Médecins de la Grande Guerre
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Très beau travail de
Jeannine Wallet, Vincent Loisel et Didier Lherbier
parut dans le Bulletin n° 90 de l’Association Culturelle et Historique de
Faches-Thumesnil La Bataille de Faches, octobre 1914 Le 4 octobre 1914, les premiers coups de feu du siège de Lille claquent à Faches-Thumesnil. Nous ne pouvons comprendre ces combats, deux mois après la déclaration de guerre, qu'en les situant dans les opérations militaires de l'été 1914 et en décrivant le vécu des habitants de l'agglomération lilloise pendant cette période. Les livres d'histoire passent sous silence les combats autour de Lille qui résiste du 4 au 12 octobre. Lille : Grand Garde, construit en 1717, restaurée en 1886. Bibliothèque municipale de Lille 44184.planche 50 « La victoire de la
Marne, les batailles de Picardie et d'Artois captaient l'attention publique et
éclipsaient les évènements du Nord. Chaque belligérant enflait ses succès et
cachait tout le reste : la vérité pouvait devenir un crime contre l'intérêt
national. Les Allemands ont donc fait connaître en Allemagne la bataille de
Douai et la prise de Lille ; en France, le pouvoir civil, grand responsable, a
étouffé l'affaire. Le front s'est immobilisé dès octobre 1914, la
barrière s'est fermée sur les régions envahies et a intercepté les bruits qui
auraient pu en venir.[1] »
Descamps est polémique, son ouvrage, c'est de bon ton, fait porter le
poids des erreurs par les politiques, évitant ainsi de mettre cause les
militaires. A 16h30, le 1er août, le décret de mobilisation est lu par
le maire de Lille, Charles Delesalle, sur le perron de la Grand-Garde
devant une foule silencieuse. Dans chaque commune, le tocsin retentit. Le même
jour les affiches de mobilisation apparaissent, chaque mairie en détient, il
suffit juste d'y porter la date. Au soir du 3, le gouvernement français reçoit
la déclaration de guerre de l'Allemagne. En réponse à l'invasion de la Belgique
et du Luxembourg le 4, les français lancent une offensive pour prendre pied en
Alsace et en Lorraine occupées depuis la guerre de 1870. Mais cette dernière
est repoussée au nord alors qu'au sud les Français atteignent mi-septembre
Saint-Dié. Malgré de violents combats la ligne de front va rester inchangée
jusque 1918. L'armée belge ralentit l'invasion allemande mais, le 23 août, les armées
françaises et anglaises se replient. L'avance allemande ne sera stoppée qu'à
Guise. La bataille de la Marne qui suit rétablit la situation, Paris n'est plus
menacé. Chacun des belligérants cherche à éviter l'enveloppement par le nord.
Les combats confus qui s'ensuivent dans les plaines du nord de la France font remonter
les troupes dans le cadre d'un gigantesque mouvement qui sera connu comme « la
course à la mer. » Lille n'est pas dans la zone
des combats en août 1914, l'invasion ennemie se faisant selon un axe Bruxelles-Paris,
au sud d'une ligne Valenciennes-Cambrai. Mais Faches-Thumesnil, comme toutes
les communes situées dans le périmètre de défense, vit au rythme des inquiétudes
de la métropole. L'arrivée de réfugiés belges dès le début août inquiète la
population. Toutefois, certains quartiers sont pavoisés et dans les rues de Wazemmes on marchait sous une véritable voute fleurie aux
couleurs françaises, belges, anglaises et russes. Dès 1889 la place de Lille a été déclassée en troisième catégorie. Ses
fortifications sont anciennes et noyées dans un tissu urbain très dense. Son
maire, Charles Delesalle, souhaite épargner à ses administrés les dommages des
combats autour et dans la ville et la déclare, dès le 1er aout,
ville ouverte, elle ne sera donc pas défendue malgré l'avis du préfet Trépont. L'agglomération lilloise est défendue par huit
forts et treize batteries, c'est une importante base logistique en raison de
ses industries et de ses dépôts d'armes. A la date du 15 août, Lille dispose
ainsi de 446 canons approvisionnés à 240 coups. Dans la semaine qui suit, plus
de la moitié de ces canons et la totalité des munitions sont retirés pour être affectés
aux armées en campagne. La ville, quasi vide de troupes, s'organise cependant
pour sa défense. En début de mois une réunion en préfecture avec les
industriels a organisé le maintien de la production et le paiement des
salaires. Les institutions scolaires sont transformées en hôpitaux auxiliaires,
les cafés doivent fermer à vingt deux heures, les automobiles sont réquisitionnées
et six cent ouvriers sont chargés de remettre en état les remparts pour la
défense. Dans les armées slaves et germaniques, un uhlan est un cavalier armé d’une lance, similaire au lancier français. Le 24 août l'état major de la région militaire et les administrations
quittent Lille. Jusqu'au début d'octobre, la ville va vivre une période
curieuse : elle est vide de troupes mais des soldats français, anglais et même
allemands qui patrouillent aux alentours y pénètrent de temps en temps. Ainsi,
le 23 août, douze uhlans sont capturés à Wattrelos, quatre autres le lendemain
au Croisé Laroche. Le 2 septembre un détachement ennemi occupe l'hôtel de ville
de Lille puis se retire. Le 5 septembre une patrouille allemandes pille le
magasin de tabacs et liqueurs de Seclin, le 10 la bijouterie. Le 11, un groupe
d’uhlans entre dans Lille puis s'en va après avoir demandé sa route. Et le 12,
deux officiers allemands venus en voiture boivent une bière sur la place de
Lille sans être inquiétés ! Durant la première quinzaine de septembre les
canons et les stocks du fort de Seclin sont déménagés. Le 16 septembre,
le 8ème régiment d'infanterie territoriale de Dunkerque est déposé
autour de Lille avec pour mission de protéger les voies ferrées, Le sergent
Paul Vershave écrit : « Que de bonnes
journées j'ai passé au pont de l'Amiteuse. Le service était un peu fatiguant
pour les sentinelles parce que les effectifs étaient restreints… de temps en
temps un brave passant leur faisait apporter un pot de bière, la
population était fort sympathique et nous apportait le café deux à trois
fois le matin. » Orchies après l’incendie. (Bundesarchiv. Bild 146-2008-0078) Les combats se rapprochent ; le 25 septembre, Orchies est incendié à
titre de représailles et une partie de sa population vient se réfugier à Lille.
Douai tombe le 1er octobre. Après la bataille de la Marne et avec le
développement de la « course à la mer », Lille redevient un enjeu
militaire et, malgré les efforts de son maire qui veut toujours la maintenir
hors du conflit, le général Castelnau, sur ordre de Joffre, est chargé de tenir
la ville à tout prix. Le 3
octobre, Lille est réoccupée par un détachement de territoriaux qui occupait
une position au sud de Tournai et un régiment de cavalerie[2]. Ce
même jour, le maire de Lille fait afficher une proclamation invitant ses
concitoyens au calme et contenant cette phrase significative : « la
proximité de l'ennemi peut faire redouter son arrivée prochaine dans
notre ville. » Les troupes
les plus proches sont celles du chef de bataillon Caron (5ème RIT) à
Tournai et celles du chef d'escadron Sontag à Orchies. Ce dernier a pour ordre
de se replier sur Lille en passant par Pont à Marcq et
Seclin. Les diverses compagnies du 8ème territorial du commandant Biguet passent la nuit à Pont à Marcq.
Quant aux troupes de Caron, attaquées à Tournai, elles se replient sur Lille
qu'elles atteignent entre 20h00 et minuit, protégées par des spahis"[3] et
des chasseurs à cheval. Le 2 octobre, vers 06h00, l'artillerie et les voitures
de Sontag arrivent à Ronchin après être passées à la Pissatière
à Vendeville. Sontag, victime d'un accident de
voiture est remplacé par le chef de bataillon Biguet qui remonte vers Lille par Templemars
et rejoint le RN25 au passage à niveau de Wattignies. Positions
françaises le 3 octobre :
Vous
pouvez le constater : les
territoriaux sont loin d'être au complet. Si le 8ème RIT est présent en totalité,
ses hommes ont d'abord été affectés au camp retranché de Dunkerque avant d'être dirigés sur Lens, Don-Sainghin, Douai le 24 septembre puis
Lille au début octobre où la majorité du second bataillon sera capturée, il n'en est pas de même
pour les autres. Par contre, au 7ème RIT, un seul bataillon prendra part
aux combats de Lille et Lesquin, les autres étant affectés aux forts de
Paris avant de gagner Calais début octobre. Et au 5ème RIT la situation n'est pas meilleure : seules les 2ème et 3ème compagnies, qui forment le second
bataillon de marche, seront à Lille où la plupart des hommes seront capturés. Les 1er et 2ème bataillons ont été affectés à la défense de Calais, le 3ème à celle de Maubeuge, les 21ème, 22ème, 23ème et 24ème compagnies sont de leur côté
responsables de la surveillance
des mines de charbon. Resteront
donc à leurs postes ces territoriaux des 5ème, 7ème
et 8ème régiments d'infanterie territoriale. Leurs casernements se
trouvaient respectivement à Arras, Saint
Omer et Dunkerque.
