Médecins de la Grande Guerre
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Naissance de la F.N. des Mutilés et Invalides de Guerre[1] Sous
le Haut Patronage de LL. MM. Le Roi et La Reine et sous la Présidence
d’Honneur de Madame la Princesse Jean De Mérode A la demande
des auteurs du «Guide de l’invalide », le Secrétaire Général de la F.N.I.
a bien voulu les notes qui suivent. Avec sa
modestie habituelle, H. Timmerman passe sous silence la part active qu’il a
prise à la création et au développement de la Fraternelle d’abord, de la F.N.I.
ensuite. L’histoire de la création de la F.N.I.
après l’armistice, offre un intérêt rétrospectif très vif pour les membres de
la grande famille des invalides de la guerre, qui sont à juste titre
profondément attachés à leur chère Fédération. Il est par conséquent utile de
la rappeler ici brièvement. La F.N.I. fut définitivement constituée à
Bruxelles au début de 1919, après quelques réunions préliminaires tenues chez
Maître Henri Le Clercq, dans sa maison de la Place de
l’Industrie, entre quelques camarades qui, précédemment déjà, avaient été mêlés
à l’un ou l’autre groupement d’invalides fonctionnant pendant la guerre, soit
en Belgique occupée, soit en France. Immédiatement après les premières
batailles de Liège, Namur, Anvers, etc., il y eu des blessés et, dans les
hôpitaux, ils furent amenés tout naturellement à échanger déjà des réflexions
sur la sort qui serait réservé plus tard à ceux qui, physiquement amoindris,
allaient se trouver dans la vie civile aux prises avec les difficultés de l’existence. En pays envahi, les plus grièvement
atteints parmi les invalides échappèrent à la captivité et purent rentrer de l’hôpital
dans leurs foyers. Par suite des rigueurs de l’occupation ennemie réduisant la
population à l’inactivité, la misère s’installa dans le pays. L’œuvre « Aide
et Apprentissage aux Invalides de la Guerre » que présidait, avec un
admirable dévouement, Madame la Comtesse Jean De Mérode, vint en aide aux
invalides. Mais la situation devenant de plus en plus difficile, le besoin d’entr’aide et de solidarité s’affirma bientôt chez ceux-ci
en même temps que le désir de s’unir en une association qui s’occuperait de
leurs intérêts moraux et matériels. L’idée prit corps et fut mise en pratique
en novembre 1915 : le premier groupement d’invalides de Guerre fut
constitué à Bruxelles, sous la dénomination de « La Fraternelle »,
avec comme devise : « Un pour tous, tous pour un ». L’article 2 de ses statuts s’exprimait
comme suit : Art. 2. – La fédération a pour but de
venir en aide aux soldats mutilés et invalides de la guerre libérés par les
autorités militaires : 1°) en les entourant d’une solide
fraternité, en relevant leur courage souvent affaibli par les souffrances de la
mutilation et par l’épuisement de leurs forces ; 2°) en les instruisant, en les distrayant,
en les soutenant dans toutes les circonstances ; 3°) en leur fournissant des secours pécuniaires
et en nature pouvant les aider dans le rétablissement de leur santé et le
relèvement de leur famille ; 4°) en leur inspirant le goût du travail,
en leur procurant des outils, marchandises, etc., en rapport avec la profession
qu’ils exerçaient avant la guerre ou celle que leurs aptitudes restantes leur
permettent encore d’exercer ; 5°) en leur procurant une occupation
rémunératrice en rapport avec leurs aptitudes ; 6°) en attirant sur eux, partout et en
tout temps, l’attention et la bienveillante protection des pouvoirs publics ; 7°) elle a pour but plus lointain de
former le noyau d’une fédération nationale de tous les vétérans de la guerre
destinée à défendre les droits de tous les anciens militaires, des veuves et des orphelins des camarades morts au champ
d’honneur. Cette comporterait une section de « secours mutuels ». Magnifique programme répondant à tous les
besoins et qui obtint l’adhésion unanime. Les invalides de Bruxelles se
groupèrent spontanément autour du Comité provisoire qui comprenait au début
quelques philanthropes désireux de se rendre utiles. Bientôt cependant, après
une courte période de tâtonnement, la présidence fut confiée à Sylvain De Valkeneer, lequel se dépensa sans compter dans l’exercice
de sa charge. Au bout de quelques mois, la fédération de Bruxelles comptait 600
membres, avait installé un atelier de cordonnerie et réparti plus de 50.000
francs – somme importante pout l’époque – en secours divers. Entretemps, l’idée avait fait son chemin :
une « Fraternelle » avait été créée à Liège, sous l’impulsion de nos
amis Désirant et Léonard ; à Louvain, sous la présidence de Mr Breus ; à La Louvière, sous celle de Mr Jaupin ; à Mons, sous celle de Mr Lefèvre. A Gand,
Hasselt et Anvers fonctionnaient également des groupements d’invalides, mais
