Portrait du Dr Maubille par son arrière petit-fils Noël Nicolas.
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Le docteur Maubille
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Le docteur Maubille
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Le docteur Maubille
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Sur une butte
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Une autre pose
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Un prêtre brancardier
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Photo de groupe dans les dunes
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Photo de groupe dans les dunes
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Arrivée d’un blessé
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Déchargement du blessé
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Une infirmière
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Une infirmière et son chien
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Après un repas
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Après le repas
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Des convalescents
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Des convalescents
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Des convalescents
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Moment de détente
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Des notes pour le carnet
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Explosion sur le vif
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Le barbier !
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Une passerelle
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Sur la passerelle
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Un peu de repos au poste
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Transfert d’un blessé
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Transfert d’un blessé
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Cuisine de campagne
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Un peu de lecture
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La nuit du 1er au 2 décembre 1914 une compagnie 23ème BCP se trouvait au repos dans l'Eglise de Lampernisse, lorsqu’un obus de 110 éclate en heurtant un pilier provoquant un effondrement d'une partie du toit. On dégagera 51 tués et 124 blessés. Les 51 morts sont inhumés, le 3 décembre, dans une fosse commune devant le porche de l'Eglise
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Voir la précédente
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Repos
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Mitrailleuse
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Portrait du Dr Maubille par son arrière petit-fils Noël Nicolas
Romain Benoît
Alphonse Ghislain Maubille est né à Saint-Gilles le
30 août 1890 dans une famille de sept enfants. Il était le seul garçon.
Le docteur Maubille photographié en 1970
En 1909, il
entre à l’armée et commence ses études de médecin. Il reçoit son diplôme en
1913. Il est alors envoyé à l’hôpital militaire de Tournai.
En 1914, la
guerre éclate. Il a alors 24 ans et est envoyé comme médecin du premier
bataillon au 13ème régiment de ligne, régiment qui était chargé de
la protection de Namur. Lors de l’attaque de la ville par les Allemands son
régiment se replie sur Bioul, sans avoir pour autant tiré un coup de feu. Après une courte nuit à Bioul, la retraite continue vers Couvin. Ils passent alors
en France et prennent le train pour Rouen.
Après
quelques jours de repos, ils repartent ensuite pour le Havre où ils prennent le
bateau pour Ostende. Ils seront alors envoyés assurer la protection d’Anvers.
Ils se replieront petit à petit subissant de nombreuses pertes et se
retrancheront derrière l’Yser à partir de la deuxième quinzaine d’octobre 1914.
Là va
commencer pour le docteur Maubille une alternance
entre des périodes au front, à soigner les nombreux blessés, et les périodes de
repos, à l’arrière, durant lesquelles il doit examiner les hommes de son
bataillon voulant se porter malade.
Durant
cette période, il passera par des lieux comme Lampernisse, Wulpen, Adinkerke,
La Panne, Nieuport ...
En avril
1916, il est pris d’une violente rage de dents et est muté à l’hôpital de Petit
Fort Philippe près de Gravelines (France).
En janvier
1917, guéri, il est promu médecin du 19ème régiment. Il s’occupe
alors en grande partie de problèmes de logistique (commande de médicaments et
de matériel, essais de masques à gaz ...)
Après la
guerre, il est muté à l’hôpital militaire de Bruxelles, où il dirige en 1930 le
service d’urologie et de dermatologie. Il se marie en 1925 avec Hélène Freson et démissionne en 1939 de l’armée. Il se consacre
alors entièrement à la clientèle de son cabinet privé à Uccle.
Il prend sa
retraite en 1968 et meurt le 26 avril 1978.
Il n’a
jamais rien raconté à ses enfants au sujet de son travail et de sa vie dans les
tranchées. Après sa mort, en rangeant ses affaires, son épouse trouve au fond d’une
armoire une boîte à chaussure contenant trois carnets om il raconte sa vie dans
les tranchées, des photos et des médailles. Dans les carnets, il alterne des
réflexions sur l’utilité de la guerre et sur son travail et son vécu dans les tranchées.
Voici tout
d’abord une citation de son supérieur décrivant son travail dans les tranchées
puis ensuite des extraits de son journal :
-
Son supérieur raconte son travail dans les tranchées :
« Médecin
aussi remarquable par sa valeur professionnelle que par son courage dans le
danger et son inlassable dévouement aux blessés. A donné pleine mesure de sa
bravoure dans les journées épuisantes du 28-09 au 4-11-1918 et notamment les 15
et 16 octobre où malgré le bombardement systématique de son poste de secours,
il continua à donner ses soins dévoués aux blessés. A été légèrement gazé à Voxdenstraat le 29 octobre 1918 où il a dû changer deux
fois d’emplacement, des obus étant tombés dans son poste de secours y tuant et
blessant plusieurs brancardiers. 43 mois de présence au front. Est porteur de
la croix de guerre » Colonel médecin Schmidt, 30 juillet 1932.
-
Retraite de Namur :
« Le
23 août est une date mémorable dans l’histoire de cette guerre surtout pour la
4ème division. C’est une des journées les plus angoissantes que j’ai
passées. Des dangers multiples nous environnaient nous le sentions bien quoiqu’on
essaya de nous le cacher. Mais nous ignorions la nature exacte et l’imminence.
L’attente d’un évènement est souvent plus pénible que la réalité.
A midi,
nous étions toujours sur la route d’Erpent, là où
nous étions arrivés la veille. Pendant la nuit déjà le bombardement n’avait
cessé. Mais depuis le matin il a redoublé d’intensité et maintenant il est
devenu général. Namur fut pendant quelques heures un véritable enfer. Toutes
les hauteurs qui dominent la vallée sont couvertes de la fumée des obus. Dans
la ville, la mitraille pleut, des incendies s’allument. Au-dessus de Beez, on aperçoit des lignes de tirailleurs qui se
déplacent au milieu de l’éclatement des shrapnels et du crépitement de la
fusillade.
A Erpent, il fait calme : nous recevons à peine quelques
obus. Nous sommes aux premières loges pour assister à la bataille qui fait rage
surtout sur la rive gauche et qui s’étend bientôt du côté de la citadelle. Mais
nous sommes bientôt arrachés à ce spectacle par un ordre de départ. Où nous
envoie-t-on ? La compagnie de Cl Devuyse est
déjà partie depuis quelques temps au pont de < illisible >. Nous nous
dirigeons vers la Meuse où un pont de bateaux construit à Wépion nous livre
passage vers la rive gauche. C’est là seulement que nous nous rendons compte de
la situation. De l’infanterie, de la cavalerie, de l’artillerie ... tout cela
encombre la route dans un ordre très relatif ! Nous battons en retraite !
Nous sommes atterrés ! Nous ne pouvons en croire nos yeux, ces évènements
ayant été si précipités et si imprévus. On nous avait en effet bercé jusqu’ici
des meilleures nouvelles. Chacun ne demandait qu’à se battre et venger l’insulte
faite au pays. On enviait le bonheur des compagnons de la garnison qui déjà
avaient fait le coup de feu et infligé de lourdes pertes à l’ennemi. Et voilà l’ennemi
arrivé à portée de fusil et l’on sonne la retraite. Le bataillon n’avait pas
tiré un coup de feu.
A l’entrain
qui nous animait tous succède une désolation profonde. On ne songe plus qu’à
fuir et fuir le plus rapidement possible. Nous nous dirigeons vers Saint-Gérard
où l’on entend de ce côté une canonnade. Un combat s’y livre, dont l’issue doit
être peu favorable car on nous fait changer de direction. Par des sentiers à
travers bois, on nous conduit à Bioul où nous
arrivons avec la nuit. Dans le lointain des lueurs d’incendies apparaissent. Ce
sont des villages qui brûlent. Namur et Dinant sont en flammes, nous dit-on.
A Bioul, règne un désordre indescriptible. Des autos, des
voitures d’ambulances, des canons, des voitures de ravitaillement. Tout le
charroi de la division auquel se mêlent sans aucun ordre des cavaliers et des
fantassins. La colonne d’ambulance et de fourgons qui étaient partis en tête
avaient été reçus par une forte fusillade au sortir de Bioul.
Certaines voitures avaient fait demi-tour, d’autres avaient été abandonnées ...
Toute la garnison de Namur se trouve maintenant tassée dans le village, le
château et les environs, abandonnée à elle-même, sans communication avec le
dehors !
Il est 10
heures du soir, environ. Nous allons passer une nuit d’angoisse terrible, comme
nous n’en avons jamais connue et comme nous n’en verrons plus jamais j’espère.
Les hommes
ignorent encore la gravité de la situation. Mais bientôt, à voir la mine
atterrée des officiers et les conciliabules qu’ils tiennent, ils sauront la
vérité. Et celle-ci n’est pas faite pour nous réjouir ! Nous sommes cernés
ou à peu près. La tête de la colonne vient d’être arrêtée. Que faire en pleine
nuit sans aucun renseignement sur les positions ennemies ?
A chaque
instant, nous nous attendons à être bombardés et le massacre serait horrible.
Plusieurs milliers d’hommes étant parqués sur la place et dans le château !
Nous avons l’air d’un troupeau pour la boucherie. Au moindre bruit des paniques
se produisent ...
Les
officiers tiennent conseil : certains parlent de se rendre, d’autres
veulent tenter de partir immédiatement, d’autre enfin préfèrent attendre l’aube
pour donner le signal de départ. Tous sont atterrés et aucune décision n’est
prise.
J’assiste à
une scène d’une émotion poignante. Le porte-drapeau, tout en larmes, détache le
drapeau de la hampe ...
Finalement
le major Delcourt commandant encore mon bataillon, prenant la responsabilité du
mouvement qu’il va tenter décide de partir aux premières lueurs du jour. Il
prend ses dispositions et à 3 heures du matin, la colonne s’ébranle. Celle-ci
fut attaquée en plusieurs endroits, mais une grande partie pu s’échapper.
J’eus le
bonheur de traverser la zone dangereuse sans essuyer un seul coup de feu.
Vers 10
heures, nous atteignons les lignes françaises qui couvrent la retraite. Nous
nous sentons déjà plus à l’aise. Mais il faut continuer à avancer. Nous
rejoignons la route de Philippeville après avoir traversé des villages
abandonnés, pillés de fond en comble. Nous passons à Philippeville, Mariembourg. Il fait une chaleur torride. Beaucoup d’hommes
sont blessés aux pieds, certains ont les pieds tout en sang, mais conscients du
danger qui les poursuit, ils marchent quand même.
Il n’y a
plus aucun ordre dans la colonne. Toutes les armes sont réunies < illisible
> chasseurs, artilleurs, cavaliers, tout cela pèle mêle, sans chefs. Notre Général,
parait-il, a déjà pris les devants depuis l’avant-veille et s’est mis en lieu
sur.
Dans la
soirée, nous arrivons à Mariembourg, ayant couvert 75
km, sans boire ni manger. A Mariembourg, nous nous
embarquons à la Gare pour Couvin où nous bivouaquons.
Le
lendemain 25 août, à l’aube, nous quittons Couvin et couvrons 50 km sous un
soleil de plomb.
Depuis l’avant-veille,
nous n’avons plus mangé, nous mourrons de soif. Je suis heureux de trouver dans
un champ des choux raves pour étancher ma soif.
Nous
traînons la patte mais nous avançons quand même.
Le soir
nous arrivons à Auvillers où nous allons coucher au
bivouac sans avoir manger. Il pleut maintenant et nous avons froid.
Le 26 à 4
heures, départ et de nouveau marche forcée, les Allemands nous serrant toujours
de près.
Le soir, arrivée
à Liart : des trains sont en formation pour nous
recevoir. Il était temps, nous sommes à bout ! » 23 à 26 août 1914
-
Dévouement d’un brancardier :
« Quelques
obus dans le village. Un shrapnel dans l’école. La veille, au moment de la
relève, nous avons eu quatre blessés, au poste de Macelle.
Ce poste extrêmement dangereux se trouve au milieu de l’inondation. On y accède
par une passerelle de 200 mètres. Celle-ci a été en partie détruite par le
bombardement de la journée. La relève ne peut se faire : quelques hommes
seulement parviennent à gagner le poste. Ceux qui s’y trouvent ne peuvent
revenir. Le 4 au soir, 2 hommes s’échappent de ce poste à la nage. Ils viennent
se sécher chez nous. Un blessé y est resté et ne peut revenir par ses propres
moyens. Un frère brancardier se dévoue et à travers l’eau, ramène sur son dos
le soldat blessé ! Brave frère ! Encore un de ces obscurs, d’un
dévouement inlassable qu’on ignore dont on ne fera pas mention dans les
rapports ... ou dont le nom et la conduite passeront inaperçus. Pendant ce
temps ces messieurs de l’arrière, installés tranquillement au coin du feu, se
font décerner des décorations pour acte de courage et de dévouement !
A peine le
frère a-t-il quitté le poste que les Allemands y mettent le feu à l’aide de
bombes incendiaires. » 4 février 1914
-
Désinfection du champ de bataille :
« Le
soir, nous allons occuper le poste de Noordshote. A 9
heures et ½ du soir, on m’envoie aux tranchées pour l’assainissement du champ
de bataille. Le spectacle auquel j’assiste est inoubliable ! Des cadavres
français gisent çà et là dans la position occupée lorsqu’ils ont été frappés.
Ces cadavres sont gelés, collés au sol, vitrifiés, noirs, hideux ! rendant lorsqu’on les frappe un son de tambour. Abandonnés
là depuis des semaines, leurs camarades français ne se sont pas donné la peine
de les enfouir : c’est honteux. Exposés aux intempéries, ils se sont
pétrifiés et desséchés : certains ne sont plus que des squelettes auxquels
restent attachés quelques lambeaux de chair pourrie.
Nous
mettons plusieurs heures à faire notre horrible besogne : recouvrir ces
cadavres de chaux et les enfouir autant que possible. Le spectacle est vraiment
lugubre : nos hommes travaillent en silence à leur sinistre corvée, vu la
proximité de l’ennemi. Au loin le canon tonne sans discontinuer. Parfois un
shrapnel éclate dans le voisinage. La lune nous éclaire de son pâle reflet. De
temps à autre, une fusée lumineuse lancée par l’ennemi nous force à interrompre
la besogne ... Des soldats deviennent malades et je suis obligé de leur faire
quitter les lieux. » 31 janvier 1915
-
Présence de rats dans les tranchées :
« Une
des curiosité du secteur est constituée par les rats. Il y en a ici par
centaines. Ils sortent en bandes énormes dès l’obscurité. Ils sapent nos abris
et nous font la nuit des visites plutôt désagréables, mangeant nos provisions
et allant même jusqu’à détruire notre mobilier. » 3 janvier 1916
« La
nuit est calme. Mais les rats sont parvenus à percer les parois de notre abri s’y
donnent rendez-vous et tiennent là des réunions bruyantes. Ces réunions ne se
terminent jamais sans une visite à notre garde-manger, auquel ils font grand
honneur. » 25 janvier 1916
-
Réflexion sur la guerre et les morts :
« Vers
midi, on m’annonce un blessé à gauche du pont. L’endroit est très dangereux,
surtout le passage du chemin de fer où il n’y a aucun abri et où les balles
sifflent continuellement, les Allemands dominant la position qui est en fer à
cheval et est par conséquent prise à revers. Je fais mon acte de contrition et
je m’en vais sans hésiter. Je suis reçu par une grêle de balles. Comme par
miracle, aucune ne m’atteint. Je trouve mon blessé agonisant, une balle dans la
tête ... Le soir, mes brancardiers vont le chercher et le ramènent à mon poste.
Le pauvre garçon est mort. Nous nous chargeons de l’inhumation. Besogne lugubre
et triste qui m’impressionne profondément ! Il est 9 heures du soir
environ. Le canon gronde, la fusillade crépite. Deux brancardiers creusent la
fosse dans les ténèbres. L’aumônier dit une prière. Le corps est descendu et
recouvert de terre. Et puis c’est tout !
Je suis
profondément ému ! Combien de malheureux vont partager le sort de ce
pauvre soldat qui vient de mourir, loin des siens, sans un parent, sans un ami
pour lui dire adieu. Combien ces jeunes gens plein de force qui s’éveillent à
peine à la vie et ne demandent qu’à vivre, s’endormiront pour toujours, frappés
brutalement par le fer meurtrier ! Et peut-être serai-je de ceux-là ! »
29 septembre 1914
« Nous
avons vécu un mois d’horreurs continuelles. Tout ce que le génie humain a découvert
dans le but de détruire a été mis en œuvre dans ces journées terribles. J’ai
encore sous les yeux, ces plaies épouvantables, ces chairs meurtries, labourées
par les obus, ces crânes fracassés, ces morceaux de cadavres abandonnés sans
sépulture et que les oiseaux de proie commencent déjà à se disputer. Et je me
demande si ce n’est pas un rêve affreux que j’ai fait ou si, dans un moment de
folie ma raison égarée, s’est imaginée ce spectacle de
sang ! Mais non, c’est la triste réalité ! C’est là l’œuvre du
progrès et de la civilisation ! » 19 novembre 1914
Docteur Romain Maubille, médecin de
bataillon, 13e Régiment de ligne, 4e division :
Carnets de campagne :
1er carnet :
Prologue :
Dès le début de la guerre, j’ai voulu tenir à jour un carnet de
campagne pour y noter mes impressions, mes faits et gestes, mes joies et mes
peines et toutes celles que je verrai autour de moi. Les revers qui se sont
abattus sur notre armée et surtout sur notre malheureuse 4e Division
m’ont forcé à interrompre ces notes pendant un certain temps. Celles-ci ont été
égarées lors de la retraite de Namur. La vie active que nous avons menée
ensuite ne m’a plus permis de noter journellement ce qui s’est passé. Ce n’est
que vers la mi-novembre après la bataille de L’Yser que j’ai trouvé le loisir
de reprendre mon carnet de campagne. À partir de ce moment, j’ai noté d’une
façon rigoureusement exacte quoique concise toutes nos pérégrinations dans la
plaine des Flandres.
