpasser.

D'un point de vue personnel, le temps est venu de faire un choix. J'ai le projet de travailler dans le domaine des soins et santé. Ce travail m'a conforté dans cette idée.

9. Annexe (interview)

J'ai interviewé monsieur Loodts le samedi 5 mars 2011 à son domicile, à Cras-Avernas. J'ai retranscrit ses paroles fidèlement.

Patrick Loodts est docteur en médecine depuis 1977. Il a deux passions dans la vie : la médecine et la recherche historique. En 2000, il découvre la correspondance de guerre de René Glatigny, le grand oncle de son épouse. Il va alors conjuguer ses deux centres d'intérêt et commencer ses recherches qui aboutiront à la réalisation d'un livre La Grande Guerre des soignants.

1. Sophie Delaporte a écrit dans son livre Gueules cassées à la page 216 : « Les mutilés ont constitué un véritable « matériel humain », objets d'expérimentation ou d'acharnement thérapeutique ». Etes-vous d'accord ?

Je dirais non pour l'acharnement thérapeutique parce que ces médecins-là essayaient vraiment de rendre un visage à ces grands mutilés. Sans visage, des romans ou des films montrent que la vie de ces gens-là était tout à fait détruite : leurs fiancées les quittaient, ils ne savaient plus où se mettre, ils devaient porter même une sorte de bavette parce qu'ils continuaient à baver, ... S'ils avaient la mâchoire cassée, la bouche restait entre-ouverte, donc c'était invivable en société. Sachant cela, c'est vrai que les médecins ont expérimenté beaucoup de techniques différentes avec des réussites et beaucoup de ratés, mais je crois que les médecins ne faisaient pas cela pour faire des expériences parce que les douleurs, les douleurs psychologiques de quelqu'un qui était blessé au visage étaient vraiment affreuses...

2. En tant que médecin qu'en pensez-vous ?

Pour les raisons psychologiques ou psychiatriques que je viens de vous expliquer, je pense que c'est une bonne chose. Le visage est quand même le miroir de l'âme de quelqu'un. Quand vous regardez les yeux, le visage de quelqu'un qui est défiguré c'est très difficile. Toute sa vie sociale est réduite à néant. Il faut tout tenter pour les aider. C'est vrai, pendant la guerre 14-18, on ne connaissait rien. Comment secourir ces traumatisés de la face ... On a expérimenté beaucoup de techniques différentes à ce propos... Outre la chirurgie réparatrice qui avait parfois de très mauvais résultats, on faisait aussi des prothèses pour remplacer le nez, un œil, et même les oreilles, etc. On s'est aperçu que les soldats ne les supportaient pas. Finalement ils en revenaient à mettre un masque, une sorte de bavette. Mais on a vraiment tout essayé, donc je crois que c'est dans un but louable. Ce n'est pas pour expérimenter ou faire de la médecine expérimentale.

3. Quels étaient les soins prodigués aux soldats gazés?

Les traitements étaient souvent des traitements de survie. Surtout l'Atropine. Quand une personne est gazée, tout ce qui peut se contracter se contracte. En gros, les bronches se contractent, elle souffre d'asthme et elle ne sait plus respirer... Au niveau cardiaque, elle fait de l'hypertension. Au niveau de l'intestin cela se contracte. Elle a des troubles gastro-intestinaux. Donc il faut tout relâcher, et l'Atropine, en injection, peut aider en urgence à contrecarrer ces effets-là. Mais indépendamment de cela, quand l'attaque pulmonaire est grave, les séquelles restent importantes. Comme moyen d'urgence, il y a aussi l'oxygène, la victime en manque puisque ses bronches sont contractées. Un effet plus grave aussi est le gaz qui pénètre au fond des poumons. Il y a un œdème c.à.d. du liquide sort des capillaires qui sont collés au niveau des alvéoles et le patient se noie. Les poumons se remplissent de liquide. C'est ce qu'on appelle un œdème pulmonaire. Il faut lutter contre... Des mesures d'urgence existaient, mais il fallait encore un hôpital ou des médecins tout près Il y avait aussi plusieurs gaz ... Le chlore était un irritant général, l'Ypérite était déjà plus dangereux… Dans les hôpitaux, les premiers soins étaient des soins avec de l'oxygène. Par exemple à l'hôpital l'Océan, on a installé un premier réseau de distribution d'oxygène pour les gazés. Cela ne s'était jamais vu avant. Maintenant on voit cela dans tous les hôpitaux, dans les ambulances, ... C'était le premier emploi de l'oxygène. On utilisait des médicaments en injection pour soutenir le cœur : huile camphrée, des choses comme ça..., des huiles censées soutenir un peu le cœur. Il n'y avait pas grand chose. On essayait que les gens survivent dans les meilleures conditions. Mais les gens mouraient beaucoup de complications.