Ces soldats, nés entre 1875 et 1880 à la
mobilisation, sont âgés. Affectés à des services de
garde et de police près des points
stratégiques ou importants, ils sont mal armés et ne doivent pas participer aux opérations en rase campagne, le plan de mobilisation ne le
prévoit d'ailleurs pas. Mais ils sont
là, au mauvais moment et au mauvais
endroit ... Leurs Journaux de Marches et
d'Opérations sont fragmentés. Pour le 7ème, il ne demeure que le JMO du 3ème bataillon pour la période qui nous intéresse.
Ceux des 5ème
et du 8ème sont complets. Il
faut ajouter à ces troupes la 42ème batterie, capitaine Danzac,
du 41ème régiment d'artillerie avec quatre canons
et 170 hommes au Moulin de Lesquin. Ce
régiment, stationné à Douai, a été engagé en Belgique en
août et depuis début septembre il se bat dans la Marne. Pourquoi cette batterie isolée
se trouve dans le secteur ? Le
Journal des Marches et Opérations du 2ème escadron du 4ème régiment chasseurs à cheval mentionne bien sa
présence le 4 à l'Arbrisseau. Peut être s'agit-il de la même batterie de 75 que le 20ème régiment de chasseurs a du
convoyer sur ordre jusqu'à Lille[5]. Situation militaire au 4 octobre 1914. (Revue Militaire Française 1935/10) Le 4, les
Allemands se dirigent vers Lille. Le général major Wahnschaffe
à partir de Tournai (1er et 2ème bataillons du 87ème
régiment d'infanterie, 4ème bataillon du 76ème régiment
d'infanterie et deux escadrons du 19ème uhlans).
Le général Von Hollen avance vers Bouvines et Lezennes avec le 4ème corps de cavalerie bavaroise. Le général
major Von der Schulenburg (2ème bataillon
du 20ème régiment d'infanterie, 3ème bataillon du 174ème
régiment d'infanterie, 2ème bataillon cycliste de chasseurs
bavarois, 1er escadron de
cavalerie du Landsturm et une batterie d'artillerie) attaque à partir de Douai
en deux colonnes, l'une par la RN17 Douai-Pont à Marcq-Lille
et la seconde selon un axe Orchies-Templeuve. Ce sont ces troupes qui vont
arriver à Faches puis Thumesnil[6]. Les 3 et 4
octobre la 13ème division d'infanterie du général de brigade Baquet,
appartenant au 21ème corps d'armée, forte de 8 à 9 000 hommes[7] et
trente six canons, débarque à Merville et se dirige vers Lille. Cette grande
unité combattait jusque là dans l'est de la France. Son état major s'installe à
Lomme et se prépare au combat. Cette
division comprend les unités suivantes :
Toutes ces
unités ne passeront pas à Faches-Thumesnil, les journaux de marches et
d'opérations, lorsqu'ils sont parvenus jusqu'à nous, en attestent. Plusieurs
seront disséminées dans la banlieue lilloise, au gré des alertes. Mais ce n'est
là qu'un renfort illusoire : entre le 6 et le 8 octobre, toutes ces unités, à l'exception
de quelques fractions d'entre elles encerclées, vont quitter la région lilloise
et se diriger vers les collines de l'Artois. Pour les 17ème,
20ème et 21ème bataillons de chasseurs à pieds, les
mouvements sont clairs. Le JMO du 17ème BCP est absent pour la
période du 11 août au 3 octobre. Mais on apprend que le 4, ses compagnies sont
en position à Hellemmes, Flers et Mons en Baroeul. Quant au 20ème BCP, il arrive à 15h le
4 octobre à La Madeleine après avoir traversé Lomme et Lambersart. La 1ère
compagnie doit ensuite se porter sur Mons en Baroeul,
la 2ème sur les Rouges Barres et la 4ème sur la ligne de
chemin de fer. Mais l'action de l'ennemi empêche d'atteindre les Rouges Barres
et Mons. Enfin, le 21ème BCPest à Ennetières en Weppes le 4
lorsqu'il reçoit l'ordre de gagner Saint André. Pour ces trois unités, la journée du 5
octobre se passe de la façon suivante : Fives
paraissant inoccupé, le 17ème BCP lance plusieurs reconnaissances tout en
restant sur ses positions de la veille : Hellemmes,
Flers et Mons en Baroeul. Au 20ème BCP on
tient toute la journée les ponts de Wambrechies et Marquette avec les hommes du
21ème présent depuis la veille. La journée
du 6 octobre, les 17ème et 20ème BCP conservent leurs
positions alors que le 21ème décroche pour La Bassée.
Dans la nuit du 6 au 7, le 20ème BCP quitte son secteur pour
Haubourdin, il est suivi le 8 par le 17ème qui se met en route pour
Haubourdin également. Ces trois bataillons seront ensuite engagés dans le Pas de
Calais : Notre-Dame de Lorette, Vimy, Hulluch, Loos
en Gohelle, Vendin le Vieil ... à l'exception de
plusieurs escadrons du 20ème qui verront leur route barrée par
l'ennemi et devront se retrancher dans Lille où ils seront capturés.
Mortellement blessé, le colonel Clémencon, chef du régiment,
décédera à Lille le 10. Le 11ème
régiment de génie, 11ème compagnie, est signalé à Lomme le 4 octobre
et le lendemain à Loos. Le 4ème
régiment de chasseurs à cheval, débarqué à Merville le 3 va se regrouper dans
la région de Lillers les deux jours suivants avant de se replier sur Saint Pol le
6 et Ablain Saint Nazaire le 8. Les archives sont maigres
mais l'on sait que certains de ses escadrons vont être brièvement engagés dans
la région de Lille. Le 6ème
escadron de chasseurs à cheval va effectuer des reconnaissances, le 4, sur Pont
à Marcq et Roncq tout en faisant le coup de feu du
côté de Fives, à la Porte de Tournai. Du 5 au 9 il
patrouille sur le secteur Ascq, Seclin et Fretin avant d'assurer la défense de
la Porte de Béthune le 10 puis de combattre aux Portes de Béthune et des Postes
le 11. Ses hommes seront capturés lors de la chute de la ville. Le 17ème
régiment d'infanterie a reçu l'ordre, le 4 octobre à 10h45, de se porter sur
Lille avec mission de prendre position au faubourg de Fives.
