Médecins de la Grande Guerre

Carnet de campagne n°1, de Jacques Mechelynck, pendant la Grande Guerre.

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Jacques Mechelynck-Masson

Carnets de Campagne

(1914 -1919)

Transcrits et édités par André L. Mechelynck

Cet ouvrage est dédié à Antoine, Cécile, Jean, André Jr., Sophie, Nicolas et Joël, en mémoire d’un grand-père ou arrière-grand-père qu’ils n’ont que peu ou pas connu.

Introduction de l’Éditeur

 Au hasard d’un déménagement, il y a déjà quelques années, je suis tombé sur une partie des carnets dans lesquels mon père avait noté, au jour le jour, sa vie de soldat pendant la première guerre, puis les journées d’occupation pendant la seconde. Un second déménagement m’a permis de retrouver le reste…

Écrits pour son souvenir personnel[1], pleins de franchise - j’allais dire « de candeur »[2] - ils constituent un témoignage sincère sur une époque presque oubliée et pourtant si proche.

J’ai finalement décidé de les transcrire, pour plusieurs raisons :

        d’abord en hommage à mon père, un homme juste et droit, élevé par son père dans le respect du principe maçonnique :

Si tu deviens père, réjouis-toi, mais comprends l’importance de ta mission. Sois pour ton enfant un protecteur fidèle. Fais que jusqu’à dix ans il t’obéisse, que jusqu’à vingt ans il t’aime, que jusqu’à la mort il te respecte. Jusqu’à dix ans sois son maître, jusqu’à vingt ans son père, jusqu’à la mort son ami. Pense à lui donner de bons principes plutôt que de bonnes manières ; qu’il te doive une droiture éclairée et non pas une frivole élégance ; fais-le honnête homme plutôt qu’habile homme.

        les lieux où se déroulent les souvenirs de la première guerre - le « Westhoek » - me sont particulièrement familiers ; j’écris ces lignes dans le petit village de Leisele, entre Furnes et Ypres, proche d’Alveringem, Houtem, Izenberge, Gijverinkhove, Oostkerke, Hondschoote, non loin de La Panne au nord, ou de Dixmude à l’est, tous lieux qu’il mentionne et par où il est passé ; les évènements de la seconde guerre, je les ai vécus avec lui en grande partie et leur souvenir n s’est pas effacé ;

        enfin, et peut-être surtout, parce qu’aujourd’hui plus personne, dans nos pacifiques pays occidentaux, ne se rend compte de ce que pouvaient être :

o   une guerre de tranchées, une guerre d’immobilisme et d’ennui ; comment s’imaginer des années d’attente, faites de tracasseries, de mesquineries, de jalousies, de petites satisfactions, … et de fatalisme ? Tranchées, piquet, « demi-repos », les jours se suivent et se ressemblent, et la mention « Rien de spécial » revient comme une litanie…

o   une guerre d’occupation, avec une armée ennemie omniprésente, une presse servile, une alimentation précaire, une information fragmentaire liée à des émetteurs radio lointains et indistincts. Et encore, nous ne savions pas tout : le ghetto de Varsovie, les chambres à gaz, la Shoah, tout cela, nous ne l’avons su qu’après…

Les carnets racontent peu de faits de guerre proprement dits ; il reste quelques mentions de décès, de blessures, de fermes incendiées, de bombardements, de balles inefficaces, de boue ; ils mentionnent l’inondation lors de la bataille de l’Yzer, la tentative de fraternisation de la Noël 1914, le nuage de chlore de la bataille de Steenstraete, la révolution allemande de novembre 1918… L’essentiel – les quatre années perdues pour une jeunesse qui aurait mérité mieux – n’est pas dit… mais il ressort de tout ce témoignage.

En ce qui concerne la seconde guerre, les carnets se limitent à la campagne de 1940, à l’incarcération à la Forteresse de Huy, une expérience à la fois pénible et enrichissante, qui mérite d’être connue, et à la Libération, évènements que j’ai vécus personnellement ; à part quelques notes, je n’ai rien voulu ajouter.

Les textes ont été rédigés « après coup », sur base de notes assez détaillées, en tout cas pour 1914-1915 ; l’agenda de 1915 a été retrouvé et j’en ai retiré certains éléments, mais sa lecture est difficile. Les documents présentent parfois des blancs, par exemple pour les journées précédant la bataille de l’Yser ; je les ai signalés. Ils comportent aussi de nombreuses abréviations, que je n’ai explicitées que quand j’étais assuré de leur signification. Les commentaires que j’ai été amené à introduire dans le texte sont présentés entre crochets [ ]. J’ai également trouvé utile de préciser les noms actuels de certaines localités, s’ils diffèrent sensiblement de la dénomination (française) de l’époque.

In fine de la Première Guerre, j’ai reproduit la volumineuse correspondance relative aux poursuites dont il fut l’objet pour avoir été fait prisonnier, ne fût-ce que pour donner une idée de l’atmosphère qui régnait à l’époque en Belgique.

Une phrase m’a frappé, à la date du 12 avril 1918, alors qu’il était prisonnier de guerre à Heidelberg : « Flamands, Wallons, ne sont que des prénoms, Belge est notre nom de famille ». Il est toujours resté fidèle à ce principe.

Que le lecteur ne se méprenne pas ; il ne trouvera pas dans ce recueil de grandes pages d’histoire ; tout au plus quelques-uns de ces petits détails dont l’histoire est faite.

A. L. M.

Juillet 2010

Jacques Mechelynck-Masson[3]



Né le 24 juillet 1894, issu d’une vieille famille de magistrats gantoise récemment installée à Bruxelles, Jacques Mechelynck était, en 1914, étudiant en droit à l’Université Libre de Bruxelles lorsque la guerre éclata. Il avait vingt ans à peine, il n’hésita pas : il s’engagea et fut affecté dès le mois de septembre au célèbre Régiment des Grenadiers, avec lequel il prit part, entre autres, aux batailles de l’Yzer et de Steenstraete. Nommé caporal, puis sergent, il fut promu au garde d’adjudant en août 1915 et finalement commissionné officier au début de 1918.

Fait prisonnier peu de temps après, libéré lors de l’armistice, démobilisé en 1919, il put reprendre ses études de droit ; après quelques années de barreau, il passa à la magistrature assise, où il fit une brillante carrière, terminant en qualité de Président de la Cour d’Appel de Bruxelles, tout en continuant à effectuer certaines prestations en qualité de magistrat émérite.



Il continua néanmoins à effectuer des rappels militaires et à progresser dans la réserve ; en 1939, il avait atteint le grade de capitaine-commandant. Brièvement rappelé en 1939, libéré à la demande du Tribunal, rappelé à nouveau en 1940, puis finalement libéré, il reprit ses fonctions de magistrat[4], ce qui lui valut, d’ailleurs, sous l’occupation, quelques mois de détention en qualité d’otage à la forteresse de Huy.



Nommé major honoraire à la fin de son service dans la réserve, il était toujours resté fidèle à ses chers Grenadiers - « Grenadier un jour, Grenadier toujours » - dont il présida la Fraternelle, puis l’Amicale des Officiers, pendant de nombreuses années. En particulier, il était très fier d’être appelé à monter annuellement la garde au « Soldat Inconnu ».



Sa carrière militaire, son service dans la magistrature, lui valurent de nombreuses distinctions honorifiques : titulaire de sept chevrons de front, Commandeur de l’Ordre de Léopold et de l’Ordre de la Couronne, Croix du Feu, Croix de Guerre, Médaille de la Résistance, et bien d’autres, dont même le Nisham Ifthikar marocain ; mais celle dont il était indiscutablement le plus fier, c’est la Croix de l’Yser : pour la mériter, il fallait avoir été sur le front pendant la bataille.





Il décéda le 23 septembre 1980, à l’âge de 86 ans, entouré de l’affection des siens, de l’amitié de ses compagnons d’armes, et de l’estime unanime de ses collègues.

Que sa mémoire vive !

Que son souvenir nous inspire !

Que son exemple nous guide !

Mutations[5]



5-8-1914                      Engagé volontaire pour la durée de la guerre, à Malines, et versé au

                           1er régiment de volontaires

20-9-1914                   Passé à la 3/III/2 Grenadiers

7-11-1914                   La 3/III/2 Grenadiers devient la 2/II/ Grenadiers

6-2-1915                     Passé à la Cie Mitrailleuses Hotchkiss/Grenadiers

18-4-1915                   Nommé caporal

5-6-1915                     Passé au C.I.S.L.A. Gaillon. Nommé sergent

8-8-1915                     Nommé adjudant candidat sous-lieutenant auxiliaire. Passé à la 1ère

                                    Cie Mitrailleuses Hotchkiss/Grenadiers.

13-4-1916                   Passé à la 4/II/Grenadiers

27-12-1916                 Le 4/II/Grenadiers devient 10/1 Grenadiers

24-1-1918                   Commissionné comme s/lieutenant au 3e par Arrêté Royal.

2-3-1918                     Fait prisonnier à Nieuport.

26-11-1918                 Rapatrié et passé au C.A.M. (Leysele)

8-12-1918                   Passé au C.I. n° 1 – 4 – 5 – 6 à Isenberghe

23-1-1919                   Détaché au G.T.E.M. Bruxelles

28-5-1919                   Passé au 1 Grenadiers

1-6-1919                     Passé à la C.S.B., à Bruxelles, à la disposition du Lt-Gén. Biebuyck

30-6-1919                   Passé au 1er Grenadiers. Détaché au G.T.E.M. à Bruxelles

15-8-1919                   Envoyé en congé illimité.

27-4-1920                   Par A. Rx. De cette date, parus au Moniteur du 6 mai 1920, nommé

                                    s/lt de réserve d’infanterie à la date du 27 juillet 1918 et lt de réserve d’infanterie à la date du 26 septembre 1919.

1er Carnet de Campagne

1er août 1914 - 31 décembre 1915[6]

L’invasion[7]

Samedi 1er août 1914.

L’atmosphère est toute enfiévrée On le sent, malgré le calme apparent de tous. Quand serai-je appelé ? Pour calmer un peu mon énervement, je vais me promener du côté des casernes. Aux casernes des Guides, on voit arriver toutes les autos réquisitionnées. Des troupes entrent et sortent. Des officiers d’E. M. arrivent et s’en vont, affairés.

Dimanche 2 août 1914.

Je ne pourrai être appelé que peut-être d’ici trois semaines. Je n’y tiens plus : je vais m’engager. Mais à l’E. M. de la Place, où je me présente au début de l’après-midi, on me déclare que, outre l’autorisation de mes parents[8], je dois avoir un certificat de moralité, délivré par l’administration communale. J’y cours, et on me délivre la pièce en question, malgré le repos dominical. Je reviens rue Royale, où l’on refuse de prendre mon engagement ; « Un nouveau bureau s’ouvre demain, à l’Hôpital Militaire. Vous vous y rendrez »

Le soir, Ernest[9] part pour rejoindre l’armée française.

Lundi 3 août 1914.

Robert[10] rentre d’Anvers désespéré. Il n’a pu s’engager. Quant à moi, je perds ma journée à faire la file devant l’Hôpital Militaire où il y a un monde fou. il semble bien que, pendant toute la journée, on cherche à gagner du temps parce qu’on ne sait que faire de nous. Finalement, on nous renvoie au lendemain. À mon retour à la maison, on me reproche de ne pas savoir me débrouiller. D’autres sont engagés depuis la veille.

Mardi 4 août 1914.

Après encore des traînailleries à l’H. M., on finit par nous expédier, par groupes de seize et en rangs par quatre, à l’E. M. de la Place. On paraît avoir pris une décision à notre égard, mais laquelle ? Enfin, on nous l’annonce : la seule pièce nécessaire désormais sera le certificat de moralité, revêtu de la signature du porteur. La file s’allonge démesurément. L’enthousiasme est énorme. Les passants nous acclament. Des gardes civiques chargés de nous contenir se mêlent à nous. Je retrouve dans cette foule Georges de Ligne et Robert Balisaux-Olin, et je fais la connaissance de Paul Scheys et d’Albert Delbecq. Ce dernier deviendra par la suite mon meilleur ami[11]. Scheys me paraît être emballé et plein d’entrain. Il me semble, au contraire, reconnaître en Delbecq un esprit plus réfléchi. À midi, assis sur la bordure du trottoir, nous déjeûner [sic][12] de petits pains et de limonade. Les journaux viennent nous donner des détails sur la séance historique du Parlement et le splendide discours que le Roi vient de prononcer. Le pays est envahi.