Quand la muqueuse était atteinte par les gaz, les poumons devenaient plus fragiles et donc moins résistants aux microbes. Ces gens-là faisaient beaucoup de bronchites, de pneumonies. Après la guerre, on ne connaissait pas encore les antibiotiques donc quand quelqu'un attrapait une pneumonie, on ne savait pas vraiment la combattre. On attendait que la nature fasse son travail. On donnait de l'oxygène, des sirops, des fluidifiants du genre eucalyptus... On faisait cracher, on combattait la température, les fièvres, les microbes. Il faudra attendre la deuxième guerre mondiale pour connaitre le premier antibiotique : la pénicilline. Sans antibiotique on est très démuni. Tous ces soldats qui ont été victimes d'attaques au gaz et qui ont survécu, avaient leurs muqueuses fragilisées. Ils devenaient bronchitiques-chroniques. Ils risquaient alors l'emphysème : une partie du poumon ne travaille plus, se cicatrise et se fibrose. Donc on perd toute une partie de l'apport en oxygène. On est moins oxygéné, on devient essoufflé. On a un handicap. Beaucoup de soldats gazés après la guerre 14-18 ont gardé des séquelles le restant de leur vie.

A cause de leurs poumons fragiles, de leurs bronchites chroniques, il y a une maladie que l'on attrapait très facilement, c'est la tuberculose. Elle est fort liée aux soldats qui survivaient aux gaz. Après la guerre, il y avait une grande fréquence de tuberculeux chez les bronchitiques chroniques. Le seul traitement était le repos, le soleil et manger gras. On a aussi créé des sanatoriums. Il y avait aussi des opérations. On coupait les côtes car les microbes se retrouvaient sans oxygène et mouraient. Mais c'est vrai que c'est une opération barbare... Cela ralentissait la maladie et parfois les malades guérissaient mais ils manquaient d'oxygène comme une partie du poumon ne fonctionnait plus...

4. Selon vous, quelles ont été les plus grandes avancées médicales durant la première guerre mondiale ?

    • La kinésithérapie est une grande avancée de la guerre 14-18. Il faut réapprendre à respirer comme il faut, les faire cracher. C'est un médecin suédois qui a inventé cette spécialité. Des hôpitaux faisaient appel à ces médecins pour monter le premier service de kinésithérapie en France.
    • On ne connaissait pas bien l'oxygénothérapie avant la Grande Guerre. On a installé cela dans les hôpitaux pour répondre aux besoins des gazés.
    • La découverte contre la gangrène gazeuse. La seule solution était l'amputation car l'infection se transmettait au sang, contaminait tout le corps et entrain ait la mort. On devait donc couper avant que l'infection arrive dans les vaisseaux sanguins, avant que les tissus ne prennent une teinte noirâtre. La gangrène est une couse de mortalité importante. Plus ou moins 75% y survivaient car l'état des artères des soldats étaient bon. C'était des jeunes de 20 ans en bonne santé, résistants, avec des organes sains donc seulement 25 % refaisait une gangrène. Beaucoup de médecins se sont penchés sur ce problème. Ils ont utilisé de l'iode pur, du mercure, etc. Ces produits désinfectaient mais brûlaient la peau, les muscles. Ils détruisaient tout, ils faisaient plus de mal que de bien. Les médecins ont donc cherché une substance qui désinfectait sans brûler les tissus. C'est le docteur Carrel qui l'a inventée avec un chimiste nommé Dakin et qui l'a expérimentée en France. Cependant les autres médecins militaires français étaient jaloux de lui. On ne lui a donc pas envoyé beaucoup de patients... Le docteur Depage a invité Carrel dans son hôpital l'Océan à La Panne pour venir expliquer cette méthode. Cette technique a rencontré beaucoup de réussite et le nombre d'amputations a diminué fortement. Les Anglais qui étaient près de la Somme ont testé ce produit sur leurs soldats. Ils étaient méfiants surtout Fleming. Ils ont émis des critiques. Finalement, on a constaté que la solution n'était pas tellement importante. Ce qui comptait c'était d'irriguer les plaies et non le produit utilisé.
    • C'est également le début de la chirurgie orthopédique. En 1913, un médecin anversois a inventé cette spécialité...
    • La radiologie est aussi un grand progrès. C'est la guerre qui va développer cette spécialité grâce à Marie Curie, entre autres... Ce qui est aussi extraordinaire : des médecins vont essayer de localiser les projectiles avec la radiologie. On va faire plusieurs radios appelées stéréo radiologie pour savoir exactement où se trouve le projectile. Avant, le chirurgien opérait un peu à l'aveuglette.
    • La chirurgie réparatrice a fait d'énormes progrès surtout en France. En Belgique, on avait moins de blessés de la face et ils étaient envoyés en France. Le roi Albert avait fait en sorte de limiter au maximum les offensives des soldats. Tandis que les Français ont envoyé leurs soldats au massacre (chemin des Dames, Verdun, ...). Ils ont eu des combats beaucoup plus agressifs que nous. Les Belges avaient plus de combats de résistance.