Malheureusement, l'ennemi qui a tenté un coup de main sur Lille empêche le
mouvement. Le 5, le régiment reçoit l'ordre de poursuivre sa mission. Passant
par Fives il atteint Hellemmes
sillonnée par des patrouilles ennemies. A l'issue d'un violent combat, qui
coûte aux Français un tué et deux blessés, les Allemands sont repoussés au-delà
du village. Mais à 21h, les Français reçoivent un nouvel ordre de repli sur La Bassée puis Haisnes ... Le 109ème
régiment d'infanterie n'atteindra jamais Lille. Parti de Vieille Chapelle à 16h
le 3 octobre, il a ordre de gagner Fournes. Le 5, un
détachement se porte sur Lens pour soutenir les divisions de cavalerie qui
opèrent dans ce secteur mais un nouvel ordre envoie le régiment sur Fleurbaix et Fournes. Ordre rapidement
annulé, La Bassée et Haisnes
deviennent les objectifs. A 18h le régiment est éparpillé entre Lens, Bénifontaine, Hulluch et Haisnes. Mais une partie des hommes va prendre part à
l'attaque, on le verra plus tard, menée sur Ronchin le 5 à 10h. Le 6 octobre la
troupe reçoit l'ordre d'occuper Vendin le Vieil et
Pont à Vendin alors qu'elle attaque sur Loos en
Gohelle. Les jours suivants le 109ème RI qui est toujours sur ce
secteur prend part à la bataille de l'Artois. JMO (Journal de Marche et Opérations) de la 2ème batterie du 62ème régiment d’artillerie de campagne. Au 62ème
régiment d'artillerie dont les batteries ont été débarquées à Armentières le 4
octobre on se presse : si les 4ème et 5ème batteries se portent sur Saint André, les 2ème, 3ème et 6ème vont
soutenir l'attaque sur Ronchin. Dernière unité de la 13ème
division d'infanterie, le 21ème régiment d'infanterie qui va passer
par notre commune. Le 4 octobre, ses bataillons effectuent des missions isolées
depuis Armentières et Merville. Et dans ce
régiment, le lieutenant de réserve (il passera lieutenant à titre temporaire le
3 novembre) Jean Julien Weber, jeune prêtre âgé de vingt-six ans[9]. Jean Julien Weber alors qu’il servait au 35ème RI en 1909. Ses carnets nous ont été précieux pour cet article. 3 octobre 1914. A l'aube, l'escadron à cheval de Chérisey du 6ème régiment de chasseurs à cheval
ainsi que les spahis[10] des
capitaines Garein et Raynaud fouillent Lesquin, Faches, Fretin, Vendeville,
Wattignies et Seclin. Ils ne découvrent que des patrouilles lointaines de uhlans et de cyclistes. Rien de bien suspect mais à la Pissatière, les lignes téléphoniques ont été coupées. Et à
Mons en Pévèle, la receveuse des Postes a signalé l'arrivée de l'ennemi. La 2ème
du 5ème RIT (Baudour) est à Faches, face à
Vendeville. A sa droite, le 3ème bataillon
du 8ème RIT dont la 8ème Cie est
en avant de Thumesnil. Le 21ème RI est
installé à la côte 43 voisine de la halte de chemin de fer de Ronchin. Suit le
17ème bataillon de chasseurs à pieds. Signalons
aussi la présence des cavaliers du 2ème régiment de hussards dans le
secteur. Depuis le matin, le peloton Letang
patrouille en reconnaissance sur l'axe Lille Tournai et le peloton de
l'adjudant Herment sur Orchies. Les deux groupes se
regroupent à Lezennes et y trouvent un parlementaire
bavarois, le capitaine Prince Karl von Wriede, qui demande à être conduit près du gouverneur de
Lille. « Dans cette ville ne se trouvaient que des goumiers et
un escadron divisionnaire. Le parlementaire est reconduit à 3h du
matin dans ses lignes. » Et les cavaliers se retirent et rejoignent
leur régiment à l'est de Loos en Gohelle. Fiche du 2ème classe Henri Deugniez tué à l’ennemi à Faches-Thumesnil le 3 octobre 1914. Fiche du soldat Antoine Jouberton du 21ème RI tué à l’ennemi à Thumesnil Ronhin le 4 octobre 1914. 4 octobre 1914. On l'a vu,
pour les Allemands, le point principal de contrôle de la RN17 est le Moulin de
Lesquin qu'il faut prendre ou contourner. A 10h ils ne sont plus qu'à quelques
kilomètres de la lisière sud de Lille. Des uhlans, accompagnés de cyclistes,
poussent vers Faches et le Moulin de Lesquin après
avoir constaté que les forts de Seclin et Vendeville
sont inoccupés. A 7h, la 3ème
batterie du 62ème régiment d'artillerie quitte Armentières pour
Loos, elle est mise à la disposition du commandant du 5ème bataillon
du 21ème RI qui se dirige sur Ronchin, deux autres batteries vont
suivre le lendemain. A 10h le 1er
bataillon du 21ème régiment d'infanterie, stationné sur Merville et
Armentières, a ordre de gagner Loos les Lille et y arrive sans encombre vers
minuit. Le 2ème bataillon parti à 11h pour la même destination est
accroché dès la sortie de son cantonnement par l'ennemi. Il engage un violent
combat dans lequel il a vingt et un tués, cent soixante cinq blessés et
cinquante quatre disparus puis parvient à gagner Loos dans la nuit avant de
s'installer dans une école de Lille à proximité de la Porte de Douai. Le 3ème
bataillon parti à 11h arrive à Loos à 5h du matin, le 5 octobre, après avoir
échangé quelques coups de feu avec des patrouilles de uhlans.
Jean Julien Weber : « On arriva dans la nuit à Haubourdin : de grands
goumiers arabes[11]
nous regardaient passer,
harassés. Ils tâtaient nos galons avant de saluer. A tous les arrêts,
les hommes se couchaient sur le trottoir. On alla jusqu'à Loos, devant Lille.
Mes cents hommes furent logés dans l'imprimerie de la rue Faidherbe.
Nouveau bon accueil. On dormit très bien. Pourquoi nous avait-on amenés
là ? Lille était menacée. Il n'y avait là que deux régiments
territoriaux. Un corps de cavalerie allemand avait attaqué la ville. Croyant
leurs cavaliers beaucoup plus loin, les Allemands avaient même lancé un train
de débarquement sur la gare[12]...
" Entre 10h30
et 11h, à La Pissatière, un groupe de cyclistes
allemands habillés en civil venant d'Ennetières tourne
vers Lesquin après avoir essuyé quelques coups de feu. Quelques instants plus
tard, les Allemands attaquent avec deux pelotons cyclistes. L'un se dirige vers
le Moulin de Lesquin et perd les deux tiers de son effectif sous les tirs
français : la demi-section (L'herbier) de la 3ème Cie du 5ème
RIT s'est repliée, permettant ainsi aux mitrailleuses de Dufestel
d'ouvrir le feu. L'autre se dirige vers Faches en
passant par Vendeville, rampant dans les betteraves.
Il est repoussé par la 2ème compagnie du 5ème RIT du capitaine Baudour et n'insiste pas. Vers 11h30,
comme le canon tonne à Ronchin, le général Baquet se porte près de la RN17[13] qui
descend en pente douce depuis un moulin à vent ayant perdu ses ailes et proche
d'un vaste trou, vestige d'une ancienne exploitation de carrière. Au loin, vers
le sud, une ligne d'arbres : c'est le bois de Vendeville.
A l'ouest un petit clocher émerge d'un fond où se blottit le village de Faches. Plus loin encore la tranchée de la voie ferrée
Paris-Lille. De la gare de Lesquin aux lisières de Faches,
les mille hommes du 5ème RIT du chef de bataillon Caron s'étirent
sur un front de 3500 mètres dont le point principal est le Moulin de Lesquin.
La 3ème Cie (Debuire) est à la hauteur du
chemin de Lesquin à Faches, sur la RN17, flanquée des
mitrailleuses de Dufestel, la 2ème Cie
(Baudour) est sur la crête qui longe la lisière sud de Faches
face à Vendeville. Au 7ème RIT la 6ème
Cie (Clerc) est en réserve au Moulin de Lesquin. Au 8ème RIT la 11ème
Cie (Lesur) se tient au nord de Ferrières, entre
l'Arbrisseau et la voie ferrée Paris-Lille. Vers 13h,
les Allemands installent trois canons de 77 dans le fort de Vendeville
et trois autres dans le parc d'Enchemont à Lesquin.
La canonnade débute aussitôt. Après une demi-heure de tirs, une centaine de
coups, trente trois soldats français de la compagnie Debuire
(5ème RIT) sont hors de combat, la ligne de défense se replie. Puis
c'est la débandade, les hommes se dispersent à travers champs, plusieurs
s'empêtrent dans les trous des champignonnières. Le lieutenant Dufestel parvient à sauver ses mitrailleuses mais, atteint d'une
balle à la jambe, c'est le lieutenant Joiret qui
prend le commandement et remet la section en batterie sur la crête nord du
plateau à la lisière de Ronchin. Jean Julien Weber : « Plus bravement,
les deux régiments de territoriaux avaient lâché, sans avoir de grandes
pertes. » La 42ème
batterie du 41ème régiment d'artillerie, installée à l'Arbrisseau,
tire sur Ronchin et Faches entre 17h et 18h. Des
témoignages font part, à plusieurs reprises, de chasseurs à cheval aux environs
de Faches et Ronchin. Le 2ème escadron du
4ème régiment de chasseurs à cheval part à 11h pour Lille avec
mission de reconnaissance plus spécialement le nord-ouest, le nord et l'est de
Lille. Vers 10h du
soir, le 3ème bataillon du 174IR allemand occupe Petit et Grand
Ronchin, il se tient à distance des fortifications et ne dépasse pas l'église
du Petit Ronchin et le passage à niveau de la ligne Paris-Lille à hauteur de
l'institut des sourds et muets. A l'arrière, le bataillon du 20ème
Landwehr a dépassé Faches et mit le feu à plusieurs
maisons du Moulin de Lesquin, brasier visible à plus de vingt kilomètres. 5 octobre 1914. Une
offensive, décidée par le général Baquet, qui a pour but de dégager Lille va
permettre aux Français de reprendre l'initiative et le terrain perdu. Objectifs
: réoccuper Ronchin, Lesquin et Faches. Porte de Douai. (Collection J. Caniot) De Lille, le
1er bataillon du 21ème RI a entamé à 6h son mouvement qui
le mène à la Porte de Douai. De là il va prendre part à l'action sur Ronchin.
Jean Julien Weber, 21ème RI : « Le lendemain, 5
octobre, de très bon matin, les femmes qui habitaient près de l'imprimerie où
j'avais couché avec mes hommes nous apportèrent du café, le breuvage national
de par là. On déjeuna. Puis on dut se mettre en route. On longea la voie
ferrée, dans la direction de l'est. Derrière le talus, des territoriaux se reposaient.
Nous sommes en position d'attente et de repos disaient-ils. On se dirigea sur
le cimetière Lille Ouest, le cimetière du Sud. Après avoir stationné quelque
temps sur la route, ordre vint de se rassembler, le bataillon entier à la porte
sud (par où sort la route Lille au Havre). Puis, après encore un arrêt, on prit
la direction du sud. Une batterie de 75 tonnait et recevait quelques 77. Les
gens se promenaient curieusement, voulant voir, sans se soucier du danger. On
nous donna comme direction Thumesnil. On se plaça
derrière la crête qui se trouve entre Thumesnil et
l'Arbrisseau. Un combat était sur le point de s'engager. Des cyclistes
allemands se déployaient sur la route de Douai, face à nous. On les voyait
longer les fossés après avoir déposé leurs bicyclettes. On déploya nos hommes.