« Des fusils, des cartouches ! » L’enthousiasme devient du délire. On chante la Brabançonne

et la Marseillaise. Enfin, vers 15 h. 30, nous arrivons à pénétrer dans le bureau. Une brève indication sur notre certificat, un cachet, et nous sortons. Il nous faut aller à Malines, au dépôt, mais on ne nous a pas fixé de jour ni d’heure. Nous nous donnons rendez-vous pour sept heures le lendemain, à la Gare du Nord.

Mercredi 5 août 1914.

Adieux à Robert, Cécile[13] et Madeleine. Je pars avec Maman[14] et Papa[15] pour la gare. Là, je retrouve presque tous mes camarades d’hier, ayant pour la plupart un petit baluchon et leur plus vieux costume.

Nous partons à 7 h 56. Les mouchoirs s’agitent longtemps pour les derniers adieux à Papa et Maman et à Bruxelles. Je retombe à ma place ; c’est fini, je m’en vais pour combien de temps ? Bah, pour deux ou trois mois au plus…

À Malines, après avoir entendu deux ou trois avis différents, nous nous rendons directement au dépôt. J’y retrouve Jean-Pierre Toussaint. On nous donne un bon d’habillement pour nous six ; « Revenez à cinq heures ».

À 17 h., nous montons dans le magasin à la file indienne ; je me présente à mon tour devant le « sergent quartier-maître ». « Grand », déclare-t-il au garde-magasin, qui me donne un énorme sac de toile qui contient mes effets d’équipement. Plus loin, on nous donne un fusil et une baïonnette. Nous redescendons dans la cour où, alignés sur un rang, nous revêtons notre uniforme. Spectacle des plus pittoresques : l’un a un bonnet de police trop grand, l’autre un pantalon trop court, le troisième une veste trop étroite. « Mais cela va très bien ». Lorsque nous sommes habillés, on nous déclare : « Il n’y a plus de place ici, tâchez de vous loger en ville ». Voilà le premier principe militaire posé : « Tirez votre plan ! », en flamand « Trekt a plan ! »

Nous voilà partis, traînant péniblement notre grand sac et notre fusil. Nous trouvons heureusement des « anciens » (de deux jours) de bonne volonté pour nous aider. En vain, nous cherchons un séminaire au Collège Saint-Rombaut. Là, comme nous ne trouvions rien (pauvres bleus qui méprisions une botte de paille), Delbecq s’en va et revient au bout d’un moment avec une voiture où nous empilons nos sacs, à la grande indignation d’un vieux sergent. Nous allons, suivis de notre voiture, chercher derrière la cathédrale à l’Institut Scheppers. Rien à trouver non plus. Mais, à ce moment, un jeune garçon s’adresse timidement à Lagrange, qui s’est joint à notre groupe. Il offre de le loger chez lui, à deux pas. Et à la Tichelerij [?], au quai, nous trouvons Mme Veuve G. Suetens Van den Berghe, qui consent à nous loger tous les sept. Cette excellente femme, qui est modiste, nous donne deux chambres, dont l’une contient un lit, l’autre un lit et un matelas par terre. Nous soupons et nous allons nous coucher, éreintés de cette première journée passée sous les drapeaux. Plût au ciel que nous n’en eussions jamais eu de plus fatigantes !



Jeudi 6 août 1914.

On commence l’instruction. Au début, il n’y a pas d’appel, on fait donc ce qu’on veut.

Vendredi 7 août 1914.

Lagrange nous quitte.

Samedi 8 août 1914. Instruction.

Dimanche 9 août 1914. Instruction.

Lundi 10 août 1914.

On nous loge à la caserne du 5e Lanciers, au-delà du canal.

Mardi 11 août 1914. Instruction.

Mercredi 12 août 1914. Instruction.

Jeudi 13 août 1914.

Robert vient me voir. Nous faisons faire notre groupe[16].

Vendredi 14 août 1914.

Instruction. Hier, j’ai dîné chez Louveaux.

Samedi 15 août 1914.

Nous allons en train à Termonde.

[Du dimanche 16 août au vendredi 4 septembre, seules figurent les dates dans le carnet ; les pages sont restées blanches…]

Samedi 5 septembre 1914.

Nous partons de Wetteren dans la matinée et, en passant par Quatrecht et Melle, nous arrivons enfin à Gand, où nous sommes logés à la caserne des Lanciers, à la Plaine Saint-Pierre, vers le soir. La nuit, les rats font des courses éperdues autour de nous et sur nous.

Dimanche 6 septembre 1914.

Le matin, j’obtiens l’autorisation du capitaine Janssens de sortir. Je vais voir Oncle Albert[17] et toute la famille. J’y dîne. Après-midi, on rentre à la caserne et on part pour Melle ; les Allemands sont annoncés. Mon peloton part dans la direction d’Audenaerde. Nous allons garder le passage à niveau de Gentrode. Des pékins viennent nous apporter des tartines, de la bière, du jambon, et nous bourrent les poches de pommes.

Lundi 7 septembre 1914.

Melle : une auto-mitrailleuse passe et revient une heure [après] avec des dépouilles allemandes. Peu après, on nous fait replier de 200 m. en arrière. Nous faisons une expédition pour capturer, à 500 m. de là, un cheval de uhlan, qui s’est trouvé n’être qu’un brave cheval de labour broutant dans une prairie. A midi, nous battons en retraite vers Gand, où nous nous embarquons pour Bruges. Là, on nous fait cantonner à la caserne des Lanciers. Nous sommes très bien reçus.

Mardi 8 septembre 1914.

On nous fait loger à la Halle aux Draps. Villenfagne nous procure, à Lavalette et moi, un excellent logement chez le droguiste Vermeersch, près du théâtre, qui nous a accordé une hospitalité très large.

Mercredi 9 septembre 1914.

Le soir, nous logeons encore chez M. Vermeersch, mais on vient nous chercher à 4 h. du matin. Nous partons pour Jabbeke sur la route[18]

Jeudi 10 septembre 1914.

On vient nous chercher à 4 h. du matin. Nous partons pour Jabbeke, sur la route d’Ostende.

Vendredi 11 septembre 1914.

Ce matin, nous nous embarquons en train, jusque Saint-Denys-Westrem. Nous sommes logés dans une ferme à une bonne distance du village.

Samedi 12 septembre 1914. Rien de spécial[19].

Dimanche 13 septembre 1914.

Ce matin, on célèbre à Saint-Denys une messe pour les morts de Melle.

Lundi 14 septembre 1914. Rien de spécial.

Mardi 15 septembre 1914. Rien de spécial.

Mercredi 16 septembre 1914. Rien de spécial

Jeudi 17 septembre 1914. Rien de spécial.

Vendredi 18 septembre 1914.

Nous partons le matin en train pour Lierre, où nous arrivons après un voyage fort compliqué. Nous pénétrons au dépôt des Grenadiers. Nous couchons dans une école.

Samedi 19 septembre 1914.

On nous rend nos havresacs de poil. Je suis versé au 2e Grenadiers. Nous allons à Koningshoyckt, où nous logeons dans une école.

Dimanche 20 septembre 1914.

Nous partons dans la nuit pour Beersel[20], où nous arrivons vers 9 ou 10 h. On nous met à 16 dans chaque compagnie[21]. Je suis versé à la 3/III, commandée par le capitaine en 2ᵈ de Hennin de Boussu-Walcourt. Le bataillon est commandé par le capitaine-commandant chevalier de Meulenaere. Mon chef de peloton est le lieutenant Dagois. Nous rejoignons notre bataill compagnie dans la campagne. En cours de route, nous rencontrons le major A.E.M. Comte d’Oultremont, qui porte une barbe inculte poivre et sel. Il nous accueille par ces mots : « Je vous souhaite la bienvenue ; plus on est de fous, plus on s’amuse ! » Nous sommes employés, dès notre arrivée, à creuser des tranchées. Le capitaine nous appelle en particulier et nous dit qu’il compte sur nous pour remonter le moral de ses hommes, atteint par les récents combats de Werchter et d’Hofstade. Le soir, nous rentrons coucher à Beersel.

Lundi 21 septembre 1914.

Nous allons en petit poste près de Schrieck, dans un cabaret. Le matin, des tas de pékins essaient de passer, mais nous ne laissons personne aller dans la direction de l’ennemi. L’après-midi, nous nous embusquons aux fenêtres, car on annonce des Allemands, mais rien ne vient. Le soir, nous allons coucher à une école, dans un faubourg de Lierre.

Mardi 22 septembre 1914.

Nous allons en avant-poste entre Koningshoyckt et [Lierre] Putte.

[Nouveau blanc, du 23 septembre au 5 octobre 1914]

Mardi 6 octobre 1914.

Nous recevons sur la tête toute la pluie d’obus que l’ennemi lance sur la ville. Nous voyons les balles de shrapnells casser des carreaux aux maisons de l’autre côté de la rue. Le soir, nous partons pour Waesmunster, où nous arrivons vers 23 h. On nous envoie à ¾ d’heure de la localité pour cantonner.

Mercredi 7 octobre 1914.

Les marches fatigantes commencent. De Waesmunster, d’où nous partons à 4 h. du matin, on nous envoie à Zele, en avant-poste.

Jeudi 8 octobre 1914.

On relève les petits postes au milieu de la nuit et on part précipitamment. On passe par Lokeren et on arrive à Beirvelde vers midi. On y reste jusque 19 h., puis on repart. On passe par Lo-Christi, puis par Gand au milieu de la nuit.

Vendredi 9 octobre 1914.

Enfin, nous arrivons à 9 h. à Mariakerke, où nous voyons des fusiliers marins[22]. Nous sommes éreintés, mais on nous fait encore marcher 20 minutes pour arriver à un château où nous logeons. Vers 14 h., nous partons pour Mérendree. Nous cantonnons tout près de chez Oncle Albert. Je ne puis aller loger chez lui, mais Charles[23] m’accueille avec joie et me prépare à souper.

Samedi 10 octobre 1914.

Nous partons à minuit pour Hansbeke, où des trains nous attendent. Nous partons vers Bruges. En cours de route, à un arrêt trop brusque, je reçois trois fusils sur le nez. En gare de Bruges, il y a foule d’Anglais. Enfin, nous descendons à Dixmude, où nous cantonnons dans le hangar des vicinaux, à côté de la gare, après avoir rendu les honneurs au drapeau sur la Grand’ Place.

Dimanche 11 octobre 1914.

Sortie le matin. Vers 11 h., on donne l’ordre de rentrer. À la suite d’une réclamation de Villenfagne, le capitaine engueule les volontaires d’une façon ridicule. Nous partons en [petit] avant-poste sur la route de [Woumen] Klerchen.

Lundi 12 octobre 1914.

Nous abandonnons la position, nous traversons Dixmude sans nous y arrêter, et nous allons cantonner à Merckem.

Mardi 13 octobre 1914.

Nous changeons de cantonnement à Merckem et allons loger dans une ferme entourée d’un véritable cloaque.

Mercredi 14 octobre 1914.

De Merckem, nous partons pour Hoogstaede, où nous allons cantonner à la Ferme Rooryck, une belle propriété, bien construite, toute neuve.

Jeudi 15 octobre 1914.

Nous restons à Hoogstaede.

Vendredi 16 octobre 1914[24].

Nous cantonnons encore à Hoogstaede.

La bataille de l’Yzer

Samedi 17 octobre 1914.

Nous partons dans la nuit pour Zuydschoote, où nous allons faire des tranchées, à 800 m. du canal.



Dimanche 18 octobre 1914.

Nous allons faire des tranchées au canal de l’Yperlée. Nous allons à une ferme en face de nous prendre des pommes. Nous devons passer en radeau, et Friant (caporal) tombe à l’eau. On célèbre la messe en plein air, derrière la tranchée.

Lundi 19 octobre 1914.

À 4 h. du matin, nous partons pour Oostkerke, où nous restons en position d’attente. Nous y installons même un bivouac.

Mercredi 21 octobre 1914.

Nous [allons en soutien à Booitshoecke ou nous] restons toute la journée terrés dans nos tranchées, par ordre. L’ennemi bombarde, en avant de nous, la route de Dixmude à Nieuport. Le soir, ou plutôt même avant le soir, nous partons vers Schoorbakke. Dans cette plaine, les Allemands nous bombardent. Mais grâce au sang-froid du 1er sergent David qui nous conduit, personne n’est atteint. Nous restons jusqu’à minuit dans une tranchée de repli.

Jeudi 22 octobre 1914.

Nous nous rendons alors à Schoorbakke, où nous occupons des tranchées à gauche du pont. Nous encaissons des obus toute la journée. Le sergent-fourrier Bellot est tué d’une balle en pleine poitrine. Les tranchées y sont fort étroites. Et dans celle que j’occupe avec Lavalette et Delbecq, mes compagnons se plaignent de ce que je bouge constamment. On voit [constamment] des Allemands circuler sur une route en face de nous.