On a aussi fait des progrès pour les blessés au ventre. Ceux-ci mourraient par septicémie car les microbes favorisant la digestion dans les intestins se retrouvaient dans le sang et contaminaient tout le corps. Quelqu'un de blessé au ventre était quelqu'un de perdu pour les médecins militaires. Malgré tout, les chirurgiens intervenaient, en sachant qu'ils allaient mourir. Ils avaient 95 chances sur 100 de décéder. Les médecins les opéraient pour les 5% de miraculés qui pouvaient survivre. C'était un acte héroïque d'opérer, en se disant que dans la majorité des cas, cela ne sert à rien. Ils l'ont fait quand même. C'est vraiment une lutte pour la vie... Les médecins ont réfléchi aussi que s'ils opéraient rapidement après le traumatisme, les chances de survie étaient bien meilleures. La grande découverte du docteur Depage est d'avoir fait des petites installations, des hôpitaux mobiles que l'on allait installer près des tranchées. Les statistiques montraient que plus vite on opérait un blessé au ventre, plus il avait de chances de s'en sortir.

    • Une autre découverte dans la chirurgie par le docteur Willems, un Belge : lorsqu'on a une articulation infectée, il ne faut pas la laisser immobile mais bouger avec pour faire sortir le pus. C'est quelque chose d'extraordinaire car grâce à cette découverte on a sauvé beaucoup d'articulations qui, autrement, restaient ankylosées pour toute la vie.
    • L'innovation en matière de neurochirurgie. Cette spécialité était pratiquée par le docteur Cushing, un Américain. Il préférait prendre son temps pour opérer. Ces patients survivaient. Tandis que ceux de ses collègues qui opéraient plus rapidement mouraient...

5. Si vous deviez en choisir une seule, quelle serait la plus incontournable ou la plus révolutionnaire ?

Pour moi, c'est vraiment, comme je vous l'ai expliqué précédemment, le traitement contre la gangrène gazeuse qui est l'une des avancées majeures de cette guerre.

6. Le nombre de soldats belges décédés de maladie est énorme 14 029 décès pour 26 338 morts au combat ou d'accident. Quelles étaient ces maladies ?

Il y avait la tuberculose, la pneumonie, la gangrène. Il y avait aussi la fièvre typhoïde, la dysenterie, la grippe espagnole. Comme on n'avait pas d'antibiotique, les gens sont morts. Ils étaient affaiblis ... En plus, si le moral ne suit pas et la nourriture non plus... Pour la Belgique, il y a eu beaucoup de morts par maladies au front...

7. Y a-t-il une évolution pendant le conflit ?

Il y a eu une évolution pour le nombre de cas de tétanos. Cette maladie infectieuse est causée par des plaies sales au début de la guerre. On ne donnait pas assez souvent le sérum donc les gens mouraient dans d'affreuses souffrances. Les médecins ont rapidement pris des mesures et ils ont commencé à donner le sérum antitétanique à tous les gens qui avaient des plaies sales. Donc, on a vraiment vu le nombre de décès diminuer fortement. Avec la fièvre typhoïde, au début de la guerre, on en a eu beaucoup. Puis, on a instauré la vaccination et on a eu de très bons résultats. C'est vraiment aussi le début de la recherche comme à l'hôpital l'Océan ...

