Médecins de la Grande Guerre
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Psychologie du
cheval de guerre[1]
par René Quinton[2] René Quinton L’abnégation
de l’animal est surhumaine. L’homme domine l’animal par l’intelligence, non pas
les facultés de l’âme sensible. Si vous connaissiez la grandeur de la nature,
si vous saisissiez la beauté morale des êtres vivants, leur oubli d’eux-mêmes,
leur dévouement à la race, leur sacrifice constant à autrui, leur mépris de la
vie, leur héroïsme, leur détachement des voluptés, la dureté consentie de leur
existence, vous prendriez de ces frères inférieurs une estime que vous n’avez
pas. Leurs vertus sont d’un ordre si élevé que c’est à peine si elles existent
chez l’homme. On les cite, quand on les rencontre, comme des faîtes de vertus,
des vertus éminentes, rares. Il
ne faut pas dire que le sacrifice fait de sa vie par l’animal qui défend son
compagnon ou ses enfants, n’est un sacrifice que dans notre esprit, attendu que
l’animal ignore ce qu’est la mort, et par conséquent son risque. L’animal sait
parfaitement ce qu’il risque. Il a peur. Il ne se laisse pas approcher. Il
connaît le danger son instinct de conservation est égal au nôtre. Quand donc,
pour sauver ses jeunes, un animal quelconque ne fuit plus, fait front au péril,
il se dévoue, il sait ce qu’il risque, son acte est essentiellement altruiste,
conscient, vertueux. L’opinion des philosophes d’autrefois sur le sentiment de
la mort que ne possédaient les animaux est d’ailleurs erronée. La guerre
vient de nous montrer à quel point
l’animal a le sentiment de la mort, et sa crainte. Le chien honteux, transformé
n’obéissant plus à son maître, quand l’obus siffle ou tombe de trop près. Les
précautions qu’il prend, sa réflexion profonde, la modification de tous ses
réflexes habituels ; il ne court plus, ne chasse plus, ne fait plus fête à
personne, ne caresse plus. Il se cache derrière un tronc d’arbre, derrière une
pierre, sous un lit, sous une table, et, si nous, son maître, nous voulons l’en
faire sortir, il nous montre ses crocs, il nous mord. Toute son attitude montre
la honte qu’il éprouve de sa conduite, mais celle-ci lui est dictée par un
sentiment intense qui le domine, et ce sentiment est la crainte de mourir. Il
en est de même du cheval le mieux dressé, le plus obéissant. Au début de la
guerre, les chevaux ne comprenaient pas le danger. Aucun effort n’était
nécessaire pour les maintenir sur une position battue par l’ennemi.
L’apprentissage du danger s’étant fait, le cheval comprit si bien son risque
qu’il devint difficile à tenir, non seulement sous les obus, mais sur des
positions où les obus ne tombaient plus, mais étaient tombés. Aussitôt dans la
zone, la bête devenait inquiète, réfléchie, prête à un écart ; elle
obéissait, mais conservait son libre arbitre pour se dérober, faire demi-tour
au premier bruit suspect. Les oreilles en avant, elle sondait l’air, entendait
l’obus venir avant son cavalier ; sa peau frissonnait dans l’attente du
péril imaginé et redouté. Peur organique, peur effroyable de la blessure et de
la mort. Impression
des chevaux passant près des cadavres de chevaux. Leur science de la mort de
leurs frères. La façon dont le cheval se ploie pour passer à côté de ces
cadavres. LA tête tournée vers eux, les flairant, les oreilles dressées, et
tout le corps s’écartant, se déployant en arc de cercle ; la terreur de
cette mort qui peut-être leur lot un jour. Seul le cadavre du cheval donne
cette terreur au cheval. Le cadavre de l’homme lui est indifférent, comme la
mort du cheval est indifférente à l’homme. Le
24 janvier 1916, à Nieuport, attaque brusquée des Allemands. Bombardement
intensif de la ville. La tour de l’église abattue ; la tour des Templiers
abattue ; puis, toute la ville arrosée d’obus, tombant sur elle comme des
gouttes de pluie. « Sellez Peau-d’Âne ! » Et je pars à Nieuport sur Peau-d’Âne. Réflexion
de cette bête obéissante. Premier temps de trot, puis au pas, sur le pavé. Elle
entend les obus tomber sur Nieuport et elle se dit : « Mon maître ne sait pas ; c’est un homme ; il ne
comprend pas où il va. ». Je la serre entre mes jambes pour la
pousser ; elle obéit, parce que sa fonction est d’obéir. Mais on se
rapproche de la ville ; elle pense et brusquement se décide. Elle s’arrête
des quatre pieds à la fois, l’oreille dressée. Je la remets en marche ;
elle obéit. Je vois sa tête qui réfléchit, se balance ; je lis ce qui s’y
passe, tellement ses pensées sont claires : « Mon devoir est d’obéir, je ne
suis pas née pour aller où je veux, mais pour porter mon maître où il
désire ; je suis obéissante, et il n’est pas de la dignité d’une jument
bien dressée de refuser ce qu’on lui demande ; il n’y aurait plus
d’honneur parmi les chevaux, si nous devenions indisciplinées. Mais à la
vérité, mon maître exagère, ou il ne comprend pas. Souvent l’homme se rompe.
