Les grands pères silencieux.
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Hippolyte Vangertruyden 28 février 1910 - 19 ans - Volontaire classe 1909 TOURNAI. (Collection R. Fontaine)
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Hippolyte Vangertruyden . (Collection R. Fontaine)
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Hippolyte Vangertruyden au Camp de Beverloo. (Collection R. Fontaine)
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Hippolyte Vangertruyden en juillet 1912 au Camp de Beverloo. (Collection R. Fontaine)
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Groupe avec Hippolyte Vangertruyden au Camp de Beverloo. (Collection R. Fontaine)
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Document concernant Hippolyte Vangertruyden. (Collection R. Fontaine)
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Document concernant Hippolyte Vangertruyden. (Collection R. Fontaine)
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Document concernant Hippolyte Vangertruyden. (Collection R. Fontaine)
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Léon Baudet, 3eme rangée et 3eme à partir de la gauche, était peut-être à Creil sur Mer ? (Collection R. Fontaine)
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Léon Baudet, le premier par la droite, lors d'une petite partie de cartes au camp d'Elsenborn. (Collection R. Fontaine)
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Document concernant Léon Baudet. (Collection R. Fontaine)
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Document concernant Léon Baudet. (Collection R. Fontaine)
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Document concernant Léon Baudet. (Collection R. Fontaine)
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Document concernant Léon Baudet. (Collection R. Fontaine)
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Les grands-pères silencieux.
Je suis maintenant arrivé dans la catégorie d’âge baptisée
au 20ème siècle celle des seniors qui, clairement, n’est rien d’autre pour ceux qui la constitue que
celle d’être tout simplement grands-parents !
Il m’arrive souvent de penser aux miens, à ces
grands-parents dont, finalement, je ne connais pas grand-chose. Ces anciens
avec qui les contacts étaient bien différents de ceux qui existent maintenant
entre les générations de nos « temps modernes ». A cette époque de Charles
de Gaulle et des Beatles, du twist et des cheveux longs, les années 60, c’est vrai que mes
grands-parents me semblaient si vieux, par
rapport à moi, tout juste adolescent !
Mes anciens, mes « vieux ».
Ces « vieux » qui étaient nés fin du 19ème siècle !
Vous imaginez, ... le 19ème siècle !
Ces « vieux » dont la vie fut brisée à
deux reprises : leur jeunesse par la première guerre mondiale puis, à
peine remis s’ils s’en étaient sortis indemnes, leur famille bouleversée à
nouveau par la seconde.
Mes « vieux » qui, sans doute par pudeur
ou peut-être pour ne pas me faire peur,
voire ne pas m’ennuyer avec de vieilles histoires, ne parlaient pas souvent
d’eux, de leurs guerres.
Mes « vieux », nos « vieux », car
de tels grands-parents, je ne suis sans
doute pas le seul à en avoir eus.
J’ai dernièrement « gratté » la
généalogie de la famille et, en m’informant auprès de tantes et oncles, leurs
enfants, je me suis rendu compte que eux
non plus ne connaissaient pas grand-chose de cette période où la jeunesse de
leurs parents fût détruite dès 1914.
Mais en poursuivant mes investigations et avec
l’aide, notamment, du Musée de l’Armée de Bruxelles, voici ce que je peux en
dire.
Mon grand-père maternel, Hippolyte Vangertruyden, était le plus âgé, du mois d’août 1891, 23 ans
en 1914.
Originaire de Bilzen, en Limbourg, il était sergent
volontaire de 1909 et entra à la Caserne Rucquoy à Tournai. Le 1er
août 1914, le matricule 51447 rejoignit la 6ème Compagnie du 2ème
Bataillon du 3ème Régiment de
Chasseur à Pieds. Il prit part aux combats dans la région de Dixmude où il fut
blessé, suivant des ouïs dires de la famille, malade suivant ses documents
militaires. Ce n’est qu’en 1964, à son décès, que le médecin de famille informa
ses proches qu’il avait perdu l’usage d’un poumon suite aux soins tardifs reçus
dans les tranchées de l’Yser ! En effet, retrouvé après plusieurs jours, étendu
dans la boue, c’est le 11 janvier 1915 qu’il fut évacué vers un hôpital, peut-être
celui de l’Océan à La Panne par où transitaient la plupart des blessés. Il
aurait ensuite été transféré vers la Bretagne mais sans certitude aucune. Le 9
juin 1915 il sera mis en congé sans solde et réformé le 5 avril 1917. La suite
de son parcours est assez mystérieuse car il se retrouva en Auvergne, à Saint
Sauves, petit village au cœur des volcans, près de La Bourboule, avec pour
fonction la surveillance d’un camp de prisonniers. Ceux-ci, français pour la plupart, réfractaires et
mutins, prisonniers de guerre pour d’autres, travaillaient à
l’exploitation d’une carrière de basalte. Etais-ce l’armée belge qui l’avait
envoyé à ce poste ? Etais-ce de sa propre initiative ? La question
reste sans réponse et le restera probablement. Cet épisode de sa vie lui permit
néanmoins de rencontrer l’élue de son cœur et de créer une famille de sept
enfants qu’il ramena en Belgique en 1935.