8. Pensez-vous que la première guerre mondiale ait permis à la médecine de réaliser des progrès considérables dans un laps de temps très court ?

Oui évidemment ! Même si on n'a pas découvert de remède miracle, les médecins ont réfléchi. Désormais ils veulent une meilleure organisation. Ils mettent sur pied une médecine moderne. Ils font des recherches intensives et consacrent de l'argent à des recherches médicales. 14-18 a donné une impulsion à la recherche scientifique et une méthodologie.

  •  Les soins infirmiers se sont développés. Cela a été capital et c'est devenu un vrai métier.
  • La naissance de la médecine spécialisée. On s'aperçoit que le médecin ne sait pas se consacrer à toutes les disciplines de la médecine et qu'il faut vraiment se spécialiser.
  • La lutte contre les microbes. Bien que les médecins ne disposent pas de grand chose, l'irrigation des plaies a été très importante...
  • L'anesthésie a aussi été améliorée. Pendant la guerre c'était un brancardier qui anesthésiait.

Mais après, cela est devenu une spécialité à part entière...

9. L'intérêt de la science n'a-t-il pas prévalu sur celui des blessés?

Non, il y avait encore trop de découvertes à faire en médecine. C'était l'urgence, agir dans l'urgence. Des étudiants en médecine étaient même pris comme médecins. Pour guérir le syndrome post traumatique, des médecins ont un peu tenté n'importe quoi avec des courants électriques et d'une manière un peu non considérée, critiquée par après. C'était un peu n'importe quoi. Il faut dire qu'on n'avait pas encore l'éthique comme on a maintenant. Maintenant, on fait des expériences, il faut bien planifier, il faut demander l'autorisation, ... A cette époque, les médecins étaient des dieux qui faisaient n'importe quoi. Ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient. Ils ne devaient rendre des comptes à personne. Les malades n'avaient pas accès à leur dossier médical qui n'existait peut-être même pas...

Les médecins étaient des dieux intouchables ...

10. Que pensez-vous de la science quand elle se met au service de l'armement de guerre ?

C'est aussi une question d'éthique. Au départ, on a développé des recherches dans ce sens là en disant que l'on doit défendre son pays. Mais cela a abouti à la recherche sur les gaz, à la bombe atomique, aux bombes à fragmentation... Je pense que les médecins qui ont prêté serment ne peuvent pas s'engager dans cette voie là. Ça c'est clair ! Mais il y en a toujours qui vont le faire, soit pour l'argent, soit pour la promotion ou le pouvoir. La science ne devrait pas s'occuper de matière de destruction mais comment empêcher cela. Ce sont des questions d'éthique qu'il faut pourtant soulever. Pour chaque découverte, on doit se poser des questions et on ne s'en pose pas assez. Il faut réfléchir à toutes les conséquences de ses actes ...

11. Pourquoi parle-t-on seulement de 14-18 aujourd'hui ?

Pendant la guerre, beaucoup de soldats écrivaient dans de petits carnets. Puis, avec la souffrance de la guerre, ils n'ont pas voulu parler de cela, à leur femme, leurs enfants. Ils ont contenu leurs souvenirs et ils ont gardé leurs carnets. A cette époque, avec la mentalité de la religion chrétienne, il fallait souffrir en silence et ne pas partager ses malheurs. Seul Dieu pouvait les recevoir.

On pouvait montrer sa souffrance. Par exemple, les veuves s'habillaient en noir, mais personne n'en parlait. Les soldats revenus du front n'allaient pas pleurer chez un psychothérapeute. Ils ne racontaient pas, à personne, mais on voyait leur détresse. La mentalité était de garder sa douleur et ne pas la partager. Ainsi, ils se montraient courageux et nobles. Or, pour la psychologie, parler est important. Cela a donc été un obstacle à la diffusion de l'histoire des combattants, de ce qui s'était vraiment passé. L'histoire de ceux qui ont souffert...