Avec mes deux sections, je fus chargé de défendre, en cas d'attaque, le passage
à niveau de la route Thumesnil - Faches[14].
On organisa les maisons. Des balles sifflaient. Une batterie de 77 commençait à
nous bombarder. Les obus coupaient les fils téléphoniques. Tout ce bruit me
donna faim et j'entamai mes provisions ... » L'attaque est lancée par le 8ème
RIT qui s'est mis en route à 9h à partir du pont de Ferrières et par les 2ème
et 3ème compagnies du 5ème RIT à partir du passage à
niveau entre Faches et Thumesnil.
La 11ème compagnie du 8ème RIT - capitaine Lesur - avance en deux colonnes dont l'une doit déboucher
du passage à niveau de Thumesnil et suivre le chemin
qui va de Thumesnil à Faches[15].
L'autre, depuis le pont de Ferrières doit suivre le chemin qui la mène à Faches[16], ces
deux colonnes devant se rejoindre à l'entrée de Faches.
Quelques canons allemands installés au Moulin de Lesquin ainsi qu'à l'entrée
nord-ouest de Faches ouvrent le feu. Renforcée par la
9ème compagnie, elle avance pourtant, s'abritant derrière les quelques
maisons bordant la route de Thumesnil à Faches. La 11ème Cie, toujours conduite par le lieutenant Lesur, entre dans la bataille, dans le plus mauvais endroit
de la ligne de combat. Pour éviter à ses troupes le passage du pont de
Ferrières vu du clocher de Lesquin, le capitaine Lesur
prescrit aux sections Verley et Dupont de se déployer et de traverser la voie
ferrée au fond de la tranchée de chemin de fer et après avoir escaladé le talus
de s'y tenir à l'abri en attendant l'ordre d'attaquer. Les hommes des 2éme et 3ème sections, quant
à eux, accomplissent les gestes précurseurs que répéteront durant trois ans les
poilus des tranchées. Sauter le parapet, en dégringoler, courir vers l'ennemi
invisible sous le feu d'enfer qui s'est aussitôt déclenché. Prenant pour point
de direction le clocher de Faches, seul visible
au-dessus de la crête, parcourant les six cents mètres en se déployant, en bondissant,
se couchant au coup de canon ou au tir de mitrailleuse, bondissant de nouveau
sitôt la rafale passée jusqu'au moment où l'ennemi, devenu visible, on commencerait
le feu pour préparer le choc et l'assaut final. A peine la section Verley est-elle apparue
sur le parapet de la tranchée de chemin de fer que la demi-batterie allemande
établie au Moulin de Lesquin l'accueille par une canonnade bien dirigée. La
distance bien calculée, la pièce bien pointée, mais les obus explosent pour la
plupart trop haut. Il en arrive suffisamment au but pour atteindre quinze
hommes. Si cette proportion se maintient, aucun des cent vingt soldats ne
parviendra à la crête où les attend probablement un tir de mitrailleuses à deux
cent cinquante mètres. Ordre est donné au capitaine Lesur de ramener ses sections en arrière du parapet de
chemin de fer. Le peloton Bureau - 1ère et 4ème sections
- après avoir progressé sans incident sur le chemin de Thumesnil
à Faches jusqu'à six cents mètres du passage à niveau
se heurte à de grosses difficultés. Section Provost
en tête, la demi-compagnie Bureau monte vers la crête : deux files de soldats
courent dans les fossés, des goumiers[17] leur
ayant crié au passage que peu d'Allemands, tout au plus une compagnie, tenaient
Faches. Un coup de canon tue un soldat de la
compagnie Pruvost et en blesse un autre. Les deux sections
se déploient dans les champs, une mitrailleuse placée sans doute près des
canons se met de la partie et des nappes de balles maintiennent les soldats
couchés. On saura plus tard, en découvrant deux
monceaux de douilles d'obus et deux monceaux d'étuis de cartouches à l'entrée
de Faches qu'il n'y avait là que deux canons et deux
mitrailleuses. Aucun canon, aucune mitrailleuse, aucune réserve n'appuyait le
peloton Bureau. L'ennemi, bien embusqué à six cents mètres, pouvait-il être
délogé par une fusillade au jugé ? Le problème
du pont de Ferrières et du Moulin de Lesquin se posait ici dans les mêmes
termes. Le résultat de l'attaque de Faches était que
quatre sections étaient immobilisées sous le feu ennemi et attendaient le
concours de l'artillerie. C'est à ce moment là qu'intervient le commandant De
Pardieu du 8ème RIT. De son poste de commandement installé à
l'Arbrisseau, il fait savoir qu'il aurait été préférable de connaître les
résultats de l'action du 21ème régiment d'infanterie opérant à
gauche vers Ronchin. Il est donc entendu que le groupement territorial suspend
son offensive jusqu'à ce que le 21ème soit engagé à fond contre
Ronchin. Le capitaine Lesur reçoit alors un billet
crayonné lui demandant de ramener ses troupes à l'arrière de la voie ferrée.
L'artillerie est prête à intervenir. Lesur place la
section Verley en arrière du talus est, la section Dupont en arrière du talus
ouest dans l'attaque du signal d'attaque. JMO de la 2ème batterie du 62ème régiment d’artillerie de campagne, journée du 5 octobre 1914. Notez l’orthographe des communes : Vattigny, Ronchainp, et Flache ! (SGA-mémoire des hommes – Ministère de la Défense – côte 26N1017/17) Le 2ème escadron du 4ème
régiment de chasseurs à cheval, comme la veille, a repris ses missions de reconnaissance
sur le nord-ouest, l'est et le nord de Lille. A 10h30 il se dirige vers
Haubourdin, Loos, l'Arbrisseau et Faches. Les crêtes
vers l'Arbrisseau sont occupées par des territoriaux qui se sauvent et à qui le
capitaine est obligé de leur donner l'ordre de se reporter en avant et de
reprendre leurs positions. Le JMO de
l'unité mentionne au passage la présence des batteries du 41ème
d'artillerie sur l'Arbrisseau. La 42ème batterie du 41ème
régiment d'artillerie et la troisième du 62ème RA ont été alignées
au bord est de la nationale 25[18],
face à l'est, bien abritées contre les vues du Moulin de Lesquin par les hauts
talus. Comme les 2ème
et 6ème batteries du 62ème régiment d'artillerie
(groupement Carruel) qui appuient l'attaque sur
Ronchin. A 14h, la 2ème batterie réduit au silence une batterie
ennemie établie près de la route de Lille à Douai, l'ennemi est forcé de
quitter sa position et d'abandonner sur le terrain des attelages et du
matériel, un caisson de munitions et une voiture observatoire. A noter que dans
son JMO, cette batterie évoque les communes de Vattigny,
Flache et Ronchainp ! On attend.
L'attention est détournée vers Ronchin où le 21ème RI opère, les
conditions de combat sont différentes, il s'agit là d'un combat d'infanterie
contre infanterie, aucune artillerie ne gênant la progression des nôtres. JMO du 21ème régiment d’infanterie, journée du 5 octobre 1914. (SGA-mémoire des hommes – Ministère de la Défense – côte 26N593/1)) Lancé à l'attaque de Ronchin, le 1er
bataillon du 21ème régiment d'infanterie s'empare de la cité après
un combat où il déplore sept tués, vingt six blessés et vingt trois disparus.