Vendredi 23 octobre 1914.

Nous restons encore là toute la journée. [Le soir, on] Nous voyons, sur notre gauche, des « piotes » battre en retraite. Le soir, on nous ramène à la grand’ route, entre Ramskappelle et Pervyse. Sous la pluie, nous nous tenons dans des trous, où la boue liquide nous passe au-dessus de la cheville et où des obus nous sifflent au-dessus de la tête.

Samedi 24 octobre 1914.

Au matin, nous partons en avant ; bientôt, nous sommes arrosés d’une grêle de balles. André De Bluts est blessé à côté de moi. Nous pénétrons dans une tranchée où se trouve une compagnie de volontaires chasseurs à pied, en avant de la Ferme Oosthof. Au bord d’une route en face de nous, les Allemands s’avancent vers nous, à la poursuite de « piotes ». Ils ne réussissent pas à s’approcher tout près. Verbruggen et Delbecq vont chercher des blessés qui se trouvent au-delà d’un petit pont mal détruit par le génie.

Dimanche 25 octobre 1914.

Notre artillerie tape dans une ferme à 500 m. de nous. On voit les Allemands s’en échapper un à un à chaque obus. Ce tir est merveilleusement exécuté. Le soir, nous nous replions en avant de la Ferme Oosthof.

Lundi 26 octobre 1914.

Vers 9 h., on communique l’ordre de retraite ; chacun s’en va comme il peut, l’un laissant son fusil, l’autre son sac. Le long de la route, des blessés agonisent. On se rassemble derrière le chemin de fer. Pendant que la retraite s’organise, nous tirons à qui mieux mieux. Tandis que presque tout le régiment va à Furnes, nous restons en arrière-garde et nous nous faisons affreusement bombarder. Un 2f [?] tombe à deux mètres de nous, sans faire de blessés. Au soir, nous reprenons position en arrière de la grand’ route Dixmude-Nieuport dans une ferme sous la rafale de balles.

Mardi 27 octobre 1914.

Nous restons dans cette ferme, autour de laquelle nous faisons des travaux de défense.

Mercredi 28 octobre 1914.

Notre ferme est bombardée. Peu de blessés. Nous voyons de longues colonnes de Français s’avancer vers la ligne de feu.

Le soir, nous sommes relevés et partons pour Alveringhem.

Jeudi 29 octobre 1914.

Repos à Forthem. Nous sommes logés à quelques-uns dans une petite maison où nous sommes fort tranquilles.

Vendredi 30 octobre 1914.

Repos à Forthem. L’après-midi, nous partons pour Oostkerke, où nous allons occuper des tranchées en avant d’un moulin, à 100 m. à l’est de la route de Dixmude à Nieuport.

Samedi 31 octobre 1914.

Vers le soir, nous partons du moulin pour aller occuper des tranchées un peu [à gauche][ à droite] en arrière des tanks à pétrole. Ces tranchées sont inondées, et de tous côtés on voit des cadavres de carabiniers. Il s’agit de travailler. Et c’est ce que nous faisons toute la nuit, tandis qu’en face de nous on entend des commandements en allemand, à petite distance.

Dimanche 1er novembre 1914.

Au lever du jour, nous distinguons devant nous les tranchées allemandes à 200 m. Il faut se cacher. Nous nous terrons tant bien que mal. Vers le soir, Lavalette, Delbecq et moi décidons de nous faire un abri un peu en arrière, où le terrain est légèrement plus élevé. Nous posons sur le sol deux mottes de gazon avant de faire notre abri. Près de nous, un homme est blessé d’une balle. Pendant que nous travaillons, nous entendons les Allemands s’en aller en chantant des cantiques

Lundi 2 novembre 1914.

L’eau monte toujours. Enfin, le soir, nous abandonnons les tranchées pour nous reporter au chemin de fer. Les Allemands ont d’ailleurs aussi battu en retraite devant l’inondation.

La stabilisation du front

 

Mardi 3 novembre 1914.

Journée fort calme. Pour nous désaltérer, nous prenons de l’eau dans une mare derrière les tranchées.

Mercredi 4 novembre 1914.

Verbruggen et Delbecq sont décorés de l’Ordre de Léopold II pour l’affaire de la Ferme Oosthof.

Jeudi 5 novembre 1914.

Lavalette est évacué.

Vendredi 6 novembre 1914.

Le soir, nous sommes relevés et allons cantonner à Oostkerke.

Samedi 7 novembre 1914.

Le soir, les deux régiments sont fondus en un seul : ma compagnie devient la 2/II. Nous partons pour Wulveringhem, par la route encombrée par la 5e D.A.

Dimanche 8 novembre 1914.

Nous logeons au Zwaentje. Je me porte malade au lit[25], mais personne ne vient me voir.

Lundi 9 novembre 1914.

Je me porte encore malade au lit, mais toujours pas de médecin.

Mardi 10 novembre 1914.

Toujours malade, toujours pas de médecin.

Mercredi 11 novembre 1914.

Départ dans l’après-midi. Je dois suivre, mais je m’arrête en route, à l’intersection de la grand’ route d’Ypres à Furnes et de celle menant à Vinckem. Je loge là dans un cabaret. Je n’en puis plus.

Jeudi 12 novembre 1914.

Je rejoins enfin ma compagnie qui est en position d’attente à Lampernisse. Je trouve enfin le Dr Delporte, qui m’envoie à l’infirmerie. Là, [après m’avoir vaguement] on m’examine et on veut me renvoyer, après m’avoir donné un médicament. Je proteste tellement qu’on finit par me garder. Je suis si démoralisé que cela paraît dans une lettre que j’écris à la maison. J’ai bien regretté plus tard de l’avoir écrite[26].

Vendredi 13 novembre 1914.

Je suis encore à l’infirmerie.

Samedi 14 novembre 1914.

J’y reste, grâce à mon insistance.

Dimanche 15 novembre 1914.

Je rejoins aujourd’hui, bien que je ne sois pas guéri. Je me guérirai peu à peu. Je rejoins ma compagnie au moulin de Forthem. Nous partons alors occuper une ferme située à l’Ouest du chemin de fer Caeskerke – Oostkerke. On nous y met dans des tranchées. Ce doit être la Ferme Franco-Belge.

Lundi 16 novembre 1914.

1er jour de tranchées, sans incidents.

Mardi 17 novembre 1914.

2e jour de tranchées. Nous sommes relevés le 17 au soir et partons pour Forthem.

Mercredi 18 novembre 1914.

1er jour de repos, sans incidents.

Jeudi 19 novembre 1914.

2e jour de repos, sans incidents.

Vendredi 20 novembre 1914.

3e jour de repos. Nous partons occuper des tranchées au bord de l’inondation, près des tanks[27].

Samedi 21 novembre 1914.

Il gèle pendant toute la journée. La nuit, je vais en patrouille jusqu’aux tanks à pétrole. Rien, si ce n’est des cadavres tous les deux pas. Je suis avec Delbecq comme chef de patrouille.

Dimanche 22 novembre 1914.

Nous sommes relevés le soir et allons cantonner dans la gare d’Oostkerke. Nous nous mettons à faire de la lumière et du feu. Aussi, au bout de vingt minutes, l’ennemi se met à bombarder la gare, un obus trop court, un trop long, le troisième en plein dedans. Aussi nous nous débinons rapidement et allons nous installer dans les tranchées de 3e ligne, en arrière des tanks. Nous sommes bien contents de ne plus avoir de toits au-dessus de nous.

Lundi 23 novembre 1914.

Rien de spécial aux tranchées.

Mardi 24 novembre 1914.

Tranchées de 3e ligne. Le soir, départ pour Wulveringhem, où nous cantonnons à la Ferme Ryckeboer.[28]

Mercredi 25 novembre 1914.

1er jour de repos : rien de spécial.

Jeudi 26 novembre 1914.

2e  jour de repos : rien de spécial.

Vendredi 27 novembre 1914.

3e jour de repos : rien de spécial.

Samedi 28 novembre 1914.

4e jour de repos : rien de spécial.

Dimanche 29 novembre 1914.

5e jour de repos : rien de spécial.

Lundi 30 novembre 1914.

6e  jour de repos. Nous sommes vaccinés contre le typhus.

Mardi 1er décembre 1914.

7e jour de repos. Je suis inscrit pour les mitrailleuses Hotchkiss.

Mercredi 2 décembre 1914.

8e  jour de repos, rien de spécial.

Jeudi 3 décembre 1914.

9e jour de repos : rien de spécial.

Vendredi 4 décembre 1914.

10e  jour de repos : rien de spécial.

Samedi 5 décembre 1914.

11e jour de repos : rien de spécial.

Dimanche 6 décembre 1914.

Départ pour Forthem.

Lundi 7 décembre 1914.

Repos. Rien de spécial.

Mardi 8 décembre 1914.

Repos. Après-midi, départ pour les tranchées. Nous avons relevé le 93e Territorial à gauche du pont du chemin de fer de Dixmude. On fait un chahut infernal pendant la relève.

Mercredi 9 décembre 1914.

1er jour de tranchées. Rien de spécial.

Jeudi 10 décembre 1914.

2e jour de tranchées. Le soir, on vient au repos.

Vendredi 11 décembre 1914.

1er jour de repos à Alveringhem. Nous sommes revaccinés.

Samedi 12 décembre 1914.

2e jour de repos. Rien de spécial.

Dimanche 13 décembre 1914.

3e jour de repos. Nous repartons pour les tranchées le soir.

Lundi 14 décembre 1914.

1er jour de tranchées : rien de spécial.

Mardi 15 décembre 1914.

Deuxième jour de tranchées. Rien de spécial.

Mercredi 16 décembre 1914.

3e jour de tranchées. Rien de spécial. Le soir, nous sommes relevés, et allons cantonner dans une petite ferme située non loin de la route qui mène de Forthem au moulin d’Alveringhem.

Jeudi 17 décembre 1914.

Premier jour de repos. Rien de spécial.

Vendredi 18 décembre 1914.

Deuxième jour de repos. Rien de spécial.

Samedi 19 décembre 1914.

Troisième jour de repos. Rien de spécial.

Dimanche 20 décembre 1914.

Quatrième jour de repos. Rien de spécial.

Lundi 21 décembre 1914.

Cinquième jour de repos. Rien de spécial.

Mardi 22 décembre 1914.

Sixième jour de repos. Le soir, départ pour les tranchées.

Mercredi 23 décembre 1914.

Premier jour de tranchées. Rien de spécial.

Noël 1914 – La Fraternisation

Jeudi 24 décembre 1914.

Deuxième jour de tranchées. Rien de spécial pendant la journée. À minuit, un grenadier, près du pont-route, a chanté le « Minuit, Chrétiens », que tout le monde a applaudi, même les Allemands. Puis, dans les tranchées ennemies, on a entendu chanter « O Tannenbaum »

Vendredi 25 décembre 1914, Noël.

Vers neuf heures, nous voyons des Allemands sur le pont-route et des grenadiers qui leur parlent de notre rive. Il paraît que c’est après des pourparlers que les uns et les autres se sont ainsi avancés. Mais voici qu’en face de nous on entend dans les tranchées ennemies des airs de flûte, puis une voix chanter « Es war in Schoeneberg,… ». À côté de la voie du chemin de fer un bras invisible agite, pendant toute la scène qui va suivre, un immense parapluie rouge. Voici que tout-à-coup, en face de nous, une tête hésitante apparaît, puis des bras, un corps entier, et un Allemand, sortant de sa tranchée, s’avance vers nous sans armes. Puis un second et un troisième font de même, et bientôt toute la rive ennemie est couverte de soldats en casque à pointe ou en bonnet de police, tous désarmés. Certains d’entre eux sont repoussants ; j’en vois encore un, la tête rasée avec de courtes moustaches rousses et de grandes lunettes, arriver, les mains en l’air, en criant : « Kamerad ! ». N’eût été ce jour sacré, je lui eusse volontiers logé une balle dans la tête. Les hommes à nous lancent du chocolat, du « singe »[29], et les Allemands aussi nous envoient des petits cadeaux par-dessus l’Yser gelé. Mais au bout d’une demi-heure, ils font demi-tour et peu de temps après tout est rentré dans l’ordre. On m’a raconté après que Villenfagne avait traversé l’Yser sur un radeau et avait été causer avec des officiers allemands. Il faillit, pour cette aventure, être dégradé. Le seul résultat en fut que le major de Meulenaere et le lieutenant Timmermans furent peu après dégommés. Les carabiniers dirent, naturellement, que nous n’en faisions jamais d’autres. Mais eux firent de même, et, depuis Nieuport jusqu’en Alsace, ce fut la même chose. Nous sommes relevés le soir et allons cantonner le 1er peloton à une maison près du pont de Forthem, le reste de la compagnie à la ferme voisine du château.

