Médecins de la Grande Guerre
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Avon-les-Roches et Brugelette gardent le souvenir des Belges du Ruchard Quelle chance
d’avoir pu enfin me rendre à Avon-les-Roches... Ce petit village est semblable
à beaucoup de nos villages brabançons où l’on extrait aussi le tuffeau, cette
roche calcaire tendre exploitée depuis plus de deux mille ans. Avon-les-Roches
comme les villages belges d’ Fox – les- Caves et de Gobertange est percé de
galeries. Beaucoup de fermes en possèdent et
s’en servent encore comme des garages où l’on entrepose du matériel
agricole. En Touraine et contrairement à nos villages belges où l’on exploitait
le tuffeau, existent de nombreuses maisons troglodytes parfois même de véritables villages
troglodytes. Ainsi, dans un hameau d’Avon, le hameau des roches Tranchelion, il
existe encore un quartier désaffecté de maisons troglodytes creusé dans le tuffeau d’une colline sur
laquelle se dressent les ruines d’une impressionnante collégiale de Il faut savoir que
ces soldats belges étaient hospitalisés dans le camp du Ruchard, ce vaste
terrain d’entraînement de l’armée française au milieu des bois et qui fut mis à
la disposition du gouvernement belge pour y créer un hôpital pour
convalescents ! Beaucoup de ces soldats belges y furent malheureux sans
qu’aujourd’hui l’on puisse en connaître
exactement les raisons. Peut-être un
trop grand isolement, peut-être le froid mais sans doute aussi la discipline de
fer qui y régnait où ces trois facteurs réunis ! En quelques rares
occasions, ils pouvaient sortir de leur village de tentes (plus tard de baraquements)
mais hélas, c’était souvent pour conduire
leurs camarades décédés vers leur dernière demeure, le cimetière paroissial
d’Avon, qui se trouvait distant du camp du Ruchard d’une dizaine de kilomètres.
Le porche de l’église d’Avon impressionne par sa beauté, il date du 12ème siècle. A l’intérieur du
porche une inscription sous forme de graffiti annonce en vieux français la mort
de Charles le Téméraire ! Ce lieu n’a pas changé depuis près de neuf cents
ans. Il n’est vraiment pas difficile de s’imaginer l’entrée des soldats belges
dans l’église lors des sinistres funérailles militaires qui se renouvelèrent une septantaine de fois !
L’église, quant à elle, est restée identique depuis le 13ème siècle. A l'intérieur, les pierres polies de tuffeau blanc accroissent
la luminosité et donnent à l'atmosphère du lieu un air de joie et d'espoir.
Le voyage dans le temps est aisé et rapidement, on
peut entendre dans la nef les soldats
convalescents et leurs officiers chanter
Le premier belge enterré à Avon fut un boy-scout motocycliste de 16 ans (né le 26 juillet 1898, décédé le 20 février 1915) qui mériterait que l’on se souvienne de lui ! Max Vanderlinden s’était prêté volontaire pour aider l’armée belge comme estafette ! Voici un texte émouvant d’un ancien du camp du Ruchard qui relate les funérailles de ce garçon. (L’auteur a cependant maquillé les noms propres des lieux) ! Depuis quatre longues semaines d’hiver, Jean était l’hôte
du camp de Rochelane (Lire Ruchard !). Sa convalescence était une de ces
punitions imméritées qui conduisent le meilleur soldat au découragement et à la
révolte. Destiné à recevoir l’été des troupes en manœuvres, ce camp, devait
tout d’abord héberger des prisonniers allemands. Mais les boches n’y restèrent
que quelques jours, bien aises de céder place à des convalescents belges. Nourris
comme des pourceaux, ne pouvant approcher le médecin qu’avec crainte, ces
pauvres gens, logés sous tente, en plein vent, crevaient littéralement de froid
et de misère. Pour la plupart, les officiers qui commandaient cette troupe
lamentable de malades et de blessés étaient aussi des victimes. Mais il y en avait
d’autres, dont la rage d’avoir vu briser leur carrière pour quelque faute grave
devant l’ennemi, ne pouvait s’assouvir que dans l’humiliation et la souffrance
des malheureux confiés à leur garde. (…) C’est à peine avouable, mais les prisonniers de Rochelane
considéraient comme une faveur l’autorisation d’assister à l’enterrement d’un
camarade que la mort pitoyable avait délivré. Cela leur permettait de sortir du
camp et d’atteindre le petit village de Verlaine (Avon-les
roches bien évidemment), où la vue des
enfants et des femmes reposait leur regard. Dès que l’on s’éloigne du front, la
mort reprend son importance civile. Un cercueil, fût-il de bois blanc, inspire
moins de crainte et plus de respect que la toile de tente jetée sur un cadavre.
En suivant le cortège qui s’acheminait lentement, Jean pensait que bientôt,
peut-être, il donnerait aux copains l’occasion d’une escapade. On le
regretterait brièvement d’un « pauvre type ! » puis on
irait boire du vin blanc comme il se proposait de le faire après la cérémonie.
