Médecins de la Grande Guerre
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L’ambulance civile 1034 à St-Hubert L’histoire de l’ambulance créé à
Saint-Hubert lors de la bataille des frontières
au mois d’août 1914 mérite vraiment d’être racontée. Imaginez-vous la bataille du 23 août qui mit aux prises
Allemands et Français à Maissin et Anloy. Au lendemain de la défaite française, des milliers
de « pantalons rouge » gisent blessés ou tués sur toute l’étendue de
ces communes. Bien entendu l’ennemi s’empressent de secourir ses propres
soldats mais négligent beaucoup de blessés français qui vont croupir pendant
plusieurs jours là où ils sont tombés. Les villageois traumatisés ont quant à
eux déserté leurs maisons et ne
reviendront que progressivement. Les
blessés français ne peuvent donc s’attendre à recevoir l’aide des villageois. Beaucoup vont
rester couchés pendant plusieurs jours, là où ils sont tombés. La majorité va
mourir mais les plus résistants s’abreuvent de la rosée matinale et sous le
soleil d’été parviennent à survivre plusieurs jours de suite. Bien entendu le sort
affreux des blessés émeut toute la contrée. A Saint-Hubert, un médecin, le docteur Dechesnes (père du général Dechesnes)
est averti de la situation catastrophique des blessés de Maissin
qui gisent depuis plusieurs jours au creux des sillons et aux abords des
sapinières et dont la chance de survivre s’amenuiser d’heure en heure.
Il faut, se dit le vieux docteur, leur porter
secours. Muni de sa veille carriole bâchée
et en compagnie de ses deux filles, le voilà rejoignant deux autres de
ses confrères pour aller explorer le champ de bataille. Arrivés sur place, les
sauveteurs trouvèrent quelques autres personnes ayant pris la même initiative
courageuse : d’autres médecins et les religieuses des écoles. Tous
ensembles, ils ramassèrent les survivants. Les plus grièvement atteints furent
évacués sur le village de Libin à 12 km de là sur les
chariots entraînés par les lourds chevaux de labour. Là, les classes se
transformèrent en salles de soins et d’opération. On opéra dans la chaleur et
dans les mouches, presque sans anesthésiant. Les Allemands virent malheureusement
aussitôt pour se saisir des soldats les
moins blessés. Le soir, on put, peu à peu, emmener la plus grande partie des
blessés dans la ville de Saint-Hubert. Ils durent supporter vingt km dans les
chars à banc sur des chemins défoncés par le charroi militaire des jours
précédents avant d’atteindre le refuge tant espéré. Celui-ci fut établi dans
l’ancienne abbaye où rapidement les vastes salles s’emplirent de lits de fer et
du matériel de couchage prêté par les habitants. Les locaux étaient
austères : pas de salle de bains ni de robinets, seulement des toilettes
rudimentaires dans les cours qu’il fallait atteindre en passant par un
véritable dédale de couloirs et de volée d’escaliers. Madame poncelet, l’épouse
du Bourgmestre sut maintenir une équipe soudée de volontaires pour soigner les
valeureux soldats. La ville ne comptait pas encore d’infirmière. Des habitantes
s’improvisèrent donc soignantes et firent des miracles. Durant, deux semaines
elles travaillèrent sans relâche jusqu’au moment où enfin un renfort précieux
arriva de la Croix-Rouge de Bruxelles. Il s’agissait du chirurgien Neuman (plus
tard il deviendra un éminent collaborateur du Dr Depage à La Panne ) accompagné
d’une infirmière diplômée, Catherine Heymans.
Madame Poncelet put compter sur l’aide de cette dernière pour former le
personnel aux rudiments de l’art infirmier. Rapidement le travail des
soignantes devint plus professionnel, plus organisé, plus efficace. Heureusement
car l’ambulance de Saint-Hubert était appelée à travailler pendant sept longs mois ! On ne
disposait alors que de teinture d’iode et de sublimé de mercure pour vaincre
l’infection, que de tisanes pour vaincre fièvre et dysenterie, mais raconte une
petite fille témoin de ces évènements[1], on
parvint à sauver une majorité de vies ! Les Allemands venaient régulièrement se rendre
compte de l’évolution des blessés. Quand ils voyaient des blessés debout dans les
salles, ils les emmenaient. A chacune de leurs visites, une vigie donnait
l’alerte et les convalescents se mettaient vite au lit entièrement habillés. En mars 1915, l’ambulance dut
malheureusement fermer et les derniers blessés furent emmenés en Suisse ou en
Allemagne. Quel déchirement pour les Belges de Saint-Hubert ! Comme on
n’avait plus à s’occuper des vivants, un comité fut créé pour s’occuper des
tombes militaires. Le premier
français qui décéda dans le poste de la
Croix Rouge fut Jean-Baptiste Donnio, âgé de 23 ans. Ce
fut le samedi 5 septembre à 14 h, exactement deux semaines après l'assaut. 27 autres blessés[2]
connurent hélas le même sort. Ils reposent dans le carré qui leur est consacré
dans le cimetière communal. L’esprit de l’ambulance
Saint-Hubert persista après la guerre, ce sont les mêmes volontaires qui
créèrent dans la commune l’œuvre de l’Enfance en 1915, qui accueillirent 1200
réfugiés Lensois en 1917 et qui soignèrent en 1918, une trentaine de
prisonniers de toutes nationalités que les Allemands avaient abandonnés au pénitencier. Le 20 septembre 2014, en présence
de descendants des blessés et des autorités communales, une commémoration
émouvante de l’ambulance 1.034 de Saint-Hubert fut célébrée avec faste[3]. Dr P. Loodts [1] Il
s’agit de Madame S. Marechal-Lambin qui publia ses souvenirs sous le
titre « L’ambulance de
Saint-Hubert » dans la Revue
Ardenne et Famenne, 1963, 2ème livr. N°22).
Les archives de la famille Lambin qui concernent l’ambulance ont été confiées à
l’Etat et sont à la disposition des chercheurs
(cfr : Archives de l'État en Belgique) [2] 28
militaires français reposent dans le carré français du cimetière civil de
Saint-Hubert : Louis Aynié, Antoine Blanchais, Eugène Blandeau,
Pierre Marie Bocon, Paul Alfred Buchart, Arthur Pierre Louis Choyau,
André Louis Cruveillier, Jean-Baptiste Donnio, Jean Léon Honoré Durac,
Albert Joseph Fos, Joseph Javel, Jean Michel Le Bars,
Joseph Marie Le Goff, Jules Lejeune, François Jean Marie Le Moigne, Alexis Marie Maugan, François Eloi Mercé, Pierre Louis Nicolas, Abel Pageot,
Jean-Marie Pessel, Mathurin Joseph Radenac, Jean Baptiste Rolland, Paul Marie Seité, Pierre Marie Sorin,
Pierre Louis Touchard et trois soldats inconnus. ! [3] Stéphane
Herin fut un pionnier de cette commémoration. Il publia dans le bulletin semestriel
(1/2014) de St-Hubert d’Ardenne un Hommage
aux victimes de la guerre 1914-1918 de la commune de Saint-Hubert ainsi
qu’un article sur l’ambulance de Saint-Hubert en collaboration
avec A. Fraipont, « L'ambulance
1034 : les services médicaux au cœur d'un îlot de souffrance et de fraternité… »
Saint-Hubert d'Ardenne asbl
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