Médecins de la Grande Guerre
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La ville d’eau de Spa, immense centre
de convalescence pour soldats allemands. Avis de l’Administration communale conjointement avec la Croix-Rouge de Spa Journal personnel du docteur Achille Poskin, médecin en chef des hôpitaux de la Croix-Rouge de Spa Le corps médical des hôpitaux spadois. On y reconnait, au premier rang à partir de la gauche : le professeur Henrijean (2e), le Dr Achille Poskin (3e), le pharmacien Marcel Leboutte (4e) et la Dr Fraipnt (5e). Au second rang à partir de gauche : le Dr Everaerts (1er), le professeur Wybauw (2e), le Dr Schaltin (3e), le Dr Delneuville (4e) et le Dr de Damseaux (6e) Le 21 août 1914, Spa possède un hôpital
de la Croix-Rouge belge de 700 lits, ainsi qu’un hôpital de 300 lits géré par
la Croix-Rouge allemande. Ces deux hôpitaux sont répartis sur de nombreux sites
de la ville dont la galerie Léopold II, l’hospice St Charles, la villa Royale,
le Casino et la grande salle du Kursaal.
Le Dr Achille Poskin (spécialiste en hydrologie, il fut à l’origine de la captation
de la source Wellington en 1908
découverte sur le terrain de Georges d’Art et au sud-est du lac de Warfaaz. Le
Dr Poskin (décédé en 1923.) est responsable de l’hôpital belge et il a fort
affaire, partagé entre la recherche de médicaments, de nourriture et du coke
pour le chauffage. En plus de ces missions d’intendance, il donne évidemment
les soins tout en gérant la complexité des relations humaines tant avec les
Allemands, qu’avec son personnel ou avec les blessés. Vue générale de l’hôpital aménagé par la Croix-Rouge dans la galerie Léopold II dont ses deux côtés étaient vitrés à l’époque Le 10 novembre 1914, l’hôpital de la
Croix-Rouge arrête ses activités après trois mois de fonctionnement. Les
derniers hospitalisés sont rapidement évacués car l’autorité allemande a décidé
de transformer Spa en un immense centre de convalescents pour soldats. Cette
décision ira évidemment de pair avec la réouverture des bains carbo-gazeux. La
ville d’eau devient alors le « KaiserlichesMilitairGennesungsheim (KMG) »
sous la direction du médecin allemand Krause. Rapidement, la ville est envahie
par des milliers de jeunes hommes convalescents. Les bâtiments qui avaient
accueillis la Croix-Rouge sont bien vite remplis et l’autorité allemande devra réquisitionner
plus de quarante autres bâtiments. C’est un coût énorme pour la municipalité qui
doit prendre en charge l’éclairage, le chauffage (il fait moins huit degrés le
21 novembre 1914 !) et l’entretien de tous ces lieux ! Selon le pharmacien Leboutte, les
convalescents qui battent le pavé de Spa sont au nombre de 4 à 5.000 ! La
masse des nouveaux arrivants entraînent des problèmes d’hygiène que l’on
imagine facilement. Le soldat allemand convalescent suivait
un parcours bien particuliers. Il était désarmé au camp de Beverloo puis on lui
donnait son affectation dans une « abteilung » (section) de Spa. Les
grands bâtiments étaient réservés aux convalescents sans trop de problèmes
tandis que les villas réquisitionnées servaient aux cas qui nécessitaient encre
des soins soutenus ou qui étaient toujours en quarantaine pour maladies
infectieuses. Généralement les convalescents séjournaient de 6 à 8 semaines
durant lesquelles ils essayaient de s’occuper au mieux en faisant du tourisme,
du sport, ou même du théâtre. Les pièces mises au point par les soldats étaient
jouées au Pouhon Pierre-Le-Grand puis au casino et ensuite, après sa
destruction en 1917, au Cinéma des Familles. Le secrétaire communal reflètera
le sentiment de la population en écrivant : « Quelle triste chose que le spectacle de voir que les eaux, les bains,
l’air de Spa servaient à retaper les troupes ennemies appelées encore à
combattre notre vaillante armée et celles de nos alliés ! ». On reconnait ici la salle à manger du Grand Hôtel Britannique, rebaptisé Station Hindenburg Mutilés allemands dans le parc de Sept-Heures Pour les médecins allemands, la