Samedi 26 décembre 1914.

Premier jour de repos. Rien de spécial. Nous recevons des tas de cadeaux.

Dimanche 27 décembre 1914.

Deuxième jour de repos. Rien de spécial.

Lundi 28 décembre 1914.

Troisième jour de repos. Rien de spécial.

Mardi 29 décembre 1914.

Quatrième jour de [tranchées] repos. Rien de spécial.

Mercredi 30 décembre 1914.

Cinquième jour de repos. Rien de spécial.

Jeudi 31 décembre 1914.

Après midi, départ pour les tranchées.

Vendredi 1er janvier 1915.

1er jour de tranchées.

Samedi 2 janvier 1915.

Tranchées.

Dimanche 3 janvier 1915.

Tranchées. Le soir, retour au cantonnement.

Lundi 4 janvier 1915. Rien de spécial.

Mardi 5 janvier 1915. Rien de spécial.

Mercredi 6 janvier 1915. Rien de spécial.

Jeudi 7 janvier 1915. Rien de spécial.

Vendredi 8 janvier 1915. Rien de spécial.

Samedi 9 janvier 1915.

Départ pour les tranchées l’après-midi. La 1re escouade est de corvée. Je dois aller cinq fois jusqu’à la gare de Caeskerke. On veut me faire porter un énorme sac de pommes de terre[30]. Le caporal Sélys finit par le prendre lui-même sur son dos et me remballer.

Dimanche 10 janvier 1015.

1er jour de tranchées. Nous nous reposons dans notre abri en lisant BRITANNICUS[31], et le soir nous prenons notre poste dans la tranchée.

Lundi 11 janvier 1915.

Un éboulement se produit dans la tranchée où nous sommes. Nous le réparons. Puis nous lisons LES PLAIDEURS.

Mardi 12 janvier 1915.

3e jour de tranchées. Nous sommes relevés à 20 heures. Nous logeons au Rabbelaer, sur la route de Loo, à 15 min. de Forthem

Mercredi 13 janvier 1915.

1er jour de repos. Nettoyage. Le régiment est de piquet. Je parviens cependant à aller faire quelques courses au village « avec autorisation du caporal Beleyn ».

Jeudi 14 janvier 1915.

De 8 à 11h., Instruction de la mitrailleuse Hotchkiss : appareil épatant, se démontant sans instrument ; fort intéressant et facile. Le soir, je vais au village.

Vendredi 15 janvier 1915.

Encore instruction. Nettoyage des pièces. Le soir, je vais au village. Les mitrailleuses partent

pour les tranchées.

Samedi 16 janvier 1915.

Matin : exercice. Les volontaires manœuvrent à part. Après-midi, à 16 h., alerte : on nous mène sur la route d’Oudecappelle, où nous restons vingt minutes sous la pluie, puis nous rentrons. Le soir, je vais à Alveringhem.

Dimanche 17 janvier 1915.

Je vais voir oncle Jean[32], qui vient d’arriver avec les aérostiers. Je déjeune avec lui et ses amis. Le soir, dîner préparé par Villenfagne.

Lundi 18 janvier 1915.

Il neige. Je vais me chauffer dans notre petite maison. Après-midi : départ pour les tranchées.

Mardi 19 janvier 1915.

1re journée de tranchées. On tire beaucoup. Mais on ne voit pas grand’ chose. Les Allemands

ont du renfort (?)

Mercredi 20 janvier 1915.

On nous fait aussi monter la garde pendant cette 2e journée. Il paraît que c’est nécessaire. On nous annonce un don d’un lord anglais.

Jeudi 21 janvier 1915.

Bombardement des tranchées. Le soir, retour au repos. Nous sommes logés sur la route de Pollinkhove.

Vendredi 22 janvier 1915.

On nous distribue les cadeaux de Nouvel An de Lord Ashton : chocolat, cigarettes ou tabac et pipe. Journée de nettoyage.

Samedi 23 janvier 1915.

2e journée de repos ; exercices, inspections. Le soir, je vais au village.

Dimanche 24 janvier 1915.

Exercice le matin. Puis je vais à Lampernisse avec oncle Jean. Après-midi, théorie du commandant Delbrassine aux volontaires sur la discipline. Le soir, je vais à un concert chez les aérostiers.

Lundi 25 janvier 1915.

Promenade d’entraînement. Je suis exempté parce que sans bottines. Je trimballe en sabots, c’est pénible… Après-midi, distribution de pelles.

Mardi 26 janvier 1915.

Instruction des mitrailleuses. Après-midi, exercice de campagne. Placement de la pièce, &c. Toujours en sabots, je suis éreinté.

Mercredi 27 janvier 1915.

Le cordonnier n’a réparé qu’une de mes bottines. Que vais-je faire ? Je reçois un paquet de Jetta[33], via Le Havre. Je vais aux tranchées en « train-bloc ». Je pars à 18 h.[34], j’arrive à 22 h. 30.

Jeudi 28 janvier 1915.

1re journée de tranchées, sans incidents.

Vendredi 29 janvier 1915.

2e journée de tranchées, sans incidents. Nuit mouvementée, deux alertes.

Samedi 30 janvier 1915.

Après-midi, départ pour le repos, toujours en train-bloc. Je pars à 17 h., j’arrive à 23 h. Je cantonne dans la grande ferme près du château[35].

Dimanche 31 janvier 1915.

Je reçois de bonnes bottines.

Lundi 1er février 1915.

Nous ne sommes pas dans notre secteur. Nous allons loger sur la route de Lampernisse.

Mardi 2 février 1915.

3e journée de repos.

Mercredi 3 février 1915.

4e journée de repos. Exercices.

Jeudi 4 février 1915.

5e journée de repos. Le soir, corvée au village.

Vendredi 5 février 1915.

Le soir, départ pour les tranchées.

Samedi 6 février 1915.

Retour et incorporation à la compagnie de mitrailleuses Hotchkiss commandée par le lieutenant Delfosse. Journée de repos.

Dimanche 7 février 1915.

Je sors le matin. J’ai par Oncle Jean des nouvelles de Bruxelles.

Lundi 8 février 1915.

Matin : travail au chemin. Après-midi : rien.

Mardi 9 février 1915.

Départ à 1 h. du matin pour les tranchées, arrivée à 4 h. au pont-route de Dixmude, au Germoir (pièce 43). Situation dangereuse. Fort curieuse installation dans les maisons en ruines. Les Allemands sont à 40 m. 30 obus allemands en 30 min., derrière les tranchées. Aucun n’éclate. Dans un arbre, à 20 m. de hauteur, une jambe de dragon.

Mercredi 10 février 1915.

2e jour de tranchées. Gardes. On apporte le cadavre du caporal du 1er C.

La Panne

 

Jeudi 11 février 1915.

On nous relève à 4 h. 30 du matin, pour partir demain pour La Panne, comme garde-côtes (repos).

Vendredi 12 février 1915.

On part à 6 h. 30. Arrivée à La Panne à 11 h. Nous logeons à l’école catholique, route de Furnes. Repos. Je vais voir Pauline[36].

Samedi 13 février 1915.

Rien à faire. Le soir, souper à l’ambulance[37]. Monde fou à La Panne.

Dimanche 14 février 1915.

Rien à faire. Je vois Mme Morel[38].

Lundi 15 février 1915.

Nettoyage des pièces. Le soir, je suis de garde.

Mardi 16 février 1915.

Soir, dîner à l’ambulance.

Mercredi 17 février 1915.

Des nouveaux arrivent pour l’instruction.

Jeudi 18 février 1915.

Les caporaux en subsistance rejoignent leur compagnie. Je dîne à l’ambulance.

Vendredi 19 février 1915.

Journée de repos.

Samedi 20 février 1915.

Journée de repos. Le soir, je dîne à l’ambulance.

Dimanche 21 février 1915.

Le soir, départ pour la garde-côtes, à St-Idesbald. Il gèle la nuit.

Lundi 22 février 1915.

Retour de la garde-côtes.

Mardi 23 février 1915. Rien à signaler.

Mercredi 24 février 1915. Rien à signaler.

Jeudi 25 février 1915. Rien à signaler.

Vendredi 26 février 1915.

Des avions allemands jettent des bombes pour la première fois. Quatre morts, dont deux civils.

Samedi 27 février 1915.

Après-midi, exercice de parade avec les pièces et défilé par l’avenue de la Mer. Nous faisons impression. Meyer, fils d’Allemands, nous quitte, avec les regrets de tous, pour aller rejoindre la Cie spéciale du Camp du Ruchard.

Dimanche 28 février 1915.

Garde-côtes. Delvaux me présente à M. Wellens. Je vois le prince Léopold à cheval.

Lundi 1er mars 1915.

Garde-côtes. Je vois le Roi à cheval.

Mardi 2 mars 1915.

Retour de la garde-côtes[39].

Mercredi 3 mars 1915.

Matin : Exercice d’alerte. Après-midi : on se fait blinquer pour la revue.

Jeudi 4 mars 1915.

Revue par le général de Ceuninck de toute la division (10 000 hommes). Retour par les dunes avec les caissons.

Vendredi 5 mars 1915. Rien de spécial.

Samedi 6 mars 1915.

Je rencontre Robert-Jones, « bleu » au 12e de ligne[40].

Dimanche 7 mars 1915. Rien de spécial.

Retour au front

Lundi 8 mars 1915.

Préparatifs de départ.

Mardi 9 mars 1915.

Départ en tram pour Oostvleteren, avec le II et le III. Nous passons par Furnes, désert, Alveringhem, Loo et Pollinkhove. Nous sommes logés dans une ferme fort sale près de la route de Reninghe. Nettoyage du local. Le village a déjà été bombardé.

Mercredi 10 mars 1915.

Nous partons le soir pour les tranchées. Chemin épouvantablement boueux. On porte les pièces pendant 45 min. Nous sommes au canal, à droite de la Maison du Passeur, là où nous avons fait des tranchées le 18 octobre 1914.

Jeudi 11 mars 1915.

Les abords sont infects. Les Français sont des cochons. Les tranchées sont nulles.

Vendredi 12 mars 1915.

Nous nettoyons les abords.

Samedi 13 mars 1915.

Matin : nous revenons au cantonnement par un meilleur chemin. Soir : je rencontre René De Le Court, chauffeur à la division. En rentrant, je perds mon porte-monnaie avec 55,55 F.

Dimanche 14 mars 1915.

Je le retrouve sur le chemin. Il fait bon. Je vois Périer.[41]

Lundi 15 mars 1915.

Je vais au piquet, à un cabaret de Pijpegaele. On nous bombarde avec des 15.

Mardi 16 mars 1915.

Hier, nous n’avons pas trouvé le chemin pour aller porter les gourdes à la tranchée. Nous partons ce matin à 6 h. 30, Dumont et moi. Nous passons par le chemin de colonne du 2 C. Mais lorsque nous arrivons sur une légère éminence, à 400 m. à peu près de nos tranchées, les Allemands se mettent à nous canarder. Nous tombons à plat ventre dans la boue et rampons jusque derrière une tranchée de repli située à 3 m. en avant de nous. Dumont file en rampant à toute allure, et je ne puis le suivre. Chaque fois que je lève la tête, des balles sifflent. Je rampe d’abord, puis je finis par entrer dans la tranchée, où j’enfonce jusqu’au-dessus du genou dans l’eau et la vase. Je vais ainsi pendant 80 m. (Cela me prend une grosse demi-heure), puis, arrivé près du chemin, je repars debout. En route, je suis arrêté par un major du 2e Carabiniers, qui ne veut pas me laisser passer sur la passerelle en bois, laquelle n’est pas dans le secteur des Grenadiers. Il me remballe brutalement et refuse de m’indiquer mon secteur et le chemin à suivre. Je trouve heureusement notre chemin de colonne. J’arrive au Pijpegaele[42] à 10 h. On me croyait mort, et le caporal Denis s’apprêtait à partir à ma recherche. J’enlève mon pantalon, mes bottines et mes chaussettes et je m’enveloppe dans une couverture pour me réchauffer. Ce qu’il y a de pire, c’est que le lieutenant Couvreur[43], de la Cie des mitrailleuses Maxim, a l’air d’insinuer que je suis revenu parce que je cloppais. Le même jour, Fincœur, en voulant venir chercher les gourdes, tombe dans un fossé alors qu’il entendait siffler des balles et y reste évanoui plusieurs heures. Relevé, il a été évacué avec un rhumatisme articulaire.