Le premier mort fut un petit-boy scout de 16 ans qui avait succombé à une
angine foudroyante. Il montra le chemin. Au cimetière, un prêtre français, beau
vieillard de haute taille[1],
magnifia l’héroïsme de ce gosse-soldat. Le pouvoir de l’éloquence est
prodigieux car tous les auditeurs sentirent se glisser dans leur âme l’émotion,
la fierté et aussi un âpre besoin de vengeance. Et après quelques verres de vin
clair, tous les hommes, sauf deux jurèrent d’écrire au commandant du camp pour demander leur renvoi
immédiat au front. Très vite un imposant monument, œuvre de Juan Bury de Ghlin fut élevé auprès des tombes Belges[2] . Ce fut le colonel Vinckier[3] qui l’inaugura le 2 novembre 1915. Nos amis de Touraine entretiennent les tombes et le monument depuis 1917 et grâce au jumelage de la commune de Brugelette et d’Avon, l’amitié franco-belge a permis de raviver la mémoire des 63 militaires belges qui reposent encore à Avon. Ils furent plus nombreux à l’origine mais certains corps furent rapatriés. Outre les soldats belges décédés, j’ai noté la présence d’autres Belges qui ne sont pas repris dans la liste officielle des soldats inhumés…Ce sont sans doute les stèles des soldats dont les corps furent rapatriés en Belgique. (Voici les noms de ces soldats) Delongueil Prosper Mauroy Jean Fusi(… ?)Arthur Vlegels Arthur Demeyere René Libert alphonse Detroye Emile Piron Jules Meyer Victor Magnifique exemple d’amitié donc que ce jumelage qui débuta en 1978. L’année précédente, un habitant de Brugelette, Monsieur Windal découvrait dans un quotidien une petite annonce des plus originales signée par Maurice Sébastien, maire d’Avon-les-roches et recherchant une commune rurale belge intéressée par un jumelage. Monsieur Windal en informa le bourgmestre de Brugelette, Monsieur Deroux, qui se montra d’emblée enthousiaste à la proposition de son homologue français. Un comité de jumelage vit rapidement le jour et pour la première fois le 11 novembre 78, des Brugelettois se rendirent à Avon pour y sceller des liens d’amitié devenus officiels ! L’année suivante un groupe de Belges se montra inventif en se rendant à Avon en voiture mais en retournant à Brugelette en patins à roulette ! En 1981, un événement dramatique prit place dans l’histoire du jumelage. Le 5 juillet, eut lieu une cérémonie patriotique au cimetière d’Avon à laquelle participaient cinquante Brugelettois. Parmi ceux-ci se trouvait Emile Windal, âgé de 73 ans, qui s’écroula durant la sonnerie « aux champs » ! Transporté à l’hôpital puis transféré en Belgique il décéda hélas des suites de son attaque cardiaque! Pour honorer celui qui avait été le promoteur du jumelage à Brugelette, on éleva dans le cimetière d’Avon un monument à sa mémoire. Jamais l’amitié entre les deux communes ne faiblit. En 1982, à Avon, furent inaugurées la rue de Brugelette ainsi que la rue Emile Windal, après quoi un banquet de 115 couverts fut servi aux convives belges et français ! Pour les 20 ans du jumelage, en 1998, on inaugura, « l’envolée » une sculpture de l’artiste brugelettois Michel Jamsin qui fut placée à Brugelette au coin de l’avenue d’Avon et qui représente deux oiseaux aux ailes uniques et qui symbolise l’union entre les peuples. A Avon, le quartier résidentiel aux abords immédiats du camp porte le nom de Sergent-major Montigny qui fut le militaire au grade le plus élevé qui décéda au camp du Ruchard. Dr Loodts, ce 11 avril 2010
guerre. 2000-2005. Tout
droit réservé. © [1] Sans doute l’abbé Théophile Maignant, né en 1864 et curé d’Avon et de Panzoult où il résidait. [2] Le monument belge est bien l'œuvre de Juan Bury mais un second artiste
nommé Raymond Le Graive lui fut associé [3] Vinckier Jean-Augustin, né le 14 avril 1860 à Bilsen, colonel, désigné le 18 décembre pour le 1er régiment de ligne blessé à Beygem le 12 septembre 1914 d'une balle de shrapnel dans la cuisse gauche (perforation de la cuisse). Déchargé du commandement du 1er régiment de ligne et désigné le 15 octobre 1915 pour prendre le commandement des troupes au camp du Ruchard. C'est le Colonel Vinckier qui présida à l'inauguration du monument belge au cimetière d'Avon-les-Roches, le 18 novembre 1915. La bénédiction par contrée eut lieu le 2 novembre 1915, par l'abbé Théophile Maignant. En 1917, l’acte de décès du sergent
Major Monteny indique que le commandant du camp était alors : le médecin
principal de première classe Deghilage |