concentration des convalescents à Spa est l’occasion de faire des études de
grande ampleur. Le typhus (il s’agit sans doute de la fièvre typhoïde et non du
typhus exanthématique !) y est particulièrement étudié. Les médecins
allemands mentionnent qu’entre novembre 14 et février 17, Spa hébergea 22.832
convalescents de cette maladie, soit la moitié des cas
survenus dans toute l’armée impériale. A ces chiffres, il faut ajouter 5.000
convalescents souffrant du paratyphus (paratyphoïde) et 7.000 de dysenterie ! L’école moyenne vaste bâtiment datant de 1907, devenu Station Schule et hébergeant 475 convalescents le 10 avril 1916. Soldats français et allemands occupés à fabriquer de petits objets pour passer le temps Sur la terrasse de la Station Bergschloss ! (villa « Le Freuheux »), réquisitionnée le 27 décembre 1914 pour les besoins du Centre de convalescents. La grande salle du Casino de Spa La piscine de l’établissement thermal rouverte pour l’usage exclusif des convalescents allemands Le six février 1917, alors que le
thermomètre marque – 22 degrés, le casino prend feu. Les convalescents ont
évacués sains et saufs... Pour les Spadois, c’est une catastrophe car leur principal attrait disparaît et, avec celui-ci,
l’espoir d’une reprise économique rapide lorsque la paix surviendra. Les faits d’après- guerre
démentiront heureusement ce pessimisme[1]. Le paradis des convalescents allemands,
si bien situé à Spa, sera cependant supprimé au début de l’année 1918 car l’empereur
Guillaume II y établit son Grand Quartier Général. Commence alors pour la ville
un nouveau chapitre de son histoire mouvementée durant la Première Guerre
mondiale. Les convalescents allemands trouveront refuge en d’autres endroits
notamment dans l’ancienne abbaye (qui deviendra plus tard le siège de
l’institut agronomique) de la ville Gembloux. Nul doute que les convalescents
regrettèrent les atouts que la jolie ville d’eau de Spa leur réservait
auparavant. Beaucoup de convalescents se feront tirer le portrait ai Pouhon Pierre-le-Grand où un petit studio de photographie avait été aménagé. On voit ici quelques-unes de ces photos souvenirs encadrées dans des « jolités » ou « Bois de Spa » Un groupe d’infirmiers volontaires allemands « un Felde » (« en campagne ») 1915 Le 14 août 1914, on réquisitionnait les pauvres pigeons des Spadois ! Ce n’était que le début des nombreuses réquisitions ! Dr
Loodts Patrick Source : Guerre et Paix, Spa et l’Europe 1914-1918, Editions de la ville
d’eaux, Edité à l’occasion de l’exposition « Guerre et Paix »
organisée par le musée de la Ville d’eaux au Pouhon Pierre-le Grand en 2018. Ce
beau livre, dont je me suis permis de reproduire ici quelques photos, fut
réalisé grâce aux recherches fructueuses de David Houbrechts, Marc Joseph,
Marie-Christine Schils et Luc Peeters. D/2018/10035/1. [1] Le casino de Spa n’était pas qu’une salle de jeux mais comprenait aussi de nombreux locaux dédiés à la culture. Dans la nuit du 5 au 6 février 1917, le feu prit au rez-de-chaussée et détruisit la salle de jeux, la salle de bal et le théâtre. La salle de bal et le théâtre, œuvres de Barthélemy DIGNEFFE dataient du XVIIIe siècle et avaient été conservés par l’architecte CHAMBON lors des transformations de 1906-1907.Après la guerre, on envisagea de démolir le Casino et de le reconstruire à l’emplacement de l’Hôtel Radisson Palace mais finalement la décision fut prise de reconstruire les locaux incendiés. Cet important travail, qui allait durer jusqu’en 1929, fut confié aux architectes spadois Marcel HANSEN et Marcel PAES. On leur doit le réaménagement complet du Casino et de la salle des fêtes avec la restauration des salles de jeux du 1er étage, la construction des salons rose et bleu sur l’emplacement de la salle de bal de DIGNEFFE, et du petit théâtre en remplacement de l’ancien théâtre dont il s’inspire pour la décoration intérieure. Une entrée fut créée par la rue Servais, enfin prolongée jusqu’à l’église, qui donna un accès plus rationnel à la salle des fêtes, au théâtre et aux nouveaux salons. |