Mercredi 17 mars 1915.

Je dois directement partir pour les tranchées de 1re ligne.[44]

Jeudi 18 mars 1915.

Nous haussons le parapet avec des sacs de terre. Le capitaine Linard, de la 1/IV, est tué d’une balle.

Vendredi 19 mars 1915.

Temps de chien ; nous ne sortons pas de nos abris.

Samedi 20 mars 1915.

La nuit de la relève, il y a une alerte. Nous sommes tous à notre poste, tandis que les balles sifflent et que des obus[45] tombent près de la tranchée. Résultat nul.

Dimanche 21 mars 1915.

Matin : Retour au cantonnement. Je reçois 100 F. de Pierre Orts[46].

Lundi 22 mars 1915.

On nous défend de sortir ce soir. En menant un cheval, je reçois une ruade.

Mardi 23 mars 1915.

On nous tond, par ordre de la division[47]. Le résultat est plutôt amusant.

Mercredi 24 mars 1915.

Oncle Jean vient me voir.

Jeudi 25 mars 1915.

Je reçois un paquet d’Antoine Dreyfus[48]. Rien de spécial.

Vendredi 26 mars 1915.

Nous changeons de logement pour nous installer à Reninghe, dans une ferme où deux personnes sont mortes du typhus.

Samedi 27 mars 1915.

On bombarde Oostvleteren. Plusieurs morts et blessés.

Dimanche 28 mars 1915.

Je vais au village.

Lundi 29 mars 1915.

Dans la nuit, nous partons pour les tranchées. Nous sommes dans un nouvel abri, plus à gauche. Le soir, je vais à la corvée de vivres.

Mardi 30 mars 1915. Rien de spécial.

Mercredi 31 mars 1915.

La 3/IV vient s’installer près de nous.

Jeudi 1er avril 1915. Rien de spécial.

Vendredi 2 avril 1915.

Le matin, retour au cantonnement.

Samedi 3 avril 1915. Rien de spécial.

Dimanche 4 avril 1915.

Arrivée de nouveaux hommes. La nuit, nous devons dormir équipés, parce qu’on craint une attaque.

Lundi 5 avril 1915. Rien de spécial.

Mardi 6 avril 1915. Rien de spécial.

Mercredi 7 avril 1915.

On choisit des hommes pour une expédition.

Jeudi 8 avril 1915.

J’apprends que Robert[49] est à Houthem. Départ pour l’expédition.

Vendredi 9 avril 1915.

Une compagnie et une mitrailleuse ont pu arriver à occuper une tranchée à deux ou trois cents mètres en avant du canal[50]. Je pars le soir pour les tranchées. Bombardement violent toute la nuit.

Samedi 10 avril 1915.

Pendant toute la journée, bombardement violent. Le tir, heureusement, est mal réglé[51]. Forte fusillade vers la Maison du Passeur[52]. À 20 h. 30, le fourrier vient d’arriver avec les vivres, quand une nouvelle fusillade éclate sur notre gauche. À ce moment, le major[53] nous fait prévenir qu’« on a signalé des mouvements de troupes chez l’ennemi : il y a alerte ». Chacun se place à son poste. Tout à coup, l’un de nous tend l’oreille : « Écoutez, dit-il, l’assaut ! ». Nous entendons alors, sur notre gauche toujours, des cris s’élever, puis un chant : « Die Wacht am Rhein »[54]. Que cet hymne est sinistre et lugubre dans la nuit ! Nul doute, les Allemands attaquent notre petit poste. Bientôt des hommes reviennent, trempés jusqu’aux os. « Tous les autres sont prisonniers ! ». Nous ne voulons pas le croire tout d’abord, mais bientôt il faut se rendre à l’évidence. Un homme passe, blessé à la tête, qui blague sur son brancard. Un autre, avec aussi une balle dans la tête, se traîne depuis le matin et ne veut pas d’aide pour aller au poste de secours. Une de nos pièces est prise, avec le caporal Gallant, Ceulemans, Havet, G. Pâques et Schietekat. Mais comment la pièce n’a-t-elle pas tiré ? La pièce placée au redan est ramenée en arrière, par ordre du général, et l’on reprend l’ancien service. Toute la nuit, calme plat. Les Allemands font une tranchée. On lance fusée sur fusée. « Mes pauvres hommes, dit en revenant le lieutenant Lefèvre. Jamais je ne me suis senti aussi triste qu’aujourd’hui ».

Dimanche 11 avril 1915. Calme plat.

Lundi 12 avril 1915.

Journée calme. La nuit, on tire beaucoup, mais il n’y a rien.

Mardi 13 avril 1915.

4e jour de tranchées. Vers 23 h., violente fusillade pour rien.

Mercredi 14 avril 1915.

Nous rentrons au cantonnement le matin. Je reçois une nouvelle capote.

Jeudi 15 avril 1915. Rien de spécial.

Vendredi 16 avril 1915. Rien de spécial.

Samedi 17 avril 1915. Rien de spécial.

Dimanche 18 avril 1915.

Je suis proposé d’office comme caporal, parce que je suis candidat provisoire au C. I. S. L. A.

Lundi 19 avril 1915. Rien de spécial.

Mardi 20 avril 1915.

Je suis nommé caporal à la date du 18, et je pars le soir pour les tranchées.

Mercredi 21 avril 1915.

Beau temps. 1er jour de tranchées.

La bataille de Steenstraete - Les gaz asphyxiants



Jeudi 22 avril 1915[55].

2e jour de tranchées. Le soir, on voit vers Steenstraete un grand nuage vert d’une centaine de mètres de hauteur. Les Allemands ont lancé des gaz asphyxiants (c’est la première fois), et les Français (territoriaux) ont abandonné la tête de pont et reculé jusque près de Lizerne. Tout le régiment vient en renfort en 1re ligne.

Vendredi 23 avril 1915.

À 3 h. du matin, je pars avec le lieutenant Lefèvre, le caporal Van Thienen et Van Halle, pour installer une mitrailleuse dans le crochet, à Steenstraete, là où la tranchée quitte le canal pour rejoindre l’Yperlée, 100 m. derrière. Nous avons un fort parapet, sur lequel il faut placer la pièce, mais pas de parados. Or le jour se lève et les Allemands se mettent à nous tirer dans le dos. Il s’agit donc de travailler couché, sur un espace d’un mètre carré. Pendant la journée, notre travail achevé, nous tirons un peu. Le soir, nous sommes remplacés, après une journée éreintante, et nous enjambons des masses de cadavres pour retourner. On nous envoie en 2e ligne, à une ferme tout à fait sur la gauche du secteur, près de l’adjudant Huissenne.

Samedi 24 avril 1915. Journée calme pour nous.

Dimanche 25 avril 1915.

Nous sommes remplacés le soir par des troupes de la 1re D. A., qui est réserve générale. On a fait des tas de prisonniers.

Lundi 26 avril 1915.

J’apprends que Delbecq a été tué par un obus[56] 75 français tiré trop court. C’était bien vrai que c’était pour la vie que nous étions là. Nous partons pour nous mettre en position d’attente à 500 m. de notre ferme. Nous passons la nuit au bivouac.

Mardi 27 avril 1915.

Nous rentrons à midi à notre ferme et nous partons le soir pour les tranchées. Je suis ravitailleur au Pijpegaele (moulin) avec le sergent-major Gérard.

Mercredi 28 avril 1915.

Je vais avec trois hommes à la C. M. I. chercher 4000 cartouches pour l’adjudant, qui est à Lizerne.

Jeudi 29 avril 1915.

Journée calme, à part le bombardement.

Vendredi 30 avril 1915.

Le soir, je conduis une section de mitrailleurs du 3[57] chez l’adjudant. Chemin détestable, encombré de cadavres. La tranchée où je vais est si basse que la moitié de mon corps dépasse. Les balles sifflent ferme. Pour revenir, nous passons au moulin de Lizerne. La route est entièrement bouleversée par les obus. Il y a même un 21 non éclaté au milieu du chemin. Nous rentrons au cantonnement.

Samedi 1er mai 1915.

Nous sommes au repos.

Dimanche 2 mai 1915. 2e jour de repos.

Lundi 3 mai 1915.

Je pars pour les tranchées le soir avec l’adjudant, à l’abri …[58]

Mardi 4 mai 1915.

Il fait très beau. Journée calme. Cependant nous voyons passer beaucoup de blessés du 4e bataillon français de chasseurs à pied.

Mercredi 5 mai 1915.

On tire peu. Nous passons la journée en plein air.

Jeudi 6 mai 1915.

3e journée, toujours aussi calme. Le soir, remplacés par une section de M du 3. Nous allons cantonner à Elsendamme.

Vendredi 7 mai 1915.

L’endroit est charmant, situé au bord de l’Yzer. Je vais voir Oncle Jean, qui est cantonné non loin de là.

Samedi 8 mai 1915.

Je rencontre Serge Beyens qui, après avoir roulé à travers le monde en pratiquant tous les métiers, à fini par échouer au 1er Carabiniers. Je déjeune avec lui. Il part pour l’infirmerie, et ne me paraît guère changé.

Dimanche 9 mai 1915.

Je rencontre André Frédérix, 1er sergent aux Cy. Br. Nous partons l’après-midi pour Reninghe.

Lundi 10 mai 1915.

Deux sections partent dans la nuit pour les tranchées.

Mardi 11 mai 1915. Journée calme.

Mercredi 12 mai 1915. Journée calme.

Jeudi 13 mai 1915.

Les hommes reviennent des tranchées. Le lieutenant Delfosse est nommé capitaine.

Vendredi 14 mai 1915. Journée calme.

Samedi 15 mai 1915.

On nous annonce que Steenstraete est repris et la tête de pont reformée.

Dimanche 16 mai 1915.

Je suis proposé pour Gaillon[59] avec des notes excellentes.

Lundi 17 mai 1915.

Pour cette raison [?], je suis exempt de tranchées.

Mardi 18 mai 1915. Rien de spécial.

Mercredi 19 mai 1915. Rien de spécial.

Jeudi 20 mai 1915. Rien de spécial.

Vendredi 21 mai 1915. Rien de spécial.

Samedi 22 mai 1915. Rien de spécial.

Dimanche 23 mai 1915. Rien de spécial.

Lundi 24 mai 1915.

Hurrah pour l’Italie ! Dans les tranchées, les hommes ont reçu l’ordre de tirer cinq cartouches à minuit en l’honneur de l’Italie, et chaque canon cinq coups.[60]

Mardi 25 mai 1915. Rien de spécial.

Mercredi 26 mai 1915.

Je reçois enfin des nouvelles de Bruxelles[61].

Jeudi 27 mai 1915. Rien de spécial.

Vendredi 28 mai 1915. Rien de spécial.

Samedi 29 mai 1915. Rien de spécial.

Dimanche 30 mai 1915.

Nous allons aux tranchées ce soir à minuit, avec le pressentiment qu’il arrivera malheur à l’un de nous. En effet, le lieutenant Lefèvre est blessé d’une balle en pleine poitrine[62].

Lundi 31 mai 1915.

Le lieutenant est mort en arrivant à l’hôpital d’Hoogstaede.

Mardi 1er juin 1915.

Nous rentrons le matin au cantonnement. Funérailles du lieutenant Lefèvre. Le colonel Lefèvre, père du défunt et commandant le 6, a été envoyé à l’arrière deux jours après les funérailles civiles de son fils. Heureusement qu’on ne fait pas de politique pendant la guerre !

Le C.I.S.L.A. – Gaillon

Mercredi 2 juin 1915.

On convoque les candidats au C.I.S.L.A. au bureau du chef de corps, à Elsendamme. Mais lorsque nous y arrivons, on nous déclare que nous ne partons que le 4. Et nous devons être rendus à Gaillon le 5 à 17 heures ! Avec l’autorisation du lieutenant Malou, seul présent à l’É. M., nous restons ici. Nous mettons nos sacs à l’auberge et nous partons pour Stavele. Delhaye et Gobert restent là, nous rentrons le soir.

Jeudi 3 juin 1915.

Le sergent-major Lebrun veut me remettre l’ordre pour Delhaye et moi de rentrer au cantonnement. Nous sommes portés manquants. Puisque D. n’est pas là, je rentre seul. Le capitaine, qui ne perd pas une si belle occasion de m’être désagréable, veut me faire coucher sur les pommes de terre[63], pour mon absence, mais finit par y renoncer.

Vendredi 4 juin 1915.