J’ai fait appel à tous mes souvenirs pour rétablir les faits antérieurs
à cette date.
Août 1914 :
C’est
le 31 juillet, vers 10 heures du soir que la nouvelle de la mobilisation m’est
parvenue. Je me trouvais à l’hôpital de Tournai. Le ...(?) De douckes et le
père Marlière m’annoncent la chose.
Le lendemain, réveil à l’aube, le principal s’ ...(?) . Il y a un grand
branle-bas de combat dans tout l’hôpital. Il s’agit de remettre l’établissement
à la Croix-Rouge : besogne laborieuse que l’on termine tant bien que mal.
Vers 1 heure, je quitte l’hôpital, qui l’aurait cru, pour si longtemps.
À la gare, une foule d’officiers sont réunis pour le départ ; des soldats
s’embarquent et débarquent. Tous le high life tournaisien est là pour les voir,
en discutant des évènements. Une dernière poignée de main aux amis et je
m’embarque pour Bruxelles pour faire mes adieux à la maison. Là tout le monde
semble joyeux. Personne ne juge la situation bien grave, une mobilisation de
quelques jours – simple mesure de précaution – sera pour nous une distraction
agréable. On me conduit quartier Léopold et me voilà parti pour Namur où je
dois rejoindre le 13e. Je m’en vais sans aucune crainte. Ne
serais-je pas revenu dans quelques jours lorsque l’orage qui gronde au-delà des
frontières se serait éloigné de nous ? Hélas, nous fûment vite
détrompés ! Nous allions bientôt assister à la guerre la plus horrible que
l’histoire eut connu !
À Namur, le dimanche 2 août au matin, je me présente à l’hôpital où le
principal tout affairé me regarde à peine. Je me rends ensuite chez le colonel
du 13e, de Werchin, qui me reçoit gentiment puis chez le major
Delcourt commandant le bataillon qui me reproche une arrivée si tardive !!
Je fais la connaissance du 13e. L’accueil est sympathique.
J’entre immédiatement en fonction. J’installe une salle de visite à la
maison communale de Jambe.
À Jambes et à Namur, l’animation est extraordinaire. Ce sont des
défilés continuels de soldats, de cavaliers, des files interminables de
fourgons, de canons, d’autos, de charroi de toutes sortes. Tout cela donne à la
ville toute pavoisée où devait se faire à cette date la joyeuse entrée du Roi et
de la Reine, un petit air de fête.
À peine la déclaration de guerre est elle connue que nous arrive déjà
la nouvelle des premiers succès remportés par nos vaillantes troupes à Liège.
Ces succès tranquillisent les habitants que la déclaration de guerre a fortement
émus. Les Allemands arrêtés déjà à la frontière n’arriveront jamais jusque
Namur !
Le bataillon est envoyé à Erpent pour creuser
des tranchées et mettre en état de défense l’intervalle des forts d’Andoy et de
Dave. Il n’y reste pas longtemps un ordre de départ arrive et nous partons pour
Gesves. C’est là que nous voyons l’ennemis pour la première fois : deux
allemands fait prisonniers. Après deux jours, on nous envoie à Mozet où nous
voyons le 1er aéroplane allemand. De Mozet, nous allons à Goyet en
grand garde. Puis après cette petite promenade nous retournons à Namur
(St Servais)
Après quelques jours passés là dans l’oisiveté et l’attente, nous
partons pour Jambes où je suis reçu chez le commissaire.
Le 15 août, on entend une terrible canonnade du côté de Dinant. On nous
dit qu’un violent combat s’y livre entre les Français et les Allemands. Les
Français, dit-on, ont l’avantage, Dinant est plein de cadavres allemands !
À Jambes, tout est calme et la
ville a même cette journée du 18 août un aspect de jour de fête. La population
s’empresse dans les rues, vient voir les soldats. Des parents sont venus de
loin pour voir leurs fils : certains visiteurs même ne pourront rentrer
chez eux, les trains ne circulant plus le soir pour certaines voies qu’ils avaient
pris pour venir à Namur.
Les nouvelles du dehors commencent à faire défaut. « L’ami de
l’ordre » est le seul journal qui nous arrive encore. Il y a tous les
jours des nouvelles de victoires que dans notre candeur naïve, nous acceptons
avec enthousiasme. Après quelques pérégrinations autour de Namur, Nous arrivons
le vendredi 21, à Andoy où le bataillon est en
grande garde.
La veille, un officier du fort que j’avais rencontré m’a invité à
visiter celui-ci. Ce que je m’étais empressé de faire. C’était la première fois
que je pénétrais dans un fort : cette défense m’avait paru formidable et
quasi invulnérable ! Le lendemain, le fort n’existait plus, réduit en
miettes par la formidable artillerie allemande !
Le 21, au matin, je fais une visite aux avants-postes. À la ferme
Baseilles, je trouve un mort. Un soldat qui était tombé pendant une fusillade
alors qu’il était en patrouille. Je ne lui découvre aucune blessure ;
probablement un cardiaque chez qui l’émotion aura provoqué une embolie
mortelle. De la ferme Baseilles, je me rend à
Quinaux, poste du commandant Devuyse qui me montre avec force gestes et
cris, les dépouilles d’un major et d’un comandant prussiens qu’une de ses
patrouilles a tués ce matin. Je commence ma visite ; elle ne fut pas
longue ! À peine avais-je commencé qu’un groupe de gendarmes et de
lanciers nous arrivent au triple galop « Filez, nous crient-ils, les
Allemands arrivent en nombre ! » À peine ont-ils parlé qu’une vive
fusillade retentit ; Les balles cinglent à nos oreilles et vont crépiter
sur les murs des quelques maisons de l’avant poste. Nous n’avons que le temps
de nous mettre à l’abri derrières elles. Les avant-postes n’ayant aucune
résistance à fournir, le commandant rassemble sa
compagnie et celle-ci se replie sur Andoy, à travers champs. Je regagne le
village à vélo par la route. Arrivé à Andoy, le bombardement commence. Les
premiers sifflements des obus nous laissent calmes. Nous avons tous le
nez en l’air, comme pour essayer de voir au passage les masses d’acier qui vont
éclater, dans un fracas formidable à 400 mètres de nous sur le béton du fort
avec une précision merveilleuse. Même les habitants, qui par suite de la
soudaineté de l’attaque n’avaient pas pu fuir et qui s’étaient réfugiés dans
les caves aux premières détonations, s'enhardissent, sortent de chez eux et
s’installent sur le seuil de leur porte pour assister au spectacle grandiose
qui leur est offert. Le spectacle est en effet féerique malgré son horreur. Le
fort disparaît dans un nuage de poussière et de fumée : il semble en feu.
Au milieu de cette fournaise, on entend le bruit déchirant des obus de 305 qui
éclatent et éclatent toujours comme le tonnerre.
C’est à Andoy que j’ai pu soigner mon premier
blessé de guerre : un homme atteint d’une balle dans le pied à Quinaux.
Vers une heure, nous quittons Andoy, ayant reçu l’ordre de nous replier
derrière les défenses des ...( ?) on nous envoie à Jambe où nous logeons.
Le 22 au soir on nous fait partir à Erpent : là, nous restons toute la
nuit sur la route attendant les ordres. Je m’installe dans un fossé avec
un peu de paille et m’endors à la belle étoile…
Le 23 août est une date mémorable dans l’histoire de cette guerre
surtout pour la 4e division. C’est une des journées les plus
angoissantes que j’ai passées. Des dangers multiples nous environnaient nous le
sentions bien quoiqu’on essaya de nous le cacher. Mais nous en ignorions la
nature exacte et l’imminence. L’attente d’un évènement est souvent plus pénible
que la réalité.
À midi, nous étions toujours sur la route d’Erpent,
là ou nous étions arrivés la veille. Pendant la nuit déjà le
bombardement n’avait cessé. Mais depuis le matin il a redoublé d’intensité et
maintenant il est devenu général. Namur fut pendant quelques heures un
véritable enfer. Toutes les hauteurs qui dominent la vallée sont couvertes de
la fumée des obus. Dans la ville, la mitraille pleut, des incendies s’allument.
Au-dessus de Beez, on aperçoit des lignes de
tirailleurs qui se déplacent au milieu de l’éclatement des shrapnels et du
crépitement de la fusillade.
À Erpent, il fait calme : nous recevons à
peines quelques obus. Nous sommes aux premières loges pour
assister à la bataille qui fait rage surtout sur la rive gauche et qui s’étend
bientôt du côté de la citadelle. Mais nous sommes bientôt arrachés à ce
spectacle par un ordre de départ. Ou nous envoie-t-on ? La compagnie de Cl
Devuyse est déjà partie depuis quelques temps au pont de la plante. Nous nous
dirigeons vers la Meuse où un pont de bateaux construit à Wépion nous livre
passage vers la rive gauche. C’est là seulement que nous nous rendons compte de
la situation. De l’infanterie, de la cavalerie, de l’artillerie ... ... tout
cela encombre la route dans un ordre très relatif ! Nous battons en
retraite ! Nous sommes atterrés !! Nous ne pouvons en croire nos
yeux, ces évènements ayant été si précipités et si imprévus. On nous avait en
effet bercé jusqu’ici des meilleures nouvelles. Chacun ne demandait qu’à se
battre et venger l’insulte faite au pays. Ou enviait le bonheur des compagnons
de la garnison qui déjà avaient fait le coup de feu et infligé de lourdes
pertes à l’ennemi. Et voilà l’ennemi arrivé à portée de fusil et l’on sonne la
retraite. Le bataillon n’avait pas tiré un coup de feu.
À l’entrain qui nous animait tous succède une désolation profonde. On
ne songe plus qu’à fuir et fuir le plus rapidement possible. Nous nous
dirigeons vers St Gérard où l’on entend de ce côté une canonnade. Un combat s’y
livre, dont l’issue doit être peu favorable car on nous fait changer de
direction. Par des sentiers à travers bois, on nous conduit à Bioul où nous
arrivons avec la nuit. Dans le lointain des lueurs d’incendies apparaissent. Ce
sont des villages qui brûlent. Namur et Dinant sont en flammes, nous dit-on.
À Bioul, règne un désordre indescriptible. Des autos, des voitures
d’ambulances, des canons, des voitures de ravitaillement. Tout le charroi de la
division auquel se mêlent sans aucun ordre des cavaliers et des fantassins. La
colonne d’ambulance et de fourgons qui étaient partis en tête avaient été reçu
par une forte fusillade au sortir de Bioul. Certaines voitures avaient fait
demi-tour, d’autres avaient été abandonnées ... Toute la garnison de Namur se
trouve maintenant tassée dans le village, le château et les environs,
abandonnée à elle-même, sans communication avec le dehors !
Il est 10 heures du soir, environ. Nous allons passer une nuit
d’angoisse terrible, comme nous n’en avons jamais connue et comme nous n’en
verrons plus jamais j’espère.
Les hommes ignorent encore la gravité de la situation. Mais bientôt, à
voir la mine atterrée des officiers et les conciliabules qu’ils tiennent, ils
sauront la réalité. Et celle-ci n’est pas faite pour nous réjouir ! Nous
sommes cernés ou à peu près. La tête de la colonne vient d’être arrêtée. Que
faire en pleine nuit sans aucun renseignement sur les positions ennemies ?
À chaque instant, nous nous attendons à être bombardés et le massacre
serait horrible. Plusieurs millions d’hommes étant parqués sur la place et dans
le château. ! Nous avons l’air d’un troupeau pour la boucherie. Au moindre
bruit des paniques se produisent…
Les officiers tiennent
conseil : certains parlent de se rendre, d’autres veulent tenter de partir
immédiatement, d’autre enfin préfèrent attendre l’aube pour donner le signal du
départ. Tous sont atterrés et aucune décision n’est prise.
J’assiste à une scène d’une émotion poignante. Le porte-drapeau, tout
en larmes, détache le drapeau de la hampe…
Finalement le major Delcourt commandant encore mon bataillon, prenant
la responsabilité du mouvement qu’il va tenter décide de partir aux premières
lueurs du jour. Il prend ses dispositions et à 3 heures du matin, la colonne
s’ébranle. Celle-ci fut attaquée en plusieurs endroits, mais une grande partie
put s’échapper.
J’eus le bonheur de traverser la zone dangereuse sans essuyer un seul
coup de feu.
Vers 10 heures, nous atteignons les lignes françaises qui couvrent la
retraite. Nous nous sentons déjà plus à l’aise. Mais il faut continuer à
avancer. Nous rejoignons la route de Philippeville après avoir traversé des
villages abandonnés, pillés de fond en comble. Nous passons à Philippeville,
Mariembourg. Il fait une chaleur torride. Beaucoup d’hommes sont blessés aux
pieds, certains ont les pieds tout en sang, mais conscients du danger qui les poursuit,
ils marchent quand même.
Il n’y a plus aucun ordre dans
la colonne. Toutes les armes sont réunies lige ... ( ?) Chasseurs,
artilleurs, cavaliers, tout cela pèle mêle, sans chefs. Notre Général,
parait-il, a déjà pris les devants depuis l’avant-veille et s’est mis en lieu
sur.
Dans la soirée, nous arrivons à Mariembourg, ayant couvert environ 75
km, sans boire ni manger. À Mariembourg, nous nous embarquons à la Gare pour
Couvin ou nous bivouaquons.
Le lendemain 25 août, à l’aube nous quittons Couvin et couvrons 50 km
sous un soleil de plomb.
Depuis l’avant-veille, nous n’avons plus mangé, nous mourrons de soif.
Je suis heureux de trouver dans un champ des choux raves pour étancher ma soif.
Nous traînons la patte mais nous avançons quand même.
Le soir nous arrivons à Auvillers où nous allons
coucher au bivouac sans avoir mangés. Il pleut maintenant
et nous avons froid.
Le 26 à 4heures, départ et de nouveau marche forcée, les Allemands nous
serrant toujours de près.
Le soir, arrivée à Liart : des trains sont en
formation pour nous recevoir. Il était temps, nous sommes à bout !
Je fais à
Liart mon premier repas depuis trois jours : un lapin
que je fais cuire en plein air sur un peu de bois dans une gamelle :
c’est un festin !
À Liart, nous voyons de longues files de civils
fuyant devant les hordes teutonnes : ce sont des femmes, des enfants, des vieillards qui traînent avec peine, courbés sous de
lourds paquets rassemblés à la hâte. Triste spectacle ! Ces malheureux
qu’épouvantent les tristes exploits commis par l’ennemi au début de l’invasion
sont partis pour l’exil, préférant cet exil à l’occupation qu’ils savent si
pénible et parfois pleine d’horreur. Ils sont partis jetant un dernier regard
au foyer qui leur fut si cher ... et qu’ils ne reverront peut-être plus jamais.
Combien en ai-je vu de ces
malheureux fuyant l’incendie et le meurtre, les yeux glacés d’effroi, de ces
femmes en larmes, de ces pauvres petiots suivant leur mère ne comprenant pas la
cause de cette fuite précipitée.
Combien en ai-je vu s’arrêtant au bord du fossé, épuisé par la crainte
et la marche et se relevant bientôt, reprenant malgré la fatigue leur voyage un
instant interrompu. Et ils s’en sont allés ainsi de village en village, bien
loin de leur terre natale vers une terre plus hospitalière.
On nous embarque vers 8 heures du soir, dans des wagons à bestiaux (50
à 60 hommes par voiture). Nos malheureux soldats vont faire un voyage de 28
heures en chemin de fer dans de pareilles conditions, ne pouvant ni s’asseoir
ni se coucher…
Je me trouve dans le fourgon où
il y a aussi un léger encombrement : il est impossible de s’étendre.
Quelques mallettes nous servent de siège. Cependant, la joie du danger passé
nous fait oublier ce manque de confort et nous faisons le voyage sans trop nous
plaindre.
Nous arrivons le lendemain vers minuit à
Rouen et on nous dirige aussitôt sur Petit Quevilly. L’accueil qui nous y est
fait est des plus cordial. Les habitants se disputent nos soldats. Chacun doit
avoir un lit . On les invite à dîner. On leur distribue du vin, du linge,
des fleurs…
Trois jours
de repos à Petit Quevilly. On se remet des émotions et des fatigues. Mais déjà
on parle de départ. Les bruits les plus divers courent sur nos destinées. Nos
effectifs en effet sont très réduits. Il reste, parait-il, 11000 hommes de la
garnison de Namur Nous n’avons presque plus de cartouches. Une grande partie de
notre artillerie est restée aux mains de l’ennemi. Aussi parle-t-on de nous
envoyer faire les vendanges à Bordeaux, de nous faire garder les voies ferrées
ou les côtes anglaises. D’autres annoncent notre départ pour Anvers.
Le lundi 31, nous quittons Petit Quevilly. On nous
expédie à St Aubin. Le Major Delcourt, tombé malade, m’attache à sa personne, je ne puis plus le quitter d’une semelle. Cela me vaut
de faire le trajet en auto et être logé avec lui au château de St Aubin.
Septembre 1914 :
Le lendemain, départ pour le Havre. Je fais la route en auto, avec le
major Delcourt. Au Havre, nous nous embarquons à bord du
« Champagne ». Le bateau est comble, on y met 3000 hommes.
Heureusement, une cabine de luxe m’est réservée. Nous quittons le port au
milieu d’ovations enthousiastes qui nous poursuivent pendant que le navire peu
à peu disparaît dans la nuit pour rejoindre la patrie dont nous sommes séparés
depuis si longtemps déjà semble-t-il.
