Médecins de la Grande Guerre
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Les civils dans la
Guerre 14-18 Le Rôle des Cheminots dans la
Bataille de Liège Louis MARAITE Aperçu du chapitre I Le sabotage des lignes de
l’Allemagne vers Liège Les liens ferroviaires entre Liège et l’Allemagne en 1913 Cette carte reflète le
réseau autour de Liège en 1932. Il y a, en 1914, bien plus de lignes
qu’aujourd’hui qui reliaient la région liégeoise et Aix-la-Chapelle. Le réseau belge
est d’ailleurs alors bien plus dense encore qu’aujourd’hui : il compte 4602 km
de voies (pour 3592 aujourd’hui), 3012 gares et points d’arrêts (pour 545
aujourd’hui). Il transporte 224 millions de passagers (pour …223 millions aujourd’hui)
et 87 millions de tonnes de marchandises (pour 34 aujourd’hui). Le parc est de
4500 locomotives (1200 aujourd’hui mais les locos d’il y a 100 ans roulaient
beaucoup moins). L’on estime à 1500 le nombre de voitures automobiles sur les
routes belges en 1913… Le réseau est donc dense entre Liège et l’Allemagne. La ligne 37, Liège-Verviers-Aix-la-Chapelle, a été
ouverte jusqu’à Aix en 1843. L’Etat belge était même actionnaire de la Société
des chemins de fer rhénans. La Belgique était à la pointe de l’industrie
ferroviaire grâce à Cockerill qui fabriquait les locomotives à Seraing et les
vendait dès 1839 en Allemagne. C’est la ligne principale encore aujourd’hui,
dédoublée de la ligne à grande vitesse LG3 via le tunnel de Soumagne. La Ligne 44/44A relie Pepinster, sur la L37, à Spa (44) puis
à Stavelot (44A) où elle rejoint la Vennbahn puis Trois-Ponts où elle aborde la Ligne 42. La Ligne 44 est
encore en activité aujourd’hui jusque Spa-Geronstère.
En 1919, le général Leman est venu à Spa avec la voiture de l’Armistice via
cette ligne. La Ligne 45, c’est une partie de la « Vennbahn, qui relie Trois-Ponts à
Malmedy-Waimes, et puis l’Allemagne via Montjoie. La Vennbahn,
c’est aussi les lignes 46, 47, 48 et 49 qui relient Aix-la-Chapelle au Grand-Duché de Luxembourg via Trois-Vierges, tout en
permettant de desservir Saint-Vith. Pour ce qui est du réseau belge
aujourd’hui, ces lignes n’existent plus. La ligne 42, Comblain-au-Pont-Rivage-Gouvy
vers Luxembourg où elle est reliée à la Vennbahn.
C’est la ligne de l’Amblève. Toujours active aujourd’hui. La ligne 43 relie Liège à Marloie
où elle rejoint la ligne 162 Namur-Luxembourg. Toujours active aujourd’hui.
C’est la ligne de l’Ourthe, Angleur, Tilff, Esneux, Barvaux, Marche… Les lignes 125 et 125 A sont les lignes de la Meuse qui relient Liège
à Namur en amont de la Cité ardente. Partie de la « dorsale wallonne
ferroviaire ». La ligne 125 en rive gauche, la 125 A en rive droite jusque
Flémalle. La ligne 40 relie Liège à Visé et Maestricht en aval de
Liège. Toujours active aujourd’hui. La Ligne 38 reliait Liège à Aix-la-Chapelle via Chénée,
Battice, Hombourg et Gemmenich, avec une ligne
annexe, la 38A, entre Verviers et Battice via Dison. La ligne 38 est un Ravel
(piste cyclable, mode de transport doux, Réseau autonome des Voies Lentes). La ligne 39 fut ouverte en 1872, desservant les mines de
Plombières qui devint un nœud ferroviaire en 1895. En effet, elle reliait les
villes de Liège (L38), Aix (39), Welkenraedt (39) et La Calamine (39a). Elle
fut désaffectée en 1952. Aujourd’hui transformée en Ravel. La ligne 49 reliait Welkenraedt à Eupen et Eupen à Raeren
où elle rejoint la ligne entre Aix et le Grand-Duché
(Vennbahn). La liaison entre Eupen et Raeren est
maintenue notamment pour d’éventuelles dessertes marchandises d’un raccordement
dans cette dernière gare. Le tronçon d’Eupen à Raeren FRE (frontière allemande,
en direction de Walheim) est préservé par la Communauté
germanophone et est toujours considéré comme « ligne principale » (!).