les communications étant rendues impossibles par l’occupant, le contact était
difficile à établir entre les diverses associations. Les sections de la
Fraternelle de Bruxelles, Liège, Louvain, La Louvière et Mons avaient adopté
les mêmes statuts. La Fraternelle poursuivit activement la
réalisation de son programme et avait déjà rendu d’éminents services aux
invalides, lorsque en septembre 1917 le pouvoir occupant en ordonnait la
dissolution, quelque temps après que De Valkeneer eut
refusé un chèque de mille marks que lui avait fait parvenir la Croix-Rouge
allemande. Mais elle continuait de vivre, la première fédération des invalides,
bien que son activité ne pût plus se manifester publiquement. Et, dès l’armistice,
elle réapparut sur la scène et reprit son activité pour se joindre en janvier
1919 aux camarades de Port-Villez. De l’autre côté de la barrière formée par
les armées en présence, fonctionnait l’école de rééducation des invalides
belges de Port-Villez. Là, également, se manifesta la
volonté de s’unir en vue de la défense des droits des victimes de la guerre. Le
sous-lieutenant Henquinez, le médecin Depoortère, MM. Discry, Van Hoeck, Neujean, Limet et d’autres créèrent le « Cercle d’Etudes de
Port-Villez », embryon de la future fédération. C’est aux premiers jours de l’an 1917 qu’y
furent organisées les premières réunions. Un comité mixte, composé de mutilés
et de professeurs choisis parmi les membres du Cercle, mit tout en œuvre en vue
de la réalisation du but poursuivi. Dans la section française comme dans la
section flamande eurent lieu des conférences suivies de discussions
approfondies sur des questions importantes telles que la mutualité, la
coopération appliquée à la situation spéciale des mutilés, le problème des
accidents de travail pouvant survenir aux mutilés et la manière dont leur
réparation devrait être poursuivie, l’éducation civique, la question des
pensions, etc. Ces séances eurent lieu chaque semaine, sauf pendant les congés,
et furent suivies assidûment par beaucoup de camarades préoccupés de trouver
des solutions adéquates aux problèmes qui hantaient leur esprit. Ensuite, l’idée de fonder un bulletin
rencontra le meilleur accueil dans le milieu des invalides de Port-Villez. Comme on le pense bien, la réalisation n’alla pas
sans difficultés. La direction ayant donné l’autorisation, c’est sur les
presses de l’école de rééducation que fut imprimé l’organe. Pour donner
satisfaction à tous, une édition française et une édition flamande firent
lancées. Ainsi naquirent, en septembre 1917, « L’Invalide Belge » et « De
Belgische Gebrekkelijke »,
ce dernier devenait plus tard « De Belgische verminkte ». Ce n’est pas sans appréhension que l’idée
fut exécutée, mais de si généreux efforts devaient trouver leur juste
récompense dans le succès le plus complet de l’entreprise. L’œuvre rencontra
beaucoup de sympathies et d’encouragements dans certains milieux français et
chez les officiers belges. Les abonnements affluèrent nombreux et le journal
put être envoyé dans les hôpitaux et les divers centres de rééducation. Fin
1918, le nombre des abonnés dépassait de loin deux milliers, lorsque la fin de
la guerre vint interrompre la publication. Tous les frais étaient payés et il
restait dix mille francs en caisse. Nos amis de Port-Villez
avaient aussi accompli avec une ténacité digne des plus vifs éloges une œuvre excellente,
préparant comme « La Fraternelle » la voie à suivre par les invalides
en vue de la réalisation de leurs justes aspirations. La fusion de « La Fraternelle »
et du « Cercle d’Etudes de Port-Villez » s’opéra
très simplement et sans la moindre difficulté. Leurs délégués se rencontrèrent
au début de 1919, chez Maître Le Clercq et ensemble
ils jetèrent les bases définitives de « La
Fédération Nationale des Militaires Mutilés et Invalides de la Guerre ».
Le travail préparatoire fut exécuté promptement ; le Comité provisoire se
présenta en mars 1919 au Lion d’Or à Bruxelles devant une assemblée très
nombreuse, qui lui marqua sa confiance. Entretemps, le journal « L’Invalide
de Guerre » - « De Belgische Verminkte »
dont la direction avait été confiée à Achille Reisdorff,
paraissait de nouveau régulièrement, et le Comité avait déjà entrepris des
démarches auprès du Gouvernement en vue de faire prendre d’urgence des mesures
en faveur des invalides de guerre. La F.N.I. était lancée. Elle se développa
rapidement sous l’impulsion de son incomparable président, Maître Henri De Clercq, pour devenir bientôt une force dans le pays.
Depuis, elle marche de succès en succès, pour le plus grand bien des invalides
de la guerre. H. Timmerman.
[1] Extrait du « Guide de
l’Invalide » Tome I, auteurs A. Castiaux et F. Temmerman, édité par :
Administration du « Guide de l’Invalide » dans les années 1930. |