Médecins de la Grande Guerre

Le rôle du belge Alexandre Galopin fut primordial pour combler la pénurie de fusils de l’armée française.

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Le rôle du belge Alexandre Galopin fut primordial pour combler la pénurie de fusils de l’armée française.



Alexandre Galopin

Avant la guerre, un brillant ingénieur.

       Diplômé de l’Université de Liège en 1902 à l’âge de 23 ans, Alexandre Galopin poursuit sa formation en France, en Grande-Bretagne et en Allemagne avant de travailler pour la Fabrique nationale d’armes de guerre située à Herstal (FN). En 1904, il est nommé directeur du tout nouveau laboratoire central de l’usine qui venait d’être créé pour réceptionner les marchandises, tester les pièces et former les jeunes ingénieurs. Sous sa direction, ce laboratoire va connaître un développement exceptionnel. Par après, Alexandre gravira les échelons pour devenir sous-directeur. L’entreprise lancée dans la fabrication d’armes et de cartouches se diversifiera dans d’autres secteurs comme celui des bicyclettes, des motocyclettes et même d’automobiles.

La « méthode Galopin » au service de l’armée française durant la Première Guerre mondiale.

       En 1914, il s’exile en France où les autorités connaissent sa réputation. Il est alors rapidement mis par le gouvernement belge à la disposition du ministre français Millerand pour résoudre un problème épineux ! Au début de la guerre, l’armée française disposait de 2,9 millions de fusils Lebel, cinq mois plus tard, il en restait moins de 2,4 millions alors que la production de se fusil avait été arrêtée dix ans auparavant. L’armée se voyait obligée d’utiliser des carabines de cavaliers, des mousquetons d’artilleurs et de vieux fusils Gras-Chassepot. Il fallait à tout prix relancer la fabrication de fusils. En janvier 1915, les patrons de l’industrie mécanique de la région parisienne sous la direction de Louis Renault, signalent au directeur de l’artillerie, qu’ils peuvent produire certaines pièces excepté les canons des fusils. C’est à ce moment crucial que l’on demande au belge Alexandre Galopin de trouver une solution qui résolve la difficile fabrication en série de fusils. Alexandre Galopin va alors proposer de spécialiser chaque entreprise du groupement en vue de fabriquer une ou plusieurs pièces en grande série. Chaque usine ne nécessitait ainsi qu’un minimum de machines-outils tandis que lui-même se chargera des canons de fusils. C’est la « méthode Galopin ».

       Mais l’ingénieur Galopin ne reste pas à ce rôle de conseiller. En juillet 1915, avec d’autres exilés de la FN, comme Gustave Joassart et Louis Piret, il fonde la Manufacture d’Armes de Paris (MAP) à laquelle s’ajoutera bientôt la manufacture située à Levallois. Le groupe Galopin va alors opérer la révision des pièces, surtout celle des canons de fusils pour lesquels il parvient à atteindre une précision jamais atteinte en France de 1/300mm. Il assure ensuite le montage des pièces détachées fournissant ainsi tout au long de la guerre plus de 800.000 fusils au Gouvernement français (soit 27% de la production totale française entre 1914 et 1919). En 1921, la FN deviendra majoritaire dans le capital de la MAP.

       Parallèlement, la Manufacture d’armes nationale de Saint Etienne (Mas), reprend vigueur en engageant plus de 350 ouvriers belges provenant pour la plupart de la région de Liège. Galopin s’est efforcé de recruter les ouvriers belges par des agents installés dans le Limbourg hollandais qui accueillit une multitude de réfugiés liégeois dans les premiers mois de la guerre. Galopin insiste aussi auprès du consul de Belgique à Maastricht pour diriger les travailleurs de la FN vers ses usines. De plus, il parvient à avoir le soutien des syndicats belges pour encourager la fuite des ouvriers restés à Liège vers ses usines. Cette action entraîna d’ailleurs la déportation des syndicalistes J. Verlinden et E. Schevenels. Galopin n’est pas le seul à recruter des ouvriers belges. Le gouvernement du Havre recrute aussi pour l’important complexe militaro-industriel créé par Charles de Broqueville, les ouvriers belges. Parmi ces usines et ateliers belges, il y a la Manufacture d’Armes de Birmingham, l’usine de Conbrook près de Londres, l’usine de Bertlez et celle de Richmond créée par le belge Charles Pelabon. En France, se trouvaient les usines de Gainneville et de Graville dans la région du Havre. A ces établissements, on doit ajouter de nombreux ateliers dans la région du Havre et de Calais et l’usine de Bonnières-sur-Seine créée par le Belge Piret Louis. Les chiffres sont impressionnants : en novembre 1917, plus de 15.000 Belges travaillent dans les usines de Calais et du Havre tandis que plus de 32.000 Belges sont employés dans les usines d’armement du Royaume-Uni. Dans les usines belges, les conditions de travail sont dures et les ouvriers, civils ou militaires, sont soumis à l’autorité militaire. Plusieurs mouvements d’ouvriers en Angleterre et en France tenteront des grèves. Le 2 février 1918, 240 ouvriers des ateliers de munitions de Gainneville font grève afin d’obtenir de meilleures rations alimentaires. Le 7 novembre 18, les ouvriers cesseront le travail rejoints par ceux de Gainneville et de Granville. Le 13 novembre, ils obtiennent l’alignement de leurs salaires sur ceux des ouvriers français, la journée de 10 heures et le retour de certains grévistes envoyés dans des camps comme celui de la compagnie disciplinaire d’Auvours.