Nous seules connaissons la direction dans une forêt ; par ignorance et
pour le retour, il nous engage dans des chemins qu’il regrette ensuite d’avoir
pris. Mon maître n’entend pas ce qui se passe ; si mon devoir est d’obéir,
mon devoir est aussi de ’avertir ! » Et Peau-d’Âne
s’arrête encore des quatre pieds, le corps rejeté en arrière, comme elle ne l’a
jamais fait. Je la remets en marche d’une pression de jambes : elle obéit
en réflexe, simplement, docilement, mais ses réflexions reprennent :
« C’est insensé, les hommes sont les plus fermés des animaux ; ils
n’entendent pas, ne comprennent pas. C’est une folie d’aller dans la
ville : un obus tombe sur chaque pavé à la minute. Comment lui faire
comprendre ? Et
elle s’arrête encore des quatre pieds, s’immobilise comme un cheval en bronze.
Je la remets plus difficilement en marche, mais elle obéit ; je ne sens
aucune rétivité chez elle ; son corps n’a rien de cette inquiétude qui
pressent l’écart ou le tête-à-queue ; elle veut obéir pour l’honneur et
point me jeter bas, afin de fuir ; mais elle est miraculeusement
raisonnable, lucide. Elle sait que je vais à la mort, ridiculement,
stupidement, par ignorance, et elle voudrait me sauver, car elle m’aime. Elle
s’arrête encore, et cette fois je ne puis plus la remettre en marche. Elle ne
se défend pas, ne se cabre pas, ne frémit pas, n’annonce aucune feinte. Mais
elle ne veut pas aller, ni que j’aille plus loin ; et elle s’arrête bien
décidée, afin que ma pauvre cervelle comprenne son geste ami, ce premier geste
de refus, qui n’est pas de l’indiscipline, mais de la raison et de l’amour. Je
l’ensorcelle par une caresse et la remets en marche. Elle est exactement la
merveilleuse bête, ce que serait une troupe disciplinée, prête à exécuter des
ordres très durs, mais qui , cependant, devant la mort certaine et inutile,
proteste un peu, voudrait faire comprendre à son chef, en même temps que son
dévouement, la folie d’une telle marche en avant. Jamais avant la guerre, ni à
la guerre, je n’ai eu le sentiment d’une telle intelligence chez l’animal. L’animal qui devant un obstacle, de dérobe,
non pas par paresse de le franchir mais parce qu’il le mesure et se sent
inférieur à l’effort, refuse l’obéissance intelligemment et sauve ainsi sa vie
et celle de son cavalier. Mais à la guerre, l’animal a dû acquérir ce sentiment
juste du danger ; il ne résulte plus chez lui d’un long instinct, d’une
longue connaissance des obstacles, d’un sentiment ancestral de ce qui est
permis où défendu. A la guerre le cheval a réfléchi, et, sans être blessé, il a
su ce qui est dangereux du nouvel état de choses, ce qu’il convient d’éviter pour éviter la mort,
la mort qu’il connaît et dont il a horreur : la mort particulière des
chevaux. Donc l’animal connaît le danger ; le danger l’épouvante ; il
veut y échapper ; il veut vivre, il veut fuir le risque où sa vie court
hasard. Et quand nous le voyons accepter
le risque, prenons conscience de sa vertu, de son abnégation, de sa hauteur
morale, de son altruisme. René Quinton Ces soldats américains rendent hommage aux 8 millions de chevaux morts pendant la Première Guerre Mondiale. [1] Ce titre est donné par l’auteur
de ce site web à un texte de René
Quinton figurant sans titre
dans la troisième partie de son livre posthume: « Maximes sur la guerre », Collection Les Cahiers
verts, Bernard Grasset, Paris, 1930. Ce livre, outre quelques réflexions comme celle émise sur les chevaux de guerre, reprenait les maximes guerrières rédigées par René Quinton
durant l’année 1918. Ces maximes dans leur grande majorité constituent un hymne à la gloire du
« guerrier » mais aussi une apologie du militarisme. Très guerrières, ces
phrases peuvent très facilement heurter notre sensibilité. Elles
proviennent du fait que Quinton considérait que trois instincts
existent chez l’homme : l’instinct
de conservation, de reproduction et de moralité. Toujours pour Quinton, c’est
ce dernier instinct qui pousse l’individu à se battre et à se sacrifier
pour l’espèce. Il est clair que les quatre années de guerre ont renforcé