Au moment où les enfants des soldats de 14-18 devenus grands ou les petits-enfants ont voulu savoir ce qui s'était passé dans les tranchées, la deuxième guerre mondiale éclatait. Cette seconde guerre a aussi été une masse de souffrance et on a oublié celle de la première guerre. Pour oublier les traumatismes de la deuxième guerre mondiale, il a fallu des années et de années... Et c'est seulement maintenant que l'on se rappelle de la première guerre mondiale, que l'on retrouve la mémoire. Les gens découvrent dans un grenier les carnets de leurs grands-parents, arrière grands-parents... C'est pour cela qu'il y a beaucoup d'écrits, il va y avoir 100 ans...

En conclusion je suis émerveillé de la résistance de l'être humain. Ces jeunes soldats ont traversé des malheurs, ils ont souffert physiquement et moralement. Je suis admiratif de l'audace des médecins qui opéraient, par exemple, les blessés du ventre sachant que 95 % allaient mourir et qui passaient des nuits à opérer, debout. Même dans les situations désespérées, il faut continuer à lutter pour un monde meilleur même si on croit que c'est la fin du monde...

10. Bibliographie

       10.1. Ouvrages

              10.1.1. Ouvrages complets

- BINDER, Patrice et LEPICK, Olivier, Les armes biologiques. Paris: Puf, 2002, 125 p. (Que sais-je ?, n° 3599)

(Intéressant, les auteurs expliquent les différentes armes d'origine biologique, leurs utilisations pendant la première guerre mondiale et dans l'Histoire en général)

- DELAPORTE, Sophie, Gueules Cassées: les blessés de la face de la Grande Guerre. Clamecy : éditions Noesis, 1996, 230 p.

(Cet ouvrage m'a grandement aidée pour comprendre ceux que l'on nomme les « Gueules Cassées ». L'auteur décrit très bien sans entrer dans des détails pesants, les douleurs physiques et psychologiques des blessés de la face. Les chirurgies testées et les soins prodigués sont également expliqués.)

- DELAPORTE, Sophie, Les médecins dans la Grande Guerre (1914-1918). France, éditions Bayard, 2003, 224 p.

(Ce livre m'a été très utile. Avec un vocabulaire accessible, sans se cacher derrière des termes trop scientifiques, S. Delaporte aborde les problèmes médicaux et éthiques qui vont être posés aux médecins durant les quatre années de guerre.)

- DELRUE, Nadine, Réfléchir les sciences, éléments d'éthique et d'histoire des sciences. Namur : éditions Erasme, 1998, 109 p.

(Ce livre m'a déçue. Le titre ne reflète pas le contenu. Les sujets principalement traités sont l'éthique et la science d'aujourd'hui avec ses manipulations génétiques.)

- DEMORY, Jean-Claude, L'aventure des soldats de 1914-1918. Paris : Hachette Collections, 2004,285 p.

(Très intéressant, la Grande Guerre est abordée dans sa globalité. Ce livre m'a surtout permis d'étudier les armes utilisées et leurs conséquences.)

- EVEILLARD, James et HUCHET, Patrick, Il y a un siècle... une médecine si étrange. Rennes : éditions Ouest-France, 2006, 143 p.

(Important pour prendre connaissance de l'état de la médecine avant la guerre. Avec simplicité, les auteurs expliquent les pratiques médicales du début du 20éme siècle. De nombreuses photos et dessins agrémentent cet ouvrage.)

- GORNY, Philippe, L'Aventure de la Médecine. Paris : éditions JC Lattès, 1991, 383 p.

(Utile pour bien comprendre et définir l'éthique médicale.)

- Sous la direction de GUENO, Jean-Pierre et LAPLUME, Yves, Paroles de Poilus, Lettres et carnets du front (1914-1918). Péissneck : Flammarion, 1998, 185 p.

(Ce livre est prenant. Il rassemble les lettres et les carnets des soldats envoyés au front. Il m'a permis de me rendre compte du quotidien, des souffrances des soldats et de la dure réalité des tranchées...)

- KREMER-MARIETII, Angèle, L'éthique. Paris : Puf, 1987, 127 p. (Que sais-je ?, n°2383)

(Aborde l'éthique en général et cela est assez compliqué. Cet ouvrage ne m'a aucunement aidée pour ce travail.)

- LE NAOUR, Jean-Yves, La Première Guerre mondiale pour les Nuls. Paris : éditions First, 2008, 315 p.