La mer est calme, nous faisons un voyage délicieux. Un seul incident
: en route, nous sommes arrêtés par les croiseurs anglais.
Le 2 septembre, vers 8 heures, nous voyons les côtes belges apparaître
et à 10 heures nous nous arrêtons vis-à-vis d’Ostende. La « princesse
Clémentine » vient nous prendre et nous porte à la côte. À peine
débarqué, on nous dirige vers la caserne. Je m’installe dans la salle de
visites qui me servira en même temps de chambre à coucher.
L’accueil qui nous est fait par la population d’Ostende contraste
singulièrement avec la réception enthousiaste des Français de Rouen. Une foule
compacte se trouve devant la gare. Pas un geste, pas un cri, pas une
acclamation. On remarque même quelques jeunes gens en pantalon blanc et bains
de mer. Quelques jeunes snobs qui n’ont pas eu le courage de prendre un fusil,
sourire de la mine fatiguée et de la tenue fanée de nos soldats. C’est
honteux ! La masse des désœuvrés ici est encore considérable. Beaucoup de
baigneurs qui ne semblent guère se soucier des maux dont la patrie saigne et
qui jouissent tranquillement de la vie sans se soucier des malheurs du pays. Le
spectacle de ces sans-patries est vraiment écœurant !
Nous ne restons que trois jours à Ostende. Le 4 septembre, on nous
envoie à Bruges en chemin de fer. Je ne sais ce que nous y allons faire. On
nous met à la caserne. Tout le monde y loge : officiers et soldats,
colonel en tête. Nous y restons une huitaine de jours.
Pendant notre séjour, le 1er Bataillon fait une expédition
du côté de Zarren où on a signalé la présence de 300
uhlans. Avec l’aide de volontaires et du IVe bataillon on se
propose de les cerner. Vers une heure de la nuit, on nous conduit sur les lieux
en chemin de fer et à 11h du matin l’action était terminée : une centaine
de uhlans sont tués ou faits prisonniers. Je soigne dans le train au retour
quelques hommes blessés pendant cette escarmouche.
Assisté aussi à Bruges à la fuite éperdue des artilleurs de la garde
civique, venant de Melle qui à l’approche de
l’ennemi ont abandonné leurs pièces chargées sans oser tirer un coup de
canon !
Nous avons peu de nouvelles de la guerre, du moins des nouvelles
sérieuses. Les journaux font l’impression de broder de toutes pièces les
évènements qu’ils rapportent. On parle un peu de Namur : 2 grandes fautes
y auraient été commises : on aurait permis aux Allemands de s’approcher
trop près des forts sans les inquiéter. Ils en auraient profité pour installer
à portée convenable leur artillerie lourde qui détruisit en quelques heures les
massifs bétonnés qui servaient de base à la défense. En second lieu, l’autorité
militaire trop confiante en ses propres forces aurait décliné les offres des
renfort français qu’on aurait voulu nous envoyer. Quoi qu’il en soit, on rend
le général responsable du désastre et on le dit déjà en train de rendre des
comptes.
Vers le 13, départ, pour Vieux–Dieux par Eeklo, Zelzate, St Nicolas. Arrivée vers minuit.
Recherche d’un logement à cette heure indue dans l’obscurité la plus complète.
Installation à la villa Alexandrina, abandonnée par les propriétaires. Nous
passons là quelques jours agréables, attendant qu’on nous emploie.
Le 17, départs à Aartselaar où nous
cantonnons Le lendemain, traversée de l’Escaut sur un pont de bateaux. Arrivée
le soir à Temse. Le samedi 19, nous nous
rendons à Elversele sous une pluie battante et
par des chemins détrempés. À 1 km de cette localité se trouve le pont sur la Durme que le génie a fait sauter aux environs duquel nos
hommes vont creuser des tranchées ; les environs sont inondés.
Le Major Vasseur commande actuellement le bataillon, le major Delcourt
n’ayant pu reprendre son service, au retour de Namur.
Vers le 20, on nous expédie à Grembergen, je
ne sais dans quel but. Le médecin d’ailleurs n’est jamais renseigné sur les
mouvements que l’on fait, heureux, quand, lorsqu’on change de cantonnement, on
n’oublie pas de l’avertir !
Je profite de l’occasion pour visiter Termonde. L’aspect de la ville
est impressionnant et donne une idée des horreurs que la guerre peut accumuler.
L’incendie a presque tout détruit. Une cinquantaine de maisons seulement ont
été épargnées. Sur la porte de ces maisons, on peut lire à la craie « Gute
lente Nicht breunen ! » Celles qui ne portaient pas cette inscription
protectrice ont été anéanties : il n’en reste que les 4 murs et quelques
débris encore fumants ! Mais ce qui n’a pas été brûlé n’a pas échappé au
pillage. Dans ces maisons, dont les portes sont ouvertes, on peut se faire une
idée de la façon magistrale dont ce pillage à été organisé. Dans la cave, ce
sont des bouteilles à moitié vides, cassées, des tonneaux défoncés une odeur de
bière et de vin vous prend à la gorge. Au rez-de-chaussée et aux étages, les
meubles ont été éventrés, la vaisselle répandue sur le sol et en morceaux, les
glaces brisées, les objets de toilette répandus pêle - mêle au milieu des
meubles facturés et brisés.
Le soir même, nous retournons à Elversele où
nous restons encore quelques jours. On nous envoie ensuite au sud de Termonde.
Je passe une nuit à la batterie n°2 en avant poste avec le Lt Luekens, près
duquel le Major Vasseur m’avait détaché comme le poste le plus dangereux. Il ne
se passe rien. À 4 heurs du matin ou nous donne l’ordre de nous replier vers
Termonde.
Le 29, le bataillon est en avant poste aux remparts de Termonde. Je me
tiens avec la 2e compagnie à la porte de Bruxelles. L’aumônier
Pauwels qui vient d’arriver au bataillon m’accompagne et s’installe avec moi
dans le corps de garde qui se trouve derrière le rempart. À peine somme nous
arrivés que commence un bombardement infernal des tranchées creusées sur le
rempart. C’est la première fois que je me trouve en plein bombardement. Les
obus pleuvent sur la rue derrière le corps de garde avec un bruit de ferraille
épouvantable pendant que les vitres de notre poste volent en éclats. D’autres
tombent en plein sur les toits des maisons voisines encore intactes soulevant
des nuages de fumée et de poussière. La fabrique de lainage de la rue de
Bruxelles qui avait été épargnée par les Allemands prend feu et bientôt une
fumée noire et acre nous environne obscurcissant complètement notre abri. C’est
horrible ! Malgré tout, je reste assez calme ; je parviens assez bien
à maîtriser mes nerfs, mais ai fort à faire à tranquilliser mon porte-sac et
mes brancardiers blottis dans tous les coins, se faisant aussi petits que
possible. Le bombardement dure 2 heures environ et pendant ce temps les obus se
succèdent coups sur coups. On nous donne alors l’ordre de partir et nous
quittons la ville, en passant par le pont de l’Escaut et nous nous rendons à
Grimbergen creuser des tranchées pendant le reste de la journée. Le soir nous
cantonnons à Grimbergen. Le lendemain, le bataillon va occuper les tranchées
situées le long de l’Escaut et a pour mission la défense du pont. Je me tiens
près du major à 40 mètres environ des tranchées. Bombardement en règle. Obus,
shrapnells, balles, ...
Vers midi, on m’annonce un blessé à gauche du pont . L’endroit est
très dangereux, surtout le passage du chemin de fer où il n’y a aucun abri et
où les balles sifflent continuellement, les Allemands dominant la position qui
est en fer à cheval et est par conséquent prise à revers. Je fais mon acte de
contrition et je m’en vais sans hésiter. Je suis reçu par une grêle de balles.
Comme par miracle, aucune ne m’atteint. Je trouve mon blessé agonisant, une
balle dans la tête... Le soir, mes brancardiers vont le chercher et le ramènent
à mon poste . Le pauvre garçon est mort . Nous nous chargeons de
l’inhumation. Besogne lugubre et triste qui m’impressionne profondément !
Il est 9 heures du soir environ . Le canon gronde, la fusillade crépite. 2
brancardiers creusent la fosse dans les ténèbres. L’aumônier dit une prière. Le
corps est descendu et recouvert de terre. Et puis c’est tout !
Je suis profondément émus ! Combien de malheureux vont partager le
sort de ce pauvre soldat qui vient de mourir, loin des siens, sans un parent,
sans un ami pour lui dire adieu. Combien ces jeunes gens plein de force qui
s’éveillent à peine à la vie et ne demandent qu’à vivre, s’endormiront pour
toujours, frappés brutalement par le fer meurtrier ! … Et peut-être
serai-je de ceux-là ! …
Octobre 1914 :
Le 1er octobre, au matin, nous sommes relevés par le 2me
bataillon et nous nous rendons à Grembergen. Le soir, au moment de nous
coucher, éclate une canonnade et un fusillade formidable . Canons,
mitrailleuses, fusils : tout tonne. Nous nous rhabillons rapidement. Les
compagnies sont réunies et nous attendons les ordres. Dans la nuit, nous voyons
passer les fuyards que l’on arrête et rassemble à grand’ peine.
Que se passe-t-il ? Les Allemands parait-il, ont attaqué le pont
en masses compactes. Arrêtés par le feu des mitrailleuses, ils sont revenus à
la charge, poussant devant eux, comme un rempart, une rangée de matelas. Un
canon caché dans la berge, pointé sur le pont les a fauché en masse. Alors
l’artillerie ennemie s’est mise à tonner, criblant nos tranchées d’obus et de
schrapnells. Devant cette avalanche, nos hommes ont lâchés pied…
Quelle est la situation actuelle
? A-t-on fait sauter le pont ? L’ennemi est-il passé ? On nous donne
comme mission de nous en rendre compte. Et dans la nuit, nos hommes s’en vont
par groupes, vers l’inconnu. À l’aube, nous parvenons à réoccuper les tranchées.
Le pont, grâce à un officier des mitrailleuses, le Lt Salmon, a sauté. L’ennemi
se trouve encore sur l’autre rive.
Le 3e bataillon vient nous remplacer aux tranchées et nous
nous rendons au piquet sur les remparts à la gare de Grimbergen. Nous sommes
copieusement bombardés jusqu’à 3 heures de l’après-midi. Nous sommes alors
relevés par le 8e et nous nous rendons à Hamme-Zogge où nous resterons jusqu’au 5.
Le 5 octobre, dans l’après-midi, nous partons pour Berlare. Notre bataillon se rend immédiatement au
pond de shoonmaarde où semble se dessiner une attaque ennemie. J’installe mon
poste de secours dans une petite maison abandonnée, non loin des tranchées. La
nuit se passe et le lendemain la fête commence. Le bombardement est d’une
violence extrême. Un obus entre dans mon poste, sans toucher personne,
heureusement. Plusieurs blessés, quelques tués sur la journée.
Le soir, nous sommes relevés par le 2e bataillon et nous
allons loger à Berlare. Le 7 notre bataillon
est de nouveau appelé à aller renforcer le 2me bataillon. La situation est
mauvaise. L’ennemi aurait passé l’Escaut. Je me tiens au couvent de Berlare, le divisionnaire m’ayant fait savoir que
mon poste précédent se trouvait trop près de la ligne. Les carabiniers arrivent
aussi à la rescousse.
Un bombardement violent commence. Nous soignons une foule de blessés.
Vers 3 heures de l’après-midi, nous voyons nos lignes se replier. On bat en
retraite, dit-on, vite, nous chargeons nos blessés. Des obus, des shrapnells,
des balles mêmes nous arrivent jusque dans la cour du couvent.
Notre besogne terminée, nous filons aussi. Dans la plaine, des lignes
de tirailleurs reculent poursuivis par des shrapnells.
Nous arrivons à Zele. Là, je retrouve mon
bataillon que l’on renvoie dans les tranchées au-devant de Zele. Je vais les
reconnaître et je retrouve le Major Vasseur installé derrière une meule où il
aurait voulut que je m’établisse aussi ! C’était un endroit idéal pour
soigner les blessés ! Je lui fais remarquer et m’installe dans une maison
abandonnée où j’entre en faisant sauter un carreau. Nous allions souper,
lorsqu’on nous apprend que le bataillon irait cantonner à Zele. Nous y arrivons
à minuit. À 3 heures, on nous réveille et nous partons vers Lokeren, à
mi chemin, on nous arrête et on nous fais occuper des tranchées. Nous devons
protéger la retraite de l’armée d’Anvers qui n’est pas terminée. La musique
nous accompagne. Je me tiens avec elle. Après quelque temps, nous voyons des
cyclistes accourir, annonçant l’arrivée de la cavalerie allemande. Déjà, dans
le lointain, la fusillade crépite. Un délégué qui s’est rendu à l’emplacement
du bataillon nous annonce que celui-ci ne s’y trouve plus. Nous sommes très
perplexes, ne sachant que faire. Finalement, je me décide à aller jusque
Lokeren. Peut-être le bataillon s’est-il déplacé de ce coté ? À Lokeren,
des troupes passent, ce sont les derniers éléments de la garnison d’Anvers.
Mon bataillon n’y est pas, je me rends sur la route de Gent. Des
soldats du bataillon m’annoncent que celui-ci est parti mais ne peuvent pas
m’indiquer exactement la direction qu’il a prise, Je retourne à Lokeren mais
n’y apprend aucun renseignement. Je me décide alors à accompagner un régiment
qui passe et qui est précisément le 13e de forteresse. Nous faisons une marche terrible et nous arrivons le soir à …
( ?) par Eksaarde et Zelzate. À … ( ?) , je trouve le deuxième
bataillon, le colonel que je rencontre ne sait ou son premier bataillon se
trouve. Je passe la nuit dans une ferme à … ( ?) . À l’aube, départ. À
Sleidinge, je trouve le bataillon tranquillement installé. Nous nous reposons à
Sleidinge.
Samedi 10 octobre. A 1 h du matin, départ de
Sleidinge. Nous arrivons vers 8 h. du matin à Aalter où nous devons prendre le
train. Vers midi en effet on nous embarque et 12 h après, à minuit, nous arrivons
à Eernegem, ayant couvert à peu près trente km.
11 octobre. Nous passons une journée à Eernegen.
12 octobre. Vers 7 heures départ vers Moere. Nous
nous établissons dans le château du baron de blanbrugge et assistons au départ
de la famille.
13 octobre. À 7 heures, départ vers Kortemark par
Koekelare. Je m’installe dans un pavillon de chasse avec le major dans la forêt
de Wynendale. Nos hommes construisent des tranchées à la lisière du bois. On
entend de nouveau le canon . Nous passons deux jours dans ce pavillon.
15 octobre. Au matin, nous quittons Wynendale et
nous arrivons à Keiem le bataillon va immédiatement occuper des tranchées,
comme si on s’attendait à l’arrivée de l’ennemi.
Vers le soir, on nous fait passer l’Yser. On nous
arrête au-delà de Stuivekenskerke, où l’on fait former les faisceaux sur le
bord de la route. Sur cette route, c’est un encombrement formidable de camions,
de canons, de caissons, d’autos,... rappelant un peu l’encombrement de la
retraite de Namur. Il fait une nuit noire. On ne voit pas à deux mètres. Dans
cet encombrement, on nous fait repartir vers Stuivekenskerke. En route, je
tombe les 4 fers en l’air dans un fossé. Je suis séparé du bataillon avec le
peloton de queue par un détachement arrivant en sens inverse.
Pendant ce temps, le bataillon disparaît. Comme de
coutume, nous n’avons pas été avertis de la destination et nous ne savons où
nous rendre. Nous renonçons à le retrouver dans cette obscurité. Et nous
cherchons à nous loger à Stuivekenskerke : tout est occupé. Nous entrons
finalement dans une prairie où nous dormons sur la dure, comme les soldats de
Napoléon, avec notre sac comme oreiller… Réveillés de grand matin, transis de
froid, nous nous mettons à la recherche de notre bataillon que nous retrouvons
à Keiem. Le Major Delcourt à peu près rétablis vient de reprendre le
commandement. Logement chez le curé de Keiem qui nous fait un excellent
accueil.
La bataille de l’Yser commence. Des combats
d’avant-poste s’engagent.
Le 17 au soir, nous sommes relevés par le 8e
et nous nous rendons à Stuivekenskerke, où nous logeons sur la paille avec
quelques officiers, chez le curé qui nous reçoit très froidement : perdant
presque la tête devant la foule qui envahit sa maison, il nous menace même de
nous mettre tous à la porte.
Le 18, le 8e a lâché pied à Keiem,
il s’est replié derrière l’Yser, abandonnant la tête de pont. Le soir, le
bataillon est chargé de reprendre le village à la baïonnette. Vers 8h.
nous nous mettons en route. Un bombardement en règle du village par notre
artillerie commence. Pendant une heure les obus se succèdent sans discontinuer,
allant fouiller les moindres coins du village. Nous nous avançons en rangs
serrés . Arrivés près des tranchées de deuxième ligne, dans une maison que
j’avais occupée quelques jours auparavant, je m’arrête pour panser un blessé.
Nous allumons la lampe. Déjà dans le village, la fusillade retentit. À peine la
lumière est elle faite qu’une grêle de balles nous arrive, Nous éteignons
rapidement et sortons de la maison. Une bande de fuyards passe au même moment,
annonçant que le bataillon avait été surpris et anéanti. Quelques blessés
arrivent que nous transportons derrière l’Yser pour les soigner à l’abri des
balles. La fusillade persiste encore quelques instants. Quelques blessés,
quelques fuyards… puis plus rien ... Le silence renaît, silence plein
d’angoisse. Que s’est-il passé ?
Le lendemain, nous commençons à connaître la triste fin de l’attaque.