de façon pathologique la
conviction de René Quinton que le
sacrifice et la lutte
guerrière constituent le seul état
naturel du « vrai mâle. Exemples de
maximes écrites par René Quinton
: · La guerre ne transforme point les hommes ;
elle les rend à leur fin native. La guerre est l’état naturel des mâles. · Les jours qui terminent les guerres sont des
jours de deuil pour les braves. · La naissance, la fortune, les vanités n’ont
plus de prix à la guerre. L’homme n’y est paré que de ses vertus · Il faut beaucoup d’efforts, et d’efforts qui
réussissent pour prendre une fierté de soi dans l’existence ordinaire. A la
guerre, il suffit de souffrir pour s’estimer. · A la guerre, c’est une joie perpétuelle que de
vivre. On ne songe à la mort qui guette que pour jour du présent. On est
heureux à la guerre du seul fait d’exister. On y jouit de la vie comme d’un bien
qui vous serait prêté [2] René Quinton : un officier mais aussi un remarquable biologiste et
thérapeute René Quinton, l’officier : Né à Chaumes
(Seine-et-Marne) le 15 décembre 1866. Était capitaine de réserve quand le 2
aout la mobilisation est déclarée. Servit comme officier d’artillerie durant
les quatre années de guerre. Particulièrement valeureux, René Quinton participa
à de nombreux combats. Il fut blessé 8 fois dont une fois à Lombardzijde
et trois fois à Nieuport. Dans ces citations on relève qu’il fut décoré
chevalier de l’Ordre de Léopold par le roi Albert pour avoir montré courage et
dévouement pour sauver les archives d e Nieuport. René Quinton n’hésitait pas à
se lancer avec les premières vagues d’infanterie pour reconnaître de nouveaux postes
d’observation pour son artillerie. Il fut cité de nombreuses fois à l’ordre de
l’Armée et obtint le 18 juin 1920 la
Légion d’honneur. Il mourut le 9 juillet 1925.
René Quinton, biologiste et inventeur de la
thérapie par l’eau de mer appelée « Plasma Quinton » Dans son livre monumental "Eau de mer, Milieu organique" René Quinton établit scientifiquement la ressemblance qui existe entre l'eau de mer et le plasma sanguin. Cette ressemblance provient du fait que les premières cellules vivantes sont apparues sur notre planète dans l’environnement marin de l’océan. Voir : http://oceanplasma.org/documents/renequinton.html Dès 1906, Quinton proposait sa thérapie par eau de mer aux bébés souffrant de troubles gastro-intestinaux graves. Le traitement marin appliqué dans les services hospitaliers de Paris (hôpitaux Saint-Louis, Beaujon, Hôtel-Dieu, Tenon, Maison Dubois, Pitié et à l'asile de Mouleaux) consistait en injection sous-cutanées d'eau de mer ramenées à l'isotonie organique à la dose 0.01 à 0.015 (pour ce mélange d'un centième à un centième et demi) du poids du corps du sujet. Un bambin avant et après la cure Quinton Vu le succès rencontré, Quinton ouvrit son propre dispensaire à Paris. Le succès fut au rendez-vous et bientôt la France se couvrit d’une dizaine de « dispensaires Quinton ». Les journaux encensèrent Quinton en le considérant comme un nouveau Louis Pasteur…. La méthode d'utilisation de l'eau de mer se répandit ensuite dans d’autres pays comme l’Angleterre, l’Italie et la Belgique et partout en Europe. La renommée de Quinton parvint même jusqu’en Egypte où il se rendit pour essayer d’enrayer l’hécatombe entraînée par les dysenteries chez les enfants. Il revint en France en 1913 puis la Grande Guerre éclata. Après l’armistice, la méthode Quinton cessa de s’étendre suite aux progrès de l’hygiène et de la thérapeutique médicale. Ses disciples Jarricot, Macé, Simon, Potocki et d'autre, continuèrent néanmoins sa thérapeutique jusqu'à la deuxième guerre mondiale. Aujourd’hui la méthode thérapeutique Quinton est toujours appliquée par quelques médecins. Le traitement par exemple des pathologies des disques lombaires par des injections sous-cutanées de solutions marines autour des disques en souffrance (hydrotomie percutanée à l’eau de mer) montre de bons résultats. Le(s) disque(s) écrasé(s) semble reprendre un volume normal en se réhydratant par l’eau de mer. |