Médecins de la Grande Guerre
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La mystérieuse
infirmière Yolande de Baye Yolande de Baye fut la première femme décorée de la Légion d’honneur avec traitement. Elevée dans le château de Baye, ses parents sont pour le moins originaux. Son père, Joseph Berthelot, baron de Baye est passionné par les relations franco-russes et la préhistoire. En août 1914, il se trouve en Russie pour y effectuer des fouilles archéologiques. Assez curieusement, il prétextera de la guerre pour ne pas rejoindre son foyer et restera éloigné de sa famille durant toute la durée des hostilités ! Quand il revient enfin en France, il retrouve sa femme, née Marie Oppenheim et sa fille Yolande devenues de véritables héroïnes. Les deux femmes s’étaient en effet totalement consacrées aux blessés de la grande guerre. D’abord volontaires dans un hôpital de Biarritz, elles décidèrent ensuite de créer leur propre fondation destinée à créer ou a subsidier des nouvelles ambulances. Yolande utilisa, dit-on, sa dot pour ce faire. La baronne de Baye et sa fille Yolande permirent ainsi la création de plusieurs ambulances dont celles œuvrant à Vitry-le François, à Dugny et à Souilly... Yolande de Baye À Vitry, Yolande dirigea sa fondation annexée à une ambulance de l’armée. Cette ambulance fut privilégiée car lors de l’offensive de champagne du 25 septembre 1915, elle disposait d’un matériel chirurgical des plus perfectionnés acquis par la fondation de Baye. De plus Yolande prêtait secours à l’ambulance à la tête d’une équipe d’infirmières recrutées par elle et entièrement à sa charge. De la même façon, elle assura de mai à octobre 1916, le fonctionnement d’une importante formation soignant les grands blessés à Deuxnouds-devant-Beauzy. Enfin d’octobre 1916 à juillet 1917, elle partagea son temps entre les formations de Dugny et de Souilly. Dans l’HOE (hôpital d’orientation des étapes) de Souilly qu’elle avait munie de matériel et même de salles de récréation, restée à son poste malgré les bombardements, elle fut blessée par un obus de gros calibre en juillet 17. Elle reçut alors la Légion d’Honneur des mains du général Pétain puis eut l’honneur de recevoir la visite du Président Poincaré qui se déplaça jusque son lit d’ambulance. Petite parenthèse amusante : Yolande eut des contacts personnels avec le général Pétain qui semble avoir éprouvé envers elle une grande admiration, si pas de l’affection. Elle aurait fait office de chauffeur au général à l’une ou l’autre occasion et ce fait ne manqua pas de susciter des ragots dans la presse sur la nature de leurs relations au point que l’on parla même d’un mariage, ce que dut démentir le général lui-même au printemps 1916. En 1918, tout en continuant son appui à l’hôpital de Souilly, Yolande et son équipe soutinrent les offensives franco-américaines dans la région de Verdun. Connaissant très bien la langue anglaise, elle fut d’un grand secours pour aider les ambulances américaines à traiter les soldats intoxiqués par les gaz, pathologie dont le service de santé américain n’avait pas l’expérience. Epuisée par les efforts de l’offensive, peu de jours avant l’armistice, Yolande développa une pleurésie (complication de la grippe ?) qui l’obligea à s’aliter. Yolande était fiancée pendant la Grande Guerre à Edmond Rostand. Elle n’eut pas l’occasion de fonder avec celui-ci une famille car Edmond décéda de la grippe espagnole le 2 décembre 1918. Guérie, Yolande continua à se dévouer pour les soldats des troupes d’occupations françaises en Allemagne. Avec sa mère, elle fonda une cantine militaire à Sarrebruck qu’elle équipa d’une salle de spectacle. Cette cantine fonctionna jusqu’en 1924. Sa mère s’illustra lors des émeutes des Prussiens en octobre 1919 en osant circuler parmi les émeutiers en tenue d’infirmière tout en arborant les couleurs nationales. De retour à Paris, en 1920, Yolande retourna vivre auprès de ses parents dans leur hôtel particulier de l’avenue de la Grande Armée. Chapelle de l’ossuaire de Douaumont : A gauche le vitrail consacré aux infirmières, à droite le vitrail consacré aux brancardiers. Les vitraux ont été conçus par l’artiste George Desvallières en 1927. Elle partageait alors son temps entre la poésie, l’animation de cercles patriotiques et son soutien aux veuves. Dans l’ossuaire provisoire du champ de bataille de Verdun à Thiaumont[1], le journaliste Achille Liégeois témoigna dans « Le Journal » du 29 octobre 1920 de sa présence consolante pour les innombrables femmes qui avaient perdu un mari ou un fils : « (…) le