Notre bataillon ayant pénétré dans le village sans rencontrer de résistance,
s’est vu tout à coup encerclé par le feu des mitrailleuses. Les hommes fauchés
comme des mouches étaient tombés les uns après les autres sans presque pouvoir
fournir de résistance, surpris qu’ils étaient de tous les côtés. De 800 hommes
que comptait le bataillon, 200 à peine purent s’échapper dont 2 officiers
seulement. Y étaient restés : le Major Delcourt et son adjoint le Ct
Mahieu, Ct Pasquier, Lt Juion... mon pauvre bataillon n’existait plus ou à peu
près.
Cette prise de Keiem n’était que le prélude de cette immense bataille,
unique dans l’histoire des peuples, où les petits Belges déjà harassés par 3
mois de fatigues continuelles, qui n’avaient jusqu’ici quasi connu que des
défaites, allaient se couvrir de gloire en résistant à des masses dix fois
supérieures en nombre, pourvues d’une artillerie formidable !
En
même temps que Keiem, les autres têtes de pont de l’Yser, Nieuport, Schore,
Beerst Dixmude, étaient attaquées. Après la prise de plusieurs d’entre elles,
la ligne de défense s’était reportée au bord de l’Yser. La lutte y fut
terrible ! 6 jours et 6 nuits consécutifs, ce fut une pluie continuelle de
mitraille, une succession ininterrompue de shrapnells, d’obus labourant les
champs, démolissant les habitations, perçant les cloches des villages voisins
de la ligne. Pendant ce temps, les troupes belges se défendirent à elles
seules, avec quelques fusillers marins et supportèrent le choc de quelque
200000 h lancés contre elles!
Combat du lion et du
moucheron ? Lutte de David contre Goliath ?
Le 22 octobre, ce qui reste du bataillon est renvoyé de nouveau au feu.
Je m’installe dans Stuivekenskerke. Je me fixe dans l’église, la plupart des
maisons du village étant déjà occupées par les médecins de la 6e
division. J’y ai a peine pansé quelques blessés qu’un obus y entre, semant la
panique Vite, j’emporte mes blessés et me réfugie dans une maison voisine où je
continue ma triste besogne. Pendant 24h sans une minute de répit, les blessés
arrivent sans discontinuer. Il y en a dans toute la maison, dans la cave. Mon
poste dégage une forte odeur de boue et de sang. Le sang ruisselle sur le
parquet, teint les murs de pourpre. C’est atroce! Et pendant ce temps, obus et
shrapnels éclatent à gauche et à droite, à quelques mètres du poste dans un
fracas épouvantable.
Le service d’automobile ne fonctionne guère. Par moments, plus de
trente blessés se trouvent parqués dans mon poste.
Le 23, au matin, je puis évacuer les derniers d’entre eux. Les débris
de mon bataillon se sont retirés le long de la route Tervate-Dixmude. Je quitte
Stuivekenskerke au milieu d’un bombardement infernal. Le soir, tout le 13e
va occuper le chemin de fer, dernière ligne de résistance où l’effort des
Allemands viendra se briser d’une façon définitive.
Harassé, brisé de fatigue, je vais m’étendre sur les dalles d’un petit
café le long de la route de Dixmude.
Le lendemain 24 octobre, je retrouve les médecins des autres
bataillons. Je me joins à eux et nous échouons à Oostkerke. Il n’existe
actuellement plus aucune organisation. Des hommes de tous les régiments se
trouvent en ligne pèle-mêle, sous les ordres du premier officier venus. Nos
hommes sont éreintés. Malgré cela, on ne nous relève pas. Aucun secours ne nous
arrive. Et le combat continue aussi acharné et aussi violent que les premiers
jours.
Le 25 au soir, nous allons relever un blessé laissé devant les lignes à
l’école de Oud-stuvekenskerke. Il fait un temps épouvantable. Il pleut, il
vente. Le terrain est un marais où l’on s’enfonce jusqu’aux genoux. Nous
mettons 5 heures pour ramener ce seul blessé et nous rentrons, trempés jusqu’à
la moëlle !
Pendant la journée, des secours français sont enfin arrivés. Nous
voyons quelques troupes d’infanterie et de l’artillerie. Il est grand temps.
Nos hommes sont à bout, tout à fait épuisés. Malgré cela, ils continuent à
rester en 1er ligne.
Le 26 est encore une chaude journée : feux d’artillerie
épouvantables.
Dans la nuit du 26-27, les Allemands que les inondations ont surpris
tentent encore un assaut au chemin de fer. Ils sont repoussés avec des pertes
énormes.
Le 13e est alors ramené en 2e ligne. Les hommes
bivouaquent. Je loge dans un hangar sur un peu de paille. Il fait un froid de
loup.
Le 28 au soir, retour sur la ligne de feu. Poste de secours près de la
gare d’Oostkerke. Bombardement violent toute la journée. Sous le bombardement,
on m’appelle pour un blessé à la ferme du colonel. Je risque dix fois ma peau,
mais arrive cependant, sans une égratignure.
Le 30, dans la nuit, nos hommes repoussent un dernier assaut contre le
chemin de fer. Au matin, nous allons cantonner à Zoutenaaie (Rousdamme).
Le 31, les débris de mon bataillon sont fusionnés avec ceux du 2e.
Je passe au 3e bataillon. J’y reste quelques jours puis repasse au 2e
bataillon où j’assure le service avec le Dr Melchior.
Novembre 1914 :
Pendant la première quinzaine de novembre, nous allons successivement
occuper les tranchées du chemin de fer au sud de Pervijse, les fermes de
Rousdamme au piquet et Eggewaartskapelle : cantonnement de repos.
Rousdamme, le 18 novembre 1914 : Je reprends aujourd’hui mon carnet
de campagne. Les journées précédentes ont été trop chaudes et trop remplies
pour trouver le loisir de noter les évènements au jour le jour.
Nous avons vécu un mois d’horreurs continuelles. Tout ce que le génie
humain a découvert dans le but de détruire a été mis en oeuvre dans ces
journées terribles. J’ai encore sous les yeux, ces plaies épouvantables, ces
chairs meurtries, labourées par les obus, ces crânes fracassés, ces morceaux de
cadavres abandonnés sans sépulture et que les oiseaux de proie commencent déjà
à se disputer. Et je me demande si ce n’est pas un rêve affreux que j’ai fait
ou si, dans un moment de folie ma raison égarée, s’est imaginée ce sspectacles
de sang ! Mais non, c’est la triste réalité ! C’est là l’œuvre du
progrès et de la civilisation !
La bataille de l’Yser est virtuellement terminée. Nos troupes occupent
toujours les tranchées du chemin de fer Nieuport - Dixmude. Les nuits sont
calmes. Le jour, lutte d’artillerie.
Le pays est transformé en vrai marécage où l’on patauge, comme des
canards. Cette nuit, il a gelé. Cela a raffermi le terrain, mais dans le jour
le dégel a ramené la boue. Demain, le 13e occupe les tranchées du
chemin de fer. Nous partons à 4h du matin. Nous nous préparons à nous coucher.
On dispose dans la petite cuisine de la
ferme où nous sommes cantonnés, la paille moisie qui va nous servir de
couchette.
Lampernisse : Borne 5 : 19 novembre : Rien de spécial ;
Un obus tue un homme du régiment et en blesse 6. Le soir départ pour
Eggenwaartskapelle où nous restons 2 jours.
Eggenwaartskapelle : 20 - 21
novembre : Une bonne nuit dans un bon lit : quel délice !
D’autant plus qu’il gèle à tout casser. Je me lève à 9 et demi. Il y a bon
temps que je n’ai plus passé pareille nuit.
J’ai reçu hier une lettre de Bruxelles. Tout y va bien, cela me fait
énormément plaisir. J’ai écrit ce matin. Ma lettre parviendra-t-elle ? On
nous annonce que l’on va préparer les quartier d’hiver. C’est
encourageant !
Le 21, reçu par le colonel une
lettre de papa demandant de mes nouvelles. On lui avait annoncé que j’avais été
blessé pendant la retraite de Namur. Je le tranquillise aussitôt.
Le soir départ pour la B5. Il gèle à pierre fendre.
Lampernisse B5 : 22 novembre : Encore un beau dimanche, passé
dans une masure, derrière les tranchées. Il fait froid. Tout est gelé. Les
nuits surtout commencent à devenir pénibles.
Rousdamme 23-24 novembre : Rien de
spécial. Journées calmes sans incidents, le soir retour à la B5.
Lampernisse B5 : 25 novembre : Calme absolu, à peine quelques
canonnades. Le soir, départ pour Eggenwaartskapelle. Appris la victoire russe
de la wartha.
Eggewaartskapelle : 26-27 novembre : 2 jours de repos sans
incidents. Il pleut et l’on patauge de nouveau.
Lampernisse : B5 : 28 novembre : Bombardement. Poste de
secours en danger.
Rousdamme: 29-30 novembre : 2 jours d’ennui mortel à Rousdamme. La visite dure 4 heures au minimum. Les soldats qui
en ont assez se portent malades en tas !
Quand retrouverons-nous le monde civilisé ? Cette vie de sauvage
commence à me peser horriblement ! Il pleut toujours. Les chemins sont
couverts de 10 cm d’une boue gluante qui s’attache aux bottines et que l’on
entraîne dans tous les locaux que l’on occupe. On vit dans la crasse.
Le soir du 30, je retourne occuper le poste de secours de la B5. Encore
des heures heureuses en perspective. Je me trouve là dans une cabane dont les
carreaux ont été enlevés par les éclats d’obus et les shrapnels et par où la
pluie et le vent pénètrent.
Je n’ai encore reçu aucune réponse aux lettres envoyées chez moi. Comment
cela va-t-il là-bas ? ... Je me sens aujourd’hui particulièrement triste.
Pourquoi, je ne sais. Cela m’arrive de temps à autre. Je songe alors aux miens,
à ma chère maman que j’ai quittée depuis 4 mois et qui tremble peut-être pour
moi. Je songe à ce cher Bruxelles que j’aime tant et qui doit être maintenant
triste et morose, comme aux jours de deuil, à ce cher Bruxelles que j’ai connu
si gai, ou il fait si bon vivre. Reverrai-je jamais tout cela ?
Le canon tonne du côté de Ypres.
Des milliers d’hommes sont là aux prises et s’entretuent depuis des jours, les
uns pour satisfaire l’ambition d’un seul, les autres, pour défendre le sol et
l’honneur.
Décembre 1914 :
Lampernisse B5 : 1er décembre: Journée calme, dans la
nuit bombardement de l’église de Lampernisse.
Eggewaartskapelle 2 décembre : Rien de spécial.
Lampernisse B5 : 3 décembre : Calme plat pendant toute la
journée, jouons aux cartes jusqu’à 24h.
Rousdamme 4 décembre : Le soir, je me rends à Furnes voir M.
Deflacteur qui se charge de porter de mes lettres à la maison. Ouragant,
pluie,, etc.
Lampernisse B5 : 5 décembre : Calme absolu. Pas un coup de
canon.
Eggewaartskapelle 6-8 décembre : Le dimanche 6 vaccination
antithyphoïdique. Le soir, je suis pris de fièvre. Ce qui me permet de rester
au lit le lendemain jusque midi.
Le 8, on nous annonce que la division se rend au repos.
Oeren 9 décembre : La division devient réserve d’armée et le 13e
se rend à Oeren. Visite en règle tous les matins : 200 hommes. Ce repos
dure jusqu’au 22. Ce repos est très relatif cependant : Il y a exercices,
nos hommes vont creuser des tranchées au bord du canal de Lo.
Le 22, au matin, départ pour La
Panne. Installation à l’hôtel de France.
La Panne 24 décembre : Villégiature à La Panne, mais comme il fait
triste ! Tout est envahi par les militaires. Ceux-ci occupent les villas.
Le soir surtout, l’aspect est lugubre : il n’y a pas d’éclairage. Au café,
quelques bougies sur les tables. Quelques lampes à pétrole sur la devanture des
magasins.
Veille de Noël ! Il bruine. Quelques ombres passent dans la rue.
Tout est calme et tranquille. Seul, le canon de Nieuport rompt le silence qui
nous enveloppe. Triste veillée de fête.
La Panne 25 décembre : C’est Noël, mais on ne s’en aperçoit guère.
Pas de chants, pas de cloches ! On annonce le départ pour 8 heures. Puis
contre-ordre. On doit attendre. Finalement on ne part pas.
Promenade sur la digue. Et la journée se passe triste comme elle avait
commencé.
J’ai reçu hier des nouvelles de maman. Cela m’a donné un peu de joie au
cœur.
Wulpen 26-27 décembre : Le 26 à 8h départ pour Wulpen où nous
restons jusqu’au 28 à 8h et demie du matin : nous partons alors à
Nieuport.
Nieuport 28-29
décembre : C’est notre première visite à Nieuport. L’aspect de la ville
est lamentable. C’est une destruction à coup d’obus. Pas une seule maison n’est
intacte. Nous installons notre poste rue d’Ostende dans une maison encore assez
bien conservée. Le Major est notre voisin chez le consul du Danemark. Le poste
est très confortable, salon, piano, un bon feu. Séances de piano au poste, de
... chez le Major. Bombardement peu intense.
La Panne 30-31 décembre : Le 30, au matin, nous sommes relevés par
le 8e et nous nous rendons à La Panne. Le 31, rencontré le colonel
et Raoul Bernard qui m’apporte des nouvelles de la maison.
Janvier 1915 :
Wulpen 1-2 janvier : Encore un joli jour de fête et cela après 5
mois de campagne déjà ! Quand tout cela finira-t-il ? Nous sommes
encore loin de Bruxelles !
Journée brumeuse et triste.
Nieuport 3-4 janvier : 2 jours à Nieuport au château Vanden abeale
sur la route d’Oosduinkerke. Les ... des 75 Français sont installés derrière
nous et hurlent déjà à notre arrivée. Cela nous promet d’heureux moments !
En effet, bientôt le bombardement commence et les obus se mettent à pleuvoir autour
du poste, sans heureusement l’atteindre.
Installation sommaire dans le château dévasté. Grande besogne pour
installer le chauffage. Soirée de gramophone.
La Panne 5-6 janvier : Arrivée à La Panne le 5 au matin. Recherche
d’une villa. Installation à Betsy cottage. Déjeuner et souper en petit comité.
Mais on nous fait malheureusement déguerpir le lendemain et nous allons occuper
une villa plus modeste : villa Magda sentier Thériar.
Wulpen 7-8 janvier : Logement chez l’instituteur. Musique ...
Le 9 à une heure et demie du matin départ pour la relève.
Nieuport 9-10 janvier : 2 journées comme on les aime ! Obus,
shrapnels, bombes, balles, pluie, vent ... toute la ligne.
Notre poste de la rue d’Ostende
est toujours debout. Piano et ....
Départ en 4me vitesse du Lt Férot, commandant ad int. Le bataillon ...
Nous quittons, à regret ces lieux enchanteurs, le 11 à 5h pour La
Panne. Un dernier obus vient éclater pas loin de nous, comme pour nous dire
adieu.
Installation à Magda cottage.
La Panne 11-17 janvier : 6 jours de calme et de paix au bord de la
mer où le bataillon assure la garde de la côte. L’aumônier Vermeylen et moi
menons une agréable petite vie retirée à la villa Magda où nous nous montons
une bibliothèque. Et les journées s’écoulent doucement, loin des obus, dans ce
petit cercle intime où nous finirions bien par oublier la guerre.
Furnes 17 janvier : Le 17 au matin, départ pour Furnes. Messe au
violon.
Le 18, apparaît la neige, mais elle fond rapidement pour laisser place
à la sempiternelle boue des Flandres.
Wulpen 19-20 janvier : Le 19, à 8h départ pour Wulpen, Rien à
noter pendant les deux jours.
Nieuport, 21-22 janvier : À 1h 1/4 de la nuit, nous quittons
Wulpen pour Nieuport, après avoir fait la visite. La moitié du bataillon va
occuper des abris creusés au bois triangulaire. Je vais cependant occuper le
poste de la rue d’Ostende, le médecin du 3e bataillon n’y étant
plus. Bien m’en prend, j’aurai de la besogne. Bombardement intense, mais pas
dans nos environs.
Le soir, 2 officiers de l’état-major se font blesser aux tranchées.
Cela me tient sur pied jusque trois heures du matin, puis arrivée des malades.
Vers 4 heures, je puis me coucher. Le 22, nouveau bombardement. Un shrapnels
éclate dans la cuisine du major. La pluie de la veille à cessée. Le ciel s’est
découvert et il fait un temps magnifique.
Les aéroplanes en profitent. Nous assistons à un tir merveilleux dirigé
contre eux. Nous avons ce jour 4 tués et 4 blessés.
Le 23, à 3 heures de la nuit, nous sommes relevés par le 8e
et nous rentrons à Furnes.
Furnes 23 janvier : La ville a été copieusement bombardée la
veille et pendant la nuit. À peine sommes-nous arrivés que le bombardement
recommence. Les habitants affolés fuient dans toutes les directions,
abandonnant tout. Un pauvre gosse de quelques mois est blessé grièvement dans
les bras de sa mère : J’ai appris par après qu’ on avait dû lui amputer
les deux cuisses. Une femme est tuée sous les yeux de son mari. C’est horrible.
Devant cette situation, on
décide de changer de cantonnement et à 2 heures, nous partons pour Bulskamp où
nous arrivons dans la soirée. Là, pas de logement. Je suis forcé d’aller
coucher sur la paille à l’hospice.
Bulskamp 24 janvier : Nous passons ce dimanche au cantonnement de
repos. On parle de nous faire changer de secteur.