La voie est également sauvegardée en Allemagne. La mobilité par le rail, la stratégie allemande Les Allemands débutent la construction de la ligne 24, entre l’Allemagne et Anvers, dès 1915. (Photo Club des Chercheurs et Correspondants Cheminots de Visé, http://cccc-vise.over-blog.com/ ) On le constate donc : en 1914, les liens ferroviaires entre l’Allemagne et Liège sont intenses. Il eut pu encore avoir une importante liaison supplémentaire : les Allemands tentaient depuis des années de convaincre les Belges de construire ce qui deviendra la ligne 24 reliant l’Allemagne et Anvers via Gemmenich, le viaduc de Moresnet, Fourons (le tunnel de Veurs), Visé (lien avec la ligne 40), Bassenge, Tongres (lien avec la ligne 34 Liège-Anvers) puis à travers le Limbourg. La Belgique à peine occupée, les Allemands entamèrent de suite la construction de cette ligne qu’ils réalisèrent à marche forcée en y affectant des prisonniers russes (entre 1000 et 3000 hommes, traités comme des esclaves, dont le père de l’actuel conseil communal de Liège, Raphaël Miklatski), des travailleurs allemands et des civils belges (8.000), au total 12.000 personnes encadrées par 2.000 soldats allemands. Elle fut terminée en 1918. En fait, si les Allemands avaient opté pour le plan Schlieffen, c’est justement parce que cette mobilité était possible via le chemin de fer. On le voit, les troupes allemandes pouvaient rejoindre Liège via les lignes 37, 38, 39 et toutes les lignes qui ont constitué la Vennbahn, en rejoignant les lignes 42 ou 43, au gré des besoins et au gré des sabotages. Les Allemands rêvent de rejoindre les Champs-Elysées en s’arrêtant le moins possible à Liège. (PG). L’Allemagne a préparé ses chemins de fer pour la guerre Le livre « La Guerre Mondiale » est édité en 1928 par la Maison d’Editions S. Mittler & Fils de Berlin sur demande des Archives du Reich. Le livre, consacré aux « Chemins de fer allemands en guerre », est en trois tomes : l’un est consacré au front de l’Ouest, le début du conflit, l’envahissement de la Belgique, la Bataille de la Marne,… Le deuxième est consacré au Front de l’Est. Et le troisième est une compilation de cartes et dessins. L’ensemble est vendu par internet pour …450 €. J’ai suggéré au Centre de documentation de la SNCB de l’acheter. C’est un élément capital pour mesurer la préparation allemande. La SNCB l’a directement acquis, dans sa réédition (2004). Elle avait pourtant, dans ses étagères, un autre ouvrage allemand, du même éditeur : « La remise en état des lignes de chemins de fer sur le front de l’ouest » de Wilhelm Kretzschmann. Ce livre-là est encore plus complet, et pour causes : il date de 1922 et son auteur a été, pendant la guerre, Membre de l’Etat-major du chef des chemins de fer sur le terrain militaire (Feldeisenbahnwesens). Le plan Schlieffen : la 1re armée (320.000 hommes) doit franchir la Meuse au nord de Liège, la 2e armée (260.000 hommes doit passer entre Liège et Namur). (Plan webmatters/carnets de route). Ce qu’il ressort d’entrée de la lecture de ces deux livres (imprimés en allemand en caractères gothiques) est la grande préparation, à de grands mouvements militaires, des chemins de fer allemands. En 1913, le rail en Allemagne qui ne s’appelle pas encore « Deutsche Bahn » (celle-ci ne fut créée qu’en 1949), ce sont 29.520 locos, 689.1190 wagons, 65.180 voitures, 61.404 km de réseau ferré. Et, pour toutes les compagnies ferroviaires réunies, 786.465 agents ! Tout un plan militaire est étudié, modifié, implémenté dans le fonctionnement ferroviaire. D’abord avec des trains devant rouler à la moyenne de 30 km/h. En 1913, l’Oberleutnant Wilhelm Groener, qui deviendra le chef des chemins de fer allemands dès le début de la guerre, recalcule tout le plan pour imposer 40 km/h de moyenne, sachant qu’un tiers du temps de déplacement se passe… à l’arrêt. Tout est prêt : dès le début du conflit, des