Jean Julien Weber : « Notre artillerie, cependant,
s'était mise fortement de la partie. La batterie allemande fut démontée et les
fantassins cyclistes n'étaient guère plus frais. L'ordre nous arriva
d'attaquer Ronchin par le nord-ouest. Grand Ronchin en 1840. L’église Sainte Rictrude et la mairie. (http://denis.delemer.free.fr/) Les compagnies se mirent en marche. La 2ème seule eut des pertes
sérieuses, à cause de l'imprudence d'un chef de section qui avait engagé ses
hommes en colonne dans un chemin creux. Les autres eurent peu de pertes et,
finalement, le village fut pris ». Sur la place du Grand Ronchin, le
gros du bataillon du 20ème Landwehr s'apprêtait à marcher sur Lille
après avoir arrêté le maire et prélevé quelques otages. Une compagnie
allemande avancée jusqu'au passage à niveau de l'institut des sourds et muets
est fort occupée à vider les caves. Les hommes du 21ème RI
bondissent sur la barrière du passage à niveau, quelques coups de feu
éclatent et c'est la retraite précipitée des Allemands à travers les rues
tortueuses puis dans la campagne. En 1914, les Allemands réquisitionnent et transforment l’institut des sourds et muets en hôpital. En 1918, il sera occupé par le 103 Squadron RAF. (http://www.103.airwarl.org.uk/103sqn4.htm) Le succès de
Ronchin aussitôt connu, le combat de Faches reprend,
dans d'autres conditions. Notre artillerie donne de la voix à partir de midi et
les territoriaux avancent appuyés par les sections de mitrailleuses Rahart, Labry et Joiret. Les mitrailleuses croisent leurs feux sur les
troupes allemandes du 174ème RI qui se tenaient couchées et
largement déployées sur la crête. Le hauptmann Oskar Hoeker racontera que ses hommes sont restés longtemps sous
l'ouragan d'acier « le nez dans la terre, le casque sur la nuque, enfoncés
à plat ventre dans le champ de betteraves. » La batterie allemande du
Moulin de Lesquin cesse le feu. Le combat de Faches
se liquide alors rapidement, les territoriaux bondissent vers la crête, la
fusillade crépite, ils occupent la crête. Il reste quatre cents mètres à franchir
jusqu'à la lisière de Faches. L'ennemi se voyant
débordé, sa retraite en rampant se transforme en une course à l'abri des maisons
du village. La 11ème Cie du capitaine Lesur
pénètre dans Faches par la rue de Wattignies sous le feu
d'une mitrailleuse ennemie qui semble couvrir la retraite. Avec prudence, les
hommes de Lesur avancent et traversent le village,
s'attendant à combattre à chaque coin de rue mais l'ennemi a rapidement gagné
la sortie sud vers Vendeville. Ronchin-lez-Lille (Nord) – Passage à niveau, barrière dite du Petit-Ronchin. (http://dents.delemer.free.fr/) Revenons au 21ème RI et au lieutenant
Weber : « Le commandant Gentelet m'avait fait
appeler à Petit Ronchin. Je suivis avec mes hommes la voie ferrée vers l'est et
entrai dans le faubourg. Laissant mes hommes derrière les maisons, j'allai voir
le commandant. Je le trouvai au sud du chemin de fer, sur le chemin allant à
Lille, d'où il dirigeait l'attaque sur Ronchin. Il me confia la mission de
couvrir le flanc droit de l'attaque et de marcher sur le groupe de maisons rassemblées
autour du calvaire entre Faches et Lesquin. En le quittant,
je rencontrai des jeunes gens de quatorze et quinze ans, boy-scouts qui
faisaient le service de brancardiers et d'éclaireurs mieux que les anciens. Ils
m'apprirent que Faches était occupé. Je revins le
dire au commandant qui me recommanda d'avancer avec précaution pour ne pas
tomber sous les coups de feu de flanc. Une patrouille marchait à l'avant ; une
à droite, les autres suivaient par les fossés de la route. Tout alla très bien.
On ramassait en passant des bicyclettes ennemies. Quelques cadavres de deux
parties, un civil exécuté gisaient dans les champs. J'avançai rapidement. Sur
la route, quelques blessés allemands ; deux s'étaient mis dans l'aqueduc
passant sous un chemin ; un coup de feu d'une patrouille de flanc de la 2ème
les fit sortir ; on escorta ces prisonniers jusqu'à Lille où le lieutenant
porte-drapeau Belot eut de la peine à les défendre
contre la fureur des femmes. En avançant, on vit une troupe se diriger sur Faches ; après examen on y reconnut des territoriaux qui
allaient occuper le village lâché par les Allemands. Je pouvais donc marcher
hardiment, étant couvert sur mes deux flancs. Nous parvînmes ainsi jusqu'aux
premières maisons groupées autour du calvaire qui formait mon objectif. Il y
avait là deux caissons de la batterie de 77 qui nous avait canonnés et que
notre artillerie avait mise en fuite. Les chevaux gisaient éventrés. Ma patrouille
se précipita pour piller les caissons : on y trouva du vin, des gâteaux,
d'excellents cigares. Je faisais suivre mes hommes, faisant la navette sur la
route, à bicyclette, entre eux et la patrouille de tête. Tout
d'un coup, je vis déboucher de Faches une compagnie
de territoriaux. Les hommes furent déployés derrière la route, face à l'est ;
les officiers se promenèrent sur la route pendant que des patrouilles allaient
fouiller toutes les maisons de l'agglomération que ma patrouille avait déjà
dépassée et que le gros de ma troupe atteignait. De quoi s'agissait-il ?
Permettre à l'artillerie d'enlever les deux caissons. Tant de précautions n'étaient pas nécessaire :
j'aurai pu suffire à la sécurité de l'opération. Un sous-officier logea une
balle dans la tête d'un cheval qui vivait encore ; un de mes coups de révolver
l'acheva. On
détela les caissons, pillés déjà de ce qu'ils avaient d'intéressant et on les
enleva : les territoriaux furent cités pour avoir pris de haute lutte un canon
à l'ennemi ! Heureusement que toutes les citations ne sont pas de ce genre. » Ravitaillé
par les habitants de Lille, le 2ème bataillon arrive à son tour dans
la ville. A partir de 10h, un détachement du 109ème régiment
d'infanterie a pris part à l'attaque menée sur Ronchin[19]. Le 21ème RI continue sa course
après sa victoire à Ronchin. Le 2ème bataillon atteint Lesquin vers
14h. Vers 16h il ouvre le feu sur des groupes ennemis assez éloignés et
poursuit même jusque Fretin où il s'arrêtera provisoirement, harassé, vers 17h. A l'est de Faches, le Moulin de Lesquin est encore aux mains ennemies.
Les sections Hans et Saulnier de la 9ème compagnie du 8ème
RIT, renforcées par la section Verley et les mitrailleuses de Lobry attaquent mais là encore les Allemands n'ont pas
attendu leur arrivée. Reconstitution au Fort de Seclin (18/10/2008) Photos de PHiLeAs. (http://phileasfogg2002.free.fr) A 22h les 1er,
2ème et 3ème bataillons du 21èm RI avancent vers le sud, la 121ème
compagnie du 3ème bataillon avance jusqu'au fort de Seclin que l'ennemi
a abandonné, le bataillon au complet s'y installe. Jean Julien Weber du 21ème
RI reste quant à lui sur ses positions : « La nuit était venue et
je me mis à organiser ma conquête : un petit poste d'une demi-section
sur la route de Douai barricadée, une demi-section sur celle de
Lesquin (celle de Séguy), un petit poste sur la route de Faches, pour se relier aux territoriaux qui
occupaient des tranchées déjà faites ; le reste en réserve en
arrière. Je fis prévenir le commandant Gentelet que
j'étais arrivé et lui donnai le croquis de ma position. J'envoyai une
patrouille de liaison avec la 2ème compagnie établie devant Ronchin :
elle ramena un Allemand ivre ayant l'œil arraché ! Il vomit copieusement du
vin. Les maisons étaient pillées, plusieurs brûlaient ; des vaches beuglaient,
échappées de leur écurie en feu. Je me plaçai sur la grand-route, dans une
maison d'ingénieur, où je pouvais faire de la lumière. Ma réserve était dans le
fossé de la route en partie, et en partie bordait la lisière est du village. Je
mangeai un peu, en compagnie de mes deux agents de liaison. J'étais à la fois
content et inquiet. J'allai inspecter mes installations. Je pouvais à peine
marcher. Le talon droit me faisait un mal horrible. » 6 octobre 1914. « On raconte que dans la journée d'hier, de
violents engagements ont eu lieu aux environs de Lille, de midi à la tombée du
jour. A Lesquin, l'Amiteuse et l'Arbrisseau notamment, l'action fut très vive.
Les ennemis furent repoussés en laissant deux canons entre nos mains.[20] » On conforte
la défense côté français. Le 3ème bataillon du 8ème RIT
se rassemble à Thumesnil puis se porte vers la
gauche. La 12ème Cie - Guillaud - va au Moulin de Lesquin avec les
mitrailleuses de la section Rohart. Tenues en réserve, les 9ème Cie
(Hans) et 11ème Cie (Lesur) sont à Thumesnil, prêtes à accourir vers les points menacés.
L'escadron De Cherisey du 6ème Chasseurs à
cheval et les escadrons de spahis Garcin et Raynaud couvrent la plaine. Ils
mentionnent que le fort de Sainghin, à deux mille
cinq cents mètres au sud de Lezennes est occupé par
l'ennemi qui y a creusé des tranchées, que le Moulin de Lesquin est vide d'ennemis
et que des Allemands surveillent le secteur à partir du clocher de Vendeville. Partis de ce village des uhlans chargent un
peloton de quarante chasseurs qui passe à proximité mais ces derniers les entraînent
en direction du Moulin de Lesquin où les soldats de la 12ème
compagnie du 8ème RIT les prennent à partie et en mettent huit hors
de combat. La reprise
des villages de Faches et de Ronchin restera pourtant
une victoire sans lendemain. Nos patrouilles de cavaliers signalent des forces
ennemies au sud de Seclin qui semblent venir de la région de Tournai. Fiche du soldat Emile Leclercq, du 5ème territorial, disparu aux environs de Lille le 4 octobre 1914. La surcharge mentionne « Mort pour la France le 6 octobre à Faches-Thumesnil ». Fiche du 2ème classe Albert Raillard du 21ème RI tué à l’ennemi le 4 octobre 1914 à Thumesnil. Les
dernières unités de la 13ème division d'infanterie quittent la
région pour l'Artois. Le détachement du 109ème RI qui a attaqué
Ronchin la veille reçoit l'ordre de rallier le gros du régiment en vue
d'occuper Vendin le Vieil et Pont à Vendin. Vers 4h, le 21ème RI reçoit
l'ordre de faire mouvement sur Loos en Gohelle, les hommes vont marcher dix
sept heures de suite ... Jean Julien Weber : « Quant je rentrai vers 4h
je reçus un ordre écrit de me replier sur Thumesnil.