Noordschote 25 janvier : On envoie le régiment soutenir la
première division de cavalerie qui occupe Noordschote. Départ à 7h 30 et
arrivée au nouveau secteur à 7h du soir. Poste de secours à l’école :
jolie salle à manger avec piano.
Le 26, je passe à ce nouveau poste. Tout est calme, mais il est
interdit de faire du feu et l’on gèle.
Le soir, nous sommes relevés par le 2e bataillon et nous
rentrons à Hoogstade, cantonnement de repos où nous arrivons vers minuit. Là,
le personnel d’installation qui fonctionne depuis quelque temps, d’une façon
plus qu’imparfaite, ne m’a pas prévu de logement. Recherche dans la nuit.
J’échoue finalement à l’hospice
d’Hoogstade. Je deviens un habitué de l’hospice ! Là je gèle et vers le
matin, je suis invité poliment à déguerpir par les anglais qui viennent
installer là un hôpital.
Le lendemain après-midi, départ pour Reminghe où nous sommes de piquet.
Reninge 28 janvier : Passé cette journée à Reninge. Le soir nous
nous rendons à Noordschote. Peu avant le départ, quelques salves d’obus autour
de notre logement.
Noordshote 29 janvier : Rien de spécial. Un blessé par shrapnels
qui a éclaté dans une place où se tenait une quinzaine d’hommes.
Hoogstade 30 janvier : Le 29 au soir, retour à Hoogstade où je
loge chez le forgeron, dans un lit dur comme la pierre.
Le 30, je me rends à La Panne chercher des médicaments. À Furnes, de
nouvelles maisons détruites par le bombardement. Le soir retour à Reninge. Nous
avons là comme logement une petite cabane misérable et froide, avec comme couchette
un matelas. Je passe une nuit atroce : froid, maux de rein, rhume de
cerveau.
Noordshote, 31 janvier 1er février : La visite à
Reninge, le 31, dure jusqu’à 3 heures. Le soir, nous allons occuper le poste de
Noordshote. À 9h et demi du soir , on m’envoie aux tranchées pour
l’assainissement du champ de bataille. Le spectacle auquel j’assiste est
inoubliable ! Des cadavres français gisent çà et là dans la position
occupée lorsqu’ils ont été frappés. Ces cadavres sont gelés, collés au sol,
vitrifiés, noirs, hideux ! rendant lorsqu’on les frappe un son de tambour.
Abandonnés là depuis des semaines, leurs camarades français ne se sont pas
donnés la peine de les enfouir : c’est honteux. Exposés aux intempéries,
ils se sont pétrifiés et desséchés : certains ne sont plus que des
squelettes auxquels restent attachés quelques lambeaux de chair pourrie.
Nous mettons plusieurs heures à faire notre horrible besogne :
recouvrir ces cadavres de chaux et les enfouir autant que possible. Le
spectacle est vraiment lugubre : nos hommes travaillent en silence à leur
sinistre corvée, vu la proximité de l’ennemi. Au loin le canon tonne sans
discontinuer. Parfois un shrapnels éclate dans le voisinage. La lune nous
éclaire de son pâle reflet. De temps à autre, une fusée lumineuse lancée par
l’ennemi nous force à interrompre la besogne ... Des soldats deviennent malades
et je suis obligé de leur faire quitter les lieux.
À 3h du matin, je rejoins le poste de secours.
La journée du 1er février est tout à fait calme. Le soir,
nous rentrons à Hoogstade chez le forgeron.
Février 1915 :
Hoogstade 2-3 février : 2 journées à Hoogstade soi-disant au
repos, mais la visite nous retient chaque jour jusqu’à 2 heures.
Noordshote 4 février : Quelques obus dans le village. Un shrapnels
dans l’école. La veille, au moment de la relève, nous avons eu 4 blessés, au
poste de Macelle. Ce poste extrêmement dangereux, se trouve au milieu de
l’inondation. On y accède par une passerelle de 200 mètres. Celle-ci a été en
partie détruite par le bombardement de la journée. La relève ne peut se
faire : quelques hommes seulement parviennent à gagner le poste. Ceux qui-s’y trouvent ne peuvent
revenir. Le 4 au soir, 2 hommes s’échappent de ce poste à la nage. Ils viennent
se sécher chez nous. Un blessé y est resté et ne peut revenir par ses propres
moyens. Un frère brancardier se dévoue et à travers l’eau, ramène sur son dos
le soldat blessé ! Brave frère ! Encore un de ces obscurs, d’un
dévouement inlassable qu’on ignore dont ne fera pas mention dans les
rapports... ou dont le nom et la conduite passeront inaperçus. Pendant ce temps
ces messieurs de l’arrière, installés tranquillement au coin du feu, se font
décerner des décorations pour acte de courage et de dévouement !
A peine le frère à-t-il quitté le poste que les Allemands y mettent le
feu à l’aide de bombe incendiaires. La garnison se déplace en tirailleur au
milieu l’eau, et l’incendie éteint,
rejoint le poste. Le lendemain, les Allemands le croyant abandonné veulent s’y
rendre en radeau, ils sont massacrés jusqu’au dernier avant d’aborder. Au soir,
départ pour Reninge.
Reninge 5 février : Piquet. Visite jusqu’à 3h de l’après-midi.
Bombardement de Reninge.
Noordshote 6 février : Calme. Rien à signaler.
Reminge 7 février : Piquet. Quelques obus près de notre logement.
Un d’eux tue un paysan d’une ferme voisine.
Hoogstade 8-9 février : Repos. Comme de coutume, visite jusque 2h.
Ce régime est éreintant !
Reninge 10 février : Le 9 au soir, départ pour Reninge où nous
sommes de piquet.
Noodshote 11 février : La relève hier a été difficile aujourd’hui
calme absolu.
Reninge 12 février : Je vais occuper ce jour-là le poste de
secours de Reninge. Pendant ce temps, Vermeylen fait la visite qu’il termine
seulement à 7 heures du soir.
Noordschote 13 février : Hier soir, relève très pénible. On
bombarde violemment Noordschote et Reninge. Le médecin que je relève ne peut
quitter qu’à 10h 30.
Vers minuit, nous sommes réveillés en sursaut par une salve de quatre
obus près de poste. Puis, calme. Pendant la journée bombardement léger près du
poste. Le soir, à la relève, au moment où nous quittions le poste, 3 shrapnels
éclatent en même temps au-dessus de nos têtes sur la place de Noordschote. Nous
sommes environnés de flammes puis d’une pluie de balles. Fuite éperdue. Dubois
se jette à plat ventre dans un trou d’obus rempli d’eau. Nous parcourons la
route Noordschote-Reninge au pas de gymnastique. À peine avons-nous dépassé
Reninge qu’on se met à bombarder le village. Retour à Hoogstade.
Hoogstade 14-15 février : Comme d’habitude, ces journées de repos
sont remplies par la visite où les hommes s’avèrent de plus en plus nombreux.
Je vais visiter mes blessés à l’hôpital Klerer, ainsi que ma petite
opérée d’appendicite. Le soir, départ pour Noordschote.
Noordschote 16 février : Journées mouvementées où nous frisons la
mort plus d’une fois.
La veille, j’ai été aux tranchées de l’Ypertee comme ramasse-crotte.
J’en suis revenu évidemment tout crotté.
Pendant la journée, bombardement en règle du poste de secours : Un
observateur d’artillerie s’étant installé dans notre poste à notre insu et
ayant probablement été aperçu. Une vingtaine d’obus vers midi nous délogent du
poste : nous filons sur la route de Reninge au poste du Major. Vers 4h un
seul obus nous arrive, comme égaré. Enfin, le soir peu avant la relève deux
nouveaux obus tombent dans l’école avec un fracas formidable.
Reninge 17 février : Visite jusque 4h. Les hommes en ont assez et
se rendent en masse à la visite, escomptant une exemptsion de service. Le soir,
retour à Noordschote. À peine arrivés, nous sommes bombardés. Le poste devient
de plus en plus agréable. L’aumônier Delooz remplaçant notre aumônier en congé
m’accompagne.
Noordschote 18 février : Rien de spécial. Calme relatif.
Reninge 19 février : Piquet dans notre chaumière à Reninge. Moins
d’encombrement au piquet, le bataillon se rendant au demi-repos.
Hoogstade 20-21 février : Le 20, un orage, le 21 au soir, nous
retournons à Reninge au piquet où nous logeons à la ferme occupée par le Lt
Delange, remplaçant le major en congé, on parle de nous envoyer au repos.
Reninge 22 février : Le soir, nous nous rendons à Noordschote par
le chemin de ... fait de passerelles entre les inondations. Nous comptions
abandonner notre ancien poste devenu trop malsain, mais le Major Fremur, prétextant
des ordres reçus, nous en empêche.
Noordschote 23 février : Calme au poste. Le Drie Grachten est
violemment bombardé. Officiers et soldats reviennent profondément ébranlés.
Reninge 24 février : Enormément de malades : une cinquantaine
d’exempts. On réparle de nous envoyer au repos. Le soir, cependant, nous
repartons pour Noordschote. J’ai décidé malgré le major Fremur de changer mon
poste de secours. Je prends mes dispositions et je m’installe dans une ferme
située à 300 mètres en dehors du village.
Noordschote 25 février : Rien à signaler. Les boches nous laissent
bien tranquilles dans notre nouveau poste. Tout est calme.
Hoogstade 26-27 février : Nous croyons nous rendre au repos, le
27. Mais à 9h du matin, on nous annonce que le bataillon était parti à Reninge.
Comme toujours, le médecin avait été oublié et n’avait pas été avertit.
Noordschote 28 février : Nous sommes arrivés hier au poste de
Noordschote. On m’a commandé une « corvée de chaux ». Les eaux,
paraît-il se sont un peu retirées et ont laissé apparaître de nombreux
cadavres. Il n’y a plus de chaux heureusement et je puis me coucher. Je n’en
suis pas fâché car depuis quelques jours je souffre de bronchite.
Le 28, calme absolu. Le soir, nous quittons le secteur, ... sans
regret. Il nous laisse un mauvais souvenir. Nous y avons été fortement secoués
et y avons perdu plusieurs hommes. Nous retournons à Hoogstade.
Mars 1915
Leisele 1er mars : Nous entamons le 8e mois
de guerre. Voilà déjà 7 mois entiers que nous battons les routes et les
campagnes. Les fatigues et les privations ne nous ont pas manqué. Nous sommes
éreintés, rhumatisés. Mais en dehors de cela, l’état sanitaire a été des
meilleurs : pas un seul cas de maladie transmissible entre autre n’a été
constaté dans le bataillon. Pour ma part, je suis fourbu, je ne serais pas
fâché de voir finir cette vilaine affaire. La moindre marche m’éreinte. Je suis
également légèrement rhumatisé.
Le régiment se rend en partie à La Panne, en partie à Leisele, et à
Isenberge pour le IVe Bataillon. Nous nous rendons à Leisele. Nous nous y
casons avec mille difficultés. Nous finissons par trouver un gîte dans une
modeste maison où trône une vieille fille de 60 ans, à la mine imposante
surnommée immédiatement « martole arche » par l’aumônier que ce monument
a probablement impressionné pendant son voyage à Londres. Cette vieille jacasse
tout le jour comme un derviche hurleur. Personne ne comprend mot à son
charabia. J’entame cependant avec elle des conversations sans fin, dont elle
fait d’ailleurs tout les frais, me bornant simplement à y jeter de temps à
autre un « ja » d’assentiment accompagné de mon plus gracieux
sourire. Je suis bientôt grâce à cela dans la manche de la vieille, jusqu’au
coude et pour me faire plaisir, elle se couperait en 4. À Leisele, une compagnie
est logée à 5 km de mon cantonnement. Il faut y faire la visite tous les jours.
À côté de cela, les malades au lit, visite du colonel indisposé, conseil de
guerre, ... voilà à quoi se passe le repos.
Nous restons à Leisele jusqu’au 9.
La Panne 9 mars : Le 9 au matin, départ pour La Panne en tramway.
La division va au repos. C’est le premier repos sérieux qu’on nous accorde
depuis le début de la campagne !
À La Panne, je loge chez des Bruxellois à la villa « les
Alouettes ». La propriétaire nous reçoit le soir dans son hall et nous
fait un long discours tout en distribuant majestueusement nos bougeoirs. Je
suis logé là avec Vermeylen l’aumônier.
Paris 10-17 mars : La demande de congé que j’ai faite il y a
quelques jours est accordée et je file à Paris. Parti de La Panne vers 1h, de
Dunkerque à 18h33, j’arrive le lendemain à Paris. Logé au Terminus nord !
6 jours dans une atmosphère qui ne sent pas la poudre, au milieu de
gens qui ne parlent de la guerre qu’à l’heure de l’apparition des journaux et
qui est en dehors de cela rient et s’amusent sans se soucier des malheureux qui
se font trouer la peau pour eux à quelques km de là.
Le changement de milieu est reposant mais qui a vu les horreurs de la
guerre n’a pas le cœur à la joie... Retour le 16, à 23h53 ; pour arriver
le 17 vers 6h du soir à La Panne où je retrouve l’aumônier Vermeylen installés
dans une gentille villa : la villa Jolimont.
La Panne 18-21 mars : Repos.
Ghyvelde 22 mars : Passé la journée au conseil de guerre. Le soir,
par la digue, je me rends à Ghyvelde où le bataillon va continuer son repos.
Ghyvelde 23-26 mars : Nous sommes à Ghyvelde, joli village
français de la frontière. Nous sommes passablement logés : rien de
brillant.
Le 23 nous annonçons la chute de Tzemypl. Le 25, on nous annonce le
départ : nous irions occuper le secteur de Ramskapelle.
Adinkerke 26 mars : À 11h départ pour Adinkerke où je suis logé
chez une vieille mégère qui me réclame 1F pour chauffer mon café. Les habitants
se livrent à une exploitation systématique des militaires. Le 27 au soir nous
quittons Adinkerke pour nous rendre au piquet à la ferme Joekoeld, derrière le
village de Ramskapelle. Je vais le soir même reconnaître la position. Je visite
les tranchées qui sont dans ce secteur assez boueuses (?) .
Ramskapelle 28 mars : La ferme Joekoeeld est occupée par 2
compagnies, la ferme Klein Noordhof par une autre. Défense formelle de se
montrer. Nous ne sommes guère à plus de 1200 m des tranchées et le terrain est
tout à fait découvert.
Journée calme. Visite. Peu de monde. Il fait froid. Il a encore gelé
cette nuit.
Le soir, je vais occuper le poste de secours situé sur la route
Ramskapelle - Perwijze au café « In de Korenbloem » : petite
maison qui n’est pas encore démolie outre mesure, mais peu confortable, ouverte
à tous les vents, crasseuse.
Les tranchées sont à 400m devant nous le long du chemin de fer. Le
bataillon fournit seulement quelques petits postes aux fermes Wolvernest,
Rijkenhoek et Roedesterkte, au milieu de l’inondation.
Ramskapelle 29 mars : On procède au grand nettoyage du poste qui
devient bientôt sous le torchon de Schoonjaren (?) presque coquet.
Il y fait malheureusement très froid : il y a encore fortement
gelé cette nuit.
Vers 8h. Je me rends à Ramskapelle visiter les ruines du village et
prendre quelques photos.
Journée tranquille. Le secteur semble très calme. Le soir nous sommes
relevés et retournons à Adinkerke.
Adinkerke 29-30-31 mars : Deux journées passées à déménager d’un
logement à l’autre. Un grand changement s’est opéré dans le bataillon : il
n’y a presque plus personne à la visite ! Le 31 au soir nous retournons au
poste de secours.
Avril 1915 :
Ramskapelle 1-4 avril : 1er avril calme plat.
L’aumônier dit la messe au poste de secours. Promenades dans les environs et
aux tranchées. Des tranchées, on voit parfaitement Nieuport, Westende,
Middelkerke : tout cela est plus ou moins détruit.
2 avril : journée particulièrement calme. On entend même pas le
canon à Nieuport. Je m’installe avec le docteur Hallez dans une tranchée
ébauchée en face du poste de secours, car il fait un temps délicieux. Nous
dînons sur l’herbe. Le mouvement des ordonnances a malheureusement attiré
l’attention de l’ennemi qui nous envoie vers 4 h plusieurs salves d’obus qui
nous forcent à déguerpir.
Nous avons encore 2 jours à passer ici, dont la journée de
Pâques ! Le 3 et 4 sont calmes. Bombardement insignifiant. Le 4 au soir
nous sommes relevés par le 4e bataillon.
Adinkerke 5-8 avril : C’est notre cantonnement de repos, un
mauvais cantonnement. Mal logés, repos à l’hôtel.
Revu le 7 Alphonse Vigneron à La Panne.
Ramskapelle 9-12 avril : Quatre jours au poste de secours.
Promenades aux avant-postes. Promenade en barquette sur les inondations pour
prendre la photographie d’une vache crevée.
Adinkerke 13-16 avril : Quatre jours à Adinkerke : on s’y
ennuie mortellement.
Ramskapelle 17-20 avril : rien de spécial.
Adinkerk 21-24 avril : De nombreux blessés de la 6e
D.A. arrivent à la gare d’évacuation. Une attaque s’est produite dans le
secteur de Steenshacte (?), à l’aide de gaz asphyxiants. La situation, un
moment critique par suite du recul des Français est rétablie grâce aux
carabiniers.
Le 24 à 1h du matin on nous réveille. Nous devons être prêts à partir.
Une attaque s’étant dessinée vers Rijskenhoek. Vers 3 heures, on annonce que
l’attaque est repoussée et nous allons nous recoucher.
