Médecins de la Grande Guerre

Le roi Albert porta l’uniforme allemand en 1913 ; et reçut les confidences impériales !

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Le roi Albert porta l’uniforme allemand en 1913 et reçut les confidences impériales !



       Le roi Albert tenait par son père, le comte de Flandres, l’honneur d’être le commandant honoraire du 16ème régiment de dragons hanovriens. Peu de temps après le centième anniversaire du régiment, le roi fut invité à passer en revue ce régiment à Lunebourg qui était sa garnison. Cette inspection eut lieu le 5 novembre 1913 et pour l’occasion, Albert revêtit l’uniforme son uniforme d’officier allemand ! A son arrivée, il fut accueilli par le général von Emmich qui neuf mois plus tard commanda le 10ème corps pour attaquer Liège. On peut imaginer qu’Albert dut jeter aux orties cet uniforme lorsque la guerre, quelques mois après, éclata et qu’il regretta ensuite amèrement d’avoir décoré Von Emmich du grand cordon de l’Ordre de Léopold !

       Lors de ce séjour, le roi Albert fut invité par l’empereur Guillaume dans sa résidence de Posdam. Le 5 au soir, eut lieu un dîner en famille. La journée du 6 novembre se passa en visite avec l’empereur et le soir eut lieu un grand dîner de gala en compagnie des personnalités allemandes. L’empereur témoigna cordialité et grande amitié au Roi mais le 7 novembre, le Roi fit par à son ministre Beyens de sa grande inquiétude. L’Empereur dans un excellent français lui avait signalé que la guerre avec la France lui semblait inévitable et le même propos lui avait été répété le soir, lors du dîner de gala, par le chef d’Etat-Major von Moltke qui avait ajouté « Votre Majesté ne peut se douter de l’enthousiasme irrésistible qui, ce jour-là, entraînera le peuple allemand tout entier ».

       Le Roi était convaincu que l’empereur Guillaume s’était ouvert à lui avec une grande confiance. Comment ne pas trahir cette confiance tout en prévenant les plus hautes autorités françaises ? Le Roi et son ministre Beyens trouvèrent un compromis. Ils décidèrent de prévenir oralement l’ambassadeur français de Berlin, Jules Cambon, des menaces entendues en évitant tout écrit et en exigeant de l’ambassadeur la plus grande confidentialité. Cambon promit ainsi de ne transmettre le contenu que verbalement au président de la République, Poincaré, et au ministre des affaires étrangères Pichon. Malheureusement la promesse ne fut pas tenue, et comme l’ambassadeur ne pouvait se rendre à Paris, il rédige le 22 novembre une dépêche destinée au ministre des affaires étrangères en demandant que celle-ci ne soit lue que par le ministre, le président Poincaré et le directeur des Affaires politiques du quai d’Orsay, Maurice Paléologue chargé de garder ensuite dans son coffre la dépêche. La confidentialité telle que demandée, ne fut qu’à moitié observée… Ainsi sans citer le roi Albert, Pichon, avertit l’ambassadeur de Russie tandis que l’ambassadeur de France à Berlin, Cambon envoya une copie à son frère Paul, lui-même ambassadeur à Londres. De plus, Paléologue « raconta » la dépêche à Joffre et Castelneau lors d’une réunion du conseil supérieur de la Défense. D’après son témoignage, Joffre écouta avec fixité puis ses yeux s’illuminèrent et frappant sur l’épaule de Castelnau, il s’écria : « Nous allons donc marcher, enfin, mon vieux ! » 

       L’inquiétude du Roi concernait uniquement la France. Revêtu de sa tenue de colonel des dragons hanovriens, il lui était impossible d’imaginer que l’Empereur puisse, un jour, le trahir…    

Dr Loodts P.

 

Référence : Jean Stengers, « Une guerre pour l’honneur, la Belgique en 14-18 », pages 121-138, Editions Racine, 2014

 

 



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