Je rassemblai mes hommes et mes bicyclettes que je ne voulais pas
lâcher. Ce fût pénible. J'avertis les territoriaux de notre
retraite puis, en route, avec notre prisonnier. On ne laissa personne en route, sauf un malheureux
nommé Bonnot, oublié en sentinelle et dont on ne remarqua pas l'absence. Il
avait de sa propre initiative changé sa place d'observation : comme on ne le trouva
pas à son ancien poste on le crut rentré. Il s'aperçut
de son isolement le lendemain quand, ayant tiré un cavalier allemand, il ne vit
arriver personne du poste. Il nous rejoignit en route[21].
La route me fût pénible : à bicyclette je souffrais autant à cause des pavés.
Notre prisonnier ne voulait pas marcher : commandements allemands, petits coups
dans les flancs, rien ni fit. On finit par le mettre dans les fossés de la
route. On s'esquiva ainsi en silence. On arriva à Loos, à force de chercher,
j'arrivai à trouver par où avait passé le 21ème. Il avait pris le
chemin du sud ; on nous ramenait vers Arras, notre première destination. Nous
n'avions été que prêtés à Lille ; le général de corps d'armée était resté à
Merville. Comme
du côté d'Arras cela fléchissait on préféra, plutôt que de voir notre gauche
tournée, sacrifier Lille. Il ne resta que le 17ème bataillon de
chasseurs, ramené en camions automobiles quelques temps après, et les
territoriaux. Quand Anvers eut été évacuée, Lillefut
submergée les 12 et 13 octobre : je suis persuadé que si nous y étions restés,
la ville n'aurait pas été prise. On reprit donc ces chemins bordés partout de maisons
et on se dirigea sur La Bassée. J'étais à bout. Je
trouvai heureusement mon cheval dans la colonne du bataillon que je rejoignis ;
je dormis dessus. Sans lui, jamais je n'aurais pu suivre. Les hommes traînaient
lamentablement .... » Puis, peu avant minuit ce 6 octobre, le 62ème
régiment d'artillerie reçoit l'ordre de gagner La Bassée
par Haubourdin puis le Pas de Calais. A 19h on trouve encore les 1er et
2ème escadrons du 4ème régiment de chasseurs à cheval à
Haubourdin pour la couverture de Lille. Les rapports signalent quelques faibles
patrouilles ennemies aperçues. JMO du 5ème régiment d’infanterie territorial, journée du 8 octobre 1914. (SGA-mémoire des hommes – Ministère de la Défense – côte 26N773/1) Le 8 octobre le commandant De Pardieu est
nommé commandant supérieur de la défense de Lille. Les conditions ont bien
changé. Les forces allemandes sont maintenant deux fois plus nombreuses et le danger
immédiat se situe aux portes de Valenciennes et de Douai, les avants gardes
allemandes sont d'ailleurs à dix kilomètres de cette dernière. L'avant-garde
formée par la 88ème brigade. Le 68ème régiment d'infanterie
à l'entrée sud du Petit Ronchin, le 2ème bataillon du 19ème
régiment d'obusiers au Champ du Cerf. La 47ème brigade de Von Falkenstein à l'Arbrisseau. Tous attendent les ordres .... Le Uhlan, terreur des populations. Dans la
matinée du 10 octobre deux uhlans se présentent à l'hôtel de ville de Lille et
annoncent l'arrivée prochaine de troupes allemandes. Vers 14h un détachement de
uhlans pénètrent dans la ville, se rend également à l'hôtel de ville et y
réunit un certain nombre d'otages pour se garantir de tout mouvement hostile de
la foule, ce détachement se dirige vers la citadelle, traverse la Grand-Place
mais, à l'entrée de la rue Esquermoise, se heurte à
une cinquantaine de fantassins français accompagnés par un peloton de chasseurs
à cheval. Les uhlans se replient vers la mairie puis tentent de regagner la
citadelle en passant par le boulevard de la Liberté, nouvelle rencontre avec
des chasseurs à cheval et des spahis qui les dispersent et les pourchassent,
capturant un lieutenant et douze uhlans. A 19h, il n'y a plus dans la ville un
seul cavalier ennemi. Aux sommations allemandes du 11 octobre, le commandant De
Pardieu ne répond pas. Quelques obus sont alors tirés sur Lille entre 9h et
10h30. De Pardieu estime urgent de renforcer le front
sud : les territoriaux qui se sont réfugiés dans la ville se portent sur la
Porte de Douai et résistent. Les obus tombent de plus en plus pour hâter la
ville, dont les munitions commencent à manquer, à la reddition. Le bombardement
allemand va détruire 882 immeubles et 1500 maisons, notamment dans le centre
ville et dans le quartier de la gare, causant une centaine de victimes civiles. « Die Erstürmung von Lille an 12 oktober 1914 ». L’assaut de Lille le 12/10/1914. (Dessin de O. J Olbeutz – journal illustré de Leipzig 1915) Le 12
octobre à 09h les pionniers allemands arrivent à faire sauter la barricade
dressée à la Porte de Douai. Les fantassins s'engouffrent dans la ville et se
heurtent aux Français qui leur causent des pertes sévères. A 15h45, persuadé de
l'inanité de la résistance, De Pardieu fait hisser le drapeau blanc sur l'église
du Sacré Cœur. C'est terminé. La fuite des soldats et des civils de Lille lors de l’incendie de la Porte de Douai. (Document paru dans la presse illustrée de l’époque en Allemagne) Des dernières troupes françaises traversent
le secteur : il s'agit de l'escadron du capitaine De Roquette Buisson du 4ème
régiment de hussards qui combat depuis plusieurs jours entre Hazebrouck et
Estaires. Les cavaliers de cet escadron poussent en
effet une pointe audacieuse sur Lille le 12. Un Henry Farman HF20 identique à celui du lieutenant Victor Ménard de l’escadrille HF32 qui s’est posé devant la citadelle de Lille le 12 octobre 1914. Le même jour
le lieutenant Victor Ménard, pilote à l'escadrille HF32, part en mission sur
Lille encerclée. Le quartier général veut connaître la position du 20ème
Chasseurs. Ménard exécute la mission et pose même sur l'esplanade, devant la
citadelle, son Henry Farman HF20 avec à son bord des dépêches, une caisse
remplie de pigeons et quelques médailles à distribuer ainsi qu'un message du
général de Maud'huy adressé au commandant De Pardieu
: « Au commandant De Pardieu, commandant le détachement
mixte de Lille - Vous adresse mes vives félicitations avec laquelle vous
avez ramené votre détachement et défendu Lille. Tenez la ville
jusqu'au bout. Une attaque allemande doit se produire aujourd'hui
vraisemblablement par le sud. Toute l'armée se porte à votre secours ; la
cavalerie peut être à Lille dès ce soir. Je vous nomme lieutenant colonel et
vous accorde une croix de la Légion d'Honneur et trois médailles militaires à
décerner à votre choix. Envoyez nouvelles par pigeons voyageurs. » Mais,
souffrant d'une péritonite, le lieutenant Ménard ne parvient pas à redécoller.