(La première guerre mondiale y est expliquée de manière simple et utile. Dans ce livre, les différentes facettes de la guerre sont évoquées. L'auteur donne des pistes pour en savoir plus. Les caricatures sont pertinentes et agrémentent cet ouvrage agréable.)

- LE PETIT LAROUSSE ILLUSTRE, Dictionnaire, 1997

(Utile tout au long de mon travail.)

- LEPICK, Olivier, La Grande Guerre Chimique (1914-1918). Paris : Puf, 1998,351 p.

(Intéressant, cela m'a fait comprendre le pourquoi de l'utilisation des armes chimiques, qui les a employées et leurs conséquences. Il explique la guerre chimique en long et en large et donne beaucoup de détails sur celle-ci.)

- LEPICK, Olivier, Les armes chimiques. Paris: Puf, 1999, 127 p. (Que sais-je ?, n°3472)

(Ce livre est très intéressant, il parle des différentes armes chimiques à travers l'histoire. Il les définit et les explique. Il permet de cerner le sujet sans entrer dans les détails.)

- LOODTS, Patrick et MASSON-LOODTS, Isabelle, La Grande Guerre des soignants (médecins, infirmières et brancardiers de 1914-1918). Bruxelles : les éditions de la mémoire, 2008, 575p.

{collection Arès} (Je me suis beaucoup servie de cet ouvrage. Il se penche sur les différentes problématiques rencontrées par le monde des soignants. Au travers de témoignages de médecins, d'infirmières, les progrès médicaux, les innovations techniques sont expliquées. De plus, des photos d'époque viennent enrichir ce livre. Il a été le point de départ de mes recherches.)

- PIERRE, Michel, Une autre histoire du XXe siècle : 1910/1920 : Un monde en guerres. Paris : Découvertes Gallimard, 1999, 160 p.

(Ouvrage intéressant, mais les documents proposés ne sont pas assez précis et donc inutilisables.)

- PRIOR, Robin et WILSON, Trevor, La Première Guerre mondiale 1914-1918. Paris : Autrement, 2001, 224 p. (Atlas des Guerres)

(Ce livre parle du conflit de ses origines à la libération. Je trouve dommage que le déroulement du conflit soit uniquement expliqué pour le front est.)

- Sous la direction de PROCHASSON, Christophe et RASMUSSEN, Anne, Vrai et faux dans la Grande Guerre. Paris : La découverte, 2004, 360 p. (L'espace de l'histoire)

(Ouvrage compliqué et vocabulaire spécifique. Il est cependant pertinent car il analyse les différentes composantes de cette guerre avec comme seul fil conducteur l'esprit critique.)

- Sous la direction de VAN DAMME, Guido et MAURY, Pierre et SCHWILDEN, Walter, Le Soir : un siècle d'actualités (100 ans). Bruxelles : Le Soir, 1987,416 p.

(Il est curieux de savoir de quelles informations le peuple disposait et surtout sur le début de la guerre chimique en 1915.)

               10.1.2. Parties d'ouvrages

- BONAH, Christian, Des bonnes mœurs et de l'honnête-homme à la bioéthique : jalons pour une histoire de l'éthique biologique et médicale en France. In : Histoire de l'expérimentation humaine en France : Discours et pratiques 1900-1940. Paris : Les Belles Lettres, 2007, pp.51- 75.

(Ce chapitre est compliqué et utilise des termes trop scientifiques. Cependant, le point de vue éthique développé est très intéressant.)

- Sous la direction de DAHAN, Amy et PESTRE, Dominique, Le nouvel univers des sciences et des techniques. In : Les sciences pour la guerre. Paris : éditions de l'Ecole de hautes écoles en sciences sociales, 2004, pp.13-26.

(Aborde un point de vue intéressant sur la science au service de la guerre. Malgré un vocabulaire compliqué, ce livre m'a aidée dans mes recherches. « Quand la science se met au service de l'armement de guerre », point 7.1. de mon travail.)

- DE SCHAEPDRIJVER, Sophie, L'Yser : le front belge et la guerre des tranchées (novembre 1914 - septembre 1918). In : La Belgique et la Première Guerre mondiale. Bruxelles : P.I.E., 2004, pp.171-211.

(Constructif pour la partie historique du travail et pour ma culture générale : l'histoire des poilus belges au front et les rivalités Nord-Sud propres aux Belges.)