commandant Lespinasse, attaché à l’état-major de la place (de Verdun), citait
ces chiffres : « il y a 600.000 soldats français mais 30.000 à peine
ont été identifiés (…) : « ah si l’on savait à quelles scènes
touchantes assiste le pèlerin qui erre au milieu de ces motifs funéraires, ou
se répète la désignation du « soldat inconnu », si laconique, si
administrative, hélas, qu’elle fait involontairement songer à cette autre
formule employée également par les P.T.T. « Parti sans laisser
d’adresse ! » A quelques pas de la ferme de Thiaumont,
un ossuaire s’élève. Baraquement en planches au toit duquel flottent nos
couleurs (…).L’ossuaire est confié aux soins de Mademoiselle de Baye. C’est
elle qui nous contait cette anecdote : « chaque jour les visites se
succèdent… toujours les habits de deuil, toujours les veuves noires, toujours
des visages en larmes… Une vingtaine de pauvres cercueils contiennent les
restes auxquels ne s’attache d’autre renseignement que l’indication des lieux
où ils furent exhumés… Parfois, lasses de recherches et comprenant l’inutilité
du pénible voyage qu’elles furent à travers la France, une veuve ou une mère
s’adressent à moi : « Ah, sanglotent-elles, on nous a déjà dit qu’il
était tombé à Fleury… Mais rien… Quel désastre ! Puisqu’une pieuse
destination réunit dans le même cercueil les camarades tués à Fleury, c’est
donc sur eux que nous prierons… Et les malheureuses s’agenouillent devant ces
compagnons « inconnus » de leurs époux ou de leurs fils… » Yolande fut aussi présidente de la section du 17e arrondissement de l’Union nationale des combattants et présidente du comité central des 8e, 16e et 17e arrondissements de la société de la Légion d’Honneur. Avec sa mère, elle participa aussi au financement du vitrail de Douaumont consacré aux infirmières. Les Femmes françaises décorées de la Légion d’Honneur pour services rendus pendant la Grande Guerre. - 1 Mme la comtesse de l 'Epinois, tuée au champ d'honneur. - 2 Mme Ehrhardt. - 3 Mlle Fouriaux. - 4 Sœur Gabrielle. - 5 Mme Maître. - 6 Mlle Deletête. - 7 Mlle Yolande de Baye. - 8 Sœur Bazilides. - 9 Sœur Julie. - 10 Mme Rocque. - 11 Mlle Marcelle Semmer. - 12 Mme Paul Dislère. - 13 Mlle Cnaton-Baccara. - 14 Mlle Thuliez. Très proche de la famille du maréchal Joffre, elle assista ce dernier jusqu’à son décès en janvier 1931. La dernière partie de sa vie fut discrète. En 1959, dernière héritière des de Baye elle céda son château à l’œuvre religieuse des Foyers de charité. En 1970, elle fut la dernière représentante de la famille Berthelot de Baye à être enterrée dans la crypte funéraire familiale de la chapelle Saint-Roch à Baye. Depuis 2014, une rue de la commune de Vitry-le-François porte son nom. On aimerait connaître beaucoup plus sur la vie de Yolande de Baye. La littérature la concernant est très pauvre ! Avis au lecteur qui pourrait compléter la petite biographie de cette femme qui certes remarquable reste encore bien mystérieuse. Dr P. Loodts [1] Après la guerre, ce fut surtout l’abbé Noël aidé par Mademoiselle de Baye qui anima le travail de récupération et d’identification des corps trouvés sur le champ de bataille de Verdun. Les dépouilles étaient regroupées dans l’ossuaire provisoire près de la ferme de Thiaumont. En 1927, elles furent transférées dans l’ossuaire de Douaumont qui fut inauguré en 1932 par le président de la république, Albert Lebrun |