Il sera capturé mais s'échappera des geôles ennemies en avril 1916. L'ennemi
entre le lendemain, 13 octobre, à 9h par la Porte de Douai. Le Prince de
Bavière félicite De Pardieu, commandant du 8ème RIT de sa belle
défense et l'autorise à garder son épée. Quelques trois mille soldats français
sont capturés, à l'exception de quelques hommes du 8ème RIT menés
par le capitaine Guillaud de la 7ème Cie qui parviendront
à se faufiler entre les lignes ennemies. Ainsi, moins
de trois mille hommes et quatre pièces de 75 presque sans munitions ont résisté
à près de trente mille hommes et cent quarante pièces d'artillerie. Ils ont eu
l'énergie, après de multiples combats dans la région, de marches et de
contremarches, de tenir solidement comme ils l'ont fait. Place de la gare de Lille : les dégâts du bombardement. (Collection G-J Lustremant) La Grande Guerre 1914-15 : la rue Béthune. (Collection G-J Lustremant) Le casse-tête des
Territoriaux de Faches-Thumesnil. Sur le monument aux morts de Faches, inauguré en août 1922, est gravée la mention « Ici reposent sept soldats inconnus du 7ème Régiment d’Infanterie Territoriale tombés à la bataille de Faches le 4 octobre 1914 » Sur une
plaque plus récente datant des années soixante, longtemps située au pied du
monument et fixée dessus lors de la rénovation de 2005, est mentionnée la
présence de « six inconnus » du 7ème RIT tombés le 4 octobre 1914 (et non plus
sept) et de huit soldats, morts pour la France, identifiés comme étant : DANEL Jules sergent 7ème
RIT 4-10-1914 BREEMERSCH
Henri soldat 7ème RIT 27-09-1914 DUPONT
7ème RIT SNECK
Alfred sergent 7ème RIT 5-10-1914 BOULOGNE Joseph 7ème RIT 27-09-1914 LECLERCQ Emile 7ème RIT BRAUSBERG Henri soldat 7ème
RIT VERPFLEGUNGS sous officier 7ème RIT. Les sept inconnus,
mention gravée en 1922, auraient-ils été exhumés par la suite et identifiés,
leurs noms étant alors fixés sur la plaque plus récente ? Mais alors, pourquoi
cette même plaque cite huit noms, dont le sous officier Verpflegungs
- traduisez en allemand : sous officier blessé, donc inconnu - et encore six
inconnus ? Il y a bien eu exhumation de corps d'une fosse commune au cimetière
de Faches à une date inconnue. Le journal « Le
mutilé de l'Algérie, journal des mutilés, réformés, blessés, veuves de guerre
et anciens combattants ou le Mutilé Algérien » dans son numéro du
dimanche 17 juillet 1927 avertit ses lecteurs que deux corps ont été exhumés à Faches :
Le
journal signale que les objets ont été déposés au secteur départemental du
Ministère des Pensions à Lille. Signalons
au passage que le 14ème régiment d'infanterie n'a jamais été présent sur la
région en 1914, ni en 1918. L'écusson
était-il un souvenir d'une
affectation précédente ? Si l'on se penche un peu plus
sur les sept noms (oublions Verpflegungs), on observe que le soldat Danel a été tué au Moulin de Lesquin le 4 octobre. Que le
sergent Sneck a été tué à l'ennemi le 5 octobre à Faches-Thumesnil. Que le soldat Leclercq, mort à
Faches-Thumesnil le 6 octobre, appartenait au 5ème RIT et non au 7ème. Qu'il n'existe aucun
renseignement dans les archives officielles sur le soldat Brausberg. Que
pour les soldats Dupont, Breemersch et Boulogne, la
mention est toujours la même : « disparu
aux environs de Tournai le 27 septembre 1914 ». Soit sept jours avant que ne
débute la bataille de Faches et à environ vingt cinq kilomètres de là. Cependant, disparu ne signifie pas forcément tué. Le
régiment les a « perdus de vue » le 27 septembre. Ils ont très bien
pu être séparés de leur corps au cours d'un accrochage et retraiter ensuite
vers Lille et peut-être même terminer leur périple à Faches
sous les balles allemandes ... Cas identique pour le soldat Georges Woutiseth, lui aussi du 7ème RIT dont la fiche porte l'indication « disparu
au combat le 27 septembre 1914 à Tournai » et dont la
tombe individuelle est au cimetière de Ronchin. Fiche du sergent Alfred Sneck du 7ème territorial tué à l’ennemi à Faches-Thumesnil le 5 octobre 1914. Fiche du sergent Jules Danel du 7ème territorial tué à l’ennemi au moulin de Lesquin près de Faches le 4 octobre 1914. Les pertes
civiles (hors la ville de Lille) : A
Lesquin, le 4 octobre 1914 à 22h, Omer Depuydt, 17
ans, « décédé accidentellement » à la ferme Depuydt rue Victor Hugo, « bataille de Lesquin ».
A la même heure, Louis Billeau, né à Faches le 17 mars 1884,
« décédé accidentellement » à l'estaminet Serrure, rue de
Seclin, « bataille de Lesquin ». A 23h, Julia Debouze, vingt ans, servante, « décédée des suites
de blessures accidentelles » à la ferme Depuydt,
rue Victor Hugo, « bataille de Lesquin ». Dernière victime
civile recensée : Augustin Dubar, 53 ans et habitant Hellemmes,
décédé au hameau d'Eveltin, commune de Lesquin, le 4
octobre 1914. Signalons aussi que le 4 au soir, des habitants encore présents
au Moulin de Lesquin tentent de fuir vers Lille. Parmi eux une femme seule, née
en Alsace, et ses quatre enfants de six, quatre, deux ans et la petite dernière
âgée de cinq mois. Elle abandonne son commerce de laiterie en flammes mais, au
niveau de la carrière Pollet, des tirs éclatent,
français ou allemands, nul ne le saura. Le bébé de cinq mois, Jeanne Monville, est tué d'une balle à la tête, les rescapés
parviendront à l'emmener jusqu'à Lille[22]. A
Ronchin, le 4 octobre à trois heures du soir, Léa Defretin,
22 ans, décédée en son domicile au 160 route de Douai. A quatre heures du soir
le même jour au 75 rue de Lille, Maria Lelièvre 49
ans, Léon Letellier 55 ans et Amélie Boury 43 ans. Les actes de décès de ces trois personnes qui
n'habitent pas à cette adresse mentionnent « sans aucun autre
renseignement ». Le 5 octobre à 11h du matin, Jean Janssens, 53 ans, demeurant
à Lille, décède rue de la Justice et à sept heures du soir Odile Boutry, vingt et un ans, meurt à l'hôpital place de l'abbé
de l'Epée. Les registres indiquent, en outre, le décès de quatre militaires,
tous décédés des suites de leurs blessures à l'hôpital, place de l'abbé de
l'Epée :
Le monument de Ronchin et ses douze tombes, érigé par une souscription communale sous les auspices de l’Avenir Musical, fanfare municipale. (photo Lherbier) Cimetière de Ronchin. Détail de la tombe du soldat Woutiseth du 7ème Territorial disparu aux environs de Tournai le 27 septembre 1914. Les mêmes questions se posent à son sujet que pour les trois territoriaux de la même unité inhumés à Faches-Thumesnil. (photo Lherbier) Le cimetière de Ronchin abrite
douze tombes individuelles françaises. Des quatre noms indiqués ci-dessus Ferdinand Guilmot
en est absent. Les neuf autres tombes sont
celles des soldats Paul Amyot, François Martin, Paul Guittard,
Félix Breton et Emile Jault, du sergent Adrien Raincourt, tous du 21ème RI. Les
trois dernières sont celles du
soldat Georges Woutiseth (7ème RIT) sensé
être disparu à Tournai le 27 septembre ; des soldats Paul Sineux (32ème Dragons)
et Achille Cappe (21ème dragons) tués à l'ennemi à Fromelles
- à une trentaine de kilomètres de Lille - respectivement les 19 et 20 octobre
1914. A
Faches-Thumesnil, le registre d'actes de décès comporte un vide. La liste prend fin au 2 octobre avec l'acte n° 80
et reprend le 16 avec l'acte n° 97. Entre
ces deux dates plusieurs pages blanches, les actes numérotés de 81 à 96 sont
vierges de toute inscription. Les
mentions des décès, il y en eut probablement quelques uns, ont-elles été
reportées sur des feuilles libres qui auraient été égarées par la suite ? A
Vendeville, aucun acte n'a été dressé à l'état civil entre le 30 août et le 10 décembre 1914. Les pertes enregistrées
par les unités engagées : D'après les fiches établies au
lendemain de la première guerre mondiale par l'administration des Anciens Combattants
et par les unités. Sont présentées ici uniquement les pertes enregistrées sur
le secteur Lesquin, Ronchin, Faches- Thumesnil et Lille. Liste non exhaustive. Au cimetière de Lille Sud, carré militaire, reposent 226 soldats des 5ème,
7èmeet 8ème Territoriaux, 6ème et 20ème
Chasseurs à Cheval ainsi que quelques spahis tombés en octobre 1914 à Lille. Les
pertes allemandes sont inconnues, le détachement von
der Schulenburg déplorera trente huit tués et
soixante six blessés le 4 octobre. Pour la journée du 12 octobre le 104ème
Infanterie Regiment à lui seul perdra douze tués et
vingt huit blessés, le 139ème IR vingt morts et soixante huit
blessés. Le cimetière de Ronchin abrite vingt tombes allemandes : leutnant Hermann Win disch,
soldats Walter Bar et Kurt Kessler, gefreiter Karl Franck du 181IR, soldat Edmund Gremmer du 20IR, chasseurs Stefan Auer, Mirh