Je suis rentré hier à 10 h. du soir, je repars ce matin à 4 h. pour me présenter avec les autres candidats à l’É.M.R. à 7 h. 30. Nous allons par différents modes de locomotion jusqu’à Adinkerke. Mais là, nous apprenons, à 10 h. 30, que le dernier seul train de la journée est parti. Force nous est donc de rester ici. Je vais à La Panne, où je reçois l’hospitalité de l’ambulance, à la Villa « Morgenstar ». La princesse de Ligne est là aussi. Elle est rentrée plus tard à Bruxelles, mais n’a même pas trouvé le moyen de donner de mes nouvelles.

Samedi 5 juin 1915.

Départ d’Adinkerke à 7 h. 09. arrivée à Dunkerque à 8 h. 20. Défense de quitter le quai. À 10 h., départ, et arrivée à Calais à 12 h. 25. Départ à 12 h. 30 et arrivée à Paris (N.) à 21 h. 30. On nous mène à la caserne « Nouvelle-France », de là à la gare Saint-Lazare pour voir s’il n’y a pas de train. Puis on finit par nous lâcher vers 22 h. 30. Je vais en taxi avenue Victor Hugo, loger chez Dreyfus.

Dimanche 6 juin 1915.

Après une bonne journée, pendant laquelle j’ai été voir Tante Claire[64], nous partons à 15 h. pour arriver à Gaillon vers 19 h. Nous dînons et nous entrons à la caserne à 21 h., soit avec 29 h. de retard. Mais on ne nous en demande aucun compte.

Lundi 7 juin 1915.

On commence à trimer. Réveil à 5 h. - 5 h. 30. Déjeuner à 6 h[65]. À 10 h., exercice. 10 h. 30 à 11 h., théorie. 11 h. 45, dîner. 13 h. 30 à 14 h. 15, étude. 14 h. 30 à 17 h. 30, exercice. 18 h., souper. 18 h. à 21 h., sortie.

Notre chef de corps est le capitaine-commandant Neuray, du 3. Notre instructeur est le lieutenant de Heusch, du 2 C. Il a l’air bon et calé. Il y a cinq pelotons, dont un des élèves venant du C. I. Je suis au 4e. Nous avons alternativement un jour : matin, exercice en rangs serrés et travail de tranchées, après-midi, service[66] de campagne ; le lendemain : matin, service de campagne, après-midi, plaine de manœuvres. Le dimanche : 7 h. réveil. 9 h. à 10 h. 30, examen. 10 h. 30 à 21 h., sortie.

En semaine, les jours de pluie, il y a théorie ou nettoyage des armes. Dans ce cas, grand travail pour les clairons, les garde-chambres et les poilus.

La cuisine, d’abord mauvaise, s’est beaucoup améliorée à cause de nos réclamations.

Menu : déjeuner, confiture, pain, beurre et café ; dîner, potage, plat de viande avec

pommes de terre et légumes, fruits, bière ; souper, ratatouille.

La caserne est un ancien château des archevêques de Rouen. Le bâtiment d’entrée est du très beau François Ier.

Les environs sont très jolis. Montagnes boisées, vallée de la Seine, Vernon, les Andelys. Petits villages montagnards : Saint-Aubin, Sainte-Barbe, le Roule, &c.

Le personnel comprend :

       Commandant de l’école : Commandant Neuray, du 3.

       Adjoint : Lieutenant Denis, du 2 C.

       Officier payeur : Sous-lieutenant De Bruck.

       Médecin : Médecin de bataillon de 1re classe Glibert.

       Un aumônier.

       1er peloton : capitaine A. E. M. Deleu, du 7.

       2e peloton : capitaine Seeliger, du 9.

       3e peloton : lieutenant Grootaerts, du 1 C.

       4e peloton : lieutenant de Heusch, du 2 C.

       5e peloton : sous-lieutenant Furnémont du 2 C., et sous-lieutenant auxiliaire De

Vlesschouwer, du 3.

 

Le programme de l’école comprend :

1° La théorie sur les règlements militaires et sur le fusil ;

2° Application des règlements à la pratique, soit service de campagne. C’est la partie la plus importante de l’enseignement.

3° L’école de peloton et de compagnie.

En service de campagne, le chef de peloton indique sur la carte les données, donne un moment de réflexion, puis indique le chef de peloton qui devra prendre toutes ses dispositions pour l’opération. Il peut y avoir ou non un ennemi. Le cours part d’un grand principe : l’offensive seule donne la victoire. De là, tout exercice qui ne se termine pas par un assaut est raté. Au début, nous aimions le service de campagne, mais celui-ci finit par devenir trop monotone : l’ennemi est à tel point ; nous devons faire une reconnaissance offensive vers tel point. Réponse : nous suivons telle route, patrouille n° 1 à 100 m. à droite de la route, patrouille n° 2 sur la route, et patrouille n° 3 à 100 m. à gauche de la route, et ainsi de suite.

Pour l’école de peloton, chaque élève commande à son tour et fait exécuter ce que l’instructeur lui commande.

Quant aux travaux de tranchées, on éprouve le besoin de nous faire faire des systèmes défensifs complètement achevés, au lieu de nous en indiquer seulement le tracé. Depuis un an que nous faisons des tranchées, nous devons pourtant savoir comment on les fait.

Tout l’enseignement de l’école est celui de la guerre en rase campagne. Mais on ne nous a guère donné que de vagues principes sur la guerre de tranchées.

Mardi 8 juin 1915. Programme ordinaire.

Mercredi 9 juin 1915. Programme ordinaire.

Jeudi 10 juin 1915. Programme ordinaire.

Vendredi 11 juin 1915. Programme ordinaire.

Samedi 12 juin 1915. Programme ordinaire.

Dimanche 13 juin 1915.[67]

Une des questions de l’examen est : « Donnez les trois couplets de la Brabançonne »

Lundi 14 juin 1915.

L’examen d’hier ne compte pas. Tous les caporaux et soldats sont nommés sergents en entrant à l’école. Je suis sergent à la date du 6 juin 1915.

Mardi 15 juin 1915. Programme ordinaire.

Mercredi 16 juin 1915. Programme ordinaire.

Jeudi 17 juin 1915. Programme ordinaire.

Vendredi 18 juin 1915. Programme ordinaire.

Samedi 19 juin 1915. Programme ordinaire.

Dimanche 20 juin 1915. Rien de spécial.[68]

Lundi 21 juin 1915. Programme ordinaire.

Mardi 22 juin 1915. Programme ordinaire.

Mercredi 23 juin 1915. Programme ordinaire.

Jeudi 24 juin 1915. Programme ordinaire.

Vendredi 25 juin 1915. Programme ordinaire.

Samedi 26 juin 1915. Programme ordinaire.

Dimanche 27 juin 1915. Rien à signaler de spécial.[69]

Lundi 28 juin 1915. Programme ordinaire.

Mardi 29 juin 1915. Programme ordinaire.

Mercredi 30 juin 1915. Programme ordinaire.

Jeudi 1er juillet 1915. Programme ordinaire.

Vendredi 2 juillet 1915. Programme ordinaire.

Samedi 3 juillet 1915.

Programme ordinaire. Chahut le soir à cause de l’espionnage de l’officier payeur. On le hue dans les chambrées du 2e, et pourtant personne n’est puni.

Dimanche 4 juillet 1915.

Remise des vestes khaki. Pas d’examen. Je vais voir Oncle Fernand et Tante Jeanne[70], qui sont venus à Vernon pour me rencontrer. Nous passons par la propriété du marquis d’Albufère. Je reviens en auto avec M. et Mme J. Thiroux, de Port-Mort.

Lundi 5 juillet 1915. Programme ordinaire.

Mardi 6 juillet 1915.

Programme ordinaire. Visite du général De Witte, et petit discours patriotique à la rentrée à la caserne.

Mercredi 7 juillet 1915. Programme ordinaire.

Jeudi 8 juillet 1915. Programme ordinaire.

Vendredi 9 juillet 1915. Programme ordinaire.

Samedi 10 juillet 1915. Programme ordinaire.

Dimanche 11 juillet 1915.

Pas d’examen. À part cela, rien de spécial.

Lundi 12 juillet 1915. Programme ordinaire.

Mardi 13 juillet 1915. Programme ordinaire.

Mercredi 14 juillet 1915.

Programme ordinaire le matin. Après-midi : congé en l’honneur de la Fête Nationale française. Je vais avec Van Cutsem, De Coster et Van der Mensbrugghe dîner à Port-Mort. M. et Mme Thiroux nous ramènent en auto à Gaillon.

Jeudi 15 juillet 1915. Programme ordinaire.

Vendredi 16 juillet 1915. Programme ordinaire.

Samedi 17 juillet 1915. Programme ordinaire.

Dimanche 18 juillet 1915.

À l’examen d’aujourd’hui, on nous posé des colles.

Lundi 19 juillet 1915. Programme ordinaire.

Mardi 20 juillet 1915. Programme ordinaire.

Mercredi 21 juillet 1915.

Fête Nationale. 7 h., réveil ; 8 h., déjeuner, café et cramique ; 9 h., Te Deum obligatoire. 10 h. à 21 h., sortie. 23 h 45[71], dîner : Potage, rôti de veau, pommes de terre, petits pois, gâteau à la crème, une bouteille de vin. La veille, pour fêter cet anniversaire, nous avions fait un tel chahut que les congés ont été un moment suspendus.

Jeudi 22 juillet 1915. Programme ordinaire.

Vendredi 23 juillet 1915. Programme ordinaire.

Samedi 24 juillet 1915.

Programme ordinaire. C’est mon anniversaire : je suis majeur. Qui eût songé que ce serait si loin, et isolé des miens, que je fêterais mes 21 ans ?

Dimanche 25 juillet 1915.

Examen d’administration. Robert vient me voir à Vernon. Cette visite me fait bien plaisir. Cependant, j’ai trouvé que Robert s’appuie si fort sur sa canne et qu’il a mauvaise mine.

Lundi 26 juillet 1915. Programme ordinaire.

Mardi 27 juillet 1915. Programme ordinaire.

Mercredi 28 juillet 1915. Programme ordinaire.

Jeudi 29 juillet 1915. Programme ordinaire.

Vendredi 30 juillet 1915.

Examen final toute la journée. Remise des capotes khaki et départ en congé le soir.

Samedi 31 juillet 1915.

J’arrive au Havre[72] à 3 h. du matin et, après avoir été à pied à Sainte-Adresse en faisant un énorme détour, pris de scrupules, j’attends le matin pour entrer à l’Hôtel des Régates. Le soir, je vais loger à l’Hôtel des Phares.

Dimanche 1er août 1915.

Je vais l’après-midi à une fête belge au théâtre. Beaucoup de gaîté et d’entrain.

Lundi 2 août 1915. Rien de spécial.

Mardi 3 août 1915. Rien de spécial.

Mercredi 4 août 1915. Rien de spécial.

Jeudi 5 août 1915. Retour à Gaillon par le banlieue.

Vendredi 6 août 1915.

Toute la journée est consacrée aux préparatifs de départ.

Samedi 7 août 1915.

Discours final du commandant, sur la bataille de Waterloo. Puis proclamation des résultats. Je suis nommé adjudant à la date de demain. À la sortie de la caserne, le commandant nous serre la main à tous. Puis nous défilons en ville, clairons sonnants. On offre des bouquets, &c. Départ à 11 h. 40 en détachement commandé par le lieutenant Denis. Nous passons quelques heures à Paris. Je dîne chez Dreyfus. Départ à 23 h. pour Calais.

Retour au Westhoek

Dimanche 8 août 1915.

Arrivée à Calais à midi. Au lieu de nous laisser coucher à Paris, nous serions arrivés à Calais à 15 h. ! Départ à 15 h[73]. Adinkerke, arrivée 21 h. Nous logeons au gîte d’étape.

Lundi 9 août 1915.

Départ pour Bray-Dunes. Nous sommes reçus par le colonel. Je suis versé à la 1re Cie de mitrailleuses Hotchkiss (1re M. H., ancienne M. M.) commandée par le lieutenant Michiels.

Mardi 10 août 1915.

Je conduis ma compagnie aux bains chauds à La Panne, et je vais voir Pauline.

Mercredi 11 août 1915.

Le soir, fête du II, très réussie[74].

Jeudi 12 août 1915.

Exercice de régiment. J’y participe avec ma section[75].

Vendredi 13 août 1915. Rien de spécial.

Samedi 14 août 1915.

Je suis de garde à la côte. Je m’embête.

Dimanche 15 août 1915.

Je suis relevé à la garde-côte par le 2e Chasseurs[76].

Lundi 16 août 1915.

Je pars pour Alveringhem par la route, avec le convoi des pièces. Le capitaine Delfosse, qui commande la colonne, trouve naturellement le moyen de me dire plusieurs fois des choses désagréables. Nous sommes cantonnés sur la route d’Oeren.