       10.2. Sites Internet

- DROUIN, Josée Nadia, Les grondes dates de l'histoire du monde [en ligne]. Disponible sur

site (consulté le 30 octobre 2010 à 12h29)

(Ce site n'est pas adéquat. La chronologie présentée est peu précise et à mon avis incomplète.)

- HALIOUA, Bruno, Histoires de médecine (1914-1928) [en ligne]. Disponible sur

Histoitre médecine (consulté le 24 octobre 2010 à 16h46)

(Intéressant au niveau des progrès médicaux lors de la première guerre mondiale surtout sur la chirurgie.)

- INCONNU, Citations et proverbes [en ligne]. Disponible sur Citations et proverbes (consulté le 2 avril 2011 à 11h43)

(Site utile pour trouver des citations.)

- LAGOLNITZER, Daniel et KOCH-MIRAMOND, Lydie et RIVASSEAU, Vincent, La science et la guerre : la responsabilité des scientifiques [en ligne]. Disponible sur

La science et la guerre > (consulté le 22 octobre 2010 à 17h30)

(Explique la guerre chimique lors de la première guerre mondiale mais la partie concernant l'implication des scientifiques n'est pas accessible techniquement.)

- LEGREY, Lucien, Deuxième bataille d'Ypres [en ligne].

<Deuxième bataille d'Ypres> (consulté le 4 novembre 2010 à 15h26)

(Très intéressant mais les informations présentées ont dû être recoupées avec d'autres sources.)

- LOODTS, Patrick et DE LOOK, Francis, Médecins de la Grande Guerre [en ligne]. Disponible sur

< Vous êtes dessus> (consulté le 4 novembre 2010 à 16h10)

(Source complémentaire d'informations au livre de P. Loodts, suscite la curiosité sur le service de santé et les médecins belges qui ont œuvré durant la grande guerre. De plus, ce site propose une multitude de photos d'époque.)

- PESTRE, Dominique, Guerre et science : un pacte indéfectible ? [en ligne]. Disponible sur

<Guerre et sciences /> (consulté le 23 octobre 2010 à 15h30)

(Pour D. Pestre, les sciences font partie de l'industrie et de la guerre. Elles visent à maitriser le monde. Son avis est intéressant.)

- RASMUSSEN, Anne, 14-18 : du laboratoire médical au champ de bataille [en ligne].

Disponible sur <du laboratoire médical au> (consulté le 23 octobre 2010 à 15h45)

(Le point de vue d'A. Rasmussen est pertinent, les microbes sont plus redoutables que les armées.)

- SAVALLE, Bernard, La chambre des officiers [en ligne]. Disponible sur <La chambre des officiers>

(consulté le 20 mars 2011 à 21h14)

(Affiche du film et informations générales.)

- T., Cedric, Découverte du sérum contre la diphtérie, par Pierre Roux [en ligne]. Disponible sur

<Découverte du sérum> (consulté le 19 février 2011 à 13h55)

(Informations sur le docteur Roux et ses recherches.)

- TREMBLAY, Bruno, Les amputations [en ligne]. Disponible sur

<Les amputations> (consulté le 20 mars 2011 à 20h20)

(Explication sur les différents types d'amputations déjà réalisées.)

- WORLDLlNGO TRANSLATIONS LLC, Gaz de poison dans la Première Guerre Mondiale [en ligne]. Disponible sur <Gaz de poison> (consulté le 30 octobre 2010 à 16h14)

(Intéressant. Ce site explique l'utilisation des gaz toxiques lors de la guerre.)

       10.3. Sources iconographiques de la page de couverture

De gauche à droite:

INCONNU, Soldats britanniques dans leur tranchée, 1917 sur le site Soldats britanniques dans leur tranchées> (consulté le 13 novembre 2010 à 18h20)

- EVEILLARD, James et HUCHET, Patrick, Il y a un siècle ... une médecine si étrange. Rennes : éditions Ouest-France, 2006, p.2

- Auteur inconnu, La délégation des Gueules cassées à Versailles, le 28 juin 1919.

[histoire-image.orgjphotojportfoliojdell_anonyme_OOli.jpg] sur le site histoire-image.org

[en ligne]. Disponible sur <La délégation des Gueules cassées à Versailles> (consulté le 29 mars 2011 à 19h55)

 

 

 



[1] Antoine Depage, médecin belge, a dirigé l'hôpital l'Océan de la Panne pendant la première guerre mondiale.