trains de 110 essieux doivent filer vers le front, une loco pour 50 wagons, de 50 à 60 trains par jour. L’ordre de déploiement est clairement arrêté : d’abord la cavalerie puis l’infanterie, puis l’artillerie légère et enfin l’artillerie lourde. Un corps d’armée se déplace dans 140 trains et … 6010 wagons : 170 voitures pour les officiers, 965 voitures pour la troupe, 2960 wagons pour les chevaux et 1915 wagons pour le matériel. Un corps de réserve a besoin de 85 trains tandis qu’une division de cavalerie nécessite 31 trains (1175 wagons) pour rejoindre la zone de combats. Tout cela n’est pas seulement de la théorie : les heures de départ des trains, leur composition, leur itinéraire, leur gare d’arrivée, les horaires précis, tout se retrouve dans des tableaux. La discipline allemande… et militaire. Groener, pour cette organisation exceptionnelle qui le verra accéder au grade de Général et devenir le chef du Grand Etat Major général de l’Armée allemande, sera décoré de la médaille « Pour le Mérite », la plus haute distinction militaire allemande, celle-là même que recevra le Général Eric Ludendorff pour sa soi-disant victoire à la « Bataille de Liège ». En novembre 18, avec Hindenburg, Groener va demander à l’Empereur Guillaume II d’abdiquer, ce qu’il fera le 9 novembre (à Spa). Deux jours plus tard, c’est l’Armistice. Plus tard, Groener deviendra Ministre des Transports puis Ministre de la Défense et Ministre de l’Intérieur. Il s’oppose aux nazis au Reichstag. Pris à parti par Goering en 1932, il démissionne : à 65 ans, sa santé défaillante ne lui permet pas de faire… front. Et son complice de 1918, Hindenburg, devenu Président, ne le soutient pas. La montée vers le nazisme vient de perdre un opposant de poids. Général-major Groener, à la tête des chemins de fer allemands pendant la guerre. (PG) Mais revenons aux trains de guerre allemands dont la composition est en réalité fixée en fonction des capacités de charge des ponts sur le Rhin à Mainz et à Cologne. Les trains ne peuvent y passer en pleine composition et doivent être recomposés. Tout le plan prévoit aussi l’approvisionnement des troupes en denrées alimentaires et des locomotives en charbon et en eau. A côté des trains de troupes circulent dès lors aussi des trains qui doivent soutenir l’économie de guerre. Et, en cette fin juillet 1914, l’Allemagne est confrontée à un drôle de chassé-croisé : alors que la mobilisation est décrétée, que les soldats ont cinq jours pour rejoindre leur caserne en train et que les trains de troupe rejoignent les frontières et les futures lignes de front, les touristes des stations balnéaires rentrent en toute hâte chez eux. De la mer du nord, entre le 28 et le 31 juillet, 235 trains rentrent à toute vapeur dans le centre du pays. Le 28 juillet, l’Allemagne décrète la surveillance des trains, le rappel des troupes, la mobilisation générale ; le 29, elle impose la protection armée des ouvrages d’art sur les lignes vers les pays voisins ; le 30, elle fait part du risque de guerre et, le 31, ferme les frontières avec la Belgique, la France, le Luxembourg et la Russie. Les touristes ont intérêt à être rentrés : dès le 31, tout le fret ferroviaire allemand est arrêté et, le 1er aout à 17 h, le réseau allemand des zones frontalières est intégralement affecté au transport de troupes. Le 1er août à 17 h, c’est aussi le moment où la direction générale des chemins de fer allemands passe des mains d’un civil, à celles d’un militaire. Groener est à la manœuvre : il déplacera, en une semaine, via 2.800 trains, 2.070.000 hommes, 860.000 chevaux et 400.000 tonnes de matériel. Sur la semaine du 23 juillet au 8 août, l’armée croisant les trains de retour des touristes, 11.100 trains ont sillonné l’Allemagne, emmenant 3.120.000 passagers ! Les statisticiens allemands comparent avec le déplacement ferroviaire de la guerre de 1870. Quarante-quatre