Mardi 17 août 1915.

Je pars le soir pour les tranchées avec le Lt Couvreur. Chemin en planches de Lampernisse à la ligne de feu. À notre emplacement (16.200), nous sommes pris en enfilade de la Minoterie et du tank à pétrole.

Mercredi 18 août 1915.

Les tranchées sont bonnes. L’abri du chef de section est bombardé de Dixmude. Je rentre le soir[77]. Bon logement chez de braves gens.

Jeudi 19 août 1915. Rien de spécial.

Vendredi 20 août 1915. Rien de spécial.

Samedi 21 août 1915.

Je pars le soir pour les tranchées avec ma section.

Dimanche 22 août 1915.

1er jour de tranchées. Calme plat. Je reçois des nouvelles de Paul Lorthioir[78], qui est au C.I.A., à …[79].

Lundi 23 août 1915.

2e jour de tranchées. Calme pendant la journée. Dans la nuit, Willy tire quelques obus.

Mardi 24 août 1915.

On nous lance des bombes. Nous répondons. Nos bombes tombent en plein dans le P.P. ennemi, d’où l’on voit les Allemands s’enfuir.

Mercredi 25 août 1915.

4e jour de tranchées. Mêmes amusements. Nous sommes relevés le soir.

Jeudi 26 août 1915.

Rien de spécial, à part que le lieutenant Michiels se met à embêter les hommes avec des inspections de toutes sortes.

Vendredi 27 août 1915. Rien de spécial.

Samedi 28 août 1915. Rien de spécial.

Dimanche 29 août 1915. Rien de spécial.

Lundi 30 août 1915. Rien de spécial.[80]

Mardi 31 août 1915. Rien de spécial.

Mercredi 1er septembre 1915. Rien de spécial.

Jeudi 2 septembre 1915.

Le soir, départ pour les tranchées.

Vendredi 3 septembre 1915. 1er  jour de tranchées, rien de spécial.

Samedi 4 septembre 1915. 2e jour de tranchées, rien de spécial.

Dimanche 5 septembre 1915. 3e jour de tranchées, rien de spécial.

Lundi 6 septembre 1915.

4e jour de tranchées. Matin, bombardement violent, d’enfilade[81]. Peu de blessés. Le soir, retour au cantonnement.

Mardi 7 septembre 1915. Rien de spécial.

Mercredi 8 septembre 1915. Rien de spécial.

Jeudi 9 septembre 1915. Rien de spécial.

Vendredi 10 septembre 1915.

On adjoint de la cavalerie à la division.

Samedi 11 septembre 1915.

Je vais voir Robert à Vinckem. Je vois aussi Oncle Jean chez Devèze.[82]

Dimanche 12 septembre 1915.

Je rencontre Henri Taymans.

Lundi 13 septembre 1915. Rien de spécial.

Mardi 14 septembre 1915.

Robert vient me voir.[83] Je pars le soir pour les tranchées.

Mercredi 15 septembre 1915. 1e jour de tranchées.

Jeudi 16 septembre 1915. 2e jour de tranchées.

Vendredi 17 septembre 1915. 3e jour de tranchées.

Samedi 18 septembre 1915.

4e jour de tranchées. Le soir, retour au cantonnement.

Dimanche 19 septembre 1915. Rien de spécial.

Lundi 20 septembre 1915. Rien de spécial.

Mardi 21 septembre 1915. Rien de spécial.

Mercredi 22 septembre 1915. Rien de spécial.

Jeudi 23 septembre 1915. Rien de spécial.

Vendredi 24 septembre 1915. Rien de spécial.

Samedi 25 septembre 1915. Rien de spécial.

Dimanche 26 septembre 1915.

Le soir, départ pour les tranchées.

Lundi 27 septembre 1915.

1er jour de tranchées. Le soir, léger bombardement.

Mardi 28 septembre 1915.

2e jour de tranchées. Léger bombardement.

Mercredi 29 septembre 1915.

3e jour de tranchées. Rien de spécial. Léger bombardement.

Jeudi 30 septembre 1915.

4e jour de tranchées.[84] Le soir, retour au cantonnement.

Vendredi 1er octobre 1915. Rien à signaler.

Alerte

Samedi 2 octobre 1915.

Alerte. Nous partons pour les tranchées, mais en cours de route, nous faisons demi-tour parce qu’on a « désalerté ».[85]

Dimanche 3 octobre 1915.

Bernard est tué, Van Roozebeke grièvement blessé. Nous allons cantonner[86] à Kruisse- Abeele, à côté de la 2e section aérostatique.

Lundi 4 octobre 1915.

Nouvelle alerte. Je vais avec mes hommes à la maison du garde-barrière. Le sergent Kuypers, Joiris et Hanssens sont tués, plusieurs autres légèrement blessés. Je rentre au cantonnement le soir.

Mardi 5 octobre 1915.

Je mange désormais avec les officiers.[87]

Mercredi 6 octobre 1915.

J’ai des nouvelles de Cécile, qui vient d’arriver à La Panne. Robert vient me voir.

Jeudi 7 octobre 1915.

Jean Vanden Elschen vient me voir au cantonnement. Je suis étonné de constater que c’est un camarade de classe du lieutenant Michiels.

Vendredi 8 octobre 1915.

Messe en plein air pour les morts de la Cie, célébrée par l’aumônier Loosenaarts du III. Le soir, départ pour les tranchées.

Samedi 9 octobre 1915.

1er jour de tranchées. Le S. L. A. Corman, en allant au Boyau de la Mort[88], a reçu une balle qui lui a brisé le bras gauche et a pénétré dans le cœur. Il est mort presque instantanément.

Dimanche 10 octobre 1915.

2e jour de tranchées. Bombardement de 8 h. 30 à 11 h. 30. Les tranchées sont bouleversées aux alentours des pièces 7 et 8. L’après-midi, comme on doit circuler derrière les tranchées, l’ennemi tire à shrapnells. Une pièce Colt a été ensevelie ; on la retrouve intacte, mais sans trépied.

Lundi 11 octobre 1915.

Bombardement de 21, de 9 h. à midi. Entre 7-8 et 9.9 bis, les tranchées sont bouleversées. On retrouve le trépied perdu à 80 m. de son emplacement. Shrapnells l’après-midi. Pas de pertes.

Mardi 12 octobre 1915.

4e jour de tranchées. Bombardement violent de 15 et de 21 aux alentours de mon abri. La pièce 9 est projetée à 15 m. de son emplacement avec la crosse brisée. Le trépied a les deux pieds coupés. Le soir, nous rentrons au cantonnement.[89] Je ne dors presque pas, tant je suis énervé.

Mercredi 13 octobre 1915. Rien de spécial.

Jeudi 14 octobre 1915. Rien de spécial.

Vendredi 15 octobre 1915. Rien de spécial.

Samedi 16 octobre 1915. Rien de spécial.

Dimanche 17 octobre 1915. Rien de spécial.

Lundi 18 octobre 1915.

Enquête Wauthy (Les officiers prennent de la viande au ménage de la troupe). Je pars pour les tranchées, Couvreur devant revenir pour être entendu.

Mardi 19 octobre 1915.

Je rentre l’après-midi au cantonnement.

Mercredi 20 octobre 1915.

Je repars le soir pour les tranchées avec ma section.

Jeudi 21 octobre 1915.

1er jour de tranchées. Calme.[90] Comme suite à l’enquête, j’apprends que Duvivier permute avec Verbruggen. Il part avec les regrets de tous.

Vendredi 22 octobre 1915.

2e jour de tranchées. Calme comme la veille.

Samedi 23 octobre 1915.

3e jour de tranchées, calme.

Dimanche 24 octobre 1915.

4e jour de tranchées. Calme. Le soir, retour au cantonnement.

Lundi 25 octobre 1915. Rien à signaler.

Mardi 26 octobre 1915. Rien à signaler.

Mercredi 27 octobre 1915. Rien à signaler.

Jeudi 28 octobre 1915. Rien à signaler.

Vendredi 29 octobre 1915. Rien à signaler.

Samedi 30 octobre 1915.

Je vois arriver une auto de la Croix-Rouge et, à mon grand ébahissement, j’en vois sortir Cécile. Le lieutenant Michiels la reçoit très aimablement. Robert vient aussi. Cécile est épatée de ce qu’on lui sert à manger. Cette visite, attendue avec impatience, m’a fait bien plaisir. Il y avait quinze mois que je n’avais plus vu Cécile.

Dimanche 31 octobre 1915. Rien à signaler.

Lundi 1er novembre 1915.

Le soir, départ pour les tranchées.

Mardi 2 novembre 1915. 1er jour de tranchées.

Mercredi 3 novembre 1915. 2e jour de tranchées.

Jeudi 4 novembre 1915.

3e jour de tranchées, pièce détruite par un 150.

Vendredi 5 novembre 1915.

4e jour de tranchées. Le soir, retour au cantonnement.

Congé

Samedi 6 novembre 1915.

Je pars en congé. Départ à pied à 5 h. Pont de Forthem, départ en tram à 6 h. 30. Arrivée à Furnes 8 h. 15. Furnes, dép. (en train) 8 h. 30. Furnes-Calais, Calais-Abancourt, Abancourt-Rouen, arrivée 22 h. 24. Je me morfonds en attendant le train du Havre. Si j’avais été par Paris, je n’aurais pas dû attendre, et je serais arrivé à la même heure au Havre.

Dimanche 7 novembre 1915.

Rouen, départ 4 h. 10. Le Havre, arrivée 7 h. 15. Je vais me débarbouiller et tombe à l’improviste chez Tante Jeanne, où je trouve aussi Aline P.

Lundi 8 novembre 1915.

Je dîne avec Mr Paul Scheyven, auditeur militaire à Rouen.

Mardi 9 novembre 1915. 4e jour de congé.

Mercredi 10 novembre 1915.

5e jour de congé. Je déjeune avec le Dr Depage[91] et Mr Didier. Je dîne avec Jean Morel[92].

Jeudi 11 novembre 1915.

6e jour de congé. Départ 17 h. 30. Paris (Saint-Lazare) 21 h. 30. Je loge chez Dreyfus, 37 rue de Rome.

Vendredi 12 novembre 1915.

Départ 8 h. 15 ; Déjeuner dans le wagon-restaurant. Calais, arrivée 15 h. 40. Départ 18 h. Furnes, arrivée 22 h. Retour au cantonnement vers minuit.

« Rien de spécial »

Samedi 13 novembre 1915.

Le soir, départ pour les tranchées.

Dimanche 14 novembre 1915. 1er jour de tranchées.

Lundi 15 novembre 1915. 2e jour de tranchées.

Mardi 16 novembre 1915. 3e jour de tranchées.

Mercredi 17 novembre 1915.

4e jour de tranchées. Le soir, retour au cantonnement.

Jeudi 18 novembre 1915. Rien de spécial.

Vendredi 19 novembre 1915. Rien de spécial.

Samedi 20 novembre 1915. Rien de spécial.

Dimanche 21 novembre 1915. Rien de spécial.

Lundi 22 novembre 1915. Rien de spécial.

Mardi 23 novembre 1915. Rien de spécial.

Mercredi 24 novembre 1915. Rien de spécial.

Jeudi 25 novembre 1915.

Le soir, départ pour les tranchées.

Vendredi 26 novembre 1915.

1er jour de tranchées. Léger bombardement.

Samedi 27 novembre 1915. 2e jour de tranchées.

Dimanche 28 novembre 1915. 3e jour de tranchées.

Lundi 29 novembre 1915.

4e jour de tranchées. Le soir, retour au cantonnement.

Mardi 30 novembre[93] 1915. Rien de spécial.

Mercredi 1er décembre 1915.

Préparatifs de départ pour le repos.

Jeudi 2 décembre 1915.

Comme le capitaine est en congé, c’est moi qui pars avec la 1re section pour Furnes, au poste de mitrailleuses contre avions installé à la Malterie Beirnaerts, à côté de la gare. Le soir, Isenbaert tombe de l’échelle menant au logement, et tape la tête sur le pavé.

Vendredi 3 décembre 1915.

Il fait un temps de chien.

Samedi 4 décembre 1915.

À 2 h. du matin, Isenbaert est évacué avec une méningite sur l’hôpital de Rozendaël.

Dimanche 5 décembre 1915.

Isenbaert meurt en arrivant à l’hôpital.

La Panne

Lundi 6 décembre 1915.

Je rentre le soir à La Panne.

Mardi 7 décembre 1915. Rien de spécial.

Mercredi 8 décembre 1915.

Je monte garde-côtes.

Jeudi 9 décembre 1915.