Cette fois, au soir, nous sommes de garde à Ramskapelle. Cette fois ci,
2 bataillons du 13e s’y rendent : un au piquet, un au chemin de
fer. Les médecins de garde et de piquet doivent se tenir au poste de
secours : nous sommes là 2 médecins, 2 auxiliaires, 2 aumôniers, nos
porte-sacs, ordonnances et brancardiers. Le service est certainement bien
assuré ! Mais le poste est devenu une ruche bourdonnante où il devient
impossible de se remuer.
Ramskapelle 25-28 avril : Le secteur devient moins calme, on
bombarde davantage. Le 26, dans la nuit on vient nous construire un abris
derrière le poste. Vers une heure, vive fusillade du côté de Stuyekensker.
Depuis notre arrivée, le canon tonne sans cesse vers le sud, du coté
d’Ypres. C’est un roulement continu comme nous n’en avons plus entendu depuis
la bataille de l’Yser. Résultats encore inconnus.
Le 27 les journaux commencent à parler de l’action qui se déroule dans
la région d’Ypres. Deux corps de l’armée allemande ont pris l’offensive,
faisant usage de gaz asphyxiants. Les Français ont reculé et la situation un
moment très critique n’a été rétablie que grâce à l’intervention des troupes
belges.
Le 28 est une journée assez chaude. Vers 9 heures, on se met à
bombarder la ferme Jackveld. Le 1er shrapnel blesse 6 hommes.
L’aumônier Vermeylen et moi accourons aussitôt sous le bombardement. Un obus
éclate à quelques mètres de moi. J’arrive cependant sans égratignure aux
tranchées élevées derrière la ferme, où les compagnies se sont réfugiées. Les
officiers sont pour la plupart dans la tranchée, se mettant à l’abri autant
qu’ils peuvent.
Je panse les blessés et les évacue, le bombardement continue toujours.
Le soir, nouveau bombardement.
On me téléphone qu’un homme est blessé. Je m’y rends aussitôt. Il est
mort : fracture du crâne avec hémorragie cérébrale.
Relève vers 9 heures. Nous nous rendons à Wulpen.
Mai 1915 :
Wulpen 29 avril – 2mai : Nous sommes très bien logés. Le 29 au
matin, enterrement du soldat mort la veille. Rien à signaler les jours
suivants. Depuis 2 jours, bombardement de Dunkerque par une pièce de marine
placée du côté de Dixmude paraît – il. Le territoire français se trouve aussi
bombardé au-dessus de la Belgique.
Ramskapelle 3 – 6 mai : Le 3, nous sommes de piquet à Jackveld. Je
m’y loge dans un abri et dors quasi toute la journée. Ver 4h, léger
bombardement des tranchées de piquet. Le soir, nous nous rendons au poste de
secours.
Le 4, soigné 6 blessés des avant – postes atteints peu grièvement
d’ailleurs pendant la relève. Je me couche dans notre blockhaus. Je m’y
installe mieux pendant la journée : une planche fixée à la paroi me sert
de table, une chaise dont on a amputé les pieds de siège. Vers 4h, le poste est
bombardé malgré la croix – rouge. Nous recevons une vingtaine d’obus.
Le soir, retour à Jackveld. Passé une bonne nuit dans les tranchées Le
matin, le poste de la route a de nouveau été bombardé. Un obus cette fois-ci
est entré dans la maison. Tout le personnel heureusement se trouvait dans le
blockhaus.
Le 5 au soir, je réoccupe le poste, nous passons une partie de la nuit
à renforcer l’abri. Le lendemain, nous sommes tranquilles, bien que le
bombardement dans les environs soit assez intense.
Mort du Lt Antoine atteint d’une balle au front aux avant – postes.
Wulpen 7 – 9 mai : Le 7 au matin nous conduisons à la dernière
demeure le pauvre Antoine. Triste et imposante cérémonie.
Le 9, nous appercevons de Wulpen un bombardement intense de Nieuport.
Notre cantonnement est bombardé vers le soir assez violemment.
Le soir, nous nous rendons au poste de secours du Violon. 2 compagnies
du IIe bataillon vont attaquer la ferme Violette. À 10h, l’attaque
commence. Toutes les pièces d’artillerie du secteur se mettent à tonner et
pendant un quart d’heure les coups succèdent aux coups. Le spectacle est
féerique ! À chaque coup de canon les ruines de Ramskapelle s’illuminent
puis quelques secondes après une énorme gerbe de feu marque l’éclatement du
projectile dans les lignes ennemies. Le vacarme est assourdissant. La cononnade
terminée, un silence de mort se fait, silence angoissant, qui ne dure qu’un
instant. Tout à coup, une fusillade retentit, les mitrailleuses se mettent à
donner. Puis, c’est de nouveau le silence et le calme. Les premiers blessés qui
nous arrivent bientôt nous renseignent sur le résultat de l’action qui a
malheureusement échoué. L’artillerie n’a pas atteint le but. Les hommes arrivés
à trente mètres des tranchées ennemies ont été reçus par les mitrailleuses et
arrêtés net dans leur élan. Le sol maintenant jonché est de cadavres et de
blessés. C’est à notre tour à entrer en
action, pour tâcher de réparer la casse. Nous pansons 45 blessés, tous des plus
horriblement atteints. Vers 9h, je puis rejoindre le piquet à Jackveld.
Ramskapelle 10 – 14 mai : Le 10 au soir, je retourne au poste de
la route où je soigne encore quelques blessés de la veille.
Les jours suivants n’offrent rien d’intéressent.
Wulpen 15 – 18 mai : Retour au cantonnement de repos le 14 au soir
pour 4 jours.
Victoire française du côté d’Arras.
Ramskapelle 19 – 22 mai : Il a plu depuis 2 jours. Le terrain est
de nouveau détrempé. Les abris que nous occupons sont dans l’eau. La mince
couche de paille qui s’y trouve forme un véritable fumier sur lequel il faut se
coucher. À côté de cela, les poux, les moustiques et les insectes de toutes
espèces vous démangent d’une façon plutôt désagréable.
Le 19 au soir, nous nous rendons à Jackveld au poste du Violon. Il
bruine. Tout est calme. Les oiseaux chantent. Les champs qui ont reverdi sont
couverts de fleurs.
Des ruines de Ramskapelle, des chants s’élèvent qu’un accordéon
accompagne... Cette tranquillité et ce calme, cette paix d’une soirée de
printemps contrastent singulièrement avec les horreurs dont ce pays est le
théâtre. Et un moment, oubliant les horreurs passées, on se met à rêver de
cette paix dont autrefois on ne goûtait pas assez les charmes et on se sent
malgré soit envahi de tristesse et le spleen nous étreind... Le 20, au soir, on
annonce que l’Italie a déclaré la guerre à l’Autriche. Cette nouvelle est
accueillie avec enthousiasme. On ordonne un feu de joie sur toute la ligne. À
10h, tous les cannons du secteur et des secteurs voisins se mettent à tonner.
Aux avant postes on tire des salves. Des cris de « VIVE L’ITALIE !
VIVE LE ROI ! » retentissent. Depuis les dunes jusque bien loin dans la
campagne ce n’est qu’une seule clameur.
Les Allemands croyant à une attaque font fonctionner les mitrailleuses.
Des fusées rouges et vertes, demandant des renforts apparaissent dans la nuit à
la grande joie de nos hommes.
Le 21 est calme. Nous apprenons que la nouvelle annoncée hier est
prématurée. Nous sommes désillusionnés, mais espérons bien fêter le fait
accompli d’ici quelques jours.
Wulpen 23 – 26 mai : Nous apprenons officiellement le 25 la
déclaration de guerre de l’Italie. Belles journées, chaudes. Je vais à la pêche
dans le canal de Nieuport.
Ramskapelle 27 – 30 mai : Le 26, au soir, en allant au poste de
secours, nous apercevons un dirigeable allemand. C’est le premier dirigeable
que je vois depuis le début de la campagne.
Cette période de piquet et de garde se passe dans le calme presque
absolu.
Le 30, j’accompagne à Adinkerke 2 compagnies du bataillon, les 2 autres
restent à Wulpen.
juin 1915 :
Adinkerke 31 mai – 3 juin : Rien à signaler, si ce n’est qu’à mon
arrivée à Adinkerke le 30, le personnel d’installation étant introuvable, je
suis forcé d’aller loger à La Panne, au Kurzaal.
Ramskapelle 4 – 7 juin : Le 4, nous nous rendons au piquet. Le 7,
violent bombardement de Panscapelle avec du gros calibre. Un dépôt d’explosif
saute.
Wulpen 8 – 11 juin : Le repos devient pour les médecins de plus en
plus agréable ! Visite, vaccinations, inspection des masques contre les
gaz asphyxiants... Dans quelques jours, j’aurai une étuve à désinfection, un
vaporisateur contre les moustiques, les bains-douches, inspection des
brasseries !!! Nous sommes surmenés. Un médecin et un auxiliaire dans de
pareilles conditions pour un bataillon de plus de 800 hommes sont tout à fait
insuffisants.
Reçu aujourd’hui lettres et photographie de la famille.
Des nouvelles qui arrivent de Belgique disent qu’une révolte aurait
éclaté dans le borinage et le bassin de Charleroi. Ces nouvelles causent parmi
nous une forte émotion, mais elle sont bientôt démenties officiellement.
Ramskapelle 12 – 15 juin : Cette fois, on nous envoie aux avants –
postes. On nous y construit un blockhaus. Au moment où je m’y rends, la
charpente seule existe. Je réclame, mais on m’oblige à m’y tenir malgré tout.
Le 12 au soir, on commence une démonstration d’artillerie. Pendant 4
heures, de 5 à 9h, toute notre artillerie est en action. Le bruit est infernal.
Le feu est bien conduit et donne de bons résultats.
Le 13, même démonstration.
Le 19, l’ennemi fait sauter un caisson d’artillerie derrière le poste
de secours.
Adinkerke 16 – 19 juin : rien à noter.
Ramskapelle 20 – 23 juin : Le 20, j’occupe le poste de la route.
Nous sommes ce jour là fortement secoué. Le poste de secours est le seul
endroit du secteur qui soit bombardé et il l’est par 3 fois. 4 obus tombent
dans la maison même qui commence à devenir une ruine véritable et devient de
plus en plus inhabitable. Je supporte de moins en moins les bombardements. J’ai
le soir les nerfs fortement tendus et suis vraiment malade.
Le soir, je me rends à Wolvernnest. La compagnie du Lt Paix (?) est
chargée de faire une reconnaissance offensive vers la ferme Terstille. Elle
échoue : le sous-lt Deffe est tué. 12 soldats blessés.
La journée du 21 est calme aux avant – postes. Il n’en est pas de même
pour le poste de secours du violon que nous apercevons très bien de Wolvernnest
et qui vers 5 heures est encore copieusement arrosé. 5 obus atteignent la
maison. Nous y rentrons le soir et passons une partie de la nuit à consolider
le blockhaus.
Le 22, nous vivons dans le blockhaus de craint d’un nouveau
bombardement. La journée se passe cependant sans que nous soyons inquiétés.
Wulpen 24 – 27 juin : Légèrement indisposé ces jours-ci atteint de
cholérine Le 27, vers 6h Wulpen est bombardé assez sérieusement. 2 blessés.
Juillet 1915 :
Ramskapelle 28 juin – 1er juillet : le 28 juin.
Wolvernnest. Nous passons 24h dans notre trou, à dormir. Nous n’interrompons
notre sommeil que pour manger. Quelle vie ! Le matin, nous avons reçu
quelques obus dans le voisinage du blockhaus sans nous en apercevoir.
Rykenhoek (?) est fortement bombardé dans l’après midi. Les jours
suivants sont calmes. Les Russes commencent leur retraite.
Adindkerke 2 juillet : Nous rejoignons le cantonnement de repos.
Le 3, au soir, je pars à Paris, en congé, retour le 10 juillet.
Wulpen 11 – 13 juillet : Pendant mon absence, bombardement sérieux
du poste de la route, du poste de Wolvernnest et de Wulpen.
Ramskapelle 14 – 17 juillet : Le soir, je vais me promener aux
postes avancés de Rykenhoek et de Beverdijk. Le 16, nous sommes bombardés à 2
reprise à Wolvennest.
Adinkerke 18 – 21 juillet : Le 21 journée de la
fête nationale. Se borne ici à un « Te Deum ».
Ramskapelle 22 – 25 juillet : 2 journées au poste du Violon, et 2
à Wolvennest. Le 25 au matin 4 blessés par l’éclatement d’une bombe à Rykenhoek
avancé.
Ramskapelle 30 – 31 juillet : 2 journées aux avant – postes. Nous
avons maintenant un second poste de secours à Roedesterkte. Le 29 au soir, le
sous-lt Damaret est tué à Beverdijk d’une balle dans la poitrine.
Août 1915 :
Wulpen 1er – 2 août : 1er anniversaire de la
mobilisation générale.
Ramskapelle 3 – 6 août : 3 août. Anniversaire de la déclaration de
guerre. Nous sommes au poste de secours du Violon. Il fait très calme.
4 août. Le soir, nous relevons le 4e bataillon à Wolvennest.
5 août. Journée malheureuse pour le 1er bataillon. 3 blessés
et 3 tués à Beverdijkt. 3 tués et un blessé dans un abri qui s’effondre sous un
150 à Rykenhoek. Le blessé a les 2 jambes et les 2 cuisses cassées et a au
moins 20 blessures. Les tués sont complètement déchiquetés : crâne ouvert,
membres en partie arrachés, poitrine défoncée... c’est un horrible carnage.
6 août. Ce jour là, il fait relativement calme et nous n’avons aucune
perte à déplorer. Le soir, nous sommes relevés et nous nous rendons à
Adinkerke.
Adinkerke 7 – 14 août : Le bataillon est au repos par moitié à
Adinkerke, l’autre moitié à Wulpen.
Nos hommes reçoivent la nouvelle tenue kaki.
Wulpen 15 – 16 août : Départ pour Wulpen, le 14 au soir. Le 16
nous retournons au piquet.
Ramskapelle 17 – 20 août : De nombreux malades : épidémie de
cholérine.
Wulpen 21 – 22 août :
Ramskapelle 23 – 26 août : Le 23, au soir, je vais occuper le
poste de secours de Roedesterke pour 72 heures. Il fait calme : un seul blessé :
un homme qui a la jambe emportée par un obus du canon revolver.
Wulpen 27 – 28 août : 1/2 repos. Pendant les 2jours, nos hommes
vont à Nieuport combler une digue du canal qui s’est rompue. Nous sommes par
suite de cet accident menacés d’une inondation très étendue.
Septembre 1915 :
Ramskapelle 29 août – 1er septembre : Le 29 août, poste
de secours du Violon. Une nouvelle digue s’est rompue à Nieuport. Vers le soir,
les inondations montent dans des proportions inquiétantes, enlevant une partie
des passerelles qui conduisent aux avant – postes. Tous nos hommes travaillent
à renforcer et à surélever le parapet du chemin de fer. Le 30 août, on semble
de nouveau maître des inondations. Le soir, je me rends à Wolvennest pour 24h
seulement. Le poste de Roesdenkerk, étant supprimé. Nous n’irons qu’un jour sur
deux aux avant - postes à chaque garde.
Wulpen 2 – 3 septembre :
Panscapelle 4 – 7 septembre : Les 3 premiers jours au poste du
Violon. Le 4e à Wolvennest.
Adinkerk 8 – 15 septembre : Repos. Le 13, inspection du
colonel ; passation de serments des officiers nouvellement promus.
Wulpen 16 – 17 septembre : 1/2 repos.
Ranskapelle 18 – 21 septembre : 3 jours au poste de secours du
violon ; 1 jour à Wolvernnest. Calme.
Wulpen 22 – 23 septembre :
Ranskapelle 24 – 27 septembre : Depuis quelques jours on parle
d’offensive. Les congés ont été supprimés, il y a une dizaine de jours. Une
animation spéciale règne un peu partout. Notre artillerie est plus active.
Le 24, on entend dans le sud, une canonnade intense.
Le 25, l’artillerie du secteur se met à tonner aussi :
bombardement violent des avant-postes ennemis. La canonnade de la veille se
poursuit toujours ininterrompue.
Tous les services ont été avertis de se tenir prêts à une marche en
avant. La cavalerie est consignée.
Les imaginations battent déjà la campagne, surtout à l’arrière… la
percée est déjà faite, notre départ est imminent. Les vivres deviennent rares,
les indigènes craignant de ne pouvoir les écouler ne faisant plus de commandes.
En attendant les boches répondent à nos bombardements.
On annonce pour cette nuit une nouvelle manifestation d’artillerie et
d’infanterie. Le feu d’artillerie est décommandée mais l’infanterie s’en donne
à cœur joie : pendant plus d’une heure, fusils, mitrailleuses, canons, revolvers
fonctionnent sans interruptions : ce qui ne semble guère incommoder les
boches d’ailleurs. Vermeylen et moi, sommes au poste de Wolvennest ce
soir-là : nous devrons nous y rendre tous les deux à chaque garde :
nos chefs jugeant la présence de deux médecins absolument indispensable. Rien à
signaler les 2 jours suivants.
Wulpen 28 – 29 septembre : Les nouvelles de l’offensive qui a été
déclenchée en Champagne le 25 au matin nous arrivent : les Français se
sont emparés de la 1re ligne et ont fait 20000 prisonniers et pris
70 canons.
Les Anglais progressent également en Artois faisant des prisonniers et
prenant des canons.
Octobre 1915 :
Ranskapelle 30 septembre – 3 octobre : Le nombre de prisonniers
faits par les alliés dépasse 37000 hommes. 127 canons ont été pris ! La 2e
ligne ennemie est entamée. Cette nouvelle nous comble de joie. Malgré notre
pessimisme, la possibilité d’une avance se dessine.
Sur notre front, il fait
relativement calme : il n’y a pas de changement apparent.