[2]L'ambulance en 1900 désigne un hôpital militaire qui suit une armée ou un corps d'armée pour en recueillir les malades et des blessés. C'est donc un hôpital de fortune qui reçoit les blessés les plus graves.

[3] DELAPORTE, Sophie, Gueules Cassées, les blessés de la face de la Grande Guerre, Clamecy, éditions Noesis, 1996, p.17

[4] « L'arme chimique est une arme libérant une substance chimique qui lors d'une opération militaire a pour effet de tuer, de blesser ou d'incapaciter temporairement un homme par les effets psychologiques qu'elle provoque. » LEPICK,Olivier, La Grande Guerre Chimique (1914-1918), Paris, Puf, 1998, p.11

[5] DEMORY, Jean-Claude, L'aventure des soldats de 1914-1918, Paris, Hachette Collections, 2004, p.25

[6] BINDER, Patrice et LEPICK,Olivier, Les armes biologiques, Paris, Puf, 2002, p.7

[7] Emil Adolph von Behring (1854-1917), médecin allemand, réalise des travaux sur l'immunologie.

[8] Emile Roux (1853-1933), médecin français, travaille sur la microbiologie et l'immunobiologie.

[9] Louis Vaillard (1873-1904), médecin français.

[10] Louis Pasteur (1822-1895), grand chimiste et biologiste français, est le premier à avoir découvert un vaccin.

[11] Sir Almroth Wright (1861-1947), médecin anglais, est un grand bactériologiste. Un de ses assistants n'est autre que Fleming (1881-1955), celui-ci découvrira la pénicilline en 1928.

[12] Dictionnaire Larousse illustré 1997, p.850

[13] Voir l'interview en annexe.

[14] « L'emphysème est un gonflement produit par le dégagement de gaz dans le tissu cellulaire sous-cutané » Petit Larousse illustré 1997, p406

[15] Citation d'Hippocrate, médecin grec (460 - 377 av. J-C).

[16] DELAPORTE Sophie, Gueules Cassées : les blessés de la face de la Grande Guerre, Clamecy, éditions Noesis, 1996, p.30

[17] DELAPORTE, Sophie, Les médecins dans la Grande Guerre (1914-1918), France, éditions Bayard, 2003, p.35

[18] DELAPORTE, Sophie, Les médecins dans la Grande Guerre (1914-1918), France, éditions Bayard, 2003, p.102

[19] « Il s'agit d'un geste de sauvetage, le pronostic vital prime sur le fonctionnel.» http://www.ledamed.org/IMG/html/doc-10634.htm l

[20] DELAPORTE, Sophie, Les médecins dans la Grande Guerre (1914-1918), France, éditions Bayard, 2003, p.93

[21] Ibidem, p.95

[22] Ibidem, p. 96

[23] LOODTS Patrick et MASSON-LOODTS Isabelle, La Grande Guerre des soignants (médecins, infirmières et brancardiers de 1914-1918), Bruxelles, les éditions de la mémoire, 2008, p.123

[24] DELAPORTE Sophie, Les médecins dans la Grande Guerre (1914-1918), France, éditions Bayard, 2003, p.188

[25] LOODTS Patrick et MASSON-LOODTS Isabelle, La Grande Guerre des saignants (médecins, infirmières et brancardiers de 1914-1918), Bruxelles, les éditions de la mémoire, 2008, p.189

[26] La blessure au visage, poème anonyme. DELAPORTE, Sophie, Gueules Cassées: les blessés de la face de la Grande Guerre, Clamecy, éditions Noesis, 1996, p.29

[27] Citation de Rabelais extraite de Pantagruel (écrivain français, 1494-1553).

[28] http://www.universcience.fr/fr/conferences-d u-college/seance/c/1239026848401/guerre-et -science---un-pacte-indefectible--/p/1239022827697/

[29] Citation de Pierre Dac, humoriste français (1893-1975).

[30] « L'éthique en médecine défend le respect de la personne humaine et de la vie. Elle énonce des principes moraux, mais ne présente aucun caractère légal. » GORNY, Philippe, L'Aventure de la Médecine, Paris, éditions JC Lattès, 1991, p.226

[31] DELAPORTE, Sophie, Gueules Cassées : les blessés de la face de la Grande Guerre, Clamecy, éditions Noesis, 1996, p.216



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