Je descends de garde et je change de logement « parce que je suis trop loin du cantonnement ». Mais le capitaine, qui loge trois fois aussi loin, reste où il est. Je ne mange plus avec les officiers. Le capitaine Delfosse a trouvé bon de prendre le logement réservé à Verbruggen et à moi.

Vendredi 10 décembre 1915. Rien de spécial.

Samedi 11 décembre 1915.

Paul L.[94] arrive du C.I.A.

Dimanche 12 décembre 1915.

Un cargo-boat anglais est échoué devant La Panne. Cinq avions allemands[95] viennent le survoler et jettent des bombes tout autour. Trois fois, ils reviennent jeter leur chargement de bombes, et quand les nôtres arrivent enfin, les ennemis sont loin. Ceux-ci ont viré au-dessus de la plage à moins de 200 m. de hauteur. Et, au-dessus du navire, ils étaient à 50 m. Ils auraient pu mitrailler les spectateurs s’ils l’avaient voulu.

Lundi 13 décembre 1915.

Nos avions montent une garde vigilante.

Mardi 14 décembre 1915.

Un avion allemand essaie de venir renouveler l’exploit d’avant-hier. Un avion anglais pique dessus et, peu d’instants après, l’aviatik [?] tombe en flammes dans la mer.[96] C’est une revanche éclatante.

Mercredi 15 décembre 1915.

Je monte garde-côtes.

Jeudi 16 décembre 1915.

Je descends de garde-côtes.97[97]

Vendredi 17 décembre 1915. Rien de spécial.

Samedi 18 décembre 1915.

Robert vient[98].

Dimanche 19 décembre 1915. Rien de spécial.

Lundi 20 décembre 1915. Rien de spécial.

Mardi 21 décembre 1915. Rien de spécial.

Mercredi 22 décembre 1915. Rien de spécial.

Jeudi 23 décembre 1915. Je suis de garde.

Vendredi 24 décembre 1915.

Je descends de garde-côtes. Grand dîner à l’Océan. Joie un peu trop exubérante. On en va jusqu’à danser.

Samedi 25 décembre 1915. Noël. rien de spécial.[99]

Dimanche 26 décembre 1915. Rien de spécial.

Lundi 27 décembre 1915. Rien de spécial.

Mardi 28 décembre 1915.

Je redéménage.

Mercredi 29 décembre 1915. Rien de spécial.

Jeudi 30 décembre 1915. Rien de spécial.

Vendredi 31 décembre 1915.

Je monte garde-côtes.

(Ici se termine le « Carnet de campagne du 1er août 1914 au 31 décembre 1915 »)[100]



[1] Par exemple, il ne donne que peu de détails sur les personnages qu’il mentionne. J’ai précisé en note, quand c’était possible, les noms des personnes (dont les membres de la famille) mentionnées dans les textes.

[2] Il suffit de noter le soin avec lequel il retranscrit les reproches de ses chefs (voir les journées des 29 janvier et 31 août 1916, 7 janvier, 30 mai, 4 juin, 22 juillet 1917), son passage devant la Commission Biebuyck, &c.

[3] Le nom était Jacques Mechelynck. Après son mariage, il y adjoignit très vite le nom de son épouse, Denise Masson, pour éviter la confusion avec son cousin germain, Paul Mechelynck, magistrat à Bruxelles comme lui.

[4] Aquarelle d’Olga Orloff.

[5] Ce tableau figure in fine du « Carnet de Campagne » n° II.

[6] Carnet noir (16 x 10 cm), broché. En page de garde, la mention : « Jacques Mechelynck, adjudant, 1re Compagnie de Mitrailleuses, Régiment des Grenadiers, 6e Division d’Armée. J’ai strictement respecté l’orthographe du texte ; pour les noms actuels des lieux, voir la note en annexe.

[7] Les sous-titres ont été introduits par l’éditeur.

[8] Pour mémoire, il venait d’avoir vingt ans.

[9] Personnage non identifié.

[10] Robert Mechelynck (1893- ), son frère aîné, à l’époque élève ingénieur ; boiteux suite à un accident, il finit par être engagé après avoir suivi à pied un régiment d’artillerie pendant plusieurs kilomètres.

[11] Une indication de ce que le carnet fut rédigé ultérieurement sur base de notes prises au jour le jour. Le carnet de notes de 1915 a été retrouvé (q.v.)

[12] JMM emploie systématiquement « déjeûner » ; je corrige.

[13] Cécile (1891-1972 ) est la sœur aînée ; restée en Belgique, elle suivit une formation d’infirmière, puis rejoignit le front en octobre 1915 via les Pays-Bas et l’Angleterre, et prit du service à l’Ambulance de l’Océan, à La Panne ; elle devint ultérieurement directrice de l’École d’Infirmières de l’Hôpital Saint-Pierre, à Bruxelles. Madeleine (1897-1958) est la sœur cadette.

[14] Née Mathilde De Mot (1866-1947), fille du bourgmestre Émile De Mot.

[15] Édouard Mechelynck (1856-1930), magistrat, conseiller à la Cour de Cassation. Il était co-compilateur des « CODES MECHELYNCK ET SERVAIS » (Bruylant, éditeur), dont la troisième édition (en ma possession) est datée de 1909 ; ils sont toujours publiés et régulièrement mis à jour.

[16] En photo, je suppose ?

[17] Albert Mechelynck (1824-1924), avocat, Ministre d’État, Vice-Président de la Chambre. En-dehors d’Édouard Mechelynck, toute la famille était restée gantoise.

[18] Passage biffé.

[19] Ces mots reviendront souvent. J’ai hésité à réunir en une seule mention les répétitions de ce texte ; mais cette litanie rend, mieux que toute autre présentation, la monotonie, l’inertie, l’ennui de cette guerre de tranchées. On pense à Erich Maria Remarque (1898-1970), qui était sur le front du côté allemand, entre Torhout et Houthulst, en 1917 (une année particulièrement « morte », comme on le verra plus tard). Son roman antimilitariste, IM WESTEN NICHTS NEUES, écrit en 1927, ne fut publié qu’en 1929.

[20] Aujourd’hui Beerzel, à ne pas confondre avec Beersel (Brabant) !

[21] Peloton ?

[22] La France avait envoyé 6000 fusiliers marins pour renforcer l’armée belge.

[23] Personnage non identifié.

[24] Pour mémoire, la « bataille de l’Yser » commença le 16 octobre 1914, par des bombardements allemands sur Nieuport et Dixmude ; l’offensive allemande fut lancée le 18 octobre. Les écluses de Nieuport furent ouvertes, à marée haute, pendant les nuits du 26 au 29 octobre, créant un infranchissable marécage de près d’un kilomètre de large et allant jusque Dixmude. L’offensive allemande, prévue pour le 30 octobre, fut annulée et le front se stabilisa.

[25] JMM ne donne aucun détail sur sa maladie, mais on peut supposer qu’elle est liée à sa consommation d’eau polluée. Voilà ce que c’est que de boire l’eau des mares ! Notons que Lavalette a été évacué, peut-être pour la même raison.

[26] Autre indication d’une rédaction a posteriori.

[27] Il s’agit, bien entendu, des réservoirs à pétrole déjà mentionnés (31 octobre 1914)

[28] De nombreux Ryckeboer sont enterrés dans le petit cimetière qui entoure l’église de Leisele.

[29] Corned beef.

[30] Agenda : « 40 kg »

[31] Une rare mention des activités de détente…

[32] Jean De Mot, frère de sa mère.

[33] Personne non identifiée.

[34] Le texte porte « 6 h. » ; je corrige.

[35] Agenda : « à Houthem »

[36] Pauline De Mot, cousine germaine.

[37] L’Ambulance de l’Océan, où Pauline (et plus tard Cécile Mechelynck, sœur de Jacques) étaient infirmières.

[38] Une cousine par alliance, côté De Mot.

[39] Agenda : « des tranchées » (?)

[40] Agenda : « 8e de ligne ».

[41] Agenda : « J’ai une cuite »

[42] Agenda : « au cantonnement »

[43] Une animosité particulière semble s’être manifestée. Nous retrouverons Couvreur plus tard.

[44] Agenda : « comme punition »

[45] Agenda ; « des shrapnells »

[46] (1882–1958) Neveu de Pauline De Mot-Orts, grand-mère de JMM. Chef de cabinet de Paul Hymans en 1914-1918. Il participa à la Conférence de Versailles, puis fur le premier délégué belge à la Société des Nations en qualité de Ministre Plénipotentiaire Il avait épousé Georgina (Gina) Peltzer.

[47] Il y avait vraisemblablement des poux dans le quartier.

[48] JMM orthographie parfois « Dreyfus », parfois « Dreyfous ». J’ai standardisé sur Dreyfus.

[49] Son frère aîné, artilleur

[50] Agenda : « Un homme revient. Le petit poste est pris en avant du canal »

[51] Agenda ; « est trop long »

[52] Agenda : « sur notre gauche »

[53] Agenda : « Un homme vient de la part du major »

[54] Agenda : « dit le lieutenant »

[55] La bataille dura du 22 avril au 26 mai ; les gaz asphyxiants (150 tonnes de chlore) y furent employés pour la première fois.

[56] Passage inséré par l’éditeur, sur base de l’agenda, pour la clarté du texte

[57] Agenda : « Je vais chercher des caisses de cartouches chez l’adjudant, qui est près de Lizerne ». Confusion avec le 28 ?

[58] Mot illisible. L’agenda dit simplement « Abri B »

[59] Le C.I.S.L.A., école de formation d’officiers. Agenda : « 4e candidat du régiment »

[60] L’Italie, dont la position dans la guerre était restée indécise, se joignit à la Triple Entente (France, Grande-Bretagne et Russie) en avril 1915.

[61] Agenda : « Rien de spécial ».

[62] Agenda : « au côté »

[63] Agenda : « veut me mettre à la boîte pour mon absence »

[64] Claire Adt (1873-1950), épouse de Jean De Mot et belle-sœur de Mathilde, mère de JMM.

[65] Agenda : l’horaire est différent et dans une certaine mesure plus crédible : Réveil à 5 h., déjeuner à 5 h. 30, exercice de 6 h. à 10 h., théorie de 10 h. à 11 h. 30, 2e repas à 11 h. 45, étude de 13 h. 30 à 14 h. 15, exercice de 14 h. 30 à 17 h. 30, 3e repas à 18 h., sortie de 18 h. à 21 h. »

[66] Agenda : « exercice »

[67] Agenda : « Tous les dimanches, réveil à 7 h., examen de 9 à 10 h., sortie de 10 h. 30 à 21 h. »

[68] Agenda : « Examen et sortie »

[69] Agenda : « Examen et sortie »

[70] Fernand et Jeanne Peltzer, née De Mot et soeur de Mathilde. Fernand Peltzer était Secrétaire d’Ambassade à Berlin en 1914 ; il fut ambassadeur de Belgique à Berne pendant la guerre.

[71] Le texte porte 11 h. 45, mais il s’agit vraisemblablement d’une erreur. Je corrige.

[72] Où séjournait le gouvernement.

[73] Agenda : « 5 h. », soit 17 h.

[74] Agenda : « très gaie, assez amusante »

[75] Agenda : « Exercices dans les dunes. Ma section avec deux bataillons »

[76] Agenda : « 1er Chasseurs »

[77] Agenda : « avec la corvée soupe »

[78] Paul Lorthioir, à l’époque étudiant en médecine, est son cousin germain, fils de Laure Lorthioir-De Mot, sœur de Mathilde.

[79] Mot illisible. Selon l’agenda, « à Eu. »

[80] Agenda : « Payé logement jusqu’à cette date »

[81] Agenda : « Bombardement effrayant, qui bouleverse les tranchées »

[82] Agenda : « Rien de spécial »

[83] Agenda : « Payé logement »

[84] Agenda : « Léger bombardement »

[85] Agenda : « Cdt Swagers, du Q. G. de la G. D. A.»

[86] Agenda : « sous le drachen » (?)

[87] Agenda : « Rien de spécial »

[88] Première (et unique) mention dans ce texte ; ne figure pas dans l’agenda.

[89] Agenda : « Fourbu, je.. »

[90] Agenda : « De temps à autre un obus »

[91] Antoine Depage (1862-1925), chirurgien, professeur, directeur de l’Ambulance de l’Océan à la Panne.

[92] Un cousin du côté De Mot.

[93] Le texte dit « septembre », une erreur !

[94] Son cousin Paul Lorthioir.

[95] Agenda : « boches »

[96] Agenda : « Grand enthousiasme »

[97] Agenda : « Rien de spécial »

[98] Agenda : « Rien de spécial »

[99] Agenda : « Payé le logement »

[100] L’agenda comporte une mention au 1er janvier : « Payé logement »



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