Une partie de sa jeunesse se résuma à 11 mois de
guerre, 2 chevrons de front, la médaille de l’Yser dont il resta très fier et,
une rente pour invalidité dès le mois d’août 1923 suite à la perte d’un poumon.
Et durant près de 50 ans, il tut sa souffrance.
André Fontaine, grand-père paternel que je n’ai pas
connu car il décéda en 1942, était né en janvier 1895. 19 ans en 1914.
Bien qu’en âge de s’engager il semble qu’il ne
souhaitait pas s’offrir en chair à canon aux armées allemandes ni d’ailleurs d’accepter
de travailler pour l’occupant.
Néanmoins, en 1916, les autorités allemandes réquisitionnèrent, comme
indiqués sur les affiches placardées dans le village, « tous les habitants
mâles de la commune ayant passé leur 17ème année jusqu’à 60
ans ».
D’abord convoqués dans la grande salle des fêtes de la Maison du Peuple, chacun répondant à ces
conditions passa devant une commission d’officiers et, après un tri « vite
fait bien fait », 577 civils d’Ecaussinnes, Marche, Mignault, Naast et
environs furent conduits sous bonne escorte à la gare d’Ecaussinnes-Carrières
d’où partit, le 11 novembre 1916, un convoi vers l’Allemagne. Transitant
notamment par Schaerbeek, Tirlemont, Liège, Cologne, Munster, Osnabrück et Brême,
le convoi de déportés arriva à Soltaü le 13 novembre. Situé à environ 80
kilomètres de Hanovre et à l’est de Brême, le camp de travail et de
concentration de Soltaü était construit dans
les marais du Lüneburg en Basse Saxe ; il était aussi considéré
comme le principal camp de représailles de la zone, une zone géographique reconnue
pour ses conditions particulièrement difficiles. Après avoir
« visité » les camps de Lichtenhorst, Munster et Metz, il fut libéré
le 25 juin 1917.
Etant en âge de s’engager lors de la déclaration de
la guerre et ne l’ayant pas fait, il n’eut droit de ce fait à aucune médaille
ni indemnisation.
Léon Baudet, second mari de ma grand-mère paternelle
naquit en mars 1894. Juste 20 ans en 1914. Il rejoignit le contingent
belge de Granville en France avec une
bande de copains d’Ecaussinnes. A en croire le carnet de route de l’un d’eux,
une bonne partie du chemin se fit à pied, mais aussi en train vers Gand,
passage à Ostende, descente vers Furnes puis Dunkerque et par bateau vers
Cherbourg pour enfin arriver à Granville
( 3ème D.A.) où il est inscrit à la date du 20 octobre 1914. Ses
documents militaires, assez complets, font mention de ses mutations au 4 / III
du 14ème Régiment de ligne en février 1916, de son passage au CIM de
Creil-sur-Mer en tant qu’élève mitrailleur, ... pour finalement passer au 18ème
Régiment de ligne, 3ème Bataillon, 12ème
Compagnie. Son bataillon occupa les secteurs de Perwijze, Ramskapelle
non loin de Nieuwport et la région de Boezingue. Il se retrouva du côté de
Dixmude lors de l’offensive libératrice de septembre 1918 et contribua à la
reconquête d’Esen. Le matricule 1910 fut mis en congé illimité le 7 octobre
1919, cinq ans après son arrivée à Granville, cinq années des quelles je ne
sais rien, cinq années dont j’ai à peine entendu parler. Si, une chose dont je
me souviens pour l’avoir entendu la répéter souvent lors de repas pris chez mes
grands parents, quand je me plaignais de la viande qui m’était servie :
« Dans la tranchée, après plusieurs jours d’abstinence, il lui fut servi
une tranche de viande si peu cuite que,
la mangeant sans couvert, le sang lui dégoulinait tout le
long du bras ».
Avouez que c’est quand même peu sur quatre longues
années de front !
Il bénéficia de six chevrons de front, fut cité aux
OJA et décoré le 14 mars 1919 de la Croix de guerre « pour s’être
évadé des territoires occupés par l’ennemi et s’être distingué par son courage
et son dévouement au cours de sa présence à l’armée de campagne » Il reçu
également le 8 août de la même année la Médaille de la Victoire puis, le 18
septembre, la Médaille commémorative de la guerre 1914-1918. Il eut droit aussi
à la Médaille avec Palmes d’or de l’Ordre de la Couronne, de Chevalier de l’Ordre
de Léopold II avec glaives, ... mais refusa de les acquérir car il refusait de
les acheter, estimant (à juste titre ) les avoir bien
méritées. Il fut aussi quelques années secrétaire de la Section Croix du Feu d’Ecaussinnes.
Et moi, son petit fils, je ne sais rien de ses 3
ans, 11 mois et 27 jours passés dans les boues de l’Yser.
Tout comme d’ailleurs je n’ai jamais rien su
d’André et tellement peu d’Hippolyte.
R. Fontaine
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