ans plus tôt, l’Allemagne avait déplacé, par 1300 trains, 548.000 hommes et 157.300 chevaux. En 1914, 1140 trains, empruntant 15 ponts sur le Rhin amènent les troupes, six brigades d’infanterie, les brigades de réserve, via Cologne dans la zone frontalière autour d’Aix-la-Chapelle. Et à Herbesthal. Le plan Schlieffen est dans les starting-blocks : l’attaque de la France passe par la Belgique et le goulot de la Meuse. La Belgique mobilise mais espère toujours rester neutre La Belgique mobilise aussi même si, jusqu’au jour de l’ultimatum le 2 août, elle pense encore pouvoir rester, comme les voisins hollandais, en dehors du conflit. Le ministre de la guerre De Broqueville lance, dès le 27 juillet, les préparatifs de la mobilisation : 2100 wagons pour le transport de troupes, 240 voitures pour le transport de blessés et 98 trains sont prêts. Ils ne suffiront pas. 6000 wagons supplémentaires doivent être acheminés. Les seuls déplacements de troupes nécessitent 210 trains, d’abord pour ramener les miliciens et soldats dans leur garnison puis pour les acheminer jusqu’aux positions de l’armée de campagne ou des troupes des forts. 317 trains spéciaux sont ajoutés aux lignes régulières renforcées. Mais l’imprécision belge contraste avec la rigueur allemande. Le 2 août, les échanges économiques entre la Belgique et l’Allemagne s’arrêtent : les livraisons belges d’œufs, de lait, de charbon et de… munitions sont stoppées. Les Allemands se retournent vers leur marché intérieur. C’est qu’il faut aussi nourrir les troupes… Le 3 août, le trafic régulier intérieur belge est interrompu progressivement. Le 3 août, un premier train pour aller chercher les blessés quitte Bruxelles-Nord pour Liège. Il est rempli… d’Allemands, chassés de Bruxelles et renvoyés chez eux. Les stratèges militaires allemands, eux, ont préparé leur guerre de mouvement en misant à fond sur le rail qui est la colonne vertébrale de leur mobilité. 26.000 cheminots allemands forment d’ailleurs le contingent du génie ferroviaire. Ils sont répartis entre équipes de 275 hommes et onze officiers. Ils sont prêts à intervenir sur les lignes : 12 trains attendent à l’arrière, chargés chacun de 22 km de rails, des traverses, de ponts préconstruits, de charpentes de bois pour les réparations. 460 km de voie à 60 cm d’écartement sont également prêts à suppléer les coupures de lignes traditionnelles. Des gares provisoires, « Sammelbahnhöffe », sont installées par le génie le plus près possible du front. Afin d’accueillir au mieux le plus grand nombre de trains. Aix-la-Chapelle et Herbesthal sont des points de rassemblement importants. Herbesthal (aujourd’hui partie de la commune belge de Lontzen) est alors en territoire allemand et nul doute que l’Allemagne croit qu’elle va foncer jusque Bruxelles et Paris par Liège et Namur sans plus de résistance que n’en ont opposée les Luxembourgeois. Le 2 août, à 0h45, alors que la guerre n’est même pas encore déclarée, l’armée allemande est déjà à Luxembourg-Ville : elle a pris possession de la ligne de chemin de fer entière et sans dégât. Sans résistance aucune. Pourquoi en serait-il autrement à Liège ou à Bruxelles (que les Allemands atteindront finalement le 20 août) ? D’Ostende à Herbesthal avec Stefan
Zweig, témoin de l’entrée en guerre Herbesthal. Le
témoignage de Stefan Zweig dans son « Le Monde d’Hier » (Edition Bermann-Fischer , Stockholm – 1941 ; Version française Editions
Belfond 1982) est là. Superbe. L’écrivain-journaliste autrichien est en
vacances au Coq, près d’Ostende. Il comptait, comme chaque année, y passer deux
semaines avant de rejoindre la maison de son ami Emile Verhaeren. C’est
l’insouciance. « Les gens heureux de leurs congés étaient allongés sur
la plage, sous leurs tentes bariolées, ou se baignaient ; les enfants lâchaient
des cerfs-volants ; devant les cafés, les jeunes gens dansaient sur la digue.
