Médecins de la Grande Guerre

Les lions Whisky et Soda, mascottes du pilote Lufbery et de l’escadrille Lafayette

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Les lions Whisky et Soda, mascottes du pilote Lufbery

et de l’escadrille Lafayette


Gervais Raoul Lufbery (1885-1918)

Lufbery fut un des plus grands pilotes de chasse de la Première guerre mondiale. Son tableau de chasse à l’escadrille Lafayette, comptabilisait 17 avions ennemis abattus officiellement (mais beaucoup plus en réalité). La vie de Raoul Lufbery constitue un véritable roman d’aventures[1]. Fils d’une Française et d’un Américain, il fut à la mort de sa maman élevé par sa grand-mère. Très jeune, il dut gagner sa vie et en 1905 quitta la France pour parcourir le monde en exerçant mille petits métiers jusqu’à sa rencontre avec le pilote français Marc Pourpe en 1912 à Calcutta. Marc Pourpe sillonnait lui-même la planète en vivant de ses exhibitions aériennes effectuée sur son monoplace Blériot. Lufbery devient alors son infatigable mécanicien jusqu’au jour de la déclaration de la guerre, où son patron et ami s’engagea dans l’aviation française. Lufbery décida alors de s’engager dans la légion étrangère pour combattre en France aux côtés de son ami. Hélas, Marc Pourpe se tua lors d’un atterrissage en décembre 1914. Lufbery qui était parvenu à être muté comme mécanicien dans l’escadrille de Pourpe n’eut alors plus qu’un seul but : prendre le relai de son ami en devenant pilote. Il parvint à ses fins et rejoignit l’escadrille Lafayette en mai 1916. Sa première victoire survint le 30 juillet 1916 au-dessus de Verdun. Le 12 octobre 1916, il parvint à abattre cinq avions ennemis et sa manœuvre « the Lufberry circle » lui assura la célébrité chez tous les pilotes alliés. Lufbery affectionnait les mascottes de l’escadrille.



Fram, le chien du commandant d’escadrille le capitaine Thénault

Il y avait d’abord Fram, le chien du commandant d’escadrille le capitaine Thénault. Ce chien grimpait aux troncs d’arbres, sautait des murs de 2 m 50. Guynemer offrit en vain une fortune à Thénault pour acquérir cette mascotte.  Fram pouvait percevoir le retour de son maître dix minutes avant son atterrissage : il quittait alors le hangar où il se reposait pour gagner la piste où nez au vent, il attendait patiemment son maître. Wisky, le lionceau avait été acquis pour 500 F. par le pilote Thaw à un dentiste brésilien au Ritz à Paris. Le pilote le ramena en train, tenant son lion par une laisse. Mais il dut descendre du train car le lionceau avait provoqué l’évanouissement de deux voyageuses. Finalement, Whisky fut ramené à l’escadrille dans une cage. Whisky devint l’ami fidèle de Lufbery vers qui il fonçait toujours comme pour le dévorer mais c’était pour être caressé. Whisky avait cependant un gros défaut, ou plutôt une lubie. Chaque fois qu’il apercevait un képi, il essayait de le dérober. Un jour il s’empara du képi tout neuf du pilote Larry Rumsey. Ce dernier pour lui faire lâcher prise lui donna un coup de bâton qui l’atteignit à l’œil droit. Finalement il fallut énucléer le lion. Thaw se rendit à Paris avec Whisky chez l’oculiste pour la pose d’un œil de verre. Il profita de ce déplacement pour donner une compagne à Whisky et ramena dans sa voiture une petite lionne qui venait de naître au jardin d’acclimatation et qui  fut baptisée Soda.



Lufbery avec Whisky et Soda

Fin de l’année 1917, l’escadrille dut se résoudre à se séparer des lions car ils perturbaient trop la vie de l’escadrille. On les ramena à Paris. Soda mourut rapidement et Whisky en 1919 non sans avoir revu le capitaine Thénault auquel il lécha la main à travers les barreaux.

Au printemps 1918, Lufbery devint le commandant de la 94ème escadrille américaine. Une année plus tard, en essayant d’intercepter un avion de reconnaissance allemand, son avion fut  touché et s’enflamma. Lufbery fut projeté dans le vide ou se jeta lui-même de son avion pour ne pas être brûlé vif. Son corps s’écrasa dans un jardin du village de Maron près de Toul. Raoul Lufbery fut enterré au cimetière des aviateurs à Sébastopol en France. Plus tard, sa dépouille fut transférée à une place d’honneur dans la crypte du Mémorial Lafayette du parc de Villeneuve l’Etang à Paris. Ce monument élevé en 1928, comprend une crypte où reposent les 67 pilotes américains tombés pour la France. Dans celle-ci, des têtes de lion sculptées rappellent les mascottes des courageux pilotes.



Le mausolée dédié aux pilotes américains dans le parc de Villeneuve l’Etang

Dr P. Loodts

 

 

 

 



[1] Voir à ce sujet la belle description des aventures de jeunesse de Lufbery dans « Vie et mort de Raoul Lufbery  » par René Nouveau :