Entre les deux guerres, Alexandre Galopin gouverneur de la société Générale.



       Après la guerre, Alexandre Galopin, en récompense de ses éminents services, est désigné comme expert dans les négociations du traité de Versailles. Il reviendra à Herstal comme directeur général et administrateur (1922) de la FN. Rapidement c’est l’ascension sociale. En 1923, il est chargé de missions par la Société Générale de Belgique (actionnaire principal de la FN). Une de ces missions est la modernisation du secteur charbonnier. Il deviendra finalement gouverneur de la Société générale de Belgique et président du Conseil d'administration de la S.A. John Cockerill et de la Providence.

La « doctrine Galopin » durant la seconde Guerre mondiale.

       Durant la Seconde Guerre mondiale, avec Max-Léo Gérard, président de la Banque de Bruxelles, et Fernand Collin, président de la Kredietbank, il reçoit la mission du gouvernement belge réfugié à Londres de veiller à la sauvegarde des Belges restés au pays. Sa méthode va consister à poursuivre les activités industrielles tout en ne répondant pas aux besoins de l’occupant. Il s’agit pour lui de conserver la main d’œuvre sur place et de subvenir ainsi aux besoins de la population tout en préparant l’après-guerre. Le maintien de l’activité industrielle est cependant perçue parfois comme une « collaboration économique » avec l’occupant et cela malgré qu’une importante caisse noire, alimentée par des entreprises sous le contrôle de la « Générale », soutienne la résistance. Galopin reste, de plus, en liaison directe avec les Belges de Londres et met sur pied un réseau de renseignements. Quand il le faut, fait ralentir le travail, ou embaucher des ouvriers menacés de déportation, jusqu’à 1000 d’un coup à Anvers !

       Conscient des critiques à son égard, Galopin assume ses choix mais il est de plus en plus isolé et attaqué par tous les camps. La « doctrine Galopin » est même désavouée dans les milieux belges réfugiés à Londres.

La fin d’un héros.

       Approuvés par Himmler qui commence à comprendre le double jeu de Galopin et encouragés par Jungclaus, des tueurs du mouvement « De Vlag » exécutent Galopin à son domicile, le 29 février 1944. C’est un ennemi du nazisme et le roi de l’économie belge qu’ils assassinent !



Funérailles d’Alexandre Galopin

       Après la guerre, Alexandre Galopin sera justement nommé, à titre posthume, Grand Officier de l’Ordre de la Couronne avec rubans à liserés d’or et, la Croix Civique de première classe 1940-1945, pour services rendus au pays, lui sera décernée.

Dr Loodts P.

 

 

 

Sources :

1) Michael Amara, « Des Belges à l’épreuve de l’Exil, les réfugiés de la Première Guerre mondiale », Editions de l’université de Bruxelles, 2008

2) Jean-Pierre Popelier, Isabelle Loodts-Masson, Mélodie Brassine, Jacques Ganthy, Isabelle Kaanen-Vandenbulcke, Alain Lelièvre,, Patrick Loodts, Lara Loose, Jean-Philippe Préaux ; «  Les exilés belges en France, histoires oubliées », 2017, Editons Racine, Bruxelles

3) Alexandre Galopin

4) Galopin Alexandre, Marie, Albert

 

 

 



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