Wulpen 4 – 5 octobre : Les communiqués sont brefs et n’ont plus
rien d’intéressant. Malgré tout, on s’attend encore à des changements.
Les troupes belges ont évacué La Panne dit-on, où arriveraient 2
divisions Françaises.
Ranskapelle 6 – 9 octobre : Cette garde se passe dans le calme le
plus absolu. Nous n’avons pas un seul blessé. Entrée en jeu de la Bulgarie.
L’offensive française est arrêtée.
Adinkerke 10 – 17 octobre : Nous nous rendons au repos de 8 jours
à Adinkerke. Le bataillon est logé dans des baraquement sur la route d’Houtem.
Le 9 au soir, n’ayant pas de logement, je vais loger au Kurzaal.
Le 10, je suis nommé lieutenant. Le 14, je fête cette nomination par un
banquet aux commandant de compagnies. Rien à signaler, si ce n’est la … (?)
balkanique par suite de l’intervention de la Bulgarie.
Novembre 1915 :
Isenberge 17 octobre – 20 novembre : Le dimanche 17 octobre, nous
quittons tous Adinkerke à 10h du matin pour Isenberge où 2 bataillons du 13e
vont cantonner. La division passe en 2e ligne.
Le 22 au soir, je fais un accouchement dans une petite masure à
Isenberge.
Le bataillon va faire des travaux à Pollinkhove. Pendant ce repos, je
tombe malade pour la première fois et suis obligé de garder le lit pendant
plusieurs jours.
Bray Dunes (?)21 – 26 novembre : Le 21, nous nous rendons à Bray
Dunes où le bataillon est garde côtes.
Décembre 1915 :
Paris 26 novembre au 4 décembre : Congé.
Au retour, le bataillon s’est déplacé et se trouve cantonné à
Alveringem. Nous allons relever la 6e division.
Alveringem 4 décembre : Le relève de la 6e division ne
se fait pas sans un certain désordre.
Le roulement dans ce secteur se fait d’une façon un peu différente que
dans le secteur précédent. Aidés de la 2e D.C. nous passons
successivement 4 jours aux tranchées à la 1re ligne, 4 jours au repos,
4 au piquet puis 4 au repos. Un bataillon n’intervient pas dans ce roulement et
pendant 16 jours est chargé des travaux de défense. Notre bataillon est chargé
de ces travaux en 1er lieu.
Les cantonnements sont malheureusement éloignés. Nous avons 10 km à
faire chaque jour pour la visite et à travers quels chemins.
Alveringem 19 décembre : Un avion ennemi visant l’église au moment
de la messe, lâche une bombe qui tombe dans la maison voisine et blesse
grièvement 6 hommes. Toute la journée et la nuit précédente, violente canonnade
sur tout le front. On annonce comme prochaine une attaque allemande sur le
front occidental et principalement en Belgique. Elle serait accompagnée de jet
de gaz asphyxiants. Aussi, suis-je chargé de faire théorie aux hommes sur
l’emploi des lunettes et des tampons.
Alveringem 21 décembre : On nous donne 4 jours de repos avant de
partir faire les tranchées.
Alveringem 25 décembre : Noël ! Le soir, nous partons occuper
le secteur, comme piquet.
Une compagnie est dans les trachées 200 mètres derrière la 1re
ligne, les 3 autres sont cantonnées dans les fermes ferme des 4 paratonnerres
et ferme 2600.
Un poste de secours est établi à la ferme du Colonel 600 m derrière la
1re ligne. C’est là que je me rends. Ce poste est plutôt un poste de
relais pour les blessés venant de 1re ligne : ils sont évacués
vers le poste divisionnaire sur des trains de roues dont on vient de nous
doter.
Un abri m’y est réservé : abri que je partage avec l’aumônier est
du modèle de cabine de navire, à 2 lits superposés. Nous y passons 4 jours. Il
fait assez calme sauf le dernier jour où les hommes sont bombardés : 2
tués et 4 blessés en 1re ligne.
Alveringenm 30 décembre : Nous sommes rentrés hier soir et avons 4
jours à passer à Alveringem au repos.
2e carnet :
Janvier 1916 :
1er janvier : 517e jour de la guerre !
Journée de nouvel an bien triste et bien morne, comme sont d’ailleurs
presque toutes les journées passées ici, en exil !... Nous sommes au
cantonnement d’Alveringenm : les soldats font de l’exercice, nous la
visite. Voilà 15 mois que nous sommes sur l’Yser et que nous menons cette vie,
sans un seul jour de répit. Et combien de temps cela durera-t-il encore ?
Demain soir, pour varier, nous irons aux tranchées nous enfermer dans nos
taupinières... nous encaisserons des obus, nous en enverrons aux boches. Comme
résultat ? Peut-être rien ; quelques hommes peut – être réduits en
marmelade, dont j’irai rassembler les morceaux. C’est ce qu’on appelle la
guerre d’usure …
Il pleut et « il pleure dans mon cœur, comme il pleut sur la
ville »…
2 janvier : C’est la drache des grands jours … Le soir, nous
faisons la relève aux tranchées du sous – secteur sud, pour la 1er
fois et sans incidents. Il fait très calme : on tiraille fort peu. Mon
poste de secours est établi en 1er ligne au pied de la digue de
l’Yser. C’est un abri relativement confortable (un poêle, un ressort, une table
et 2 chaises !…) mais peu approprié aux usages auquels il est destiné. On
ne peut en effet y entrer un brancard !
Il fait une nuit noire. On ne peut guère se rendre compte de l’état des
lieux. Il y beaucoup d’eau... et de la boue !!!
3 janvier : Calme. Je fais le tour du propriétaire et visite le
secteur qui est des plus pittoresque. Les tranchées et les abris se trouvent
dans la digue de l’Yser, bordée de saule déchiquetés, brisés par les obus. Une
passerelle longe toute la tranchée et permet de circuler à pieds sec, tout le
terrain avoisinant formant un bourbier sans nom, criblé d’entonnoirs.
Il fait beau et j’en profite pour faire quelques photos.
Examen des tranchées boches au périscope, de Dixmude, de la fameuse
minoterie où se trouve caché le fameux tireur Fritz qui enfile nos passerelles.
À la partie nord du secteur, les Allemands ne sont séparés de nous que
par la largeur de l’Yser. Leur ligne quitte le bord du fleuve au niveau du pont
de chemin de fer, puis suit la voie ferrée et la route de Woumen.
Un blessé léger : un éclat d’obus dans l’épaule gauche.
4 janvier : Lutte d’artillerie. Léger bombardement de la partie
sud de notre secteur. Un homme tué d’un éclat d’obus à l’hypocondre gauche. Il
bruine aussi nous restons « chez nous ».
Une des curiosité du secteur est constituée par les rats. Il y en a ici
par centaines. Ils sortent en bandes énormes dès l’obscurité. Ils sapent nos
abris et nous font la nuit des visites plutôt désagréables, mangeant nos
provisions et allant même jusqu’à détruire notre mobilier.
5 janvier : Cette nuit, 2 blessés par obus. Journée calme.
Bombardement de la partie sud du secteur.
Un homme blessé aux petits postes. Le passeur blessé d’une balle à la
fesse.
Nous avons des postes de surveillance établis sur la rive droite de
l’Yser. Les hommes qui s’y rendent y sont transportés, la nuit, en radeaux.
6 janvier : Calme presque absolu dans notre secteur, mais bombardement
intense de celui du 10e pendant toute la matinée.
C’est notre 4e et dernier jour de garde : 4 jours que
nous sommes enfouis dans des trous sans air et sans lumière. Depuis 4 jours,
nous ne nous sommes plus lavés. Nous sommes noirs comme des nègres et couvert
de crasse ! Le soir nous faisons une marche de 15 km pour rejoindre notre
cantonnement
7 janvier : Alveringem Théorie sur les gaz asphyxiants. Depuis
cette menace de gaz, on nous a déjà doté de 3 masques différents. Le médecin a
été chargé de cette importante besogne. Pourquoi ? Je suis encore à me le
demander. Le résultat, c’est qu’à chaque repos, je suis chargé de donner des
conférences sur l’application des masques et sur les moyens de se protéger des
gaz malodorants, produits de l’industrie boche.
8 janvier : Comme la veille théorie sur les gaz toute la matinée.
9 janvier : L’étuve à désinfection du bataillon qui avait été
emportée par la 6e division, lors de notre arrivée dans le secteur
semble devoir revenir... Le chef, qui à la suite de la disparition de ce
précieux appareil tue – poux était devenu presque inabordable, reprend à cette
nouvelle une mine un peu plus avenante.
10 janvier : On annonce que l’abri du commandant de la compagnie à
Froost in noord à été défoncé par un obus. Il est tué et rôti (le feu ayant
pris aux décombres) en même temps que 3 officiers qui se trouvaient avec lui.
Le soir, je me rends au piquet à la ferme des 4 paratonnerres, Vermeylen va à
la ferme du colonel.
11 – 14 janvier : Piquet au « 4 paratonnerres. »
Du 15 au 21 janvier : Congé à Paris.
22 janvier : Retour à Alveringem. Le bataillon descend des
tranchées où il a été assez éprouvé : 15 blessés dont plusieurs
grièvement. Mais nos patrouilles se sont distinguées, entre autres en ramenant
dans nos lignes un boche qu’elles ont tué près des petits postes. Ce qui a
permis d’identifier les troupes qui nous font face : 362e
Ersatz (prussiens). Ensuite, une reconnaissance en règle du terrain vis-à-vis
du secteur a été faite par nos soldats.
Le bataillon est félicité… La situation reste cependant inchangée.
23 – 24 janvier : Repos à Alveringem.
25 janvier : Repos.
Conflit entre l’aumônier et le commandant de la 1er.
Conférence aux officiers sur l’emploi de nouveaux appareils contre les
gaz asphyxiants.
Reçu aujourd’hui plusieurs lettres de Bruxelles.
Une escadrille d’une douzaine d’avions passe ce matin en vue
d’Alveringem et jette des bombes en plusieurs endroits, entre autres à La
Panne.
26 janvier : Repos. Théorie à la troupe sur les gaz asphyxiants.
Le soir, je me rends au piquet à la ferme du colonel et insiste sur la
ferme du colonel St Jacob et Froost in Noord pour vérifier les appareils contre
les gaz asphyxiants.
Rencontré au départ un médecin de la colonne d’ambulance se rendant au
poste de secours divisionnaire, qui devait être occupé uniquement par les
médecins chefs de service. Ces messieurs dont la besogne n’est pas très lourde
parviennent à trouver à la colonne d’ambulance des médecins pour alléger encore
leur service, alors qu’on demande des médecins de bataillons un surcroît de
besogne, souvent très pénible, lorsque l’un des 2 est absent. Pourquoi pour
ceux-ci ne trouve – t – on pas de remplaçants ?
27 janvier : un blessé à soigner cette nuit : une balle dans
le genou.
Calme au piquet.
La tranchée est bombardée : 2 tués et 2 blessés.
Une petite offensive Allemande déclenchée à Lombardsijde le 25 à été
repoussée.
28 janvier : Brouillard calme.
29 janvier : Brouillard. Calme presque absolu.
Le soir, un travailleur du 4e est blessé d’une balle à la
région lombaire gauche.
30 janvier : Brouillard très intense. On ne voit pas à cent
mètres. Aussi, il fait calme plat. On n’entend pas un coup de canon de toute la
journée.
Le soir, nous sommes relevés et
nous retournons à Alveringem notre cantonnement de repos.
31 janvier : Alveringem visite et bains.
Février 1916 :
1 – 2 février : Alveringem. Visite et théorie sur les masques
contre les gaz asphyxiants.
3 février : Le soir, nous nous rendons aux tranchées de 1e
ligne. Feux de mousqueterie assez vifs pendant la relève. Examen des appareils
contre les gaz.
4 février : Dès le matin, je fonctionne 2 hommes sont atteints par
un obus. Un soldat et un caporal. Celui-ci est horriblement déchiqueté :
le crane broyé, les 2 bras à peu près arrachés. L’autre est blessé grièvement d’un
éclat dans le poumon droit. Évacuation immédiate.
Vers 2 heures, nous sommes bombardés à gros calibre. Une vingtaine
d’obus de 190 qui font dans la tranchée de combat une brèche de tente mètres.
Un obus tombe à 5 m de notre poste de secours. Mais toute la partie visée a été
évacuée et nous assistons à 100 m de là au bombardement qui reste localisé.
Le soir, vers 9h et vers 11h, nous recevons encore quelques obus.
5 février : Ce matin, un mitrailleur est touché à la tête par une
balle et présente une fracture du crâne.
Dans l’après – midi, bombardement de la partie sud du secteur. Un
soldat affreusement mutilé : plaies à l’avant – bras gauche, paroi
abdominale, cuisse droite, le genou gauche arraché.
La nuit est calme. Mais les rats sont parvenus à percer les parois de
notre abri s’y donnent rendez – vous et tiennent là des réunions bruyantes. Ces
réunions ne se terminent jamais sans une visite à notre garde – manger, auquel
ils font grand honneur.
6 février : Journée relativement calme. Au matin, un mitrailleur
est blessé par balle au niveau de la mâchoire. La moitié de celle-ci est
emportée, toutes les parties molles et le maxillaire déchiquetés : énorme
plaie béante laissant voir la base de la langue, la gorge. Scène
horrible ! Le malheureux, qui a aspiré son sang, asphyxie, devient vert,
se tord de douleur ! Impossible de le soulager, ni de le panser. Je suis
forcé de l’évacuer sans pansement, assis sur un brancard sur lequel on le
maintient avec peine
Je suis encore dans l’impression de cet affreux spectacle, lorsqu’un
coup de téléphone annonce qu’un de nos petits postes a été enfoncé par un obus.
Un homme est tué, ( fracture de la base du crâne). Un autre est atteint d’une
plaie contuse du cuir chevelu et d’une facture de l’avant – bras gauche. On ne
peut le ramener en radeau qu’au tomber du jour.
7 février : Il fait très calme, l’arrière seul est bombardé.
Quelques shrapnels sur la tranchée droite. Le soir, nous quittons sans regrets
et nous rentrons à Alveringem.
2 soldats sont encore blessés pendant la relève.
8 février : Notre bataillon devient pour 16 jours bataillon des
travailleurs. Il est cantonné à 5 km du village. Ce qui nous fait chaque jour
pour la visite une promenade de plus de 10 km, par des chemins qui sont des
bourbiers, à travers la pluie et le vent le plus souvent.
11 février : Ce soir, vers 7 heures, au moment du souper, nous
sommes appelés d'urgence chez le major. Les Allemands, paraît-il, nous
attaquent. Le bataillon va occuper les tranchées de 3e ligne, où nous nous
rendons également avec le major. Il pleut à torrents. Nous n'entendons rien.
Mais vers 7h, dit-on on a entendu des cantonnements occupés par nos compagnie
une canonnade violente suivie immédiatement d’une vive fusillade.
Nous attendons… L’alerte a fonctionné merveilleusement. Tout est sur
pied,... jusqu’aux travailleurs qui filent vers l’arrière. Nos hommes sont
plein d’entrain et serait heureux d’une action quelconque qui les changerait un
peu de la vie démoralisante des tranchés mais plus rien ne se produit. Vers 11h
du soir on nous annonce que l’alerte est finie et nous rejoignons nos
cantonnements.
13 février : Les communiqués sont très sobres et ne donnent pas de
détails sur l’action qui s’est déroulée avant-hier. Ils annoncent simplement
qu’une attaque allemande à été repoussée sur le front belge. Où ? On ne
sait au juste. À Ramskapelle, dit-on. Les Allemands ne seraient pas sortis de
leurs tranchées dans notre secteur ?
Ces jours derniers, bombardement sérieux de nos positions.
22 février : La neige fait son apparition et tombe en abondance
toute la matinée.
23 février : Cette nuit, il a gelé dur et dès le matin, la neige
se remet à tomber par rafales. Le canon tonne du côté de Steenstraat et
d’Ypres. Chez nous, il fait relativement calme. Depuis quelques temps, on parle
d’offensive allemande. Cette canonnade
intense que l’on entend au sud en serait peut-être le prélude ?
La période de travail du bataillon cesse aujourd’hui. Nous allons au
repos pour 4 jours avant de retourner aux tranchées.
Nous canonnons toujours Alveringem.
Un nouveau groupement est constitué pour le service de garde et de
travail. 3 compagnies seulement se rendront encore en 1e ligne, la 4e
assurent les travaux.
24 février : Une grande offensive allemande est declanchée du côté
de Verdun où les Français ont laissé prendre leur 1re ligne. Mais
d’après les renseignements reçus, ils se maintiennent derrière elle. L’action
continue et d’après les journaux, est très violente.
27 février : Ce soir, nous nous rendons aux tranchées de 1er
ligne. Le canon gronde d’une façon terrible du côté d’Ypres. Chez nous, il fait
très calme. Il n’y a que la fusillade habituelle.
28 février : Cette nuit, 2 blessés légers à soigner.
29 février : Aujourd’hui, un tué, fracture du crâne par balle et
un blessé léger.
Calme plat.
Il fait un temps délicieux et je fais une ronde pour photographier.
L’offensive allemande à Verdun se poursuit, mais sans donner des
résultats appréciables.
Mars 1916 :
2 mars : Le soir, nous sommes relevés par le 4e
bataillon et nous rentrons à Alveringem.
6 mars : Départ vers 6 heures pour le piquet à la ferme des 4
paratonnerres. J’assure le service de ce poste, ainsi que des 4 compagnies de
travailleurs, cantonnés sur la route jusqu’au Rabbelaer.
9 mars : Rien à noter, si ce n’est hier et aujourd’hui un
bombardement de la route près des « 4 paratonnerres » au moment du
passage du Decauville.
Les attaques contre Verdun continuent.