Graf et Georg Riedel du 1er bataillon de chasseurs
bavarois, chasseur Paul Bram du 2ème bataillon de chasseurs bavarois,
soldat Rudolf Schmalbein du 22ème bataillon
de pionniers, soldats Kurt Lôscbner, Josef Obermeier, Joh Kesseler et Ernst Gaspary du
IR104, soldats Franz Weiken et Jacobs Neff du IR174 et uhlan Paul Poser du 1er régiment
de Uhlans bavarois. Tous sont décédés entre le 4 et le 23 octobre. Deux
dernières plaques n'existent malheureusement plus. 5ème Régiment
d'Infanterie Territoriale
7ème
Régiment d'Infanterie Territoriale
8ème Régiment
d'Infanterie Territoriale
20ème Régiment
de Chasseurs à Cheval
6ème régiment de
chasseurs à cheval
21ème Régiment d'Infanterie
Un texte de
Jeannine Wallet. Revu et complété par Vincent Loisel et Didier Lherbier. Sources : "Vendeville et son
histoire" par Vincent Loisel http://www.mairiedevendeville.fr "Sur les pentes du Golgotha" Jean Julien
Weber - texte Jean Noël Grandhomme - La nuée bleue 200l. "Nous avons lu et découvert pour vous". Article
de Jean Luc Charles, bulletin n° 56 - 12/2003. "Histoire de Faches-Thumesnil, du village à la
ville". G.J Lustremant - ACHFT 1996. "Un coin de guerre peu connu, la bataille de
Douai, la défense de Lille". Alain Descamps. La Librairie Centrale -
Lille. 1936. "Campagne 1914-1918. Historique du 4ème
régiment de Hussards" - Librairie Nouvelle Rambouillet sans date. "Historique du 20éme régiment de Chasseurs,
campagne 1914-1918" Faivre d'Arcier à Luxeuil - sans date. "Historique du 4ème régiment de
spahis" - F Weber. Tunis 1920. "Historique du 3ème régiment de
spahis algériens" - Berger Levrault sans date. "Historique du 1er régiment de
spahis pendant la campagne 1914-1918". Lavauzelle
1921. "Historique du 8ème Régiment Territorial
d'Infanterie". Librairie Chapelot à Paris. Sans
date. http://tableaudhonneur.free.fr http://www2.ac-lille.fr/patrimoine-caac/ http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr http://www.memorial-genweb.org Service Historique de la Défense: côtes
26N821/18 (17ème BCP) - 26N823/1 (20ème BCP) - 26N823/6
(21ème BCP) - 26N680/1 (109ème RI) - 26N588/1 (17ème
RI) - 26N593/1 (21ème RI) - 26N773/21 et 26N774/1 (pour les RIT) -
26Nl017/1 et 1017/7 (6lme RA) - 26N887/10 (4éme chasseurs à cheval)
26N888/8 (6éme chasseurs à cheval) - 26N893/11 (20ème chasseurs à cheval)
- 26N894/9 (2ème hussards). Villes de Lesquin, Ronchin, Faches-Thumesnil et Vendeville - Etat civil. [1] A Descamps « Un coin de guerre peu connu, bataille de Douai et défense de Lille » - Editeur Béziat 1936. [2] Il s'agit très probablement du 4éme régiment de chasseurs à cheval présent sur le secteur Tournai Orchies le 3. Signalons aussi la présence à Lille du 20ème régiment de chasseurs à cheval dont le 1er peloton du 1er escadron, les 1er et 2ème pelotons du 3ème escadron seront capturés à Lille le 12 octobre alors que le reste du régiment est dans le secteur Illies, Fournes, Aubers et Fromelles. Le lieutenant colonel Buisson indique dans le JMO qui démarre à la mi-octobre que « Dans la tentative faite le 10 octobre pour ne pas être enfermé à Lille, j'ai dû pour éviter de tomber entre les mains des Allemands laisser mon cheval, mon harnachement, mon shako, mon sabre dans une des masures qui se trouvent à l'est d'Escobecque - ouest de Lille - au lieu-dit Fin de la guerre. Le journal de marche du 2ème chasseurs se trouvait dans le sac accroché à ma selle ... ». Nous n'en saurons donc pas plus sur cette unité et son rôle à Lille. A ces 4ème et 20ème régiments de chasseurs à cheval, il convient d'associer le 9ème peloton du 6ème chasseurs à cheval sur le secteur du 4 au 12 octobre. [3] Les spahis étaient des unités de cavalerie appartenant à l'Armée d'Afrique qui dépendait de l'armée de terre française. [4] On affectait dans un régiment territorial les hommes encore capables de manier les armes, mais considérés comme trop âgés (après 30 ans) et plus assez entraînés pour intégrer un régiment de première ligne d'active ou de réserve. [5] Ce convoyage a lieu, selon l'historique du régiment, le 10 octobre. Erreur de transcription ou autre batterie concernée ? [6] Le 4ème corps de cavalerie Von Hollen se compose des 3ème et 6ème divisions de cavalerie : 5ème et 13ème régiments de dragons (dragoner rgt), 20ème et 21ème régiments de dragons légers (badisches leib dragoner), 23ème et 24ème régiments de dragons de la Garde (garde dragoner rgt), 13ème et 14ème régiments de hussards (husaren rgt) et 7ème, 8ème et 13ème chasseurs à cheval (jâger zu pferde). Outre ces unités et celles citées dans le texte, les unités suivantes sont intervenues sur le secteur qui nous intéresse : le 19ème corps d'armée avec les 68ème et 181ème régiments d'infanterie et 19ème régiment - ou batterie - d'obusiers lourds. A la 31ème division d'infanterie : intervention probable d'éléments des 60ème, 137ème, 166ème, 170ème et 174ème IR (régiments d'infanterie), du 7ème régiment de Uhlans et des régiments d'artillerie 67 et 81. [7] Une division d'infanterie de l'époque était composée, en général, de 15 500 hommes et 380 officiers. Mais après deux mois de combats, l'effectif est considérablement réduit. [8] Le fameux 17ème RI s'illustra les 18, 19 et 20 juin 1907 à Béziers. C'était un régiment composé de recrues dont la majorité venait de villages viticoles de la région de Béziers. Lors de la crise vinicole où l'armée tira sur les manifestants en faisant plusieurs victimes, plusieurs centaines de ses soldats refusèrent d'intervenir contre la population et mirent « la crosse en l'air ». Les insurgés furent dirigés sur les camps disciplinaires de Tunisie et le régiment déplacé dans l'est de la France. [9] JeanJulien Weber [1888-1981) sera évêque de Strasbourg de 1945 à 1966. Ses carnets de route seront écrits de 1916 à 1919 pendant ses périodes de convalescence qui suivront blessures et maladies. Les précieux carnets serviront au livre de Jean Noël Grandhomme paru en 2001, se reporter aux sources en fin d'article. [10] Ils seront souvent et indûment appelés goumiers. En août 1914 les spahis arrivent d'Afrique du Nord. Le 5ème escadron du 1er Spahis, le 6ème escadron du 3ème spahis et le 4ème du 5ème spahis vont former le Régiment de Marche de Spahis aux ordres du colonel Martin de Bouillon. Du camp retranché de Paris ils vont combattre ensuite dans l'Aisne, la Marne, la Picardie et, à partir de l'automne 1914 en Artois. Ces cavaliers très mobiles et affectés aux missions de reconnaissance souvent lointaines seront présents au sud de Lille à plusieurs reprises à partir du 1er octobre. [11]
Les carnets de Weber comportent quelques erreurs. Les goumiers, infanterie
légère de l'Armée d'Afrique composée de troupes autochtones marocaines sous
encadrement essentiellement français, ont été créés en 1908. [12] Un « train blindé » chargé de soldats partis d'Ascq avait été dirigé vers Fives mais le receveur d'Ascq avait prévenu la Préfecture. Les Français lancèrent une locomotive contre lui mais le télescopage souhaité échoua suite à une erreur d'aiguillage. Se voyant joués, les Allemands stoppent leur train à « la barrière de sable », à l'orée de la rue Pierre Legrand avant de se replier sur Ascq après avoir mis le feu à une dizaine de maisons près de la douane de Fives. [13] L'actuelle avenue du général Leclerc. [14] L'actuel passage à niveau des rues Kléber et Carnot. [15] Actuelle rue Kléber. [16] Rues Pasteur à Wattignies et de l'Arbrisseau à Faches. [17] En fait des spahis. On l'a vu plus haut, les goumiers ne sont jamais intervenus en métropole durant cette guerre. [18] La nationale 25 va de Lille à Seclin, c'est la route d'Arras sur la commune de Faches-Thumesnil et les rues Clémenceau et du général de Gaulle à Wattignies. [19] A ce moment là, on l'a vu, ce régiment est éparpillé entre Lens, Bénifontaine, Hulluch et Haisnes à la suite des ordres et contre-ordres reçus. D'ailleurs son Journal de Marches et d'Opérations ne signale pas d'attaque sur Ronchin. Par contre, le JMO du 6ème régiment d'artillerie mentionne bien la présence à ses côtés du 109ème. [20] Journal de Monsieur Eugène Riboud, directeur de la Banque de France d'Armentières. [21] Le 2ème classe Clotaire Bonnot du 21ème RI sera tué à l'ennemi le 26 septembre 1915 à Souchez dans sa vingtième année. [22] Ce qui explique l'absence d'acte de décès à Lesquin. Témoignage de Madame D. de Templemars recueilli le 15 novembre 2004. L'enfant de six ans cité dans le témoignage était la maman de Madame D. |