Toutes les nations se trouvaient rassemblées en paix, on entendait beaucoup
parler allemand – en particulier car, ainsi que tous les ans, c’était sur
la côte belge que la Rhénanie, toute proche, envoyait le plus volontiers ses
vacanciers d’été. Le seul trouble était causé par les petits marchands de journaux
qui hurlaient, pour mieux vendre leur marchandise, les manchettes menaçantes
des feuilles parisiennes. « L’Autriche provoque la Russie », « L’Allemagne
prépare la mobilisation ». On voyait s’assombrir les visages des gens
qui achetaient les journaux mais ce n’était jamais que pour quelques minutes.
Après tout, nous connaissions depuis des années ces conflits diplomatiques.
(…) Cependant les nouvelles les plus graves s’accumulaient (..). Je me
rendais tous les jours à Ostende par le petit train électrique pour être plus
à portée des nouvelles ; et elles étaient toujours pires (NDA : il
s’agit de la ligne du « Chemin de fer Electrique d’Ostende-Blankenberge et
Extensions » groupe (Empain) qui sera plus tard
intégrée au réseau de la SNCV). Les gens se baignaient encore, et les hôtels
étaient encore pleins, les vacanciers se promenaient encore en foule sur la
digue, riant et bavardant. Mais, pour la première fois, un élément nouveau
s’ajouta au tableau. Brusquement, on vit surgir des soldats belges qui, en
temps ordinaire, ne venaient jamais sur la plage. Les mitrailleuses étaient – particularité
curieuse de l’armée belge – trainées par
des chiens sur de petites voitures ». Stephan Zweig, en train d’Ostende à Vienne le 31 juillet 1914, via Liège, Verviers et Herbesthal. (PG) Zweig est alors attablé
avec ses amis belges autour du dramaturge Fernand Crommelynck, après avoir
passé l’après-midi chez James Ensor. Lors de cette visite passa à nouveau une
troupe de soldats avec la mitrailleuse tirée par un chien. Mitrailleuse tirée par les chiens, spécificité belge. (PG) « L’un d’entre nous se
leva et caressa la bête, au grand dépit de l’officier, qui craignait que cette
caresse à un objet guerrier ne compromît la dignité de l’institution militaire.
Pourquoi ces stupides marches et contres-marches ? grogna quelqu’un dans notre groupe.
Mais un autre répondit tout excité : Il faut bien prendre ses précautions. Cela
veut dire qu’en cas de guerre les Allemands ont l’intention de faire une percée
en passant par chez nous. Impossible ! dis-je avec une conviction
sincère, car dans le vieux monde d’alors, on croyait encore en la sainteté des
traités. Si quelque chose devait se passer et si les Français et les Allemands
s’exterminaient jusqu’au dernier, vous autres Belges seriez bien tranquillement
à couvert. (..) Il me semblait tout à fait absurde qu’une armée se tint sur la
frontière, prête à l’invasion, pendant qu’ici des milliers et des dizaines de
milliers d’Allemands jouissaient, détendus et joyeux, de l’hospitalité de ce
petit pays neutre. C’est un non-sens. Vous pouvez me pendre
à cette lanterne si les Allemands entrent en Belgique ! Je suis encore
reconnaissant à mes amis de ne pas m’avoir pris au mot ». La situation s’empira. Les gens
quittèrent les hôtels, les trains furent pris d’assaut. « Et moi aussi, dès que
j’appris la déclaration de guerre de l’Autriche à la Serbie, je retins une
place, et il n’était que temps. Car cet express d’Ostende fut le dernier train
à quitter la Belgique pour l’Allemagne ». La suite dans le livre de Monsieur Maraite Le Rôle des Cheminots dans la Bataille de Liège |