Rupture des relations diplomatiques entre l’Allemagne et le Portugal.
10 mars : Retour au cantonnement de repos à Alveringem.
14 mars : Le soir, relève du IIIe bataillon aux
tranchées de 1re ligne. Examen des aptitudes anti-gaz.
15 mars : Calme absolu.
16 mars : Bombardement de la tranchée et de Kappelhoek.
Temps clair photos.
17 mars : La nuit, un tué : balle dans la poitrine, un blessé
au pied.
Durant la journée, bombardement intermittent de la tranchée et des
petits postes. Un blessé léger au petit poste. Un tué (fracture du crâne)à la
tranchée. Le soir, nombreux shrapnels.
18 mars : Je compte partir en congé, mais mon titre de congé que
je dois prendre au bureau du colonel a été envoyé aux tranchées. Je vais
attendre et ne puis partir que demain.
19 mars : Départ. Je manque le tram mais trouve une voiture pour
me conduire à la gare d’Elzentap (?). Arrivée à Paris à 9 et demi du soir.
26 mars : Retour à Alveringem à 8h du soir. Rien de spécial
pendant mon absence.
27 mars : Le bataillon est au repos à Alveringem.
30 mars : Le soir, nous nous rendons aux tranchées de 1re
ligne. La garde précédente à été agitée, leur officier vient d’être tué par un
shrapnel.
À peine arrivé, un blessé.
Nous sommes bombardés jusque vers 11h. Une salve toutes les demi-heures.
31 mars : Cette nuit, un tué : fracture du crâne.
Aujourd’hui, 2 blessés : balle dans le mollet et éclat d’obus dans
la main.
Bombardement violent dans le secteur de la 6e D.A. et
bombardement presque continuel de la tranchée est et sud de Kapelhoek.
Le soir, obus toutes les demies heures.
Avril 1916 :
1er avril : Calme.
2 avril : Le soir, bombardement de 8 à 1 h. Un obus tous les quarts
d’heure.
3 avril : Calme. Relève sans incidents.
4 avril : repos à Alveringem.
7 avril : Le soir, je relève le poste du piquet à Froost in noord.
Je soigne le Lt VanCauwelaert et le capitaine Marsen, blessés en 1re
ligne.
8 avril : Calme. Photographie.
10 avril : La nuit, 2 tués et 4 blessés venant de la 1re
ligne.
Bombardement de la tranchée 19 , voisine du poste et de Froost in
Noord.
Temps superbe. Chaud.
11 avril : Le soir, retour à Alveringhem.
12 avril : Repos à Alveringhem.
15 avril : Le soir, relève en 1re ligne. A la relève,
on tiraille ferme. Une balle me passe entre les jambes. Un tué, une balle dans
la tête.
16 avril : Calme. Pas un coup de canon. Suis pris d’ abcès
dentaire.
19 avril : Mon abcès me faisant souffrir horriblement. Je dois rentrer
au cantonnement, je suis pris de fièvre et dois me mettre au lit.
25 avril : Je suis désigné pour l’hôpital de Petit-Fort-Philippe.
Je dois remettre mon départ, devant toujours garder le lit.
Mai 1916 :
8 mai : Départ pour Petit-Fort-Philippe.
3me Carnet :
Janvier 1917 :
15 janvier : Arrivée au 19e.
Visites.
16 janvier : Remise du service par le médecin chef de service du
13e.
Visite des cantonnements d’Avekapelle. Infirmerie réglementaire
installée à Wulpen.
Le régiment occupe le secteur de Beverdijk.
17 janvier : Visite des postes de secours du secteur : postes
modèles comprenant une place de pansement, un abri pour les médecins.
Le … du 2e …, le service médical est assuré par un médecin
et un auxiliaire. Les médecins du 3e ne sont pas encore arrivés.
18 janvier : Visite médicale du 2e bataillon.
19 janvier : On signale une recrudescence des maladies cutanées et
spécialement des maladies parasites. Mesures prises : visite générale des
bataillons à chaque repos.
Désinfection des cantonnements à la créoline 5%.
Communication d’une note relative aux mesures à prendre en cas de
diphtérie observée dans la population civile.
20 janvier : Rapport médical concernant le soldat Fraineux
(amblyopie de l’oeil gauche)
Tous les jours, visite des malades de l’infirmerie.
22 janvier : Arrivée des médecins du 3e.
Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 25
fiévreux
Hôpital : 18 fiévreux
29 janvier : Visite au médecin directeur de la C.A. et demande de
matériel. (Sacs d’ambulance, musettes, brancards).
Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : fiévreux
Hôpital : fiévreux
Février 1917 :
5 février : Visite des postes de secours.
Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 43 fiévreux
Hôpital : 7 fiévreux
19 février : Visite au médecin divisionnaire.
Rapport hebdomadaire :
Exempts de service : 60
fiévreux
Hôpital : 7
fiévreux
26 février : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 50
fiévreux
Hôpital :
7 fiévreux
Mars 1917 :
5 mars : Note limitant l’usage des voitures automobiles
d’ambulance.
Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 54
fiévreux
Hôpital : 8
fiévreux
12 mars : Visite de 3 « coloniaux ».
Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 49
fiévreux
Hôpital : 7
fiévreux
18 mars : Réglementation du service au cantonnement de Ghyvelde où
le régiment se rend demain
Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 66
fiévreux
Hôpital : 3
fiévreux
25 mars : Rapport sanitaire :
Exempts de service : 54
fiévreux
Hôpital : 9
fiévreux
Avril 1917 :
2 avril : Manœuvre de brigade.
Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 49
fiévreux
Hôpital : 3
fiévreux
9 avril : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 34
fiévreux
Hôpital : 4
fiévreux
16 avril : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 37
fiévreux
Hôpital : 8
fiévreux
22 avril : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 4
fiévreux
Exempts de service : 32
fiévreux
29 avril : Rapport médicaux concernant 5 soldats qui demandent
leur passage à une autre arme. Rapport hebdomadaire :
Hôpital 13
fiévreux
Exempts 27
fiévreux
Mai 1917 :
1er mai : Aux médecins du 1e , liste des
militaires de la compagnie atteints de bicones pustuleudes des membres,
paraissant avoir été provoquées.
2 mai : 1 cas de scarlatine à la 7ecompagnie,
évacuation et désinfection du cantonnement qu’elle occupe.
Rapport médical concernant un soldat qui demande son changement de
corps.
3 mai : Rapport médicaux concernant un soldat qui demande son
changement de corps.
Instruction relative à l’organisation du ss dans le S.S.N.
4 mai : Visite et rapport médical concernant 2 hommes qui demandent
leur changement de corps.
5 mai : Départ pour Westvleteren
6 mai : Visite des PS du secteur de Boezinge. Rapport médical
hebdomadaire :
Exempts 22
fiévreux
7 mai : Réglementation du service de santé du régiment dans le
secteur de Boezinge. 2 postes en 1e ligne, 2 en 2e, 2
postes de piquet et de relais, 1 poste régimentaire.
8 mai : Statistique des vénériens.
Le soir, relève au poste régimentaire.
9 mai : 2 blessés : une plaie au cuir chevelu et une plaie
pénétrante avant-bras gauche.
Rapport sur l’état des postes de secours du S.S.N. avec propositions.
11 mai : 3 blessés : 2 du 13e : plaie partie
supero-externe jambe gauche et plaie contuse fesse g.
1 des lance-grenades, 3e batterie : plaie contuse face
antre-jambe droite.
Envoi une note aux médecins et auxiliaire copie de la note relative au
traitement des intoxiqués par les gaz.
12 mai : Au médecin divisionnaire, liste ... des médecins ayant
été faits prisonniers. Au directeur medecin du CA, liste des brancardiers ayant
été faits prisonniers...
Le soir, retour au cantonnement.
13 mai : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital 7
fiévreux
Exempts de service 13 fiévreux
16 mai : Demande de lits télescopiques à la CA pour les postes de
secours. Demande du Dr Dewilde … avec rapport sur son état de santé au médecin
divisionnaire.
17 mai : Garde au poste de secours régimentaire.
18 mai : Vérification des réservoirs à Vermorel
19 mai : 1 blessé léger.
Examen des appareils à hyposulfite et Vermorel.
Réglementation du service dans le secteur de Lizerne.
20 mai : Le soir, retour au cantonnement de Westvleteren. Rapport
médical hebdomadaire :
Exempts de service 20
fiévreux
22 mai : Réponse au Cl de la 9e pour la note concernant
la demande des gourdes thermos.
25 mai : Garde au poste régimentaire. 4 blessés du 19e,
2 blessé du 13e.
27 mai : Vérification des vermorels et récipients du secteur
Lizerne. 10 récipients vides à faire remplir, 2 appareils hors d’usage et à
remplacer. 1 tué du 13e.
Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 17
fiévreux
3
fiévreux
Juin 1917 :
3 juin : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 4 fiévreux
9 juin : Retour de congé.
Régiment au repos à Krombeke.
10 juin : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts 20
fiévreux
17 juin : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 5 fiévreux
Rappel des mesures d’hygiène à prendre dans les cantonnements.
18 juin : Mutation du Dr Bessemans 2e et Dr Dewelde 3e
Revue du régiment à Krombeke.
19 juin : Dr Bessemans évacué sur la 1e
division.
3 rapports médicaux.
Visite du Lt d’Hariment sollicitant un congé de
repos (1 mois – fatigue). Départ du 3e bataillon pour Wulpem.
24 juin : Rapport hebdomadaire :
Hôpital 13
fiévreux
Exempts 7
fiévreux
30 juin : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts 30 fiévreux
Juillet 1917 :
3 juillet : Visite générale au 1e bataillon.
4 juillet : Visite générale au 2e bataillon.
5 juillet : Visite générale au 3e bataillon.
7 juillet : Visite des cantonnements Andres Balinghem Ardres.
8 juillet : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 22 fiévreux
10 juillet : visite de 4 hommes envoyés par le 1e.
12 juillet : Réunion des médecins pour communication de
l’instruction relative aux postes de secours I.G.S.S.
Demande d’un train à roue en échange du train de roue à la C.A. du
régiment en mauvais état.
14 juillet : Au médecin divisionnaire, rapport sur le
fonctionnement du service au cantonnement d’Andre – Ardre.
Aux médecins, transmis note relative aux tuberculeux.
15 juillet : Exempts de service : 28 fiévreux
Hôpital : 5
fiévreux
9
blessés
Changement de cantonnement : Ardres – Bourbourg, une quinzaine
d’éclopes. Rapport médical hebdomadaire :
16 juillet : Instruction relative au service sanitaire au
cantonnement de Bourbourg.
Rappel concernant le rapport hebdomadaire.
17 juillet : Visites des cantonnements.
19 Juillet : Instruction concernant le fonctionnement du service
sanitaire en campagne.
21 juillet : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 12
fiévreux
24 juillet : Rapport médical pour le soldat Blondri demandant un
changement de corps.
25 juillet : Changement de cantonnement : Bourbourg – Ardres.
Quelques malades dans l’ambulance, une dizaine d’éclopés.
26 juillet : Instructions réglant le service sanitaire au
cantonnements Ardres – andres. Rapport médical concernant le soldat
Deveux : changement de corps.
3 hommes envoyés par le 1er.
27 juillet : visite des cantonnements.
28 juillet : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 9
fiévreux
29 juillet : Mutation du brancardier Wauters qui rejoint le CA et
est remplacé par le brancardier Delacourt.
Demande d’un médecin auxiliaire en remplacement.
30 juillet : rapport médicaux pour les soldats Corsin, Desined et
Lebrun demandant leur changement de corps.
Août 1917 :
2 août : Rapport médical pour le soldat Blaumi demandant son
changement de corps.
3 août : Aux médecins du régiment, instructions relatives à leur
brancardier délégué.
4 août : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 4
fiévreux
Hôpital : 21 fiévreux
13
blessés
Au médecin chef de la CA, mutation du brancardier Èmile.
6 août : Rapport concernant 4 hommes qui demandent un changement
de corps.
11 août : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 5
fiévreux
11
blessés
12 août : Le médecin chef de la CA demande du matériel nécessaire
à la réparation des trains de roue.
Le brancardier Fubry rejoint la 8ecompagnie, sortant de
l’Océan : mutation annoncée aux médecins et au médecin chef de la CA.
13 août : Inspection des masques anti-gaz et des sachets de
pansement du régiment.
Demande de remplacement des objets en mauvais état au médecin
directeur.
Rapport au colonel concernant cette inspection.
14 août : Rapport concernant les brancardiers au médecin chef de
la CA (qualités physiques que doivent réunir les brancardiers d’ici).
16 août : Rapport médical concernant 3 hommes demandant leur
changement de corps.
Visite du Ct Mertens demandant un congé pour cure à Vichy.
17 août : Visite du cantonnement du II bataillon pour mesures à
prendre contre parasites.
18 août : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 5 fiévreux
6
blessés
20 août : Cours de brancardier aux ambulanciers du régiment.
21-22-23-24 août : Cours de brancardier.
25 août : Au médecin directeur de la CA. Etat des brancardiers
évacués du 25 juillet au 25 août.
Cours de brancardier.
26 août : Demande d’équipement supplémentaire pour les nouveaux
brancardiers.
Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 29
fiévreux
Hôpital : 5 fiévreux
10
blessés
Septembre 1917 :
2 septembre : Congé.
Rapport médical hebdomadaire :
8
blessés
9 septembre : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 2 fiévreux
8
blessés
15 septembre : retour de congé.
16 septembre : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 3
fiévreux
7
blessés
blessés de guerre 1
17 septembre : Demande de sachets de pansements, de brancards, de
matériel sanitaire et de brassards pour les ...
23 septembre : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 4
fiévreux
12
blessés
Brassards médecins
24 septembre : Changement de cantonnement : Ardres –
Gravelines 24km, une vingtaine d’éclopés.
30 septembre : Rapport médical hebdomadaire :
Octobre 1917 :
7 octobre : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 3
fiévreux
14 octobre : Rapport médical hebdomadaire :
Hôpital : 4
fiévreux
21 octobre : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 22
fiévreux
Hôpital : 2
fiévreux
28 octobre : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 22
fiévreux
Hôpital : 1
fiévreux
Novembre 1917 :
4 novembre : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 11
fiévreux
Hôpital : 2
fiévreux
3
blessés
Relevé du matériel sanitaire.
5 novembre : Visite d’un homme demandant son passage à la colonie.
Cours de brancardiers aux musiciens
9 novembre : demande de sachets de pansements.
10 novembre : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 19
fiévreux
Hôpital : 7
fiévreux
7
blessés
Au médecin divisionnaire, rapport sur un homme évacué pour lésions
cutanées apparues après s’être lavé les mains dans un trou d’obus.
11 novembre : rapport sur l’inspection des masques anti-gaz et
demande de remplacement des masques en mauvais état. (au chef de corps)
12 novembre : Visite d’un homme demandant son changement de corps.
13 novembre : relevé des troupes françaises dans le secteur par le
13e de ligne.
14 novembre : Instruction pour le fonctionnement des services
sanitaire au cantonnement de Westvleteren où le régiment arrive ce jour.
15 novembre : Au médecin de bataillon : prescription de la théorie
sur les gaz, envoi de leur matériel (brancards, train de roue) dans le secteur
16 novembre : Visite du sous-secteur occupé par le régiment.
Établissement des services sanitaires et postes de relai.
17 novembre : Instructions aux médecins de Bataillon relatives au
fonctionnement des services sanitaire dans le secteur.
Demande d’appareils Draespe et Vermord au médecin divisionnaire pour le
sous-secteur du régiment. Rapport sur les cantonnements du régiment, Demande de
sachets de pansement.
19 novembre : Demande de matériel sanitaire et sachets de
pansement. Visite (pour changement de corps.)
21 novembre : Visite au médecin divisionnaire.
Demande relative au chauffage et éclairage des postes de secours.
Exposé de l’organisation du service sanitaire dans le secteur occupé
par le régiment.
22 novembre : Relève au poste de soin régimentaire de.....
25 novembre : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 17
fiévreux
Hôpital : 5
fiévreux
11
blessés
blessés de guerre 6
tués 2
28 novembre : Attaque du poste de l’Epernou (?) 30 blessés, 2 tués
ramenés. Brancardier Wery de la 5e blessé grièvement, infirmier
Meunier 5e tué.
29 novembre : 25 blessés, 12 tués.
Décembre 1917 :`
1er décembre : retour au cantonnement à Westvleteren.
2 décembre : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 30
fiévreux
Hôpital : 10
fiévreux
18
blessés
3 décembre : Demande de matériel sanitaire (musettes).
Relevé du matériel sanitaire des régiments.
État des mutations survenues dans le personnel sanitaire durant le mois
de novembre.
6 décembre : congé.
16 décembre : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 44
fiévreux
Hôpital : 8
fiévreux
15
blessés
blessés de guerre 1
21 décembre : retour de congé.
Régiment installé à Ostvleeteren.
L’ordre de bataille primitif a été repris dans le secteur (régiments en
profondeur).
22 décembre : Réponse à diverses notes en litige.
23 décembre : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 77
fiévreux
Hôpital : 4
fiévreux
21
blessés
blessés de guerre 10
24 décembre : Garde au poste de secours régimentaire jusqu’au 2
janvier. Note aux médecins de Bataillon concernant les mesures à prendre contre
la pédiculose.
28 décembre : Propositions pour la répartition des appareils
Verorel dans le secteur.
29 décembre : Rapport sur l’état du matériel anti-gaz du secteur
de Hoekje.
30 décembre : Rapport médical hebdomadaire :
Exempts de service : 17
fiévreux
Hôpital : 6
fiévreux
9
blessés
31 décembre : Au médecin divisionnaire, état des mutations
survenues parmi le personnel sanitaire pendant le mois de décembre.
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